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Éditorial (7 mars 2013)

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Alda Greoli
//Secrétaire nationale
© A-M Jadoul
Une vie sans ride n'est pas une vie !

Il y a quelques années, rentrant de l'école, un de mes fils m'expliquait avec tout son sérieux : “Maman, j'ai compris ! Printemps, été, automne, hiver ; printemps, été, automne, hiver, et on recommence et puis, c'est fini , on est mort! C'est simple. C'est bien”. Avec le bon sens de l'enfance, il avait saisi, sans crainte, le temps, ses effets, et surtout la participation de la mort au cycle de la vie.

Mon fils a bien grandi depuis et il a dû constater que, dans la société contemporaine, le rapport au temps n’est pas si naturel. A force de vouloir façonner le monde selon nos envies, nos exigences, quel rapport entretenons- nous encore avec les cycles, avec le temps qui passe et qui ne reviendra pas? Nous sommes sans doute convaincus que la force intellectuelle de l'homme l'autorise à réinventer la terre. N’avons-nous pas placé l'humain au-delà de tout Dieu ou de toute divinité, fait de l’Homme une nouvelle et unique religion?

Fausse jeunesse éternelle

Dans cette société de l'éternité de l'humain, nous rejetons de plus en plus tout signe de notre finitude ou de notre avancée en âge. L'Homme s’échine à rechercher des émotions vécues en groupe, comme une grâce de l'adolescence prolongée. Pas à pas, nous passons d'une société qui voyait dans la vieillesse les attributs de la sagesse, à une relation à nous-mêmes qui voit dans la jeunesse éternelle notre émancipation et notre suprême liberté humaine. Tout élément diminuant notre capacité à rester jeune est vécu comme un échec, pour nous mais aussi pour la société en général.

Dans notre monde, ceux qui ne sont plus capables de travailler tout en faisant du sport, ceux qui n’ont plus la possibilité de vivre sans aides extérieures, ceux qui sont les aînés des aînés, ont-ils encore droit à la parole? Ont-ils encore voix au chapitre sur leur vie ? Les aînés sont-ils condamnés à être considérés comme un poids ? Notre cadre jeuniste tend à culpabiliser l’individu lors de son avancée en âge.

Un poids coupable

La sécurité sociale et l'organisation sociale qu'elle permet tendaient à envisager, jusqu’à présent, la vie dans sa globalité : enfance, temps du travail, temps de la retraite. Aujourd'hui, nous glissons vers un modèle où tout ce qui ne fait pas partie de l'espace de productivité est considéré comme une charge, un poids pour les autres. Des débats fondamentaux en émergent, notamment sur le droit à la vie en situation de dépendance. Les réponses simplistes trop souvent entendues en matière d'euthanasie, de droit à une mort digne, nous laissent parfois pantois sur la relation que certains entretiennent avec la valeur personnelle et familiale d'une vie. Elles nous questionnent aussi sur la qualité que certains veulent encore donner à l'indispensable colloque singulier entre le patient et son médecin. Une vie humaine n'est pas un bien économique, une ligne statistique de dépenses en pension ou en soins de santé !

La question sociale sous-jacente est, elle aussi, tout à fait fondamentale. Nous avons vécu des années de richesse sans précédent. Nous avons profité de ce cadre pour penser et mettre en place des systèmes qui rendent la cohésion sociale plus forte. Ces systèmes doivent être réinterrogés afin de tenir la distance dans une crise qui n'est pas prête de se terminer. Mais pour réinterroger le modèle, il faut aussi s’exprimer clairement. Dire qu'il faut tenter d'allonger la durée de la carrière active des travailleurs et mettre en place les mécanismes qui réduisent les possibilités de prépension, de sortie anticipée de l'emploi, c'est différent que de dire la charge des pensions insoutenable. Dire que la prévention de la santé et les sommes engagées dans les soins préventifs sont porteurs de gains en dépenses de soins de santé, c'est différent que de dire qu'une personne dépendante coûte trop cher. Dire qu'il faut favoriser la vie sociale, l'action citoyenne, la vie associative porteuses de santé, c'est autre chose que d'affirmer que chacun doit prendre seul ses responsabilités pour assurer son avenir.

S’interroger sur la voie à suivre

Cette année, nous fêterons les cinquante ans de l'assurance soins de santé obligatoire belge. Nous aurions pu aussi fêter les acquis de la concertation sociale, les avancées de la sécurité sociale et le consensus historique qui y est lié, la participation des travailleurs et des employeurs au système de sécurité sociale. Pourtant, aujourd'hui, le seul discours politiquement correct semble être celui de la diminution des charges salariales, de la baisse de l'impôt, celui de la constitution par chacun d'entre nous d’une pension complémentaire, d'une assurance santé personnelle, d'une épargne. Mais sommes-nous certains qu’agir de la sorte rend le système plus efficace et moins cher, et donc globalement économiquement plus tenable ? Croyons-nous vraiment que c'est la voie à suivre pour que le développement économique soit possible dans un monde en paix sociale pour les entrepreneurs et les travailleurs? Croyons-nous que c'est en culpabilisant les plus âgés du coût de leurs pensions que nous améliorerons notre projet de société et le bien-être dans notre pays?

Le contexte européen prône essentiellement le vieillissement actif sous la forme d’un allongement du temps de travail. S’il est indispensable d’oser s’interroger sur la durée réelle des carrières, l’Europe pose aussi la question de l’utilité de la personne âgée et de la charge qu’elle représente pour la collectivité. Enéo, mouvement social des aînés, partenaire de la Mutualité chrétienne, entame une réflexion importante sur l’image des aînés, sur la manière dont on les considère. Il développera tout à long de l'année de nombreuses recherches, actions, réunions, rencontres pour approfondir ce thème.

Osons espérer que notre société s’engagera sur le chemin de la sagesse. Un chemin qui ne réduit pas la vie à la seule jouissance de libertés individuelles, ni aux chiffres des statistiques de consommation. Mais un chemin empruntant la ligne de crête, montrant son véritable horizon à l'Homme. Un chemin qui, par la solidarité, ouvre à la vie en société et permet de marcher en paix!

Alda Greoli//Secrétaire nationale

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