Éditorial
(19 février 2009)
Le besoin d’accompagner
la fin de la vie
Dans
notre société occidentale, parler de la mort est devenu un sujet
particulièrement difficile. Parmi les explications: le fait que nous nions
bien souvent cette réalité intrinsèque à notre qualité d’être vivant et que
nous accordons trop peu d’espace et de temps à l’accompagnement de fin de
vie, puis du deuil. Pour celui qui va décéder comme pour ses proches, le
respect de la qualité de vie reste fondamental. Le refus de vieillir, de
surcroît, fait de ce thème un sujet tabou.
Il
est important de souligner que la question de la fin de vie ne concerne pas
uniquement l’accompagnement d’une personne âgée mais également celle d’un
enfant ou d’un jeune adulte. Les questions soulevées par l’accompagnement de
la fin de vie sont alors encore plus délicates. La réalité de la mort
devient plus révoltante et nécessite encore plus de qualités d’écoute, de
compréhension des acteurs professionnels.
Au delà, ou plutôt, à
côté de toute réflexion philosophique ou anthropologique, ce qui est de la
responsabilité d’une institution comme la Mutualité chrétienne ou la
Fédération des soins à domicile (FASD), c’est de réfléchir et de proposer à
nos membres des services et des réponses adéquats, afin de leur permettre de
vivre ces moments avec apaisement et la certitude confiante que ce qui peut
être pris en charge par d’autres le soit. L’utilité de notre présence est
qu’elle les autorise à se consacrer à l’essentiel: l’accompagnement de la
fin de vie d’un être cher.
Pour proposer des
réponses justes aux besoins, nous avons réalisé une étude sur la manière
dont se sont déroulées les dernières semaines de 41000 affiliés ainsi que le
vécu d’une centaine de leurs proches. Vous pourrez retrouver dans ce numéro
d’En Marche, en page 7, un article détaillé consacré aux constats de
l’étude.
Nous avons complété les
apports de cette recherche en organisant une journée de travail afin de
concrétiser les pistes qui se dégagent des témoignages.
Quel constat important
se dégage de cette étude ?
Il est essentiel d’offrir un soutien psychologique à ceux qui
accompagnent un mourant. |
Le souhait exprimé par
l’immense majorité des personnes est de décéder “à la maison”. Pourtant,
force est constater que la réalité est bien différente pour diverses
raisons.
1.
Un Belge sur deux
meurt à l'hôpital. L’étude de la Mutualité chrétienne montre que cette
hospitalisation a généralement lieu très peu de temps avant le décès.
2.
Les services
existants pour permettre un maintien à domicile dans de meilleures
conditions sont utilisés trop peu et souvent trop tard.
3.
Un obstacle
important pour débuter les soins palliatifs reste la difficulté de dialoguer
à propos du risque de l'imminence de la fin de vie. Des termes comme
“forfait palliatif” et “patient palliatif” sont sans doute des expressions
lourdement chargées d’émotion. Mais au-delà du choix des mots pour le dire,
c’est le nécessaire temps d’écoute et les indispensables formation et
soutien des équipes soignantes qu’il faut permettre et encourager.
Face à ces constats,
nous voulons faire des propositions.
1. Des informations adéquates au moment opportun.
Le non recours ou le
recours tardif aux aides existantes découle notamment du fait que les
personnes en fin de vie et leur entourage ne disposent pas toujours des
informations adéquates au moment opportun. Les attentes à l'égard du médecin
de famille sont très importantes. La disponibilité des équipes des
mutualités mais également des centres de coordination de soins à domicile
est essentielle. La collaboration de l’ensemble de ces acteurs est donc
indispensable dans l’intérêt des patients et de leur famille.
2. L’aspect financier peut freiner certaines catégories de la
population.
Lorsque le maintien au
domicile est encore possible ou a pu être organisé, il reste de nombreux
obstacles pour qu’il puisse se dérouler dans les meilleures conditions.
Certaines familles ou personnes ont des craintes quant au coût financier.
Les proches assurent
souvent eux-mêmes des services, des gardes de nuit, tout en continuant à
mener leur propre vie. Il est donc essentiel d’accompagner les aidants
proches en leur permettant des moments de répit, en leur offrant un soutien
psychologique, en les encadrant pour leur permettre de maintenir leur
proche à la maison le plus longtemps possible.
Il serait important de
pouvoir renforcer l’offre de services. Le nombre d’équipes reconnues en
soins palliatifs à domicile reste trop faible. Les équipes spécialisées dans
l’accompagnement des enfants relèvent encore trop souvent de l’expérience
pilote et n’ont pas encore de reconnaissance suffisante par les autorités.
Il est en outre
important que ce soutien ne s'arrête pas avec le décès. En effet, un
accompagnement après celui-ci s'avère souvent nécessaire pour les proches.
3. Une répartition des moyens en fonction des besoins.
Améliorer la qualité de
la fin de vie pour chacun des acteurs concernés nécessite des
investissements importants. Les coûts à charge de l'assurance soins de santé
s’élèvent en moyenne à 2.400 euros par personne et par mois au cours des six
derniers mois de la vie. Les frais à charge du patient sont plus importants
en cas de décès à domicile. Le choix politique de l’octroi des moyens doit
être basé sur le bien-être du patient ainsi que celui de son entourage, tant
d’un point de vue psychologique que technique. C’est pourquoi, il semble
indispensable que le coût à charge du patient ne soit pas différent selon
qu’il soit à l’hôpital, à son domicile ou à celui d’un proche qui
l’accompagne.
Il est
de notre responsabilité institutionnelle de mettre ces questions à l’ordre
du jour. Le (non) rapport à la mort de la société actuelle rend d’autant
plus important notre rôle de “veilleur” et de relai des besoins de nos
affiliés les plus fragilisés et de leur entourage.
Alda
Greoli
Secrétaire nationale
Les
résultats complets de l’étude de la MC sont disponibles sur
www.mc.be
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