Vie Quotidienne
(17 mars 2011)
►
Lire aussi
: La nature
aux soins intensifs
Il a niché près de chez vous
Grâce à
un gigantesque effort de prospection du territoire, la connaissance des
oiseaux en Wallonie n'a jamais été aussi précise qu'aujourd'hui. Un ouvrage
de très bonne tenue compile des milliers d'informations. Un appel à mieux
protéger les milieux qui accueillent les espèces de nos villes et campagnes.
|
©
Philippe Vanmeerbeeck |
La publication de l'Atlas des oiseaux nicheurs de Wallonie est un événement
pour tous ceux qui, de près ou de loin, amateurs occasionnels ou
indécrottables passionnés, s'intéressent à ce qui porte bec et plumes.
D'abord parce que ce livre était attendu depuis très longtemps, l'exercice
précédent (le seul du genre) remontant à près de trente ans. Ensuite parce
que ce genre d'ouvrage se distingue de la flopée permanente de “beaux
livres” consacrés à la nature et ses hôtes.
Décliné sur près de 500
pages, le présent ouvrage n'est pas destiné prioritairement à “faire joli” à
propos d'un monde qui s'y prête pourtant à merveille, mais bien à fournir un
maximum d'informations chiffrées et qualitatives sur le statut des 173
espèces nichant au Sud du pays. Sa prouesse est d'y arriver haut la main,
sans avoir négligé pour autant le plaisir de la consultation. A ce titre, il
plaira autant à celui qui se contente d'observer quelques mésanges
charbonnières dans son jardin qu'à celui qui s'inquiète du déclin du bruant
proyer (un oiseau au plumage totalement insignifiant) dans les plaines
limoneuses ou à celui qui veut à tout prix découvrir le premier nid de grues
cendrées en Wallonie (une espèce prestigieuse dont la reproduction, jugée
impensable chez nous pendant tout le vingtième siècle, devient de plus en
plus plausible).
A chacun
sa carte
Fruit de sept années de
prospections systématiques du territoire wallon par plusieurs centaines
d'observateurs, l'Atlas des oiseaux nicheurs donne, pour chacun d'eux, deux
-voire trois- cartes du territoire wallon, découpées en 514 mini territoires
de 8x5 kilomètres. Grâce à un jeu de couleurs et de symboles assez
accessibles, il livre des informations précises sur le nombre de couples
d'oiseaux présents dans les 5 grandes écorégions wallonnes (Région
limoneuse, Condroz, Fagne Famenne, Ardenne, Lorraine) et sur l'évolution des
populations enregistrée depuis le premier atlas. Chaque espèce a droit à
deux pages de format A4 et fait l'objet de commentaires sur sa répartition,
son effectif, son habitat et son évolution. Il est donc possible, en un
simple coup d'œil, de se faire une idée du caractère banal, répandu ou
exceptionnel d'une observation d'oiseau, quel que soit l'endroit prospecté
en Wallonie. De retour chez soi, du moins, puisque l'ouvrage, fort de ses
2,5 kilos, n'a rien d'un guide de terrain…
Si les cartes et les
informations sur chaque espèce constituent le cœur de l'ouvrage, celui-ci
n'en compte pas moins quelques informations plus générales sur les
différentes sous-régions naturelles du pays, sur l'occupation par les
oiseaux des milieux construits par l'homme (y compris les friches
industrielles) et, bien évidemment, sur l'évolution de l'habitat wallon,
frappé par diverses formes de destruction et de banalisation.
Retours
et déclins
Il y aurait, en
Wallonie, de l'ordre de 2,8 millions de couples d'oiseaux indigènes
nicheurs, soit 166 couples par kilomètre carré. Au rayon des espèces en
déclin, on citera – parmi d'autres – la perdrix grise, l'alouette des
champs, la tourterelle des bois et le moineau friquet. Au rayon des grands
retours après une longue absence: le hibou grand duc, le faucon pèlerin, le
grand corbeau et le busard cendré. Quasiment condamnés à court terme ou très
menacés, par contre: le tétras-lyre (le prestigieux coq de bruyères), la
sarcelle d’été, et la bécassine des marais. Très globalement, la proportion
d'espèces wallonnes en danger reste stable depuis treize ans. Mais, plus que
jamais, les sites peu ou prou protégés (réserves naturelles et autres
“Natura 2000”) jouent un indispensable rôle de refuge contre diverses formes
de déprédation, particulièrement dans les campagnes à haute pression
agro-industrielle.
// Ph.L.
>> L'Atlas des oiseaux
nicheurs de Wallonie
est le
résultat d'un partenariat entre le Service Public de Wallonie et
l'association Aves/Natagora. Il compte près de 450 cartes et plus de 500
photos. Il est disponible au prix plein de 39,90 euros à la Boutique verte,
3 rue Fusch à Liège et dans d'autres villes (infos: 04/250 95 90 ou
www.aves.be ). Commandes possibles via
boutique-verte@natagora.be.
Cet ouvrage fait suite aux atlas consacrés aux reptiles et amphibiens,
orchidées, papillons de jour et libellules.
Le retour du titan |
|
© Jardin botanique |
“Aujourd'hui, rien ne se passera. C'est peut-être pour demain…
La base grossit, mais la taille n'augmente plus. Vous savez, tout
ralentit, puis se déclenche très vite…. A ce moment, il ne faut plus
traîner…” Il faut les entendre parler de leur protégée, les
responsables du Jardin botanique national de Belgique, à Meise! Un
véritable accouchement… Point de bébé à l'arrivée, pourtant. Ni de
gynéco dans les parages. Juste des botanistes, penchés sur l'Arum
titan, une plante énorme dont la fleur - ils attendaient une
nouvelle efflorescence depuis 2008 - serait la plus grande du monde:
plus de deux mètres ce printemps-ci, à Meise...
Ce “monstre”
floral est peut-être encore visible, en ce moment, au Jardin
botanique. Attention: la floraison dure trois jours, pas un de plus!
C'est pourquoi, avant de filer l'admirer, mieux vaut consulter
www.jardinbotanique.be.
Pour le voir à l'état sauvage, il faudra en effet arpenter les
forêts de… Sumatra (Indonésie) où l'Arum se raréfie au même rythme
que les forêts et les orangs outans. Quant aux jardins botaniques
qui disposent d'un exemplaire de l'Arum en fleur, ils sont
rarissimes dans le monde.
Si
l'efflorescence est terminée à Meise, inutile de se lamenter. Un
détour par les serres du Jardin (situées à 3 kilomètres de
l'Atomium, à Bruxelles) permettra de toute façon de s'informer sur
les “mœurs” étranges de l'Arum. Son mode de reproduction est basé
sur la… puanteur. Celle-ci attire les insectes qui, par la suite,
jouent à merveille leur rôle de pollinisateurs. Tout cela est
expliqué sur place en long et en large, y compris la traduction
française d'Amorphophallus titanum: pénis titanesque déformé. Mais
quel programme!
(1) Parmi les multiples activités à venir
du Jardin botanique, signalons une promenade parmi les magnolias du
1er au 30 avril. Prix: 5 EUR. Rens. 02/260.09.70 –
www.jardinbotanique.be
|
Le
jeu des trois devinettes |
Dur, dur,
l'hiver dernier. Des oiseaux comme le merle, le rouge-gorge et la
grive musicienne ont été en difficulté, probablement à cause de
l'indisponibilité de nourriture pendant les épisodes les plus
froids. On en a moins compté que l'année dernière dans les jardins.
Les pinsons, eux, n'ont jamais été aussi nombreux, au point que la
différence entre les deux espèces (l'une sédentaire, l'autre venue
du nord) a pu être observée par un grand nombre d'observateurs. La
tourterelle turque continue à battre de l'aile.
Voilà le genre
de bilan qui découle de l'opération “Devine qui vient manger chez
nous aujourd'hui”, montée par Natagora. Le principe: un weekend
par an, chaque observateur en herbe est invité à identifier et
compter les oiseaux qui fréquentent son jardin ou un coin de verdure
proche. Février est une bonne époque: en l'absence de végétation,
les hôtes à plumes sont aisés à déceler. Loupé le rendez-vous, cette
année? Pas grave… Une opération du même genre aura lieu pour les
hirondelles les 18 et 26 juin prochains et, pour les papillons, les
6 et 7 août. Amusant et instructif: une fois les résultats encodés,
chacun peut consulter, sur le site de Natagora
(1), le nombre exact d'oiseaux
repérés dans sa commune. Et, éventuellement, s'investir davantage
dans l'association. |
Ce genre d'opération ne se veut pas vraiment scientifique, mais
plutôt didactique et ludique. Etalée sur plusieurs années, elle peut
toutefois contribuer à donner un aperçu de l'évolution des
populations d'oiseaux les plus communs. Or ceux-ci sont des
indicateurs intéressants de l'état des milieux naturels, notamment.
Bien médiatisées, de telles initiatives amènent le public vers
d'autres formes d'intérêt pour l'avifaune: participation à des
excursions, construction de nichoirs, organisations de jeux ou de
classes vertes... Elles le poussent aussi à s'interroger sur
l'impact des comportements sur une nature de plus en plus corsetée,
maîtrisée, maltraitée: usage de pesticides au jardin, exigence
d'infrastructures routières plus nombreuses, achat de plantes
exotiques invasives, utilisation de comprimés anti-limace, etc.
(1)
www.natagora.be
|
|