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Dans les pays de l’Est du Sud, le secteur de la santé est de plus en plus libéralisé. Les Etats ont tendance à se désengager. Les populations sont démunies face aux intérêts de l’industrie pharmaceutique et aux libres tarifs d’une médecine à deux vitesses. Sauf pour une minorité de nantis, l’accès aux soins de santé régresse. Face à ces défis, le mouvement mutualiste développe une stratégie et des réponses concrètes.

Sous la contrainte des organisations internationales (Banque Mondiale, Fonds Monétaire International…), de nombreux pays en transition ou en voie de développement ont considérablement réduit leurs dépenses publiques au cours de la dernière décennie. Les dépenses sociales comme celles relatives à la santé et à l’éducation sont directement touchées par ces plans d’ajustement dits structurels et les conséquences sont dramatiques : personnel soignant plus ou mal rémunéré, installations sanitaires abandonnées, rupture de stocks de médicaments génériques… Ce vide est bien vite comblé par le développement d’une médecine libérale où les tarifs sont libres, par la création d’hôpitaux privés inaccessibles pour la grande majorité de la population et par la promotion de médicaments de marque. On assiste ainsi à une libéralisation du secteur de la santé qui ne se préoccupe pas de politiques de santé publique (vaccination, hygiène, prévention). La qualité des soins et l’accès aux soins ne sont plus garantis. Dans les pays de l’Est, on assiste parallèlement au développement des assurances privées. Finalement, la qualité de vie se détériore et dans certains pays l’espérance de vie diminue.

Le mouvement mutualiste,
une alternative pour l’accès aux soins de santé

Le fossé grandissant entre le Nord et le Sud ne peut laisser personne indifférent. Il interpelle la raison d’être de notre humanité et nous appelle à un mouvement de solidarité pour permettre un développement durable partagé par tous.

Dans ce contexte, le mouvement mutualiste se fondant sur la solidarité et sur la participation démocratique constitue une voie alternative intéressante. Ce mouvement a contribué dans nos pays à la création d’une richesse sociale trop vite oubliée. C’est le capital social accumulé au cours des dizaines d’années qui garantit aujourd’hui la mobilisation permanente d’hommes et de femmes pour un modèle social équitable et solidaire.

La diffusion de ces valeurs est essentielle pour l’avenir des pays de l’Est et du Sud. Etant donné notre expérience, nos connaissances, nos moyens et nos convictions, nous sommes bien placés pour appuyer l’émergence d’un mouvement mutualiste dans ces pays.

Les Mutualités Chrétiennes s’engagent dans des projets de partenariat concrets

Concrètement, notre action mutualiste internationale se traduit par des jumelages entre Mutualités Chrétiennes belges et mutualités naissantes en Afrique et dans les pays de l’Est. Par ces projets de partenariat, nous partageons notre expertise en matière de gestion de l’assurance maladie, de l’économie sociale, d’organisation des soins et de techniques de formation. Des manuels de formation sont publiés à l’attention des promoteurs et des gestionnaires de mutuelles de santé et permettent un effet multiplicateur. Par ces projets de partenariat, nous investissons aussi dans la qualité des infrastructures et des services, dans la capacité contributive des populations locales. Nous favorisons l’utilisation des médicaments génériques. Par ces projets de partenariat, nous donnons forme à des organisations démocratiques qui favorisent la participation et la prise de responsabilité des populations locales. Enfin, il est essentiel de tisser des liens entre les personnes. A partir des échanges entre personnes, des liens d’amitié se nouent, marqués par un respect et une estime réciproques. Ainsi, nous voulons créer des solidarités qui s’inscrivent dans la durée car nous savons que la création d’un mouvement mutualiste prend du temps.

Ces projets sont le fruit d’une démarche d’ouverture internationale initiée en 1995. Ce sont, bien sûr, de petits ruisseaux, mais nous pensons qu’un jour ils deviendront de grandes rivières car les résultats sont encourageants et démonstratifs. Nous coopérons dans dix pays (Sénégal (1), Burkina Faso, Bénin, Congo, Burundi, Pologne, Lettonie, Roumanie, Liban, République Dominicaine). Neuf mutualités sont impliquées dans des projets de partenariat. Ces mutualités couvrent près de 70.000 personnes.

Ces projets et réussites concrètes interpellent aussi les organisations internationales, et peuvent donc à terme influencer les réformes du secteur de la santé. Ainsi, la Banque Mondiale vient-elle d’attribuer à notre service de coopération internationale une étude de faisabilité pour développer une assurance maladie solidaire en Côte d’Ivoire.

La marchandisation de l’économie mondiale affecte la santé des populations dans les pays en voie de développement. Dans ce contexte, le mouvement mutualiste international est une alternative, une réelle lueur d’espoir et de progrès social pour les populations locales. Les Mutualités Chrétiennes y participent à travers des projets de partenariat concrets.

Jean Hermesse
Secrétaire national ANMC

(1) Lire La Mutualité en fête au Sénégal (1 mars 2001)