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Éditorial (5 juin 2014)

Alda Greoli
//Secrétaire nationale
© A-M Jadoul
Non, Eupen, t’es pas tout seul !

Le super Sunday du 25 mai est derrière nous! Et maintenant ? Au lendemain des élections, les analyses les plus diverses ont été réalisées. Notre propos n’est pas d'en ajouter une. Mais un phénomène mérite qu’on s’y arrête dès à présent : la constitution rapide d'un gouvernement côté germanophone du pays.

Certes le jeu de “je te tiens, tu me tiens par la barbichette” a de beaux jours devant lui. Il suffit de regarder les prises d’initiatives au fédéral en parallèle avec celles des Régions bruxelloise et wallonne pour s'en convaincre. Néanmoins, en Communauté germanophone, on est déjà reparti pour une nouvelle législature. La majorité au pouvoir sera identique à la précédente, avec une distribution des rôles quelque peu différente.

Bravo aux germanophones ! Mais…

On peut, bien-sûr, se réjouir de la capacité de trouver rapidement un accord, vu l’importance des enjeux de cette prochaine législature et l’ampleur de la tâche. Ne citons que les défis liés à l'emploi, au choc démographique, au taux d’endettement et évidemment aux transferts de compétences… Il est donc essentiel de se mettre rapidement à l’ouvrage.

Mais justement, c’est là le premier étonnement : quasiment aucun commentaire n’a été fait sur les axes prioritaires de cette majorité pour les cinq prochaines années. Aucun éclairage n'a été donné, aucune déclaration gouvernementale publiée. Les groupes de travail vont maintenant se réunir et les premiers textes devraient apparaître.

L’important semblait donc de repartir le plus vite possible et de voir ensuite pour quoi faire. Et ce, sans être contraint par des enjeux venant de l’extérieur de la Communauté germanophone elle-même. Les dirigeants germanophones, tous partis confondus, ont trouvé inopportun que les autres Régions et Communautés se mêlent de leurs affaires. Ils ont estimé pouvoir avancer sans attendre le reste du pays.

Cet endroit où il fait bon vivre se développe, entre autres, grâce à sa place privilégiée au cœur de ce qu’on appelle l’Euregio Meuse-Rhin, au carrefour de l’Allemagne, des Pays- Bas, à un saut de puce de la France et jouxtant Luxembourg. La Communauté germanophone connaît – plus que n’importe quelle autre partie de la Belgique – l’utilité et les effets de l’Europe, de ses programmes économiques. Elle connaît aussi l’interdépendance des Etats qui la composent. Elle sait donc, mieux que quiconque, comment des mesures prises dans un endroit de l’Europe peuvent avoir des conséquences importantes dans le reste de l’espace européen.

En quoi la Belgique fédérale serait-elle différente ?

La législature qui débute concrétisera la sixième réforme de l’Etat. Contrairement aux précédentes réformes, celle-ci transfère des pans entiers de la sécurité sociale et achève presque totalement le transfert des politiques d’emplois.

Les défis liés au financement de ces matières – essentielles pour le bien-être de la population et le développement socio-économique de notre pays – nécessiteront plus que jamais une capacité importante de cohésion et de dialogue entre les Régions et Communautés. L’organisation de la gestion de ces compétences nouvelles d’une Région à l’autre facilitera ou rendra impossible la liberté d’entreprise, la circulation des citoyens… Elle mettra en œuvre – ou non – une concurrence dangereuse entre les pouvoirs publics et les entreprises (marchandes et non marchandes) des différentes parties du pays.

Un État fédéral doit évidemment conduire à ce que chaque entité qui le compose puisse s’organiser, prendre des initiatives et composer ses majorités. Cependant, il est impensable de se passer de dialogues entre les Régions, entre les responsables et dirigeants de partis. Là où, auparavant, la cohérence des politiques et la cohésion sociale étaient assurées par “l’unité de commandement” fédérale, demain, elles devront être garanties par l’art de la co-construction entre les Régions et Communautés.

Imaginons un instant qu’en matières de santé, la Région flamande décide une gestion par l’administration sans laisser de place aux prestataires ni aux mutualités; que la Région wallonne mette en œuvre l’accord de la législature précédente et créée un organisme d’intérêt public (OIP) pour gérer ces matières avec les mêmes acteurs qu’à l’Inami actuellement; que la Communauté germanophone choisisse un modèle de gestion avec concertation des acteurs mais sans cogestion et donc sans coresponsabilité. Imaginons ensuite qu’il faille décider du remboursement d'un vaccin voire de l’obligation de certaines vaccinations pour circuler sur le territoire en question… Quel imbroglio! Et ceci n’est pas de la santé-fiction…

Même si les différences entre les lignes politiques des partis s’estompent parfois, les projets de société soutenus par les diverses formations politiques ne sont pas identiques. Celles-ci n’envisagent pas l’organisation de notre société et de notre “vivre ensemble” de la même manière. La diversification des majorités d’une Région ou Communauté à l’autre aura donc pour conséquence de rendre encore plus difficile le développement d’un modèle concerté de société. Le risque de concurrence politique en sera lui aussi augmenté. Or, les moyens ne vont pas croître et des choix essentiels à la soutenabilité du système de sécurité sociale devront absolument être réalisés. Sinon, l’édifice risque de s’écrouler. La Communauté germanophone – pas plus que les autres Régions – ne disposera des moyens nécessaires pour faire face à ces défis si elle s’isole ou s’appuie davantage sur la construction européenne que sur la maison Belgique.

Il n’est pas question de revenir à la “Belgique de papa”. Par contre, durant cette législature, nous devons mettre sur pied la gouvernance de la “Belgique de nos enfants et petits-enfants”. La sécurité sociale, la liberté d’entreprendre, l’initiative citoyenne et volontaire, l’emploi et l’état de nos finances publiques méritent de prendre le temps nécessaire et suffisant pour définir des projets cohérents et communs, avant d’agir vite et bien! Non, Eupen, t’es pas tout seul!

Alda Greoli//Secrétaire nationale

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