Santé des femmes
(24 janvier 2013)
> Lire également :
Les pilules sous la loupe
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© BSIP/Reporters |
Les pilules
contraceptives de 3ème et 4ème générations ont récemment fait la Une de
l’actualité : en France, des jeunes femmes, victimes d’accidents
vasculaires, ont mis en cause leur pilule et décidé d’aller en justice
contre les fabricants. Qu’en est-il des risques liés aux hormones ? Comment
distinguer les sortes de pilules ? Le point dans cet article.
"Depuis toujours, on
sait que la pilule contraceptive comporte des risques d’accidents
vasculaires et cardiaques, lance d’emblée le Dr Xavier De Muylder, chef du
service gynécologie, obstétrique et infertilité à la Clinique St-Jean à
Bruxelles. Depuis sa découverte au milieu des années ‘50, la pilule a
fortement évolué pour améliorer la tolérance, diminuer les effets
secondaires comme la prise de poids, le gonflement des seins, les nausées,
les céphalées et migraines... et pour réduire les risques vasculaires,
cérébraux et cardiaques”.
“Les accidents vasculaires restent heureusement
très rares chez les femmes en âge de procréer”, observe encore le Dr De Muylder. Ainsi, le risque de thrombose veineuse (thrombophlébite ou embolie
pulmonaire) est de 0,5 à 1 cas pour 10.000 femmes non utilisatrices de la
pilule. Ce risque est doublé avec les pilules de 2ème génération et
multiplié par trois ou quatre avec celles de 3ème ou 4ème génération. Il
reste toutefois inférieur à celui qui existe lors de la grossesse (multiplié
par six, voire nettement plus encore d’après certaines données).
“Cela
étant, la pilule combinée (associant œstrogène et progestatif) ayant une
propension à abîmer les vaisseaux, elle est contre-indiquée aux femmes
présentant des risques cardiovasculaires, enchaîne le Dr De Muylder qui cite
parmi ceux-ci l’hypertension artérielle, les anomalies de la coagulation,
des antécédents de phlébites, le diabète mal contrôlé... Elle est également
contre-indiquée aux fumeuses de plus de 35 ans, l’association pilule
combinée et tabac augmentant considérablement le risque d’accidents
cardiovasculaires après cet âge”.
En présence de facteurs de risque ou
d’antécédents de thrombo-embolie veineuse, on optera pour un progestatif à
faibles doses par voie orale ou sous forme de stérilet lorsqu’une
contraception hormonale est souhaitée.
“Quel que soit le type de pilule
combinée, le danger thrombotique est maximal durant la première année
d’utilisation, précise par ailleurs le Dr Isabelle Crabbé, médecin
généraliste qui consulte en planning familial et en hôpital. J’insiste
toujours auprès des jeunes filles pour qu’elles n’interrompent pas leur
contraception car le risque redémarre à chaque fois qu'on recommence sa
pilule, même si c'est la même qu'auparavant. Une fois débutée, si tout va
pour le mieux, l’idéal est de poursuivre la prise de la pilule jusqu’au
moment où une grossesse est souhaitée ou si l’on veut changer de moyen de
contraception”, conseille-t-elle.
Le médecin, un rôle-clé
“Une discussion
approfondie avec son médecin généraliste, son gynécologue ou dans un centre
de planning familial est toujours nécessaire au démarrage d’une
contraception, plaide de son côté le Dr François Sumkay, médecin à la
direction médicale de la Mutualité chrétienne. Le médecin envisagera avec sa
patiente ce qui lui convient le mieux parmi les différentes méthodes
hormonales et non hormonales(1) en fonction de son âge, de sa situation, de
son anamnèse, de ses antécédents personnels et familiaux, ajoute-t-il.
Souvent, les jeunes filles demandent qu’on leur prescrive telle ou telle
marque utilisée par leur copine ou leur sœur mais ce n’est pas pour cela
qu’elle leur conviendra”, fait-il remarquer.
Il est nécessaire de faire un
bilan afin de rechercher les facteurs de risque éventuels. Une évaluation
régulière est également conseillée, tenant compte notamment de l’âge, des
modifications du mode de vie, du désir éventuel de grossesse. “Mais si la
pilule convient et qu’il n’y a pas de changement notoire, il n’y a pas de
raison d’en changer”, conseille le Dr Crabbé.
Des recommandations ?
Le
Centre belge d’information pharmacothérapeutique (CBIP) – qui fournit aux
acteurs de santé une source neutre d'information sur les médicaments, en
dehors de l'influence de l'industrie pharmaceutique(2) – est très clair: la
règle générale est de prescrire la dose la plus faible d’œstrogènes qui
puisse être bien tolérée tout en apportant la meilleure efficacité. Dans un
article rédigé récemment, il suggère explicitement de préférer les pilules
combinées contenant comme progestatif du norgestimate, de la noréthistérone
ou du lévonorgestrel (les contraceptifs de 2ème génération) aux associations
contenant les progestatifs présents dans les pilules de 3ème et 4ème
générations, en raison de leur risque accru de thrombo-embolie veineuse et
d’accident vasculaire cérébral. “Cette augmentation du risque – limitée en
chiffres absolus – est connue depuis de nombreuses années. Les avantages
suggérés avec ces contraceptifs sur les paramètres métaboliques ou sur la
qualité de vie n’ont jamais été démontrés d’une point de vue clinique”,
précise encore le CBIP.
Sur la base des données scientifiques disponibles et
de celles relatives aux effets indésirables potentiels qui leur ont été
notifiées(3), les experts de l’Agence fédérale des médicaments estiment, de
leur côté, que les pilules de 3ème et 4ème générations ne sont pas à
proscrire mais à utiliser avec précaution, sans pénaliser les patientes qui
y recourent actuellement. Et elles sont nombreuses ! Environ un million de
femmes prennent la pilule en Belgique. Et, plus de 75% des pilules
prescrites appartiennent à la 3ème ou 4ème génération, selon les chiffres
fournis par la ministre fédérale de la Santé. Le Dr De Muylder estime, pour
sa part, qu’il serait dommage de priver un certain nombre de femmes de
pilules récentes dont elles tirent par ailleurs des avantages.
Le débat est
loin d’être clos. La conférence de consensus organisée par l’Inami en mai
prochain sur la prescription des méthodes contraceptives est fort attendue.
Elle devrait permettre d’y voir plus clair et de fournir aux médecins des
recommandations de bonnes pratiques. Ce qui est certain, c’est que la pilule
représente la méthode contraceptive la plus efficace (à plus de 99%). A
condition, bien sûr, de la prendre correctement. Le rapport bénéfice/risque
des pilules contraceptives reste très positif(4), quelle que soit leur
composition, à condition de respecter les contre-indications et les
précautions d’emploi.
// JOËLLE
DELVAUX
(1) Pour en savoir plus sur tous les moyens
contraceptifs, consulter en ligne le dossier complet publié sur le site
www.mongeneraliste.be
(2) Plus d’infos sur
www.cbip.be - Lire notamment l’article paru
le 16 janvier dernier : "Risque de thromboembolie veineuse avec les contraceptifs estroprogestatifs contenant du désogestrel, de la drospirénone ou du gestodène: aucune raison de paniquer ?"
(3) A ce jour, une vingtaine de
notifications d’effets indésirables ont été enregistrées auprès de l’AFMPS
concernant notamment des thromboses et des troubles visuels pour les
contraceptifs de 3ème ou de 4ème génération.
(4) Notamment règles plus régulières, moins
douloureuses et moins abondantes avec diminution des risques d’anémie, de
fibrome utérin et de kystes fonctionnels...
>> Sources :
Pour s’y retrouver |
|
© Ian Hooton/Science Photo Library |
Les pilules les
plus utilisées sont composées d’œstrogènes et de progestatifs: ce sont
les
pilules combinées qui mettent les ovaires au repos et bloquent l’ovulation.
Il existe aussi des pilules progestatives (appelées aussi minipilules) qui
ne contiennent pas d’œstrogènes. Elles sont recommandées aux femmes qui
allaitent et à celles pour lesquelles la pilule combinée est déconseillée ou
contre-indiquée. L’inconvénient majeur est que cette pilule doit être prise
en continu (28 jours) et strictement à la même heure. Elle est aussi un peu
moins efficace que la pilule combinée et n’apporte pas de solution aux
règles irrégulières et abondantes.
Parmi
les pilules combinées, les
monophasiques (c’est-à-dire avec des doses en œstrogène et progestatif
identiques dans chacun des 21 comprimés) sont le premier choix chez la
plupart des femmes et les plus adaptées pour avoir des menstruations
régulières. Dans les pilules bi- ou triphasiques, les doses d’hormones augmentent au cours de la plaquette en deux ou trois paliers. Ces pilules doivent impérativement être prises dans le bon ordre pour être efficaces.
Les pilules combinées sont classées en quatre grandes
catégories, selon la nature du progestatif qu'elles contiennent :
> Les
pilules de la 1ère génération, qui contiennent des doses élevées d’œstrogènes
(50 µg d’éthynilestradiol), ne sont quasiment plus prescrites car moins
tolérées. La seule marque qui subsiste est Microgynon 50.
> Les pilules de
la 2ème génération, apparues dans les années 70 et 80, contiennent de
faibles doses d’œstrogènes (20 ou 30 µg d’éthynilestradiol) et comme
progestatif du norgestimate (Cilest), de la noréthistérone (Ovysmen,
Trinovum...) ou plus souvent du lévonorgestrel (Microgynon 20 et 30,
Stediril 30, Eleonor, Lowette, Nora-30, Trigynon, Trinordiol...).
> Les
pilules de la 3ème génération, mises sur le marché dans les années 90,
contiennent également de faibles doses d’œstrogènes mais d’autres types de
progestatifs : le gestodène (Femodene, Harmonet, Liosanne, Meliane,
Gestodelle, Gestofeme...) et le désogestrel (Marvelon, Mercilon, Deso 20 et
30...). Ces pilules présentent un risque avéré de thrombose veineuse deux à
trois fois plus élevé que les pilules de la 2ème génération.
> Les pilules
de la 4ème génération, apparues au début des années 2000, contiennent, outre
de faibles doses d’œstrogènes, la drospirénone comme progestatif (Yasmin, Yasminelle, Yaz, Annabelle, Annaïs...). La drospirénone agit sur le rein, ce
qui augmente le risque d’effets indésirables, et son action interfère avec
celle de nombreux médicaments. Les pilules qui contiennent ce progestatif
ont la réputation de faire perdre du poids mais c’est une illusion, comme
l’explique la Revue Prescrire dans un article paru en octobre 2011. Dans une
expérimentation, au bout d’un an, les femmes qui ont pris une pilule à la
drospirénone ont perdu en moyenne 270 grammes de plus que les femmes qui ont
pris une pilule classique. Par ailleurs, ici aussi, le risque de thrombo-embolie
veineuse est deux à trois fois plus élevé que celui encouru avec les pilules
de 2ème génération.
Parmi toutes les pilules combinées, celles à base
d’acétate de cyprotérone (Diane, Daphné, Claudia, Elia…) occupent une place
particulière car elles ne sont pas cataloguées comme contraceptifs hormonaux
mais sont souvent prescrites pour de possibles effets sur l’acné en raison
des propriétés anti-androgènes de ce progestatif. Cependant, l’acétate de cyprotérone augmente de façon significative le risque de phlébite et
d’embolie. |
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