Santé des femmes
(19 mai 2011)
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On
n'y pense pas, elle laisse indifférent, on la redoute ou on l'espère. La
ménopause, phénomène naturel que vivent les femmes au midi de leur vie,
comporte une dimension existentielle. Ce rééquilibrage hormonal peut ouvrir
à une “maturité nouvelle pleine de promesses”
(1).
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© BSIP-Reporters |
Une définition encyclopédique de la ménopause parlera de la fin
de la “période reproductive” de la femme.
Elle décrira le
mécanisme à l’œuvre évoquant les ovaires qui ne sécrètent plus les
hormones sexuelles (l'œstrogène et la progestérone) et ne produisent
plus d'ovules. Elle rappellera que la ménopause est marquée par
l'arrêt définitif des règles. Qu’apprend-on encore? Que l'âge auquel
la ménopause survient est très variable, mais se situe généralement
aux alentours de la cinquantaine. Contrairement à certaines
croyances, ce moment n'est influencé ni par le poids, ni par l'âge
de la puberté, le nombre ou l'âge des grossesses, ni par la prise de
la pilule. Par contre, il est en partie héréditaire. Et il est avéré
que la consommation de tabac en anticipe la venue.
En amont de la ménopause
proprement dite, se vit une période de pré-ménopause – dite péri-ménopause.
Cette période s’étale sur plusieurs années (de deux à sept ans). Durant ce
temps, que se passe-t-il, biologiquement parlant? La production d'hormones
devient fluctuante; elle entraîne des règles irrégulières, plus rapprochées,
puis plus espacées, plus ou moins longues et abondantes. Une prise de sang
peut confirmer cette évolution. C'est lorsque les règles ont disparu pendant
au moins un an qu'on parle de ménopause. Et jusqu'à ce moment-là, la
possibilité d’être enceinte n'est pas exclue.
A chaque
femme, une ménopause
Voilà pour les
mécanismes physiologiques, communs à l’ensemble de la gente féminine. Mais
la ménopause n'est assurément pas vécue par toutes les femmes de la même
manière. Certaines n'observent aucun changement, hormis l'arrêt de leurs
règles. D'autres ressentent quelques symptômes sans être dérangées. D'autres
encore sont fortement incommodées. Pour l’une, les symptômes dureront
quelques mois, pour l’autre, plusieurs années. Et pour une même femme, des
variations peuvent se produire au fil du temps, que ce soit dans le type de
manifestations à l’œuvre ou dans l’intensité des signaux. Une chose est sûre
: ces troubles ne présentent pas de danger pour la santé.
Désagréments parfois cachés
“Bouffées de chaleur”.
Nombre de femmes évoquent en ces termes le chamboulement hormonal de la
ménopause : une vague de chaleur, parfois accompagnée de transpiration ou de
palpitations envahit brusquement le torse et le visage. Les bouffées
surviennent sans crier gare, durent de quelques secondes à quelques minutes
et peuvent se répéter plusieurs fois par jour. La nuit, ces fortes sueurs
peuvent même interrompre le sommeil. On estime que la moitié des femmes au
moins est confrontée à ces désagréments. Prendre le temps d'observer quand
les bouffées se produisent permet d'éviter certaines de ces situations comme
la consommation de boissons chaudes, l’exposition au soleil ou à des sources
de chaleur, le port de vêtements synthétiques ou d’un pull à col montant…
Superposer plusieurs vêtements amples et légers plutôt que de n'en porter
qu'un seul chaud permet, au besoin, de se découvrir. D’autres mesures toutes
simples peuvent être envisagées : éviter le café, l’alcool, les épices.
D’autres manifestations
ont trait à de petits tabous dont on parle moins. Ainsi, la paroi du vagin
peut devenir plus fine, plus sèche, et rendre les rapports sexuels
inconfortables (un trouble facilement pallié avec un gel). De même, la
diminution d'œstrogènes peut affaiblir les muscles du plancher pelvien et
provoquer des pertes involontaires d'urine lorsqu’on rit, tousse ou fournit
un effort. Là aussi, des solutions existent dont les exercices de
renforcement de ces muscles.
Puis, la peau devient
plus fine et plus fragile. Parfois on prend quelques kilos (entre deux et
quatre). Les fesses et cuisses s'affinent. Le ventre s'arrondit un peu.
Maux de tête, sensation
de grande fatigue, sommeil troublé, douleurs articulaires, irritabilité,
coup de blues… en voilà des soucis qui peuvent accompagner la ménopause! Ils
sont les conséquences des changements hormonaux ou les suites de symptômes.
Ainsi les réveils nocturnes fréquents ne peuvent qu'entraîner de la fatigue
qui pèse elle-même sur le moral. Sans compter que la ménopause peut être un
grand moment d'interrogation, d'ébranlement de certitudes, d'anxiété pour
l'avenir.
Quand la
société s’en mêle
Des chercheurs ont
étudié la représentation de la ménopause dans différentes cultures.
Certaines sociétés valorisent la femme ménopausée pour son expérience et sa
sagesse ou lui permet d’accéder à une vie ou à un rôle social dont elle ne
bénéficiait pas auparavant. Par contre, la ménopause peut dévaloriser
totalement la femme, là où seule la maternité offre une identité. En Europe
et en Amérique du Nord, la jeunesse est une valeur prédominante. Il est dès
lors moins aisé de franchir sereinement cette étape qui confronte à son
éloignement.
Ces conceptions
culturelles ne sont pas sans conséquences sur la manière de vivre la
ménopause. Daniel Delanoé, psychiatre et anthropologue, observe ainsi que
“les femmes ménopausées obtenant une amélioration de leur statut social, se
déclarent peu ou pas symptomatiques. Au contraire, chez les femmes perdant
leur identité sociale en même temps que leurs règles, la ménopause engendre
un cortège de troubles pénibles voire invalidants”.(2)
Mais finalement, quoi
qu’il en soit de la culture, l'expérience de la ménopause peut aussi varier
considérablement d’une femme à l’autre. Ceci suggère qu'aux facteurs
biologiques et à l'influence culturelle se superposent les perceptions
individuelles dans le vécu de la ménopause.
Entre
perte et découverte
La ménopause renvoie au
temps qui passe, à la vieillesse et à la mort, d'autant plus quand elle
survient à un moment où les enfants deviennent adolescents ou quittent la
maison, à une époque de la vie où il n’est pas rare qu’un parent décède, que
l’on soit confronté à la maladie, à la perspective d'une préretraite, à des
difficultés dans le couple... Le corps change, on perd la possibilité
d'enfanter et avec elle une des expressions de la féminité.
Bien que les pertes
jalonnent la vie, celles représentées par la ménopause ne sont pas ignorées
car elles s’imposent à toutes les femmes. Ce passage de la vie fragilise,
ravive les deuils et les souffrances mal digérés du passé. Il offre
l'occasion d'y repenser, de les soigner (pas de les annuler) et de libérer
l'énergie créatrice qu’ils retenaient jusque-là. Cette étape peut permettre
de faire un bond en avant, de découvrir de nouvelles forces et de vivre plus
intensément et davantage en accord avec soi-même.
Et la sexualité ?
L'envie de faire l'amour
ne s'arrête pas à la ménopause. Mais le désir s'inscrit dans un contexte
global et, une seule difficulté peut le perturber : une douleur lors du
rapport sexuel, la honte de son corps, un mal-être, une rancœur vis-à-vis de
son partenaire, l'ignorance de phénomènes physiologiques ouvrant la porte à
de fausses interprétations et à un manque de communication. Par ailleurs, à
l’aube de la cinquantaine, des problèmes de santé existants peuvent
interférer avec la ménopause.
Plus que des hormones,
la libido dépend de son appétit de vie et de sa relation avec son conjoint.
Lui-même vit peut-être difficilement l'avancée en âge ou sa réponse sexuelle
change. S'interroger et parler de ses difficultés avec son partenaire,
manifester son affection peuvent ouvrir à de nouvelles expériences.
// Isabelle Thirion
(1) Bergeret-Amselek C., “La femme en crise ou la ménopause
dans tous ses éclats”, Paris, Desclée de Brouwer, 2005, 209 p.
(2) Cité dans D. Doumont, F. Libion, D. Houeto, “Comment
préserver, voire restaurer une qualité de vie durant la ménopause?”, UCL-RESO,
Unité d'éducation pour la santé, 2006, p.15.
Ménopause, facteur de risques? |
Ostéoporose et
risques cardio-vasculaires sont souvent associés à la ménopause,
mais cette dernière n'en constitue qu'un facteur de risque. Brève
explication. Pendant l'enfance et l'adolescence, la production de la
masse osseuse est plus importante que sa perte. A partir de 40 ans,
la destruction est plus importante et une légère perte de masse
osseuse se produit. La chute du taux d'œstrogènes contribue à cette
déperdition, mais c'est principalement le phénomène normal du
vieillissement, modulé par l'hérédité et le mode de vie qui en est à
l'origine.
Ce n'est pas une
fatalité : la pratique d'une activité physique, une alimentation
équilibrée et suffisamment riche en calcium, un apport suffisant en
vitamine D (vie au grand air, alimentation), l'arrêt du tabac
aideront à compenser la diminution de la masse osseuse. Si
nécessaire, le médecin peut aussi prescrire de la vitamine D ou du
calcium.
Par ailleurs,
les œstrogènes contribuent à garder un haut taux de HDL (le “bon”
cholestérol) et un bas de LDL (le “mauvais”), ce qui expose moins
les femmes aux maladies cardio-vasculaires que les hommes. Avec la
ménopause et la chute des œstrogènes, disparaît la protection
particulière qu'ils apportaient au cœur et aux vaisseaux sanguins
contre les dépôts de graisse. Il est cependant toujours possible de
garder ou d'adopter une attitude préventive en surveillant son taux
de cholestérol, son poids, l'hypertension artérielle, en pratiquant
une activité physique régulière, en ayant une alimentation
équilibrée privilégiant les graisses non saturées, en évitant les
excès de sel et en ne fumant pas.
La question des traitements pharmacologiques pour combattre les
différents symptômes et problèmes associés à la ménopause est
complexe et mérite des développements que nous n’aborderons pas ici
mais sur lesquels nous reviendrons ultérieurement. Disons simplement
ceci : l’hormonothérapie – qui supplée aux hormones que les ovaires
cessent de sécréter – a été présentée dans les années 60 et 70 comme
“la solution” à la déficience des hormones féminines, protectrices
de l’ostéoporose et des maladies cardiovasculaires. Elle a ensuite
été décriée, dès les années 90, pour ses risques accrus de cancers
du sein et d’accidents thromboemboliques. Elle doit aujourd’hui être
envisagée au cas par cas avec le médecin en fonction des facteurs de
risque (cancer du sein, indice de masse corporelle, antécédents
familiaux…) et parmi d’autres traitements non hormonaux.
//IT et JD |
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