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A suivre... (1er mars 2012)

Belges, que dites-vous de vos valeurs?

Tous les neuf ans, quelques sociologues renommés se penchent sur ce qui est vrai, beau et bien à nos yeux. De la Méditerranée en Arctique, pas moins de 45 pays du continent européen et quelques milliers de citoyens ont été sondés en 2009. Que raconte le volet belge?

La Belgique – en la personne de chacune de ses trois Régions – compte parmi les habitués de l’exercice. Dès 1981, et les premières recherches du genre, les Belges sont de la partie. Au cœur des explorations : les valeurs des gens. Les enquêteurs participent en effet à la EVS, abréviation pour European Values Study. En fait de valeurs, il s'agit de cerner leurs “visions” de la société, de “ce qui reçoit l'agrément”, de “ce qui compte dans l'existence”, précise Liliane Voyé, professeur émérite de l'UCL et coordinatrice de la version belge de l'étude.

Eviter les traits grossiers

Le volet belge de la EVS qui vient d'être publié sous le titre “Autres temps, autres mœurs”, est empreint de la prudence qui caractérise les universitaires scrupuleux et soucieux de la rigueur de l'analyse(1). En bref, ils n'entrent pas dans les clichés taillés sur mesure pour faire la Une des journaux. Du style, le Belge, ce mécréant en puissance ou les Belges apolitiques ou encore ces jeunes adultes belges qui délaissent leurs parents. Des conclusions hâtives, des raccourcis. Les observations vont parfois même dans un sens contraire : elles dépassent des stéréotypes éculés. En matière de travail par exemple - un élément central dans la vie du Belge, dont il attend qu’il offre sécurité de revenus et possibilité de se réaliser(2) : les plus jeunes s'écartent clairement de leur image de “génération nonchalante, peu portée sur le travail”. Ils font état d'une éthique du travail des plus élevées – c'est-à-dire de la grande importance du travail et de l'obligation morale à travailler. Autre exemple dans le même champs laborieux : là où l'on parle souvent d'un “Flamand, grand travailleur” et d'un “Wallon plus frivole, moins discipliné”, l'EVS contredit : “les Flamands interviewés obtiennent des scores moindres en matière de centralité du travail et d'éthique du travail que les répondants wallons et bruxellois”. L'exercice de vulgarisation des résultats est délicat. Tout en nuances, il ne s'agit pas de donner dans la caricature.

Respecter les nuances

Néanmoins, il y a lieu aussi de pouvoir avancer certains éléments. Heureusement, “Autres temps, autre mœurs” ne se réduit pas non plus au seul exposé des précautions à prendre dans la lecture des résultats. Pas d'excès de relativisme qui renverrait à des échantillons bien trop petits pour déduire quoique ce soit ou se refuserait à généraliser parce que les mots – traduits dans plusieurs langues – cachent des réalités tellement diverses… A cet égard, les chercheurs relèvent avec humilité une fausse note. Elle concerne la famille et la paternité. Parmi les assertions proposées aux participants à l'enquête : “un homme a besoin d'avoir des enfants pour être épanoui” – d’accord ou pas? En néerlandais, la phrase devient “un homme doit avoir des enfants pour être vraiment un homme”. Sans surprise les deux formulations donnent des résultats fort contrastés au nord ou au sud du pays. Seuls 8% des Flamands se diront d'accord avec l'affirmation, 35% des Wallons avec la phrase formulée en français. Le couac de traduction n’entache pas l’ensemble des résultats. Il révèle cependant le soin à apporter aux comparaisons entre pays (3), entre régions.

Bons points pour le système de soins

Parmi les tendances de notre société que livre l'enquête, il en est une qui réjouira les acteurs mutualistes. “La confiance dans les institutions centrales de l'Etat providence est quasi unanime. Au moins huit Belges sur dix expriment explicitement leur confiance dans le système des soins de santé, la sécurité sociale et l'enseignement”. Un effet de la générosité du système? De l'humanité à l'œuvre dans ces secteurs? De la visibilité plus grande de ces domaines sur la vie des gens? Les institutions politiques (les partis et le gouvernement surtout), l'Eglise, les banques ne jouissent en tout cas pas du même plébiscite. Marqués sans doute – déjà en 2009 – par des scandales.

Politique et ecclésiastique tancés

L’enquête précise cependant qu’il n’y a pas plus de désenchantement citoyen ni d’apathie politique que par le passé. Elle note “une légère progression” de l’intérêt pour le politique en même temps que de la contestation, les engagements devenus plus éphémères et informels. Il n’en reste pas moins qu’un Belge sur trois témoigne d’une attitude apolitique. Et attention, l’insatisfaction à l’égard de la politique peut se transposer dans un appel à une démocratie plus autoritaire, fondée sur un leadership fort.

L’enquête souligne aussi le déclin du religieux. “Alors qu’en 1981, près de trois quarts de la population belge se déclaraient encore catholiques, ce n’est aujourd’hui plus le cas que pour la moitié de celle-ci. Dans le même temps, la proportion de catholiques périphériques et non pratiquants ne cesse de croître.” Et de noter que “de plus en plus de jeunes sont élevés dans des familles non religieuses, alors que dans les années quatre-vingt, la sécularisation de la société découlait de la rupture d’avec la foi ou de l’abandon de la pratique religieuse régulière.” Distance est prise par bon nombre de croyants. Beaucoup se sont construit “une pratique et un credo personnels, constitués de patchwork de pratiques et de croyances”.

Famille, le Belge vous aime

La famille, elle, continue de recueillir les suffrages, comme l’amitié et le temps libre. Le constat ne date pas d’hier. La nouveauté se trouve dans la conception de la famille, s’élargissant à toutes formes de vie commune. La cohabitation entre partenaires – en dehors du mariage – est de plus en plus acceptée. De même que le statut de mère célibataire ou que l’adoption par des couples homosexuels. Quant aux attentes que les membres des familles nourrissent les uns par rapport aux autres, on peut parler de “relations intimes à distance”. “Les générations restent réellement attachées aux relations familiales, mais sans l’exigence normative de se prendre mutuellement en charge”, observent les auteurs.

Par rapport à la religion comme dans les choix éthiques (fin de vie, rapport au corps…) ou dans les relations, c’est la liberté de choisir sa propre forme de vie qui domine. Pas question de se laisser dicter sa conduite. Mais il ne s’agit pas non plus de faire fi des règles de vie en société. La grande question est de savoir ce qu’elles doivent être. Et là, l’incertitude pointe à l’horizon. Il y a comme une invitation à les façonner.

//CATHERINE DALOZE

(1) “Autres temps, autres mœurs. Travail, famille, éthique, religion et politique: la vision des Belges”, éd. Racine Camus, 2012.

(2) C'est-à-dire des collègues sympathiques, un travail valorisant, compatible avec la vie familiale. “Des aspects comme ‘beaucoup de vacances’ et ‘pas trop de stress’ sont jugés secondaires”, lit-on aussi.

(3) Les comparaisons à l’échelle européenne ne sont pas encore connues pour l’édition 2009.

 


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