Maladies
(19 janvier 2012)
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Migraine, ça cogite !
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Reporters-BSIP |
Maux de tête caractéristiques, les migraines
sont des douleurs complexes, difficiles à cerner et à traiter. Pas
question, cependant, de se résoudre à la fatalité, même si trouver les
traitements ad hoc s’apparente à une longue exploration. Des chercheurs
continuent de s’intéresser à la problématique. Ils demandent la
collaboration des premiers concernés.
Souffrir de migraine
n’est pas anodin. Même si certains s'en accommodent.
Sans doute devrions- nous dire certaines car ce mal touche trois fois
plus de femmes que d'hommes – en raison du caractère hormonal de
certaines migraines. Certaines donc tentent de vivre avec, bricolent des
solutions pour tenter d'en réduire l'impact sur la vie quotidienne. La
migraine peut être très invalidante. Outre la douleur, les nausées et
autres troubles physiques qu'elle génère, les soignants en constatent
des impacts dans la vie des personnes. Les migraines peuvent être la
source de conflits de couple ou familiaux face à un mal qui demande
souvent de s'isoler, de se retirer du bruit du monde – il n'est agréable
pour personne d'annuler en dernière minute la soirée prévue. Elles
peuvent engendrer des difficultés professionnelles lorsqu’elles
empêchent parfois littéralement la personne qui en souffre d'assurer la
moindre tâche, et peuvent provoquer des absences régulières. Elles
génèrent du stress lié à l'angoisse de voir surgir une crise de
migraine… Ce n'est évidemment jamais le moment. Des recherches
scientifiques mettent en évidence les relations entre migraine et
anxiété, d’une part, et migraine et dépression, d’autre part. Si les
liens de cause à effet ne sont pas établis, des facteurs de risques
communs sont observés: un migraineux sur quatre serait concerné par la
dépression ou l'anxiété. C'est dire la détresse émotionnelle qui
accompagne ces maux de tête.
Dans la malette des soignants, au premier plan
desquels on trouve les médecins généralistes, il n'y a pas de recettes.
Et le chemin du traitement comprendra essais et erreurs. La première
étape consistant à poser un diagnostic. Car sur le terrain des maux de
tête, tout n'est pas migraine.
Migraine, céphalée ou névralgie
En effet, chaque mal de tête n'est pas signe de
migraine. Nous avons sans doute tendance à utiliser ce mot d’une manière
abusive à l'apparition d'un mal de crâne. Afin d’assurer des soins
adéquats, établir un dépistage peut être précieux. Car les douleurs
recouvrent des situations très différentes, qui répondent à des
traitements spécifiques. Le corps médical parle de diagnostic
différentiel. Des questionnaires relativement simples permettent de
donner une première idée du type de mal de tête dont on souffre. Les
critères établis par l’IHS (International Headache Society) permettent
d’identifier migraine et aura. Autrefois, on parlait de “migraine
accompagnée” pour désigner ce que l’on nomme aujourd’hui des “migraines
avec aura”, c’est-à-dire des troubles de la vue, des engourdissements
voire des difficultés à parler qui surviennent bien souvent avant la
crise de migraine.
Les maux de tête peuvent aussi être signes de
névralgies ou de céphalées de tension par exemple. On quitte alors le
champ de la migraine à proprement parler, les symptômes diffèrent, les
traitements aussi. Les céphalées de tensions se traduisent par une
sensation d’étau ou de barre et peuvent durer de quelques heures à
quelques jours. Les céphalées dites symptomatiques sont, elles, la
manifestation d’une autre maladie ou d’un autre trouble, comme un signal
d’alarme. Quant aux névralgies faciales, elles se manifestent par des
sortes de décharges électriques, provoquées par l’irritation ou la
lésion d’un nerf sensible.
Traitements sur la bonne voie
L’efficacité des traitements de la migraine repose en
grande partie sur les informations observées par le patient. Les notes
récoltées au fil des jours forment un agenda précieux, riche
d’enseignements pour préciser le diagnostic et envisager les types de
soins. Identifier les facteurs déclenchants propres à la personne
permettra de réduire les fréquences d'apparition, d'en diminuer
l'intensité et la durée. L'un devra être attentif aux changements de
rythme dans sa vie, car des circonstances plus spéciales comme le début
des vacances, un manque de sommeil… sont autant de facteurs de risque.
L'autre devra veiller à ses habitudes alimentaires, à sa consommation
d'alcool… Evidemment, sur certains facteurs notamment hormonaux, on a
peu de prise, le premier conseil étant généralement d’aborder les crises
de migraine le plus sereinement possible. Des traitements de fond
tenteront de renforcer le seuil de sensibilité, tandis que les
traitements médicamenteux anti-douleur viendront souvent tenter de
soulager la crise annoncée.
Mais attention au fameux effet rebond, qui entraîne la
réapparition ou l'aggravation des symptômes à l'arrêt d'un traitement,
ou aux solutions miracles, fort coûteuses et miroirs aux alouettes. En
la matière, trop de migraineux ne consultent jamais un médecin et
pratiquent l'automédication avec tous les dangers que cela représente.
L'abus de médicaments guette aussi. “Si, de crise en crise, la
consommation d'antalgiques augmente, un fond douloureux quasi permanent
s'installe et les médicaments agissent moins longtemps, pour des doses
croissantes. Tous les antalgiques sont concernés, aspirine comme
paracétamol, et plus encore en cas d'association avec de la caféine ou
de la codéine”, explique simplement l'article “la spirale
infernale” paru dans le magazine Equilibre, en avril 2011. Traiter ces
abus compte parmi les défis présentés aux soignants en matière de
migraine, indique Patrice Laloux, neurologue aux CHU Mont Godinne. Comme
le renforcement de “l'arsenal thérapeutique encore trop pauvre”.
Les recherches se poursuivent. Elles tentent notamment
de comprendre comment et pourquoi certaines personnes migraineuses sont
plus réceptives à tel ou tel traitement. Elles explorent également la
nébuleuse des facteurs déclenchants, de même que les répercussions
psychologiques (lire encart ci-contre). Nombre de personnes migraineuses
affirmeraient que l'on ne peut rien pour elles. Pourtant, sans leur
collaboration – et celle de ceux qui expérimentent ces maux –, la
recherche ne peut rien.
// CATHERINE DALOZE
Soufrez-vous de
migraine? |
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Critère 1 |
Sans traitement, les
crises durent-elles de quatre heures à
trois jours? |
oui/non |
Critère 2 |
Votre céphalée
a-t-elle au moins deux caractéristiques
suivantes?
> Elle touche un côté du crâne.
> Elle est pulsatile (comme des
battements de cœur).
> Elle est d’intensité suffisamment
importante pour retentir sur vos
activités.
> Elle s’aggrave lors d’activités de
routine telles que la montée ou la
descente des escaliers. |
oui/non |
Critère 3 |
> Des vomissements ou
une envie de vomir (nausées).
> Une intolérance à la lumière et au
bruit (photophobie et phonophobie) |
oui/non |
Migraineux certain :
si vous répondez oui aux trois questions ci-dessus et si vos maux de
tête ne sont pas en rapport avec un traumatisme crânien ou une lésion.
Migraineux probable : s’il
manque un des trois critères. Votre médecin devra confirmer le
diagnostic.
Etude en
cours à l’UCL |
Une
recherche ayant trait aux
migraines est actuellement
menée à l’UCL, au sein du
Centre de recherche en santé
et développement
psychologique (CSDP). Sous
la supervision du Professeur
Moïra Mikolajczak, Stéphanie
Miliche, doctorante en
psychologie, explore le
sujet dans le but
d’améliorer la prise en
charge des personnes
confrontées aux migraines.
Dans un premier temps, il
s’agit de mieux comprendre
les migraines, ses facteurs déclenchants et son impact,
notamment en termes psychologiques. Une
fois analysées, les données de cette
première étude exploratoire serviront à
mettre en place des interventions auprès
des patients malades. Ces interventions
tenteront de fournir aux patients des
outils en complément des traitements
déjà existants, afin d’aider dans la
gestion des migraines. Que ce soit
préventivement ou une fois la crise
migraineuse déclarée.
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