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Éditorial (6 mars 2014)

Alda Greoli
//Secrétaire nationale
© A-M Jadoul
Quand l’individualisme est solidaire !

Il nous arrive d’être confrontés à des réactions du type : “Pourquoi devrais-je payer pour ce service dont je n’ai pas besoin ?” ou “J’ai déboursé autant de cotisation cette année, mais, en retour, je n’ai pas profité d’avantages pour ce montant”. On répondra en évoquant la solidarité: “Vous n’avez pas reçu en retour mais vous avez contribué à la solidarité et demain, c’est peut-être vous qui en aurez besoin”. Cet argument est-il encore recevable aujourd’hui et pourquoi ?

Une forme de pensée contemporaine conduit souvent à opposer dans le discours “individualisme” et “solidarité”. Le premier serait condamnable, alors que le second serait une valeur respectable et louable. Pourtant, nous voyons également que les mutualités pensent de plus en plus leur communication pour atteindre l'individu. On montre que chacun bénéficie d'une couverture de ses soins de santé, que tous ont un intérêt personnel à l’avantage mis en avant. Serionsnous victimes, nous aussi, de cette nécessaire individualisation et personnalisation de l’avantage octroyé?

Une culture de la responsabilité individuelle

Les uns perçoivent de l’égoïsme alors qu’il faudrait que le projet mutualiste soit par essence solidaire. Les autres y voient une solidarité obligatoire et non consentie alors qu’une couverture devrait servir à assurer l’individu pour ses risques propres. Mais quand on y réfléchit, ces deux approches ne se rencontrent-elles pas dans ce qu’est vraiment l’acte solidaire? En effet, en Occident, le christianisme qui constitue historiquement une des bases de notre culture met en avant l’homme émancipé et libre, responsable et central. Tout autant qu'il l’articule aux autres dans une dimension solidaire, prenant soin de ceux-ci et de la société en général.

Ainsi, le christianisme interpelle notre conscience de la solidarité, mais dans le même temps, il tend à émanciper les individus d’une vision collectiviste pour les amener à une responsabilité individuelle et une réalisation de soi au profit de tous. Il n’est pas question ici de prosélytisme religieux, mais bien de tenir compte de la réalité de notre histoire et de notre culture, que l’on soit ou non croyant. La culture occidentale ne peut donc pas faire l’économie de la prise en compte de l’individu. Mettre en place une assurance sur la base de l’efficacité pour le plus grand nombre et par le plus grand nombre, cela doit se faire en montrant que chacun y trouve ou y trouvera sa place et son intérêt, ne fut-ce que par la reconnaissance de tous de son investissement.

Ne pas déforcer l'intérêt collectif

La sécurité sociale a pu se construire et se pérenniser dans notre pays parce qu’elle répond à des besoins individualisés (pension, chômage, assurance soins de santé et allocations familiales). Dans le même temps, elle met en place une plus grande solidarité. Elle articule donc l’intérêt individuel à l’intérêt collectif. Elle combine utilement les avantages à destination de chacun avec un filet de sécurité pour tous. Le danger serait de faire croire que la sécurité sociale et l’assurance soins de santé, parce qu’elles sont obligatoires et redistributives, pourraient être des obstacles à la responsabilisation des individus. En tant qu’organisme assureur exerçant des missions de service public, nous devons toujours défendre et vouloir répondre à des besoins individuels, mais nous devons aussi veiller avec la même vigueur à ce qu’ils ne déforcent pas l’intérêt collectif. Nous avons à entretenir ce lien étroit entre la déclinaison de nos avantages pour chacun de nos membres et la garantie que l’ensemble du système contribue à augmenter la sécurité de l’accès et la qualité de soins pour tous.

Le jour où les mutualités laisseront tomber un des deux aspects et en particulier la dimension de l’intérêt collectif, alors les individus pourront –voire devront – s’inquiéter. Car nous glisserons petit à petit vers un système d’assistance sociale où la couverture obligatoire sera minimale, destinée aux plus fragiles. Tandis que les autres paieront beaucoup plus cher qu’aujourd’hui une couverture de soins de santé, avec une qualité de soins moins garantie, dont ils seront exclus avec l'âge, la maladie ou les accidents de la vie… En tant que mutualité, nous avons un rôle fondamental à jouer pour que le droit individuel se conjugue utilement à la solidarité collective.

Prendre conscience des vrais choix

Il est parfois politiquement difficile d’illustrer cet enjeu. Mais c’est aussi notre rôle de le faire. Prenons alors un exemple: au fil du temps se sont ajoutés à nos couvertures de sécurité sociale, des avantages extra-légaux, des assurances groupes portant sur les pensions, des hospitalisations et d’autres couvertures encore. À l’heure où certains veulent retrouver des marges de manœuvres financières, quels seront les premiers avantages remis en cause? Le risque est grand de cibler les cotisations sociales qui alimentent la sécurité sociale, plutôt que les avantages extralégaux qui alimentent les caisses des assureurs privés. Ces dernières années nous ont montré la fragilité de ces fonds. Et pourtant le climat ambiant risque de privilégier ces modes de financement notamment de pensions individuelles, au détriment des pensions légales.

De même, si les membres de mutuelles demandent de plus en plus des avantages basés sur leurs seuls besoins et que les mutuelles se laissent entraîner sur cette pente, pour la seule raison de l’efficacité commerciale à court terme, alors nous ne donnerons pas cher de notre système de couverture de soins de santé. Ni de son accessibilité financière au profit du plus grand nombre. Ni de la qualité des soins pour tous.

Quelle que soit notre place dans la société – citoyen, professionnel de la mutualité, politique, membre de l’administration – chacun de nous porte une véritable responsabilité : celle d'être conscient et acteur du système. Mutualistes, nous avons la chance de jouir de la grande confiance de nos membres, ayons aussi la volonté d’avoir conscience de cette chance et de vouloir protéger, conforter et pérenniser notre système de sécurité sociale. Il est utile à chacun et bon pour tous !

Alda Greoli//Secrétaire nationale

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