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Exclusion (3 mai 2012)

© Jacques Collet/BELGA

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Notre société malade de ses prisons

Les voix qui s’élèvent de l’intérieur du milieu carcéral seront-elles enfin entendues par les responsables politiques? Il est urgent de repenser le vivre ensemble dans une société qui produit de l’exclusion, génère des ghettos et remplit les prisons. Car multiplier les établissements pénitentiaires ne résoudra pas ce grand malaise.

Le plus souvent, ce sont de grands bâtiments anciens à l’allure de châteaux forts plantés au cœur des villes. Dans ces étranges lieux de vie, 11.000 détenus (pour 9.000 places) séjournent pour plus ou moins longtemps. Ils partagent le même quotidien qui ne ressemble en rien à la vie dans un hôtel quatre étoiles. Certaines cellules, surpeuplées, n’ont ni eau ni sanitaire. Les rations alimentaires sont calculées sur le nombre théorique de places dans l’établissement. La cohabitation génère la violence, pousse certains au suicide.

Mises en boîte explosives

La Belgique compte 31 établissements pénitentiaires répartis entre maisons d’arrêt pour les personnes en détention préventive et maisons de peine pour les condamnés, le manque de places amenant souvent les établissements à mêler les deux populations. Il existe aussi quatre établissements ouverts et deux semi-ouverts. On compte 95% d’hommes pour 5% de femmes dans les prisons. Près de 70% ont entre 18 et 35 ans. Beaucoup ont cumulé les mêmes handicaps dès l’enfance: difficultés à s’intégrer sur le plan économique, social, scolaire, familial parfois.

Les dysfonctionnements de la politique pénitentiaire sont observables à tous les niveaux : durée anormalement longue de la détention préventive, conditions irréalisables pour les libérations conditionnelles, manque de formation et d’accompagnement des gardiens, directeurs de prison isolés et démunis, insuffisance de formations et d’aides psychosociales pour les détenus, manque de réflexion de fond sur la justice pénale et sur les peines alternatives, manque de moyens humains et financiers. En particulier, la loi sur la libération conditionnelle misait sur la construction, avec le détenu, d’un projet de réinsertion réaliste. Mais les moyens ne suivent pas pour accompagner ce travail de réinsertion dans le quotidien.

Certes, les détenus ont une dette envers la société mais, pour s’en acquitter, encore faut-il qu’ils quittent la prison sans avoir accumulé davantage de rancœurs et de rage. Un ex-détenu témoigne : “La prison, c’est un peu comme si l’on recouvrait un grand trou d’une lourde plaque. Une fois cette plaque retirée, le détenu se retrouve comme un fauve.” A sa sortie de prison, l’ex-détenu retourne vers les personnes qu’il a connues avant et repart souvent dans les mêmes schémas. Ce qui explique en partie la récidive car, comment emprunter des chemins nouveaux lorsqu’on a été coupé de toute réalité, amputé de la vie en société, de ses codes, enfermé durant des mois voire des années, hors du temps. Si on ajoute à cela l’absence de logement, de travail, de relations sociales, on peut comprendre le retour rapide à la case prison.

Portes intérieures ouvertes ?

Dans les écoles, les associations, certains ex-détenus, comme Jean-Marc Mahy (lire ci-dessous), témoignent de leur vécu et des éléments qui leur ont permis de donner du sens à leur vie, de sortir de la spirale infernale du délit. Pour eux, il y a eu des rencontres avec un visiteur de prison, un aumônier, la participation à des ateliers, à des groupes de paroles, des formations aussi. Toutes choses qui participent à faire entrer dans cette enceinte repliée sur son intérieur malade, une lucarne vers d’autres possibles. Car le pire est le repli, le carrousel des pensées sombres, la télévision comme seule fenêtre sur le monde.

Je me sentais un peu comme un hôtelier de l’absurde”, résume un ancien directeur de prison, regrettant l’époque de l’autogestion, par les détenus, de certains aspects de la vie quotidienne dans l’établissement pénitentiaire où il avait fait ses débuts.

Il est plus qu’urgent de s’interroger sur la réponse univoque qu’apporte la prison à tous types de délit, que la personne représente un réel danger pour les autres, ou non. Urgent, au 21ème siècle, de repenser la prise en charge et la réinsertion de ceux qui, pour de multiples raisons, brisent un jour les balises de l’ordre établi.

// LAURENCE DELPERDANGE

>> Pour aller plus loin, consulter l’excellent dossier réalisé en novembre 2011 par Les Equipes Populaires : “Prisons: Les raisons de la colère” (67 p).

Sont abordés la vie en prison au quotidien, la surpopulation carcérale, les problèmes de santé, la réinsertion, l’aide aux détenus et la libération conditionnelle. 8 EUR.

Infos: 081/73.40.86. – www.equipespopulaires.be


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