Cinéma (
6 octobre 2011)
La fée
Une histoire d'amour et de fée, un conte burlesque et loufoque,
d'une poésie fulgurante.
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©
Laurent Thurin-Nal |
Elle
s'appelle Fiona et a de superbes cheveux roux.
Pour le reste, c'est moins glamour : pieds nus un peu sales et jogging rose.
Pourtant Fiona est une fée, une vraie, quoiqu'aux pouvoirs un peu limités,
comme on le verra... Lorsqu'elle propose à Dom, portier de nuit à l’Hôtel de
la rue des Amoureux d’exaucer trois vœux, tout ce qui lui vient à l'esprit,
c'est un scooter et l'essence gratuite à vie. Pour le troisième, il ne sait
pas. “Prends ton temps” lui conseille la fée bien avisée... Le lendemain, le
scooter est là, dans le hall de l’hôtel, mais Fiona a disparu...
Il était une fois, dans un passé pas si lointain, un genre de film dans
lequel on voyait arriver les gags de très loin. C'était un gros plan
insistant sur le seau d’eau au-dessus de la porte ou sur la plaque d'égout
grande ouverte, et l'anticipation participait pleinement du plaisir.
Il en va un peu de même dans ce film un brin vieillot, hors du temps
en tout cas. Les images sont fixes, les plans très longs et les trucages
sentent bon l'encaustique. L'évidence est mise sur les corps, dégingandés et
élégants, des comédiens. La parole est rare, comme un cartouche de film
muet. “Notre cinéma est souvent qualifié de ‘burlesque poétique’. J’aime
beaucoup cette expression”, explique le Français Bruno Romy, un des
trois réalisateurs-comédiens, avec le Belge Dominique Abel et la Canadienne
Fiona Gordon. “Elle fait penser au ‘réalisme poétique’ cher au duo
Carné-Prévert. Le burlesque, c’est le désir de faire rire les spectateurs
avec des images, des cadres, des corps, des couleurs, des sons, des décors,
avec tous les outils que nous offre le cinéma. Plus les situations des héros
sont tragiques, plus il y a de matière burlesque”.
Un peu comme une histoire qui commencerait par la fin, les trois films
actuellement à l'actif du trio sont construits autour du couple formé par
Dominique et Fiona : L’Iceberg, en 2005, chroniquait leur rupture
et leurs retrouvailles, Rumba en 2007, les saisissait dans un état
de plénitude, contrarié par la malchance, alors que La Fée nous
détaille leur rencontre. Il sera également question d'un Anglais cleptomane
et de son chien-sacoche, d'un barman myope et ses Dieselles, de flics pas
finauds et de clandestins en errance, dans une ville totalement cinégénique,
Le Havre, qui inspira Jacques Tati ou Aki Kaurismaki(1). On reste en bonne
compagnie...
// Linda Léonard
(1) “Mon Oncle”, “Playtime”, de Jacques Tati, et “Le Havre”, de Aki
Kaurismaki, dont la sortie est prévue en décembre.
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La Fée,
de et avec Fiona Gordon, Dominique Abel et Bruno Romy
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1h34
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