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Éditorial (3 octobre 2013)

Alda Greoli
//Secrétaire nationale
© A-M Jadoul
Transfert de compétences : la métaphore de l’alpiniste

Transférer des compétences du fédéral vers les Communautés nécessite que soient franchis plusieurs écueils. Il existe des sommets qui ne se grimpent pas les mains en poche et où tout écart de la voie principale risque de faire dévisser l’équipe entière. Ici, la population belge face aux risques couverts par la sécurité sociale.

Une fois l’accord fédéral signé en 2011, il s’agissait de se mettre d’accord sur le chemin, l’équipe des sherpas et la localisation du camp de base. Si on traduit ces notions dans le concret des matières, il fallait s’accorder au fédéral sur le contour des compétences transférées, sur l’organisation du transfert, sur les montants nécessaires à la réalisation de l’accord, sur la loi de financement pour déterminer la part qui irait vers la Flandre, vers Bruxelles, vers la Wallonie et vers la Communauté germanophone. Globalement, on parle d’une somme de près de 17 milliards d’euros, soit plus de 15 % du budget de la sécurité sociale. Dans ce paquet, 4,3 milliards concernent l’emploi, près de 6 milliards les allocations familiales, et plus de 4 milliards la santé.

Première ascension

Une première étape a été atteinte, avant les vacances de cet été. On n’avait jamais tenté cette paroi verticale que constitue le transfert de matières de sécurité sociale. Et on n’est certainement pas au bout de nos surprises sur ce terrain fragile, friable, dont les aspérités sont nombreuses et risquées. Le sommet est encore loin et les pentes raides. Grimper nécessite de respecter la nature du sol, les conditions atmosphériques, les milieux de vie traversés. La sécurité sociale est une région à hauts risques et à grande plus value de cohésion sociale ; on n’y jette pas impunément des “petites idées” trop rapides, sans conséquence pour la population.

Une commission dite Wallonie-Bruxelles composée de parlementaires a écouté de nombreux acteurs qui, jusqu’à présent, organisent les compétences, tels les mutualités, les fédérations patronales, les syndicats, mais aussi des associations, des acteurs sociaux et économiques. Cette commission a rendu son rapport à l’entame des beaux jours.

En parallèle, des discussions ont été engagées entre les présidents de quatre partis francophones (PS-MR-CDH et Ecolo) pour trouver un accord sur le modèle de gestion de ces nouvelles compétences. Il est essentiel de se rappeler qu’en dehors des matières d’emploi, toutes les compétences transférées auraient dû relever des Communautés et non des Régions. Les présidents de partis ont pourtant très rapidement considéré que les gouvernements et parlements régionaux détermineraient les politiques - sauf pour la Communauté germanophone qui reçoit systématiquement les compétences régionales ou communautaires. Sans faire de bruit, c’est sans doute cette Communauté qui, demain, aura le plus de matières à gérer…

A peine les compétences ont-elles été coupées en morceaux entre les Régions qu’il est apparu nécessaire de minimiser le risque d’incohérence voire le risque de compétition ou de concurrence sociale et économique entre les parties du pays. Pour exemple : une famille aura-t-elle intérêt à vivre dans telle ou telle région en fonction du montant des allocations familiales accordées ? Une infirmière en maison de repos aura-t-elle intérêt à déposer son CV à Gand, à Bruxelles ou à Arlon ou à Eupen ? D’autant que la négociation salariale a été, pour les domaines transférés, elle aussi régionalisée.

Il s’agissait donc d’aller mettre les coinceurs et pitons pour assurer les points de sécurité et ne pas laisser dévisser la sécurité sociale dans ses parts régionalisées, tandis que la qualité des cordes et des chaussons dépendra des acteurs autour de la table demain. Imprimer la manière dont il faut poursuivre les prochaines ascensions limitera sans aucun doute le risque de passer, au gré des majorités politiques, d’un type de grimpe à un autre, au mépris des acquis et de la cohésion sociale.

Une voie commune ?

Les présidents francophones sont donc tombés sur un accord ! A la lecture de celui-ci, deux attitudes sont possibles : soit on attend et on regarde s’ils ont bien choisi une seule et même voie et là, on risque des surprises, soit on lit l’accord de manière volontariste, persuadés qu’ils ont choisi une route commune vers le sommet.

Prenons cette version optimiste : ils ont pris la voie de la sagesse ! Conscients de l’importance du modèle social qui est le nôtre, ils ont assuré la poursuite de l’organisation de celui-ci. Ils ont donné aux partenaires sociaux leur juste et complète place. Ils ont permis la continuité de la gestion globale (enfin presque…) ; ils ont mis en place les lieux de négociations paritaires réels ; ils ont choisi de répartir les montants suivant les besoins des branches de la sécu (emploi, soins de santé, allocations familiales, …) ; ils ont conservé aux pouvoirs organisateurs, fédérations patronales de la santé et aux mutualités leur place dans la cogestion de la déclinaison de la santé… ; ils transformeront l’Awiph (Agence wallonne pour l’intégration de la personne handicapée) en un vrai organisme de gestion de la sécurité sociale plutôt que de le maintenir dans un statut hybride où le/la ministre a tout à dire… En bref, ils nous ont compris et nous les en remercions.

C’est la seule lecture que nous aurons de cet accord. Toute autre lecture s’apparenterait à une décomposition ou à une remise en cause de ce que les présidents de partis ont fièrement affirmé… Voyons dans l’accord la continuité de celui pris à Bruxelles avant l’été et qui organisait l’accueil des compétences sur le modèle fédéral. Présumons que les présidents de partis et leurs troupes auront le sens de la continuité de l’Etat et des acquis de la sécurité sociale. Mais cela ne suffira pas, il faudra que les partenaires sociaux, les partenaires sectoriels et en particulier de la santé prouvent eux aussi qu’ils peuvent construire et poursuivre demain le modèle social qui est le nôtre.

S’il n’est pas nécessaire d’espérer pour entreprendre, poursuivre l’escalade nécessitera que nous restions tous bien encordés. Sinon, ce sera le drapeau de la concurrence sociale, des inégalités et des difficultés budgétaires qui flottera au sommet des Etats wallons, bruxellois, flamands et germanophones repliés sur eux-mêmes !

Alda Greoli//Secrétaire nationale

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