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A suivre (21 janvier 2010)

«Dans le doute,

mets tout en œuvre pour agir mieux»

 

Après un sacré tumulte autour de la grippe A/H1N1 et des campagnes de vaccination, le temps de l’évaluation et de la réflexion semble s’ouvrir peu à peu. Notion de risques, de précaution émergent en filigranes.

 

Chaque semaine, le Commissariat interministériel Influenza établit un rapport sur l’évolution de la grippe A/H1N1 dans notre pays. Le dernier en date signale que «le nombre de personnes contaminées dans notre pays par la grippe A/H1N1 reste relativement limité et l’épidémie n’a pas eu, à ce jour, d’impact significatif sur la population» (1). Depuis fin avril 2009, 209.871 personnes auraient contracté le virus dans notre pays. Quant au nombre de décès du fait de «complications liées à une infection grippale», 17 ont été notifiés au Commissariat. «La présence de la grippe A/H1N1 n’a pas d’impact significatif sur le taux de mortalité», indique le Commissariat. L’heure semble être à la relativisation de la pandémie annoncée, même si l’épisode d’alerte grippale n’est pas totalement terminé. De plus en plus de réserves voire de critiques sont émises sur la manière dont l’alerte a été abordée, sur la gestion de l’éventuelle pandémie, tant les discours ont été fort alarmistes et certains médias diffuseurs de messages anxiogènes.

 

C’est surtout en France, autour de la commande de vaccins, que la polémique fait rage. Au pilori, les choix de la Ministre de la Santé, Roselyne Bachelot : achat de vaccins en quantités excessives, manque de preuves de fiabilité de ceux-ci et campagnes d’information sujettes à caution - leur but aurait été d’écouler les doses davantage que d’informer. Les controverses s’aventurent dans la nébuleuse des lobbies, des influences. Le curriculum de la Ministre est passé au crible, laissant apparaître des expériences professionnelles auprès de laboratoires pharmaceutiques (2). La puissance de ces derniers est mise en lumière et les soupçons de collusions avec des politiciens, des scientifiques et des institutions comme l’Organisation mondiale de la santé (OMS) font leur chemin dans les débats. D’aucuns tentent d’afficher au grand jour des pressions exercées en coulisses. Le Conseil de l’Europe entend enquêter.

 

La « précaution », principe dans le vent

Dans ce contexte, le principe de précaution bat son plein. Il induit que dans le doute, mieux vaut gérer l’incertitude et tout mettre en œuvre pour agir mieux. C’est dans le champ de l’environnement que le principe de précaution s’est d’abord déployé. Le Sommet de la Terre à Rio en 1992 définit le principe : «En cas de risques de dommages graves ou irréversibles, l’absence de certitude scientifique absolue ne doit pas servir de prétexte pour remettre à plus tard l’adoption de mesures effectives visant à prévenir la dégradation de l’environnement». De nombreuses thématiques sont traversées par ce raisonnement : des sujets aussi divers que les OGM, le nucléaire, les ondes GSM…, de même que d’autres sphères relatives à la santé ou à l’alimentation (la génétique, l’élevage - vache folle -,…).

 

D’après les informations disponibles sur la pandémie de grippe A/H1N1, était-il évident d’agir selon ce principe ? N’était-il pas justifié de prendre des mesures d’une certaine ampleur ? Etait-il envisageable d’adopter le dicton «dans le doute, abstiens-toi» ? Au risque d’être condamné pour imprévoyance si cela avait dû mal tourner?

 

La question du risque, en effet, plane sur ce débat. Risque supposé, attendu ou assuré, attitude de prudence, d’indifférence ou catastrophisme… Nos sociétés, plus à l’abri des graves périls que par le passé, seraient devenues à certains égards moins tolérantes aux risques (3). D’autant moins qu’en Occident, nous sommes nourris de promesses d’une sécurité accrue, d’une consommation sans risque. D’autant moins que nous avons tendance à délaisser l’idée de fatalité pour préférer la conviction de notre pouvoir agir. D’autant moins, comme le remarquait l’historienne Marie-Sylvie Dupont-Bouchat, que nous avons tendance à nous vivre comme immortels, que nous nous soucions, avec plus ou moins d’élans selon nos angoisses ou notre indifférence, de nous prémunir contre ce qui pourrait augmenter le risque de maladie (4)

 

Cependant, les écueils de trop de précaution sont pointés du doigt : immobilisme, refus d’innover, alourdissement des contraintes réglementaires ou recherche d’un utopique risque zéro…

Le philosophe François Ewald, créateur de l’Observatoire du principe de précaution en France, évoque l’inclinaison à faire du risque une notion relativement subjective. Plus que l’existence même des risques, c’est la crainte de leur existence qui motiverait de plus en plus la précaution. Les angoisses des particuliers, la perception des risques, le soucis de tranquillité des citoyens engagent la précaution au-delà de son strict principe. Voilà que devient inévitable le dialogue entre l’expertise scientifique et les voies inquiètes qui remontent du terrain.

// Catherine Daloze

 

(1) Rapport du 14 janvier – www.influenza.be

(2) Ecoutez le reportage « L’alibi des lobbies » de l’émission Là-bas si j’y suis (24 novembre 2009 – France Inter)  sur www.la-bas.org/

(3) E.Zaccaï, «De la prévention à la précaution, et réciproquement », 2002.

(4) « Peur et prévention », n°spécial de Bruxelles Santé, 2003 – www.questionsante.org (onglet « réflexions »).

 

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