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Vie quotidienne (21 février 2008)

 

 

Une vie pour la ville!

Qui souhaiterait vivre dans une ville où les piétons circulent  sous terre et les voitures à l'air libre? Quelle ville a choisi de renvoyer ses habitants à la périphérie pour remplacer les logements par des bureaux et des parkings? Quelle ville a souhaité transformer son centre en nœud autoroutier? Quelle ville cache son musée d'art moderne sous terre?... Voilà une belle brochette de questions posées par l'Atelier de Recherche et d'Action Urbaine (ARAU) depuis plus de 30 ans à propos de Bruxelles, comme le rappelle l'un de ses fondateurs, René Schoonbrodt, dans un livre militant qui est aussi un bilan (1).

 

 

 

 

 

 

 

La ville appartient
d'abord à ses habitants.

 

"Le cœur de la ville n'étant pas un échangeur routier”, la Charte urbaine de l'ARAU privilégie – en 1970 – les transports publics. L'ARAU s'intéresse beaucoup aux trams et métros en reprenant les thèmes de tous ceux qui revendiquent un bon maillage du réseau, une fréquence élevée et peu de transit d'une ligne à l'autre. Mais, si ces impératifs de bonne gestion conditionnent l'attrait pour les transports collectifs, l'ARAU estime que c'est à partir de la conception qu'on se fait de la ville qu'il faut réfléchir et agir.

Quels avantages la ville doit-elle offrir à ses habitants sinon d'offrir à tous un accès satisfaisant aux besoins personnels et collectifs, de la consommation à l'éducation, du travail au loisir, du logement à la culture ? Les avantages de la ville, ce sont précisément la proximité et la densité des services, ce qui suppose aussi des déplacements aisés. Or, comme le constatait déjà l'ingénieur Fabio Ciuffini lors de la 27ème Ecole Urbaine organisée par l'ARAU en 1996 (!), si nous maîtrisons bien les longues et très longues distances par le train et l'avion, il reste que pour les courtes distances, on ne trouve pas d'instruments adéquats. Certes, on a développé des lignes de métro. Mais René Schoonbrodt s'interroge sur les véritables bénéfices du métro à Bruxelles: “Je pense, écrit-il, que le métro a pour premier résultat de libérer les rues et les avenues des trams et des bus, au profit de la fluidité des voitures. Les trams (collectifs) gênent les voitures (privées). Les bus aussi. Là où les trams disparaissent, les voitures gagnent.” Le métro aurait donc eu surtout pour effet de favoriser le flux automobile, de mettre les piétons sous terre, de contribuer à transformer le centre de Bruxelles en centre d'affaires et de renvoyer ses habitants vivre en périphérie.

 

Le combat de la Marolle

Tous les combats de l'ARAU partent d’une idée fixe: la ville appartient d'abord à ses habitants. Il n’est donc pas étonnant que l’histoire de l’ARAU commence par “la bataille de la Marolle”, un quartier pauvre, menacé de destruction pour permettre l'extension du Palais de Justice. Il ne s'agissait pourtant, disaient certains, que du déplacement de 1.500 personnes qui, de toute façon serait relogées dans des logements sociaux... C’est vrai, répondait l’ARAU, mais ces personnes seraient déplacées loin de leur milieu de vie où elles avaient tous les services (commerces, services de santé, emplois...) dont elles avaient besoin. Ensuite, comme l’expérience l’a montré maintes fois, lorsqu’on détruit du logement, c’est en général pour y mettre des bureaux.

Jacques Van der Biest, vicaire des Marolles, cherche appui auprès du MOC, où travaillait à l'époque René Schoonbrodt qui l'incite à prendre contact avec Maurice Culot, architecte et urbaniste. Assistant à l'école d'architecture de La Cambre, celui-ci venait de publier un article critique et intéressant sur l'aménagement d'un quartier près de la Grand'Place de Bruxelles.

Voilà comment, en quelques contacts, s'est allumée la mèche d'un mouvement de résistance urbaine contre l'esprit du temps, convaincu que la ville n'était plus destinée aux habitants mais aux affaires et aux automobiles, et que les grands axes de pénétration permettraient de circuler rapidement entre le lieu de travail, les zones de logement, les lieux de détente et les grandes surfaces dédiées à la consommation.

La “bataille de la Marolle” portait en germe les combats à venir et la brutalité d’un certain urbanisme comme en témoigne, par exemple, l’aménagement du “Quartier Nord” au milieu des années 70, pompeusement appelé “plan Manhattan”. Celui-ci prévoyait des milliers de mètres carré de bureaux, alimentés par deux autoroutes urbaines plaçant le centre de Bruxelles, selon la publicité de l’époque, au croisement des voies rejoignant Madrid à Helsinki et Istanbul à Londres! Ce quartier très populaire fut en partie sauvé, comme dans la Marolle, grâce à un long processus associant les habitants aux institutions publiques.

Certes, tous les combats n'ont pas été gagnés. La ville est un milieu complexe. Il faut souvent négocier pour rencontrer tant d'aspirations contradictoires. Mais l'on y découvre que les habitants, premiers concernés, sont souvent les plus faibles face aux affairistes, aux commerçants, aux politiques, aux pouvoirs de grandes institutions bancaires ou d'administrations publiques. L’ARAU a cependant contribué de manière incontestable à faire évoluer la culture urbaine en exprimant un projet de vie pour la ville, non pas en brassant des idéaux humanistes et généralistes sur la qualité de vie en ville, mais en s’attaquant à des questions aussi concrètes que la largeur des trottoirs, la qualité du logement et la mobilité urbaine, analysant chaque projet, quartier par quartier.

 

Habiter, c’est se loger

Ce fut, dès 1969, sur le thème du logement que se font les premières interventions de l’ARAU. C’est une évidence: “Bruxelles, perdant ses logements, perd ses habitants”. Aussi, le premier objectif du combat, mené avec Inter-Environnement, pour obtenir un plan de secteur est d’assurer l’avenir du logement bruxellois, ce qui suppose l’abandon des autoroutes urbaines, de certains tronçons de métro au profit “des petits trams, partout et tout le temps”, ainsi qu’un contrôle permanent des décisions des autorités en matière de permis d’urbanisme.

L’ARAU défend donc le logement existant, la rénovation de logements anciens ou la construction de logements neufs, ce qui n'a pas plu à tout le monde. L’ARAU se voit accusé de conservatisme. Il handicaperait l’évolution de la ville et la modernisation architecturale. Or, à l’expérience, on doit bien constater que nombre de projets considérés comme incontournables pour l’avenir de Bruxelles étaient des projets volatiles. Ceux qui s’étaient battus pour la construire de bureaux soi-disant indispensables (comme la tour ITT de La Cambre ou l’extension de la Banque de Bruxelles au Sablon) abandonnaient les lieux quelques années plus tard. Mais le mal était fait. L’espace était  perdu pour les habitants: “Fusion, rachat, concentration, délocalisation heurtent de front la durabilité de la ville. Pour s’établir, une entreprise peut demander (et obtenir au nom de l’emploi) la démolition de logements… et disparaître elle-même deux ans plus tard, vendue, absorbée, en faillite. Perte sèche pour la ville.” Faut-il dire que l’opposition des patrons du bâtiment, des syndicats de la construction, des fonctionnaires, des financiers à cette manière de voir la ville fut très forte?

L'Atelier de Recherche et d'Action Urbaine a très vite fédéré les comités d'habitants au sein d'Inter-Environnement Bruxelles, une fédération qui existe aussi en Wallonie et en Flandre. L'ARAU a donc pu obtenir que tous les permis d'urbanisme soient soumis à enquête préalable. Ainsi l'urbanisme est public depuis 1976... ce qui n'a guère plu aux communes qui tenaient à négocier des accords particuliers avec les promoteurs immobiliers. Mais elles ne réussiront pas à faire casser cette décision par le Conseil d'Etat comme elles l'espéraient.

La défense du logement a donc été le point essentiel de l’action de l’ARAU “parce que le logement est la fonction urbaine la plus menacée”, explique René Schoonbrodt. Et c’est de là que découle tout le reste. Car vivre en ville, ce n’est pas seulement disposer d’un toit. C’est circuler et travailler, se reposer et se former… C’est donc aussi participer à la construction de la vie en ville. Voilà pourquoi l’ARAU a voulu et obtenu la démocratisation des processus de décisions: “Nous avons rendu public ce qui était secret”, explique René Schoonbrodt dans un livre qui se lit comme l'histoire d'une guérilla urbaine, où les habitants se réapproprient la vie en ville, quartier après quartier. Mais rien n’est jamais définitivement acquis. Il ne faut cesser de poser ces questions: “Pour qui la ville? Au profit de qui?”

Christian Van Rompaey

 

 

 

 

 

 

(1) Vouloir et dire la ville.

René Schoonbrodt. AAM éditions 2007 (19 EUR).

 

Cinq chantiers pour Bruxelles

Ecole urbaine de l’ARAU: 17-21 mars

Bruxelles bénéficie de nombreuses réserves foncières en marge de la ville, dont les plus importantes sont situées sur des sites ferroviaires (tels que Schaerbeek – Formation). Depuis quelques années, des projets se multiplient sur ces terrains au travers du Plan de développement international, du plan logement… alors que le tissu urbain comporte encore des territoires dont le développement n’est pas terminé.

 

L’ARAU a choisi de consacrer sa 39e École urbaine à cinq de ces morceaux de ville : le Quartier européen, la gare de l’Ouest, Tour et Taxis, la gare Josaphat et la Cité administrative de l’État.

Ces territoires urbains concentrent des enjeux considérables : place de l’habitant, mobilité et accessibilité, intégration dans la ville mais aussi gestion de l’énergie, de l’eau, des déchets, participation citoyenne, réalisation d’équipements au service de la ville…

 

Infos pratiques

Lieu : Espace du Marais asbl - Sleep Well, Rue du Damier, 23 - 1000 BXL.

Dates : Du 17 au 21 mars de 19h45 à 22h30.

Prix : 4 EUR par séance ou 16 EUR pour l’ensemble du cycle.

Renseignements: 02/219.33.45 - www.arau.org

 

Promenons-nous dans la ville ...

Pour sensibiliser la population bruxelloise aux questions du développement urbain, l'ARAU organise depuis de nombreuses années des tours de ville qui connaissent beaucoup de succès (quelque 8.000 visiteurs par an).

La ville n'est pas un enjeu théorique et il faut faire sentir aux habitants les enjeux de la vie en ville de manière très concrète. Aussi l'ARAU propose des balades en ville sur des thèmes qui n'ont cessé de se diversifier l'Art nouveau, le patrimoine industriel, le logement social : l'Art déco...

Renseignements: 02/219.33.45 - www.arau.org

 


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