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Éditorial (21 octobre 2004)

 

Assurance maladie : des chiffres préoccupants pour 2004

 

Les chiffres des dépenses de l’assurance maladie pour le premier semestre de cette année ont été communiqués ce lundi 18 octobre au Conseil général de l’Inami. Ils ne sont pas bons. Le budget autorisait pour l’année 2004 une croissance, index compris, de 5,7 %. Or, on se retrouve avec une croissance de plus de 11 %. Cela fait une sérieuse différence et cela engendre, bien normalement, une certaine inquiétude.

 

Il faut évidemment, comme toujours quand il s’agit de chiffres partiels, les manier avec prudence avant de tirer des conclusions hâtives. Au premier semestre, les dépenses sont toujours plus élevées qu’au second puisqu’en été on consomme moins. Il peut aussi y avoir des modifications de rythme dans la clôture mensuelle des comptes. Depuis quelques temps, l’Inami demande, à juste titre, des clôtures mensuelles plus strictes et cela a pu provoquer une accélération dans la comptabilisation des dépenses. Il est cependant peu probable que le second semestre présente un freinage tel dans l’évolution des dépenses que l’on se retrouve dans les limites du budget prévu. Il y aura donc un dépassement et celui-ci risque d’être plus conséquent que celui qui a été intégré dans les calculs du conclave budgétaire et qui se montait à quelque 300 millions d’euros. Le budget total est de 16.257 millions d’euros, c’est donc un dépassement d’un peu moins que 2%. Vu les masses financières en jeu, un pourcentage, même réduit, donne rapidement des chiffres absolus très élevés.

Pourquoi cette augmentation aussi forte des dépenses ? Il est difficile à ce jour de donner des explications très précises, mais on peut relever quelques éléments.

 

Il y a d’abord des éléments d’ordre général.

La Belgique ne fait pas exception et tous nos voisins sont confrontés au même phénomène de croissance alors que nos dépenses par personne restent inférieures aux leurs. Le vieillissement de la population, le coût de plus en plus élevé des techniques de soins et de diagnostic, l’augmentation des coûts de la main-d’œuvre dans un secteur où les gains de productivité sont minimes, ce sont là quelques facteurs de croissance.

Dans tous les pays se posent les mêmes questions de choix politique : pour maintenir la qualité des soins et leur accessibilité, il faut augmenter les budgets et cela provoque des arbitrages pénibles avec d’autres budgets.

 

Il y a ensuite des facteurs spécifiquement belges.

Dans la dernière convention médico-mutualiste, nous avons accepté une importante revalorisation de la médecine générale. Elle était légitime, mais elle a son coût financier qu’il faut assumer.

Les médicaments continuent à déborder largement de leur budget. A eux seuls ils représentent plus des trois quarts du dépassement. Il est clair qu’ici il y a beaucoup de dépenses inutiles. Une politique plus volontariste devrait engendrer des économies substantielles. La prescription des génériques a progressé, mais pas suffisamment et ils restent trop chers. Je ne prendrai qu’un seul exemple, mais il est stupéfiant et il n’est pas isolé. Le Zantac, médicament contre les ulcères d’estomac, est vendu en spécialité à 22,8 euros (300 mg) ; étant hors brevet, il y a chez nous des génériques pour 18,6 euros et en Nouvelle Zélande, qui n’est pas un pays sous-développé et qui mène une politique très volontariste, le générique Zantac est vendu à 1,56 euro (sic). Malgré les campagnes en leur faveur, médecins et malades continuent chez nous à rester réservés à l’égard des génériques. On a vu récemment sur un plateau de télévision un professeur d’université, pharmacologue, exprimer des réserves insidieuses au grand dam du Ministre des Affaires sociales et d’autres participants, mais à la grande satisfaction du représentant de l’industrie pharmaceutique. Pour faire face aux dépenses engendrées par les vrais nouveaux médicaments, qui coûtent légitimement cher, il faut absolument utiliser partout où c’est possible des médicaments à prix réduit à qualité égale.

A côté des prix excessifs des médicaments, surtout des plus anciens, on constate une explosion considérable des dépenses pour les implants et prothèses de plus en plus utilisés généralement pour le plus grand bien des malades. Deux facteurs peuvent engendrer des dépenses excessives : les prix de vente la plupart du temps très élevés aussi car le marché est peu ou mal concurrentiel, et le volume de prescription pas toujours bien contrôlé.

La pratique des ristournes aux médecins implanteurs par les firmes productrices est totalement malsaine, mais fréquente. Ajoutons encore que ce sont les malades eux-mêmes qui endossent souvent le supplément de dépenses car l’assurance maladie ne rembourse que partiellement, ou après coup pour certains, via le système du Maximum à facturer (MAF).

 

Que faire ?

Il ne faut certainement pas céder à la panique, mais voir les choses en face. Il est certain qu’il sera difficile, à bientôt deux mois de la fin de l’année, de peser de façon efficace sur les dépenses 2004. Mais les débordements de 2004 auront des conséquences sur ce qui va se passer en 2005 puisque nous partirons d’un montant plus élevé. Le Ministre des Affaires sociales serait bien inspiré d’appeler tous les acteurs de la santé à prendre sans tarder des initiatives fortes et de le faire lui-même dans les secteurs directement sous sa responsabilité. L’expérience a montré qu’une situation d’excédent budgétaire, c’était le cas en 2002, provoquait curieusement un surcroît de dépenses tandis qu’inversement, un plan sérieux d’économies pouvait induire un freinage plus important que prévu, comme si tous les acteurs, y compris les malades, s’étaient vus rappelés à leurs responsabilités.

 

En tout état de cause, il faudra faire attention aux faux remèdes qui ne manqueront pas de se manifester. Je range parmi les fausses solutions les revendications de scission communautaire ou les revendications de privatisation du secteur, les deux vont souvent de pair sous la pression du modèle hollandais. Il n’y a rien à gagner dans cette voie, certainement pas pour ceux qui sont malades, comme pour ceux qui pourraient l’être un jour.

 

Édouard Descampe

Secrétaire général

 

 

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