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Éditorial (20 janvier 2005)

 

Il faut limiter les équipements médicaux

 

L’offre en services et équipements médicaux lourds est très importante en Belgique. Le Ministre fédéral des Affaires sociales et de la santé a décidé de la limiter plus strictement. C’est un enjeu de santé publique essentiel.

 

Dans la plupart des systèmes de soins développés, des critères de programmation limitent le nombre d’équipements et de services médicaux lourds tels que le Pet-scan, la résonance magnétique nucléaire, les services de cardiologie, de dialyse rénale, les services médicaux d’urgence. Par la programmation, on évite la multiplication de ces services coûteux et on assure une meilleure qualité grâce à une pratique suffisante par service. Force est toutefois de constater que la programmation n’est pas respectée sur le terrain et que des services et équipements ont été installés sans autorisation un peu partout dans le pays, mais plus particulièrement à Bruxelles et en Wallonie.

Qu’est-ce qui explique l’empressement des hôpitaux à vouloir installer ces services et équipements ?

 

Un financement et agrément inadéquats poussent au suréquipement

Une des raisons qui pousse à l’installation et au développement de certains services plutôt que d’autres est d’ordre financier.

L’hôpital est en effet constitué de nombreux services médicaux (radiologie, biologie clinique, soins intensifs, quartier opératoire, urgences, pédiatrie…) et parmi ces services certains sont “rentables” et d’autres déficitaires. L’équilibre global est plus facilement atteint si l’hôpital dispose de tous les services “rentables”, tels que le service de cardiologie, la dialyse, l’orthopédie. Ces services nécessitent des équipements spécialisés et lourds.

Comment se fait-il que certains services sont plus rentables que d’autres ? La réponse se trouve en partie dans la hauteur des tarifs des prestations médicales. Ces tarifs sont fixés à un moment donné en tenant compte de la capacité technique, des coûts de l’appareillage, de la durée de l’intervention et des soins annexes requis. Mais comme les techniques évoluent rapidement, si les tarifs ne sont pas adaptés, ceux-ci seront en décalage par rapport aux coûts réels. Des tarifs inadéquats par rapport à la réalité des coûts sont donc en partie à l’origine de la rentabilité ou non des services.

Un autre motif qui pousse au développement de certains services lourds est la législation sur les agréments. En effet, l’agrément de certains services spécialisés est parfois conditionné à d’autres services. Ainsi sans SMUR ou sans pédiatrie, l’agrément de plusieurs autres services ne peut pas être obtenu ou maintenu. Ces agréments “en cascade” poussent donc à la création de services pour raison de survie.

Les besoins ne sont donc pas les seuls critères guidant les choix des hôpitaux en services et équipements médicaux ; la rentabilité financière et les perspectives d’agrément influencent aussi ce choix.

 

Trop d’équipements, trop de services sont néfastes

Les tarifs inadéquats pour les actes médicaux rendent certains services financièrement plus attractifs et risquent d’orienter le développement de ces services non pas en fonction des besoins mais de l’intérêt financier. Ainsi, les hôpitaux envisagent d’abandonner les services déficitaires. La politique de Santé Publique finit par en être elle-même influencée puisque l’offre de services serait déterminée par des considérations économiques et non par les besoins sanitaires.

Par ailleurs, les tarifs médicaux plus intéressants dans certaines disciplines risquent aussi d’influencer le choix des études de médecine. Dans le cadre du numerus clausus, l’attrait financier de certaines spécialités entraîne une diminution d’étudiants en médecine dans des spécialités moins rémunératrices telles que la gériatrie, la psychiatrie, la rhumatologie ou la pédiatrie.

Enfin, l’équilibre financier des services et équipements médicaux lourds ne peut être atteint que si un nombre minimum d’actes est “produit”. S’il y a pléthore de services, il y a un risque réel d’une multiplication d’actes inutiles. L’étude menée sur les examens préopératoires l’a clairement montré. Les pratiques diffèrent très fort d’un hôpital à l’autre. La tendance à la surproduction est manifestement plus grande à Bruxelles et en Wallonie.

La surcapacité n’incite pas à la mise en œuvre d’une médecine basée sur les recommandations de bonnes pratiques.

 

Tous les services médicaux doivent être financés correctement

Pour que l’offre des services et des équipements médicaux soit guidée par les besoins sanitaires et non par les intérêts financiers, les tarifs médicaux doivent être adaptés à la réalité des coûts. En diminuant le prix de certains actes et en valorisant d’autres, on réalise ni une économie, ni une dépense supplémentaire mais on peut mener une politique de santé publique plus sereine.

Les hôpitaux seront moins poussés à rechercher les services et équipement médicaux “rentables”. La programmation sera plus facile à faire respecter et les standards de bonne pratique médicale seront mieux appliqués.

 

La limitation des équipements et services lourds est juste pour des raisons économiques, de santé publique et de solidarité. Mais elle doit nécessairement être accompagnée d’une révision des tarifs médicaux garantissant un financement correct de tous les services. C’est un enjeu prioritaire et fondamental.

 

Jean Hermesse

Secrétaire National

 

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