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A la recherche du temps couru

“Jamais dans l'histoire, nous n'avons disposé d'autant de temps, car nous venons, en un siècle, de presque doubler notre durée de vie et diminuer de moitié notre temps au travail”. Le constat de l'essayiste français Jean-Louis Servan-Schreiber(1) a de quoi secouer. Il interroge nos doléances à propos de ce temps que nous n'avons pas, qui nous manque, qui file à toute allure.

Avec l'été, se profilent nos souhaits de lever le pied, de profiter du farniente. Nous rêvons d'assouplir nos horaires, de reléguer le réveil au placard, de nous libérer des contraintes de l'agenda, de jouir du temps qui passe. Dans un mois, nous nous imaginons flâner. Et, présageant de notre capacité à nous libérer de certaines addictions, nous nous projetons en vacances sans montre au poignet, sans gsm à l'oreille, sans plan d'actions au programme. La délivrance ne pourra être que temporaire. Nos modes de vie sont loin d'être organisés de la sorte. L'époque contemporaine respire l'affolement permanent. La vitesse est devenue la norme. L'urgence est invoquée à tout bout de champ et semble faire contagion.

Cette accélération, nous l'avons construite, et nous poursuivons la tâche. Nous perfectionnons nos modes de transport pour qu'ils nous assurent des trajets de moins en moins longs. A l'absurde parfois… Les pointes de vitesse de nos automobiles ne servent pas à grand-chose au regard des limitations en vigueur sur nos routes. Nous adaptons nos modes de communication pour nous trouver au plus proche de l'instantané. Le nez sur le vécu à l'autre bout de la planète. Au point de vibrer à l'unisson sur des nouvelles qu'en d'autres temps, nous n'aurions jamais connues.

 

Les yeux rivés sur l’immédiat

Et nous voilà atteints de “court-termisme”, comme le regrette Jean-Louis Servan-Shreiber. “La recherche désormais instinctive du chemin le plus court, la primauté de l'urgence sur l'importance, la pression des résultats sont toutes filles de la vitesse, écrit-il. Ensemble, elles ont engendré une situation de court-termisme généralisé dont nous ne sommes même plus toujours conscients”. C'est l'immédiat qui prend le dessus. Le long terme est relégué à plus tard…, à jamais. D'urgence en urgence, nous perdons le sens. Nous faisons face également à un volume croissant de découvertes, de données à intégrer mentalement. Les pensées pratiques prennent le pas sur la réflexion abstraite. Et l’essayiste de décliner l'attitude dans différents domaines: “les politiciens ont les yeux rivés sur la prochaine échéance électorale ou le sondage de la semaine, les patrons de sociétés cotées (ndlr: en bourse) sur leurs résultats trimestriels, les boursiers sur les statistiques économiques de la journée, les managers sur le compte-rendu mensuel réclamé par le siège social. Nous sommes trop occupés par l'immédiat pour prendre le temps de nous projeter loin devant en pensée. Notre horizon temporel s'est rapproché.”

 

L’angoisse du coup d’œil sur l’avenir

Avoir du mal à se projeter dans l'avenir, être insouciant dans le présent sont des avatars de l'enfance. Quelle n’est pas notre nostalgie, parfois, pour ces épisodes plus confortables? Mais, il faudra nous y résoudre: grandir, mûrir, c'est différer ses désirs, c'est savoir attendre, malgré le flot croissant d'objets de consommation à jouissance immédiate qui ne nous soutient pas dans cette voie. Savoir anticiper l'avenir – non le deviner, mais le construire sur la durée –, semble être un atout majeur, un gage contre le vacillement.

Avec une acuité grandissante, les questions environnementales nous contraignent à penser autrement. A envisager le “durable”, d'après le lexique adapté. Les prises de conscience se multiplient et, avec elles, les actions soucieuses de préserver la planète, d'envisager le long terme. D'aucuns prôneront le slow, le décroissant… “L’heure du changement de logique semble venue, où le “toujours plus”, effréné et insensé, laisse place à la sobriété heureuse, consciente et responsable”, écrit le penseur Pierre Rabhi (2). Mais il ne faudrait pas le nier: la tension de l'action, l'adrénaline de l'urgence nous plaisent aussi. Et face à un avenir plus qu'incertain, nous préférons nous tenir éloignés des angoisses relatives au futur.

© Philippe Poulet/Belpress

Pourtant, conclut le scrutateur du temps Jean-Louis Servan-Schreiber, “chacun doit pouvoir remettre un peu plus de long terme dans la pratique de sa vie”. Le défi est de taille. Et comme le rappelle la rédaction de l’Appel (3): la période des vacances peut être un bon moment pour commencer à lever le pied.

Quelques idées pour amorcer le mouvement: ne pas s'affoler lorsqu'un message reste sans réponse quelques heures, voire quelques jours; aller faire ses courses à pieds, et préférer le marché; s'asseoir un moment dans ces lieux que l'on traverse habituellement, éteindre les écrans… En somme, nous déparasiter de temps en temps pour approcher notre long cours. 

// Catherine Daloze

 

(1) Jean-Louis Servan-Schreiber, “Trop vite! Pourquoi nous sommes prisonniers du court terme?”, éd. Albin Michel, 2010.

(2) Auteur entre autres de “La part du colibri. L’espèce humaine face à son devenir”, éd. De l’Aube, 2006.

(3) “Magazine chrétien de l'événement”, juin 2010, n°328 – http://magazine-appel.be/

 


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