Maladies
(20 septembre 2007)
Mieux
comprendre
l’alcoolisme
Pour bon
nombre de médecins, la maladie alcoolique est une des pires maladies à
traiter. La dépendance alcoolique s’apparente, en effet, à une spirale
infernale de laquelle il est très difficile de sortir. Par le biais du
co-alcoolisme, l’entourage contribue souvent, sans en avoir conscience, à
maintenir l’alcoolodépendant dans son état.
Si
la consommation d’alcool est souvent synonyme de convivialité, de plaisir
et de liberté, elle se révèle aussi être une véritable maladie de société.
«Il existe une culture de l’alcool et une banalisation du produit, affirme
Nathalie Ehrhardt, psychiatre au CHC clinique Saint-Vincent de Rocourt.
Dans certaines familles, on boit de l’alcool pour se désaltérer. Et chez
de très nombreuses personnes, la prise d’alcool est, avant tout, un mode
de fonctionnement qui aide à faire face aux problèmes de la vie
quotidienne. Cependant, la consommation d’alcool n’est pas un acte banal.»
La
spirale de la
dépendance
Ce qui fait l’attrait de
l’alcool, c’est qu’il agit sur le système nerveux. A faible dose, il
permet de se détendre, soulage temporairement les angoisses, anesthésie
les émotions, lève les inhibitions, donne de l’assurance, comble le
sentiment de vide. Mais nous ne sommes pas tous égaux devant l’alcool et
en abuser peut mener à la dépendance. Comme l’explique Benoît
Troisfontaines, médecin chef du Service de psychiatrie au CHC clinique
Saint-Vincent de Rocourt et spécialisé dans les pathologies liées à
l’alcool, «La dépendance à l’alcool s’installe progressivement, en
fonction de la sensibilité du sujet et se caractérise par une perte de
liberté par rapport à une consommation qui ne peut plus être maîtrisée.
Lorsque la personne dépendante arrête de boire, elle souffre d’un réel
manque car son organisme ne sait plus fonctionner sans alcool. Boire
devient alors une activité importante qui monopolise chaque instant de la
vie.»
L’alcoolisme : une
maladie familiale
Sans en être conscient,
l’entourage développe souvent des attitudes qui maintiennent l’alcoolique
dans son problème, par exemple en lui fournissant des boissons
alcoolisées, en le protégeant des conséquences néfastes de son
comportement, en cachant ou niant son problème. Cela s’appelle le
co-alcoolisme. «Le problème de l’alcoolisme et du co-alcoolisme
s’installe de façon très insidieuse, observe Raymond Gueibe,
alcoologue et psychiatre de liaison à la clinique Saint-Pierre
d’Ottignies. Dans un premier temps, la famille ne perçoit pas ou doute
qu’il y ait un problème. Lorsqu’elle devient consciente du problème
d’alcool d’un des siens et le lui fait remarquer, la personne dépendante
se défend alors de trop boire, et va boire en cachette. Très souvent, les
proches de l’alcoolique cachent le problème vis-à-vis de l’extérieur afin
de protéger la famille. Dans un deuxième temps, la famille va essayer
d’aider l’alcoolique à ne plus boire en le surveillant, en supprimant
l’alcool de la maison. Au fil du temps, la famille s’épuise dans le besoin
de contrôler l’alcoolique et de le protéger. De son côté,
l’alcoolodépendant est dans le déni et culpabilise son entourage en
attribuant son problème aux autres. Dans ce contexte, il n’est pas rare
que des violences familiales apparaissent. Le conjoint (bien souvent
l’épouse) et les enfants en arrivent à se sentir coupables et responsables
du problème. La souffrance des enfants et des adolescents est profonde,
d’autant plus qu’ils ont le sentiment d’être seuls à vivre cette
situation, qu’ils croient par ailleurs avoir provoquée, et s’enferment
dans le silence.»
Le co-alcoolisme existe aussi
sur le lieu du travail. Lorsque, par exemple, un collègue expédie les
tâches de l’alcoolique ou que le chef de bureau ferme les yeux sur ses
retards et erreurs répétitives, on parle de co-alcoolisme.
Guérir
l’alcoolismePour les spécialistes du
problème alcoolique, il n’y a pas de secret : en croyant bien faire, en
réparant les pots cassés, en protégeant l’alcoolique des effets néfastes
de sa consommation, la famille retarde le moment d’une prise de conscience
nécessaire pour qu’il cesse de boire. Cette “complicité” n’est pas tenable
à long terme pour le co-alcoolique et ne fait que conforter
l’alcoolodépendant dans sa situation. Même s’il s’agit d’une vérité
difficile à accepter pour l’entourage proche, seule la personne alcoolique
peut décider d’arrêter de boire. Minimiser les choses ne résout rien. Il
faut aborder le problème directement en mettant l’alcoolique face à ses
responsabilités et en ne dissimulant pas ses erreurs, même si cela
engendre un conflit.
Le rétablissement d’un malade
alcoolique passe nécessairement par une prise de conscience de son état.
Bien souvent, cette prise de conscience se fait lorsque la personne a le
sentiment d’avoir touché le fond. Mais il vaut mieux éviter d’en arriver
là. Selon Benoît Troisfontaines, «Il est toujours possible de faire le
bilan de sa consommation personnelle d’alcool afin de se situer.
Lorsqu’une personne se rend compte qu’elle est en difficulté par rapport à
sa consommation d’alcool, le mieux qu’elle puisse faire, c’est de ne pas
rester seule avec cette difficulté, mais d’en parler au médecin traitant,
au médecin du travail, à des proches ou encore à des associations qui ont
fait leurs preuves, telles que les Alcooliques Anonymes ou Vie Libre».
Colette
Barbier
Où commence la consommation à risque? |
L’Organisation Mondiale
de la Santé (OMS) a établi des limites maximales recommandées pour
une consommation d’alcool à moindre risque. Les limites à ne pas
dépasser chez les adultes, pour une consommation régulière, sont de
14 verres par semaine pour les femmes et 21 verres pour les hommes,
avec au moins un jour sans alcool sur la semaine. Pour une
consommation occasionnelle, il ne faut pas absorber plus de quatre
verres d’alcool en une seule occasion. L’OMS insiste bien sur le
fait que la tolérance et la vulnérabilité à l’alcool sont propres à
chaque individu. Certaines personnes peuvent développer des
pathologies en ingérant des quantités inférieures à celles décrites
ci-dessus.
>
Source : Enquête de Santé par Interview, Belgique, 2004. Service
d’Epidémiologie, 2006, Bruxelles. Institut Scientifique de Santé
Publique. |
Le
soutien des mouvements d’entraide
L’expérience
montre que le suivi idéal d’un patient souffrant de dépendance alcoolique
passe par un sevrage sous surveillance médicale, une psychothérapie et la
participation aux réunions organisées par les mouvements d’entraide.
u
Les Alcooliques Anonymes
sont une association d’hommes et de femmes qui partagent entre eux leur
expérience, leur force et leur espoir dans le but de résoudre leur
problème commun, et d’aider d’autres alcooliques à s’en sortir et à se
rétablir. La seule condition requise pour être membre des AA est un désir
sincère d’arrêter de boire. La justification et la négation faisant partie
intégrante de l’alcoolisme, les membres AA qui ont dépassé cette
résistance et accepté de faire face aux conséquences de leur alcoolisme,
sont particulièrement qualifiés pour en aider d’autres à surmonter cet
obstacle.
Conscients qu’il ne suffit
pas de s’abstenir de toucher à la bouteille pour en être libéré, les AA
proposent un nouveau mode de vie permettant de chasser l’obsession de
boire, tout en apprenant à mener une vie heureuse et pleine de (bon) sens.
Pour ce faire, le programme des AA se base sur l’étude et l’application
dans la vie de tous les jours des “12 étapes”, la première étape
consistant à se reconnaître alcoolique et impuissant devant l’alcool.
u
Le mouvement Al-Anon
offre une aide précieuse aux personnes affectées par la consommation
d’alcool d’un proche, en leur proposant d’apprendre à vivre autrement avec
une personne alcoolique, que celle-ci décide ou non d’arrêter de boire.
u
Alateen est une section
d’Al-Anon et est destinée aux enfants et aux adolescents.
u
“Vie
Libre”
a pour but d’accompagner les alcooliques dans leur
rétablissement, tout en étant ouvert à l’ensemble de la famille de
l’alcoolique.
Infos:
•
Alcooliques Anonymes
Tél. : 02/511.40.30.
bsg@alcooliquesanonymes.be
www.alcooliquesanonymes.be
•
Al-Anon et Alateen - Tél. : 02/216.09.08. -
info@alanonbefr.be
www.alanonbefr.be
• Vie
Libre - Tél. : 061/41.45.09.
vielibre@scarlet.be
www.vielibre.be
Test
: l’alcool vous pose-t-il
problème?
Les Alcooliques
Anonymes proposent un test en 12 questions qui permettent de
réaliser dans quelle mesure la consommation personnelle d’alcool
pose problème ou pas. 4 réponses positives indiquent un problème
avec l’alcool. |
1. Avez-vous déjà résolu d’arrêter de boire pendant une
semaine ou deux, sans pouvoir tenir plus de quelques jours ?
2. Aimeriez-vous que les gens se mêlent de leurs affaires
concernant votre façon de boire, qu’ils cessent de vous dire ce que
vous devez faire ?
3. Avez-vous déjà changé de sorte de boisson dans
l’espoir d’éviter de vous enivrer ?
4. Vous est-il arrivé, au cours de la dernière année, de
devoir prendre un verre le matin pour pouvoir vous lever ?
5. Enviez-vous les gens qui peuvent boire sans
s’occasionner des problèmes ?
6. Avez-vous connu des problèmes liés à votre
consommation d’alcool au cours de la dernière année ?
7. Votre façon de boire a-t-elle causé des problèmes à la
maison ? |
8. Vous arrive-t-il, lors d’une
soirée, d’essayer d’obtenir des consommations supplémentaires parce
qu’on ne vous en donne pas suffisamment ?
9. Vous dites-vous que vous
pouvez cesser de boire n’importe quand, même si vous continuez à
vous enivrer malgré vous ?
10. Avez-vous des trous de mémoire ?
11. Avez-vous manqué des journées de travail ou d’école à
cause de l’alcool ?
12. Avez-vous déjà eu l’impression que la vie serait plus
belle si vous ne buviez pas ? |
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