Éditorial
(21 février 2013)
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Jean Hermesse
//Secrétaire général
© A-M Jadoul |
L'avenir de notre système de santé
Le système de santé belge est l’un des meilleurs au monde, rappelons-le. Il n’est cependant pas parfait et doit être adapté en permanence à l’évolution des besoins, des techniques et surtout des connaissances. Pour mieux orienter ces adaptations, il faut bien connaître ses points forts et ses points faibles. Ainsi, un rapport récent sur la performance du système de santé belge devrait inspirer les politiques pour l’avenir.
Le check-up de notre système de santé a été réalisé conjointement par le Centre fédéral d’expertise en soins de santé (KCE), l’Inami et l’Institut scientifique de la Santé publique(1). Il se base sur 74 indicateurs et les résultats obtenus ont été comparés à ceux de 15 pays de l’Union européenne. Les indicateurs portent sur l’état de santé de la population, l’accessibilité des soins, la qualité des soins, l’efficacité et la durabilité du système de santé, l’équité et enfin, sur la promotion de la santé. Globalement, la Belgique obtient un bon score mais une analyse détaillée permet d’identifier des aspects plus fragiles que d’autres, des points d’attention.
Les points forts...
L’espérance de vie en Belgique est plus élevée que pour la moyenne des Européens. De même, l’état de santé “perçu” par la population se révèle meilleur en Belgique que, globalement, au niveau européen. Le tabagisme est en baisse. La vaccination des enfants atteint de très bons taux. Les soins curatifs donnent de bons résultats en termes de traitements du cancer du sein et du cancer colorectal.
La qualité des soins apparaît élevée et le Belge semble entretenir avec son médecin généraliste une relation positive et inscrite dans la continuité. Le rapport indique également que davantage d’interventions s’inscrivent dans le cadre d’une hospitalisation de jour, que l’utilisation de médicaments moins chers est en hausse, qu’il n’y a pas ou peu de listes d’attente pour les soins. Globalement, les Belges se montrent satisfaits voire très satisfaits (plus de 90%) vis-à-vis du système de santé, bien plus que la moyenne européenne.
… et les points faibles
Aucun système de santé n’est parfait. Certains chiffres sur la santé des Belges sont interpellants. Nous connaissons le taux de suicide le plus élevé d’Europe. Le nombre de personnes en surpoids ou souffrant d’obésité est élevé. L’activité physique est relativement faible. Les taux de dépistage des cancers du sein et du col de l’utérus sont trop bas. Le rapport évoque aussi un nombre de prestations très élevé laissant supposer la pratique de soins inappropriés. Trop d’antibiotiques, trop de césariennes, trop de radiographies et donc une irradiation inutile, comptent parmi les constats négatifs.
Surtout, les écarts de santé entre les différentes catégories socio-économiques sont très marqués. Que ce soit en termes d’espérance de vie, de mortalité infantile, d’obésité, de tabagisme, d’activité physique, de support social…, les différences entre citoyens sont grandes. Et le rapport de préciser que ces écarts se révèlent également très importants entre les trois Régions du pays. Globalement, le nombre de ménages qui reportent des soins pour des raisons financières augmente tandis que la quote-part des dépenses à charge des patients s’élève à 19% du coût total, soit sensiblement au dessus de la moyenne européenne qui est de 15%.
Des recommandations pour l’avenir
L’analyse de ces indicateurs et leur comparaison avec d’autres voisins peuvent constituer une bonne boussole pour orienter la politique de santé.
Nous savons l’impact majeur sur la santé de facteurs comme l’enseignement, l’emploi, le logement, l’environnement, le revenu… Dans ces domaines, il faut également agir pour améliorer la santé des personnes. Si les inégalités socio-économiques s’accroissent de par les mesures d’austérité, les inégalités en termes de santé vont s’aggraver. En cette période difficile, il y a lieu de renforcer la cohésion sociale plutôt que de la détricoter.
L’accessibilité financière aux soins de santé s’est dégradée. La hausse des coûts à charge des patients a engendré des reports de soins. Et on constate que les assurances hospitalisation privées se développent. On assiste finalement à une privatisation larvée des soins de santé. L’avertissement est clair : il faut agir sur le coût à charge des patients, soit en diminuant et en régulant mieux certains prix, soit en remboursant mieux certains soins coûteux. Parallèlement, on peut agir sur la responsabilisation des prestataires de soins, en mettant en place d’autres techniques de financement moins inflationnistes, en favorisant l’autocontrôle basé sur les guides de bonnes pratiques.
Enfin, face à une première ligne de soins en danger, l’âge moyen des généralistes ne cessant d’augmenter, il s’agit de veiller à sa survie, à sa continuité et son développement. Or, en ce moment crucial, l’organisation de la première ligne va être communautarisée. Pour faire face à ce défi majeur en termes de pérennité du système, le modèle de gouvernance qui sera adopté par chaque Région pour les compétences transférées sera déterminant. S’il invite à la collaboration et à la complémentarité avec le niveau fédéral, on peut espérer relever le défi d’une première ligne de soins de proximité et accessible.
L’étude sur la performance du système de santé belge est emplie d’enseignements. Il appartient maintenant aux décideurs politiques de transformer ces résultats et signaux en actions politiques concrètes. Espérons que ce rapport ne restera pas dans un tiroir, mais guidera les décideurs politiques pour mener une politique de santé volontariste et pour l’améliorer.
(1) “La performance du système de santé belge”. Rapport 2012 – A lire sur
http://kce.fqov.be
Jean Hermesse//Secrétaire général
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