Éditorial
(15 janvier 2009)
Il
m’a semblé important de partager la place de l’édito avec un groupe de
signataires d’une carte blanche sur le Budget d’assistance personnelle.
Le
sujet de cette carte blanche est essentiel tout autant que la démarche des
signataires. Elle témoigne de la capacité à travailler ensemble,
bénéficiaires, utilisateurs, pouvoirs organisateurs, fédérations
représentatives, afin de définir des positions communes.
Alda
Greoli, Secrétaire nationale
Le BAP: bon à prendre?
Depuis
plusieurs années, le projet d’un Budget d’assistance personnelle (BAP) en
Région wallonne est l’objet de nombreux débats, questionnements, espoirs
mais aussi le lieu de confrontation entre différentes visions et enjeux de
la politique sociale concernant les personnes handicapées.
Aujourd’hui, il n’y a
plus de “trajet de vie-type” d’une personne handicapée. Tout comme les
besoins de n’importe quel citoyen, ceux des personnes handicapées se sont
diversifiés et s’expriment de plus en plus sur un mode individualisé. Ainsi,
si certaines personnes handicapées continuent à avoir besoin de structures
collectives qui leur sont spécialement dédicacées, d’autres revendiquent
d’autres chemins respectant mieux leur autonomie et leur choix de vie.
Très prochainement, un
arrêté sera adopté par le gouvernement wallon afin de mettre en place un
dispositif de BAP au sud du pays.
Un budget d’assistance
personnelle (BAP)?
Grâce à de nouveaux
moyens collectifs, le BAP, porté et soutenu par plusieurs associations de
personnes handicapées, veut permettre à la personne handicapée:
►
de se maintenir
dans son milieu de vie ordinaire le plus longtemps possible;
►
d’améliorer son
intégration dans la vie sociale au sens large par un dispositif souple et
adapté à ses besoins;
►
de renforcer son
implication et son pouvoir de décision quant aux solutions proposées;
►
de répondre à des
besoins d’assistance hautement personnalisés et non ou mal rencontrés
aujourd’hui.
Tout en respectant et en
soutenant davantage son entourage.
En Région wallonne?
Compte tenu des
expériences de BAP dans d’autres pays européens et en Flandre, deux options
sont possibles pour répondre aux attentes exprimées par les associations de
personnes handicapées.
Première option: le BAP
est un revenu. Nous devons alors être attentifs au transfert implicite de
compétences fédérales vers les Régions. L’ensemble des prestations qui
garantissent des revenus de remplacement dans notre système de protection
sociale relève de la solidarité fédérale. Au vu du contexte communautaire
actuel, les signataires estiment donc qu’une vigilance toute particulière
doit accompagner la mise en œuvre de ce dispositif de BAP en Région wallonne
pour éviter de fragiliser ces mécanismes fédéraux de protection sociale.
Seconde option: le BAP
est un droit de tirage pour des prestations relevant de services reconnus et
agréés. Comme il s’agit d’une matière qui relève de l’aide aux personnes,
c’est la Région wallonne qui est ici compétente. Afin de satisfaire aux
nombreuses demandes, des budgets suffisants doivent être prévus sans créer
de problèmes supplémentaires de financement des structures ou services
d’accueil, d’hébergement, d’accompagnement ou d’aides et de soins. Si les
moyens ne permettent pas de rencontrer l’ensemble des demandes, la question
de la sélection des bénéficiaires est posée: avec quels critères? Avec quels
risques de discrimination?
Si les auteurs de la
présente carte blanche se réjouissent du fait que l’on s’oriente davantage
vers la seconde option, il n’en reste pas moins des questions.
Un BAP,
mais encore?
Le projet de BAP en
Wallonie a permis de mettre en évidence certains besoins des personnes
handicapées non ou mal rencontrés aujourd’hui. Il réaffirme également la
nécessaire liberté de choix que devrait pouvoir avoir toute personne
handicapée.
Il a également permis de
questionner légitimement et de manière nécessaire le secteur associatif et
les structures d’accueil traditionnelles sur la manière dont elles peuvent
répondre aujourd’hui aux besoins évolutifs des personnes handicapées. Il n’y
pas de doute sur la complémentarité entre les réponses qu’apportent le BAP
et celles des structures d’accueil mais il s’agit d’une option parmi
d’autres possibles…
Les signataires
souhaitent réaffirmer cette complémentarité au service d’une diversité de
trajets de vie non linéaires qui souvent nécessitent le recours à plusieurs
formes de services tout au long de la vie.
Pistes à privilégier
Nous estimons dès lors
qu’il faut prioritairement poursuivre le renforcement des capacités des
services collectifs et des services d’aides et soins à domicile (associatifs
subventionnés et publics) afin qu’ils puissent apporter des réponses
souples, innovatrices et adaptées aux demandes légitimes des personnes
handicapées et de leurs familles. Concrètement, ce meilleur financement
devra permettre une souplesse plus grande dans les horaires, la réalisation
de nouvelles tâches, la rencontre de besoins d’accompagnement spécifiques et
adaptés à la personne, à son handicap et aux besoins de son entourage. Trop
souvent, ce n’est pas la bonne volonté des acteurs qui manque. Ce qui fait
défaut, c’est le manque de moyens financiers, les difficultés et
contraintes organisationnelles imposées par des carcans budgétaires et
administratifs étroits.
Dans ce cadre, nous
pensons également qu’il faut promouvoir les initiatives des services d’aide
à la vie journalière (1) en réfléchissant à un élargissement de leurs
missions, associé à un refinancement nécessaire.
Encourager les
solidarités familiales et de proximité est un autre angle d’approche que
nous estimons également important. Ainsi, la meilleure reconnaissance du
rôle des proches aidants et leur nécessaire soutien concret et direct
(moyens, accompagnement, répit…) sont aujourd’hui indispensables.
Enfin, nous estimons que
l’intérêt collectif de l’ensemble des personnes en situation de dépendance
doit prédominer et que ce n’est pas le budget qui doit être personnalisé
mais bien l’aide que la personne handicapée est en droit d’attendre pour
participer pleinement à la vie sociale, économique et culturelle.
(1)
Ces services fournissent à des personnes adultes handicapées physiques
graves un logement adapté et une assistance permanente destinée à pallier
leur incapacité fonctionnelle à accomplir les actes de la vie journalière
Signataires : Mutualité chrétienne, Altéo (Mouvement social de personnes
malades, valides et handicapées), Fédération nationale des associations
médico-sociales (FNAMS), Fédération des aides et soins à domicile (FASD),
Fédération des institutions et des services spécialisés d’aide aux adultes
et aux jeunes (FISSAAJ) |
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