Conseils pratiques
(15 décembre 2011)
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Les
congés
familiaux
Prendre du temps comme père
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©
Philippe Turpin/Belpress |
Dix jours de congé indemnisés à l’occasion de la naissance de
leur enfant : c’est ce que peuvent prendre les pères salariés depuis
près de dix ans déjà (voir ci-dessous). Un droit auquel ils sont de plus
en plus nombreux à recourir. Une manière, pour eux, de participer à la
vie de famille et d’assumer leur rôle de père. Témoignages.
Rudy
a deux enfants. Le premier a dix-sept
ans et le second... un an et demi. Technicien dans une société de
téléphonie, quelle ne fut pas sa surprise d’apprendre, par son service
du personnel, l’existence d’un congé de paternité. “Lors de la naissance
de Loïc, mon aîné, cela n’existait pas. J’avais très rapidement repris
le boulot après que ma femme soit rentrée de l’hôpital, se souvient-il.
J’ai vécu tout autrement la naissance d’Alexandre et les premiers mois
qui ont suivi, bien décidé à profiter de ces jours de congé pour épauler
mon épouse et m’occuper du bébé. J’ai pris deux fois une semaine
complète de congé, avec l’accord de mon employeur”.
Sébastien,
directeur dans une entreprise d’économie sociale, a préféré, quant à
lui, prendre les trois premiers jours de son congé de paternité après la
naissance de son fils et étaler ensuite les autres jours pour bénéficier
de week-ends de trois jours pendant sept semaines successives. “Mon
congé vient de se terminer. Cette formule était idéale pour moi. J’ai pu
rester connecté au travail et assumer mes responsabilités
professionnelles. En même temps, avoir congé les vendredis m’a permis de
vivre des moments de détente privilégiés avec ma femme et notre bébé,
l’aîné étant à l’école”.
Responsable d’une grosse équipe d’ouvriers chez un grossiste en viande,
Claudy a, lui aussi,
pu prendre ses congés de paternité dans de bonnes conditions. “J’ai la
chance de travailler dans une entreprise familiale vraiment respectueuse
du personnel. Je n’ai pas pu concentrer tous mes jours de congé juste
après la naissance de mon deuxième enfant car, en décembre, on a
vraiment trop de travail mais par contre, j’ai pris une semaine au
Carnaval, ce qui nous convenait bien à ma femme et moi”.
Pour Claudy comme pour beaucoup d’autres pères, prendre un congé de
paternité paraît tout à fait naturel. Un point de vue qui témoigne d’un
changement de mentalités et est confirmé par le recours croissant des
pères au congé de paternité et au congé parental. “De plus en plus
d’hommes s’investissent dans la vie de famille et prennent leur part de
responsabilités car les femmes ont aussi une vie professionnelle, avance
Claudy. Dans mon équipe, composée en grande majorité d’hommes, je vois
bien qu’ils préfèrent avoir plus de temps libre pour leur famille que de
travailler plus pour gagner plus. La plupart demandent de prendre leur
congé de paternité en prolongement de leurs congés payés. Plusieurs,
aussi, ont pris un congé parental à 4/5. Ce n’est pas mal vu dans
l’entreprise, que du contraire. Le tout est qu’on prévienne à temps pour
qu’on puisse organiser le travail”.
Tous les jeunes pères n’ont malheureusement pas cette chance. Dans
certaines entreprises, il n’est pas de bon ton de demander un congé de
paternité. Les collègues ou supérieurs hiérarchiques, souvent plus âgés,
découragent les jeunes pères de prendre leur congé de paternité,
notamment par des moqueries mais aussi par des pressions. “Mon ami qui
travaille comme serveur s’est vu refuser sa demande de congé car son
patron estimait que c’était tout simplement débile et que s’il
commençait comme cela, il pouvait prendre la porte”, témoigne
Anne, une jeune
maman de 22 ans. Sous la menace, le jeune père a obtempéré... D’autres
n’ont pas pu choisir les jours de congé souhaités, se pliant aux
injonctions de leur employeur. D’autres encore ne prennent qu’une partie
de leurs jours de congé, car la pression sur le travail est trop forte.
“Déjà que je n’arrive pas à prendre tous mes jours de vacances
annuelles, alors le congé de paternité, n’en parlons pas”, soupire
Arnaud, cadre
supérieur dans le secteur automobile.
Bertrand, directeur commercial, est plus radical
: il n’imagine même pas prendre de congé de paternité : le travail avant
tout.
Enfin, il y a tous ceux qui méconnaissent tout simplement leur droit au
congé de paternité. Comme Aziz,
chauffeur-livreur pour un petit patron. Son enfant vient d’avoir six
mois. Personne ne lui avait jamais parlé de ce congé avant d’être
interviewé pour cet article. “Depuis, j’en ai parlé à mon patron qui m’a
dit qu’il en ignorait l’existence, précise-t-il. Mais de toute façon, je
ne vois pas bien quand je l’aurais pris. Le patron compte sur moi et il
n’y a personne pour me remplacer”.
// Joëlle Delvaux
Dix jours de congé de naissance
Il y a quelques mois, le congé de paternité a été rendu
accessible au partenaire de vie de la mère biologique, à défaut de père
légal. Explications à propos de ce qu’on appelle dorénavant le congé de
naissance.
Qui a droit au congé?
Le congé de naissance, d’une durée de dix jours, est un droit accordé en
tout premier lieu au père à l'occasion de la naissance
d'un enfant dont la filiation est établie à son égard.
Depuis le 20 mai 2011 (1), le
coparent (généralement la compagne de la mère biologique) peut
également bénéficier de ce congé à l’occasion de l’accouchement de sa
partenaire. Plusieurs conditions doivent être remplies :
>
L’enfant ne doit avoir un lien de filiation légale qu’avec la mère. Si
un lien de filiation légal existe avec le père, alors ce congé est
reconnu uniquement à celui-ci.
>
Le coparent doit apporter la preuve de partenariat avec la mère de
l'enfant (acte de mariage, preuve de cohabitation légale, extrait du
registre de la population attestant que les intéressés sont inscrits à
la même adresse depuis une période ininterrompue de trois ans précédant
la naissance...).
Quel statut professionnel?
Ont droit au congé de naissance les travailleurs salariés et le
personnel contractuel du secteur public, quel que soit leur
régime de travail (temps plein ou partiel). Ne sont pas concernés:
>
Le personnel statutaire (nommé) et le personnel subventionné de
l’enseignement libre qui n’est pas engagé dans les liens d’un contrat de
travail. Il leur est conseillé de s’informer auprès de leur service du
personnel pour connaître les règles spécifiques prévues.
>
Les indépendants et conjoints aidants.
Quand ce congé peut-il être pris?
Le travailleur choisit librement ses jours d’absence dans les
quatre mois à dater du jour de l’accouchement. Les jours de
congé peuvent être pris en une fois ou étalés, en accord avec
l’employeur. Ils doivent coïncider avec des jours normaux de travail.
Exemples :
>
Le travailleur à temps plein qui travaille du lundi au vendredi a le
droit de s’absenter l’équivalent de deux semaines complètes.
>
Le travailleur à temps partiel qui preste deux jours une semaine et
trois la suivante a le droit de s’absenter durant l’équivalent de quatre
semaines complètes.
Comment ce congé est-il rémunéré?
>
Durant les trois premiers jours de congé, le
travailleur perçoit, de son employeur, sa rémunération normale
(dans le cadre du petit chômage).
>
Durant les sept jours suivants, il perçoit une
indemnité à charge de l’assurance soins de santé obligatoire et payée
par sa mutualité. Cette indemnité s’élève à 82% du salaire
journalier brut plafonné. L’indemnité maximale s’élève à 122,02
euros par jour – en régime de cinq jours de travail par semaine – et à
101,68 euros par jour – en régime de six jours – (montants valables
depuis le 1er mai 2011). Ces indemnités sont soumises au précompte
professionnel de 11,11%.
Quelles formalités vis-à-vis de l’employeur?
>
Le travailleur bénéficie d’une protection contre le licenciement
dès le moment où il avertit son employeur par écrit de la prise de son
congé et jusqu’à trois mois après cet avertissement
(2). Durant cette période, l’employeur ne
peut mettre fin au contrat de travail, sauf pour des motifs étrangers à
la prise du congé.
En cas de non-respect de cette protection, l’employeur devra verser au
travailleur une indemnité égale à trois mois de salaire, en plus de
l’indemnité compensatoire de préavis, éventuellement due.
>
Le coparent qui n’est pas le père légal doit fournir à son employeur une
déclaration sur l’honneur qu’il entre dans les
conditions pour ouvrir ce droit.
Quelles formalités vis-à-vis de la mutualité?
Pour ouvrir un dossier de congé de naissance, le travailleur doit
envoyer une demande écrite à sa mutualité, accompagnée
de l’attestation de naissance délivrée par la commune. A cet effet, un
formulaire est disponible auprès de la mutualité ou sur le site mc.be.
Le coparent qui n’est pas le père légal doit, de plus, joindre une copie
de la déclaration sur l’honneur fournie à l’employeur.
Quand les indemnités sont-elles versées?
Lorsque la demande est complète, la mutualité envoie au travailleur une
feuille de renseignements qu’il doit compléter et renvoyer à sa
mutualité. Dans le même temps, la mutualité envoie à l’employeur la
partie de la feuille de renseignements qui le concerne et qu’il doit
compléter. Attention, l’employeur attendra la prise du dernier jour de
congé avant de renvoyer sa partie à la mutualité.
L’indemnisation interviendra donc en une fois, après la prise
de la totalité du congé de paternité (3).
// JD
>> Pour plus d’informations,
contactez votre conseiller
mutualiste, appelez gratuitement le 0800 10 9 8 7 ou surfez sur
www.mc.be
(1) Loi du 13 avril 2011 modifiant, en ce qui
concerne le coparent, la législation afférente au congé de paternité (MB
du 10 mai 2011).
(2) Une loi du 11 juin 2011, entrée en vigueur le
30 juillet 2011, instaure une protection contre le licenciement en cas
de congé de paternité (MB du 20 juillet 2011).
(3) Le congé de paternité est assimilé à des
prestations de travail effectives pour la pension et les vacances
annuelles.
Quelques cas particuliers |
>
En cas de naissance de jumeaux ou de
naissance multiple, le droit aux 10
jours de congé de paternité n’est
reconnu qu’une fois.
> La naissance d’un enfant mort-né
après 180 jours de grossesse ouvre
également le droit au congé de
paternité.
>
Pour le coparent qui entame une
procédure d’adoption de l’enfant, les
jours de congé de naissance sont déduits
des jours de congé d’adoption, comme
suit: de 1 à 5 jours de congé de
naissance: réduction d’une semaine du
congé d’adoption; de 6 à 10 jours de
congé de naissance: réduction de deux
semaines du congé d’adoption. Le parent
adoptant a donc tout intérêt à prendre
un congé de naissance complet (ou de 5
jours) pour ne pas perdre des jours de
congé d’adoption (rémunérés puis
indemnisés de la même manière que le
congé de naissance).
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