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Éditorial (7 novembre 2013)

Alda Greoli
//Secrétaire nationale
© A-M Jadoul
Et si on réduisait les charges salariales ?

Le discours est connu : les salaires en Belgique ne permettent pas la relance de l’économie, les charges salariales freinent l’embauche, elles briment l’initiative et l’investissement ; il serait temps de mettre en place les conditions de la relance, de la compétitivité et de l’espoir de la croissance! Mais encore…

Si les paramètres ne changent pas, si nous ne réfléchissons pas à plus d’une échéance électorale, alors toutes les conditions seront réunies pour ne plus permettre aux générations futures les rêves sociaux et économiques de leurs grands parents. La génération du plein emploi a combiné les acquis de ses parents au travers de la sécurité sociale (allocations familiales, indemnités de chômage, soins de santé couverts par l’assurance obligatoire, pensions légales…) et les acquis de négociations salariales sectorielles qui permettent les assurances groupes, les voitures de société… Mais, soyons honnêtes, cette génération a sans doute trop délaissé l’avenir, s’inquiétant peu d’être prévoyante. Or, il est temps de s’interroger sur la capacité de notre système à se reproduire pour plus d’une génération. Le boom des pensions nous le rappellera amèrement, si nous ne prenons pas les mesures nécessaires. Il ne suffit pas de dire que notre système de soins de santé, de sécurité sociale est un vrai bijou, unique au monde. Encore faut-il oser nous interroger pour savoir ce que nous sommes prêts à mettre en place pour sauvegarder ce trésor.

Les employeurs et représentants des travailleurs sont d’accord: la sécurité sociale donne les conditions de la cohésion sociale et de la paix sociale. Elle lutte contre la peur du lendemain. Plusieurs analyses internationales montrent d’ailleurs que la cohésion sociale produit les meilleures conditions du développement durable d’une société.

La tendance actuelle va pourtant vers l’affaiblissement de la cohésion sociale. Pour favoriser la reprise économique, c’est facile : on diminue les cotisations sociales, les remboursements de soins de santé, on limite le chômage dans le temps, on demande au citoyen de s’organiser seul pour sa pension, on remet en place la lutte des classes. Et hop!, on réduit le rôle de l’Etat, on diminue ses dépenses et on gagne en compétitivité. Mais on perd sur toute la ligne de la cohésion sociale! Les riches sont plus riches. Les pauvres plus pauvres. Les inégalités se creusent, et la douleur sociale persiste!

Elargir l’assiette et simplifier les règles

Et si nous essayions de travailler sur d’autres variables? Les penseurs plus à gauche proposent notamment une piste : l’élargissement de l’assiette de la perception des contributions fiscales. Pourquoi certains revenus ou des avoirs échappent-ils à la solidarité? Il serait normal de taxer les revenus immobiliers ou les plus-values au même titre que le travail. Autre piste : simplifier les règles. Pourquoi les règles fiscales sont-elles à ce point compliquées que les mieux informés peuvent en profiter pendant que les autres ont l’impression de les subir? Simplifier au maximum les règles permettrait sans doute de mieux contrôler tous les acteurs du système. La clarté est source de démocratie. Il en va de même dans le fonctionnement de toute la sécurité sociale. Nous avons au fil du temps tellement ajouté des statuts et des particularités qu’il est parfois impossible de savoir comment appliquer certaines dispositions. Quand l’opacité règne, le contrôle devient impossible, l’accès au droit difficile et la suspicion d’un monde de fraude fait le lit de discours populistes.

Changer la donne

Les charges salariales, les cotisations sociales… ont la réputation d’être pesantes. Mais prenons l’exemple des avantages extra légaux pour tenter de réfléchir autrement. Les avantages extra légaux sont constitués principalement par les assurances groupe pension, les assurances collectives hospitalisation et, bien sûr, les voitures de société. Ces “cadeaux” participent à biaiser le marché de l’emploi entre les secteurs capables de les offrir et les autres. Les employeurs qui “offrent” des assurances groupe pension et des assurances hospitalisation cotisent pour un montant de plus d’un milliard en faveur de ces deux avantages. Si on additionne les assurances hospitalisation payées par les citoyens à titre privé et celles payées de manière collective par les employeurs , on aboutit à un montant de 1,3 milliard d’euros par an, dont plus de 600 millions versés par le patronat. Pourtant, il ne faudrait que 200 millions pour garantir des factures d’ hospitalisation en chambre à deux lits ne dépassant jamais 200 euros. Si on voulait aller plus loin en limitant la facture dans tous les cas à 50 euros, il faudrait financer l’assurance obligatoire d’un peu moins de 400 millions d’euros supplémentaires.

Rien que dans le domaine des assurances hospitalisation contractées par les employeurs et par les citoyens, il y a un potentiel financier de plus d’un milliard d’euros d’économies. Alors, pourquoi ne pas envisager de consolider la cohésion sociale? Avec 200 ou 400 millions d’euros injectés dans un juste financement des hôpitaux, on pourrait offrir davantage de garanties aux patients, une meilleure accessibilité aux soins pour l’ensemble des citoyens.

En outre, la garantie tarifaire permet de lutter efficacement contre la marchandisation des soins de santé, la dérégulation des honoraires entre les spécialisations à l’intérieur de l’hôpital; elle garantit la bonne gouvernance des établissements. Un juste financement permet une politique de contrôle et de régulation plus forte dans l’intérêt du système. Permettre aux employeurs qui, aujourd’hui, paient plus de 600 millions pour ces assurances de ne plus le faire, voilà déjà une réduction de charge à ne pas négliger.

Les syndicats pourraient alors eux aussi revenir au juste combat sur les salaires qui produisent aussi de la sécurité sociale, loin de l’individualisation des couvertures toujours génératrices d’inégalité sociale.

L’idée peut sembler trop simple pour être vraie… Et si nous la mettions à l’épreuve des calculs de tous les interlocuteurs sociaux (patronats et syndicats) et des acteurs de soins de santé (fédérations hospitalières et mutualités) ? Et si nous mettions le résultat de nos études communes sur la table du gouvernement pour faire avancer ensemble la cohésion sociale, tout en rendant du pouvoir d’achat et en réduisant le coût des salaires? Réduire les “charges salariales”, c’est possible tout en renforçant notre sécurité sociale!

Alda Greoli//Secrétaire nationale

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