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Éditorial (2004)
Le vieillissement : un défi politique majeur

Pouvons-nous faire face aux conséquences du vieillissement de la population ? Un Comité d’Etude, créé spécialement au sein du Conseil supérieur des Finances pour faire le point sur cette question, vient de sortir son rapport annuel. Il n’est pas politiquement neutre !

 

Le Comité d’Etude sur le vieillissement a été créé par le gouvernement en 2001 afin d’estimer le coût budgétaire du vieillissement jusqu’en 2030. L’objectif est d’élaborer une stratégie de politique budgétaire qui permette de financer le coût croissant du vieillissement. Les moyens nécessaires pour ce financement peuvent être trouvés grâce à la réduction de la dette publique et/ou par l’alimentation du Fonds de vieillissement, créé pour garantir les pensions à long terme. Les hypothèses retenues dans l’étude ne sont cependant pas politiquement neutres.

 

Des évolutions significatives

L’étude met d’abord en évidence les évolutions significatives du passé. Nous retenons particulièrement les cinq suivantes :

Au cours des 40 dernières années, les salaires ont progressé de 2,9% en moyenne alors que les allocations sociales n’ont été adaptées au bien-être qu’en moyenne de 1,1 %. La valeur de remplacement des allocations sociales n’a donc fait que reculer.

La Belgique détient le plus faible taux d’emploi des plus de 55 ans en Europe : 25,7 % (la moyenne européenne est à 39,8 %).

Le taux de pauvreté atteint 25 % chez les personnes de 65 ans et plus alors qu’il n’est que de 13 % pour toute la population belge.

L’intégration sociale est moindre chez les âgés.

Le vieillissement de la population explique très peu la croissance des dépenses en soins de santé dans le passé. Celles-ci possèdent une “dynamique propre” et les mesures d’économie n’ont eu qu’une influence réduite sur les comportements de consommation de soins de santé.

A partir de ces faits et tendances du passé, les experts tentent ensuite d’estimer le coût supplémentaire en 2030 en termes de pensions, soins de santé, chômage, invalidité, … suite au plus grand nombre de personnes âgées, c’est-à-dire le coût budgétaire du vieillissement. Pour effectuer cette estimation, le Comité d’Etude émet deux hypothèses fortes.

La première porte sur la croissance des dépenses en soins de santé après 2008. Au lieu de reprendre le taux de croissance actuel, le Comité a décidé de le ramener volontairement à 2,8 %, ce qui est très ambitieux, voire irréaliste.

La seconde hypothèse porte sur le taux d’adaptation au bien-être des revenus de remplacement, à peine 0,5 % ! Avec ce faible taux, la valeur des revenus de remplacement continuera à reculer par rapport au bien-être général.

Le résultat final de l’estimation intégrant ces deux hypothèses “politiques” entraîne un coût supplémentaire d’ici 2030 de 3,4% par rapport au PIB et pour le financer, il faudra donc trouver des moyens nouveaux.

 

Un coût substantiel inévitable

Le Comité d’Étude sur le vieillissement prédit une augmentation de 5 ans de l’espérance de vie et de 15 % (!) des dépenses en sécurité sociale d’ici 2030. Il donne l’impression que, moyennant le financement de ce coût supplémentaire, nous ne mettrons pas à mal la couverture sociale actuelle. Cette conclusion est trompeuse.

Déjà aujourd’hui, nous savons que pour bon nombre de personnes âgées, les coûts de la dépendance sont difficiles à payer. Plus des deux tiers des personnes âgées en maisons de repos ne peuvent financer seules le prix de l’hébergement. Le personnel soignant subsidié n’est pas suffisant et nous devrons encore valoriser les salaires dans le secteur des soins. Si on s’en tient à l’hypothèse restrictive du Comité d’Étude, nous connaîtrons un recul de la couverture publique des soins de santé. Enfin, ce n’est pas en adaptant les revenus de remplacement de 0,5 % par an que le taux de pauvreté diminuera chez les personnes âgées.

Tout le monde le sait : le coût budgétaire du vieillissement sera important. Mais le rapport ne précise pas où trouver l’argent. Réduire la dette publique, démentir le Fonds du vieillissement, mais avec quels moyens, quelles “nouvelles” recettes ?

 

Une politique sociale active

Ce que l’étude révèle aussi, c’est l’importance d’une politique sociale active à l’égard des personnes âgées. Ainsi augmenter le taux d’emploi des plus de 55 ans, actuellement le plus bas d’Europe, a un effet non négligeable sur le coût du vieillissement. Mais aussi favoriser l’intégration sociale et la participation des personnes âgées réduit les coûts de la dépendance et le risque de pauvreté.

Enfin, orienter notre infrastructure sanitaire vers les soins chroniques et même vers les soins aigus en subsidiant convenablement les structures alternatives pour personnes âgées donne la tranquillité que l’offre collective et solidaire des services sera suffisante lorsque nous ne serons plus autonomes.

 

Le vieillissement de la population est lent mais certain. Le coût sera important et inévitable. On ne peut plus se mettre la tête dans le sable des études.
Y faire face nécessite une politique budgétaire et sociale active, prévoyante.
Le débat public sur les choix et les conséquences devient urgent.

 

Jean Hermesse

Secrétaire National

 

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