Éditorial
(1er
mai 2008)
Réduire le
coût des médicaments à
l’hôpital, c’est possible!
Depuis
le 1er juillet 2006, une partie des médicaments consommés par les
patients hospitalisés est remboursée par l’assurance soins de santé sous la
forme d’un forfait. La Mutualité chrétienne à étudié l’impact de ce nouveau
mode de financement: il est globalement positif pour les finances de
l’assurance obligatoire et celles de l’hôpital, et c’est tant mieux (lire
ci-contre). Mais pour les patients, la situation ne s’est pas améliorée.
Nous proposons une formule simple pour mieux assurer les médicaments à
charge des patients hospitalisés.
Avant
la forfaitarisation, les médicaments prescrits et consommés à l’hôpital
étaient tous remboursés à l’unité. Peu importe le prix et le nombre, tous
les médicaments (sauf les médicaments D) étaient remboursés. Il n’y avait
donc pas d’incitant à utiliser des médicaments moins chers ou génériques ou
à faire l’effort d’une prescription plus rationnelle. Conséquence, le coût
des médicaments utilisés variait de manière importante entre les hôpitaux,
et pour l’assurance soins de santé obligatoire ces dépenses n’étaient pas
maîtrisables. Quant aux médicaments non remboursés, entièrement à charge des
patients, on constatait aussi une grande disparité, selon la pathologie,
l’hôpital, le choix du médecin. Cette facture peut varier de quelques euros
à 5.000 euros. Face à cette grande hétérogénéité des prescriptions
pharmaceutiques, la Mutualité chrétienne proposait depuis longtemps déjà de
rembourser les médicaments non plus à l’unité mais via un forfait.
Le forfait médicaments responsabilise l’hôpital
L’idée est simple: on
paye lors de chaque admission un forfait couvrant les médicaments remboursés
(lire ci-contre : “Un forfait finement défini”). Par cette technique de
financement, on responsabilise l’hôpital et les médecins: s’ils utilisent
des médicaments génériques ou moins chers et qu’ils font l’effort d’une
prescription rationnelle, le coût des médicaments utilisés sera moindre que
le forfait. La bonne gestion procure donc des surplus financiers que
l’hôpital peut utiliser à sa convenance pour faire face à ses dépenses,
notamment en personnel qualifié.
Si par contre le coût
des médicaments utilisés dépasse le forfait payé, l’hôpital devra supporter
la différence. Les forfaits payés en 2006 sont des moyennes calculées à
partir des dépenses historiques et en fonction des pathologies. Il y avait
donc au départ en 2006 autant de “gagnants” que de “perdants”. Qu’en est-il
en 2007?
Les hôpitaux ont rapidement adapté leurs prescriptions
pharmaceutiques
Grâce
à la forfaitarisation, les hôpitaux et médecins ont très rapidement
adapté leur pratique de prescriptions de médicaments. |
Contrairement aux
craintes et critiques exprimées lors du lancement de la forfaitarisation,
les hôpitaux et médecins ont très rapidement adapté leur pratique. Notre
étude portant sur le 1er semestre 2007 indique que les hôpitaux
présentant historiquement des coûts élevés (dépassant donc leur forfait) ont
tous diminué leur consommation, certains même de manière spectaculaire (- 30
%!). Par ailleurs, et que les hôpitaux historiquement les plus “économes”
(donc en-dessous de leur forfait) ont, dans la grande majorité, encore pu
diminuer leur consommation de médicaments. On constate aussi une
augmentation de la prescription des médicaments génériques.
Grâce à l’adaptation de
leur prescription pharmaceutique, les hôpitaux généraux ont ainsi pu dégager
une marge positive estimée entre 14 et 30 millions d’euros. Quant aux
dépenses pour l’assurance soins de santé, elles sont stabilisées, voire même
en léger recul. Le système introduit en 2006 devra bien sûr être affiné. Il
faudra étudier l’impact sur la consommation ambulatoire, examiner comment
introduire un forfait pour l’hôpital de jour, recalculer certains forfaits…
Et la facture pour les
patients?
Les patients doivent aussi être “gagnants”
Les patients paient 60
millions d’euros de leur poche pour les médicaments non remboursés délivrés
durant leur hospitalisation, ce qui correspond à 10 % du coût total de la
facture médicament (l’assurance soins de santé prend en charge les 90%
restants). Cela représente environ 35 euros par admission. Mais derrière
cette moyenne se cache une très grande disparité qui pose question. Pourquoi
dans une maternité, la patiente paie-t-elle 15 euros en moyenne par séjour
et dans une autre 75 euros? Cette grande variation alimente l’insécurité.
Certaines factures dépassent largement les 1.000 euros pour des médicaments.
La facture médicament pour les patients est donc non maîtrisée et
incertaine.
Alors pourquoi ne pas
aussi forfaitariser la facture médicaments à charge des patients? Chaque
patient hospitalisé paierait 35 euros pour les médicaments, ni plus, ni
moins. Plus de surprises, plus de risque financier. En intégrant ces 35
euros dans le Maximum à Facturer (MAF), les malades chroniques et les
patients gravement malades seraient aussi remboursés par l’assurance soins
de santé obligatoire.
Ainsi, la
forfaitarisation des médicaments à l’hôpital sera aussi une opération
“gagnante” pour les patients: on responsabilise l’hôpital, l’assurance
obligatoire soins de santé est plus efficace et l’accès aux soins
hospitaliers est mieux garanti.
La forfaitarisation des médicaments a prouvé que la
responsabilisation entraîne un changement des pratiques de
prescriptions pharmaceutiques. L’hôpital et l’assurance soins de
santé en sortent “gagnants”. Nous proposons que les patients soient
aussi “gagnants” en forfaitarisant le coût des médicaments à leur
charge, soit 35 euros par admission. C’est simple et c’est possible.
Jean Hermesse
Secrétaire Général |
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