Vie Quotidienne
(1er avril 2010)
Attention aux emplois
“titres-services”
Le signal
d'alarme est tiré du côté de certaines entreprises agrées "titres-services".
Elles sont plusieurs du secteur non-marchand à indiquer que le financement
du système est problématique, et à interpeller le Fédéral. Maintenir des
services de qualité et proposer des emplois qui le sont tout autant
deviendraient malaisé voire impossible dans le cadre financier fixé.
Fin 2009, on
comptabilisait près de 2.500 entreprises agrées “titres-services”, le double
par rapport à 2006. Le succès du système va
grandissant. Un ménage sur huit, soit 660.000 utilisateurs recourent aux
quelque 117.000 travailleurs que compte aujourd'hui le secteur. Et pour ces
services qui vont du nettoyage ménager, au repassage en passant par des
courses ménagères, le consommateur fait face à une diversité d'entreprises
agréées. Le secteur privé côtoie le public; le lucratif, le non-marchand; l'interim,
les services d'aide à domicile ou d'insertion. Quel que soit son choix, le
client déboursera la même somme soit 7,50 euros par titre-services, à raison
d'un titre par heure prestée de service ménager; il bénéficiera d'une
déduction forfaitaire d'impôt de 30% (s'il est soumis à l'impôt sur les
personnes physiques). La valeur d'échange du titre-services pour
l'entreprise agréée est de 20,80 euros. “Ainsi pour chaque heure prestée
l'Etat participe à raison de 13,30 euros à la prise en charge du coût
patronal du travailleur ainsi qu'aux frais de structure tels que
l'administration ou l'encadrement du travailleur”(1).
Qualité du
service,
qualité de
l'emploi
Quant à la
qualité des prestations, l'Institut de recherches économiques et sociales de
l'UCL (Ires) constate qu'elle est relativement incertaine pour le
consommateur. Elle sera fort dépendante de l'expérience vécue, de la
relation entre un travailleur et son client. Le choix de telle entreprise
plutôt que telle autre sera d'ailleurs souvent guidé par le “bouche à
oreille”. Des amis, des connaissances, des parents recommandent les
prestataires dans 31,1% des cas.
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Pierre Rousseau/Belpress |
Cependant, l'Institut pointe des différences de qualité de l'emploi
créé, ainsi que dans l'organisation des services, en fonction des
types d'entreprises. “Les organisations d'aide au domicile –
publiques et privées – apparaissent comme particulièrement
performantes aux deux niveaux”. Visites auprès d'une majorité de
nouveaux usagers afin de calibrer le travail, contrats à durée
indéterminée proposés aux travailleurs, respect de l'ancienneté,
formations et encadrement de ces derniers… sont gages de qualité
pour l'Ires. Et de souligner “les modus operandi très spécifiques”
des sociétés d'interim. “Celles-ci privilégient leur capacité
d'adaptation aux désidérata de leurs utilisateurs et la minimisation
des coûts, au détriment de la qualité des emplois offerts qu'elles
rendent aussi flexibles que possibles. Cela se traduit tant par un
faible accompagnement des travailleurs que par une plus faible
qualité des contrats offerts en termes de durée et de temps de
travail”.
Viabilité non
assurée
Vient alors,
indissociable des questions de qualité, celle de la viabilité financière.
D'après l'étude de l'Ires, un équivalent temps plein d'ancienneté nulle et
sans aide à l'emploi est rentable (c'est à dire que les recettes couvrent au
moins les coûts) pour l'ensemble des entreprises agrées à l'exception des
CPAS et des services d'aide aux familles et aux personnes âgées, notamment à
cause de leurs barèmes salariaux, des commissions paritaires auxquelles ils
sont liés. Mais pour tous ceux qui prennent en compte l'ancienneté, après
quatre ans de contrat de travail, le même travailleur n'est plus “rentable”.
Certains
jonglent alors avec des aides à l'emploi ou d'autres apports sous la forme
de subsides complémentaires. Mais ces économies s'amenuisent, au même titre
que les apports de l'Etat. “S'ils ne sont pas soutenus, les services du
secteur non marchand seront contraints de restreindre les avantages octroyés
actuellement aux travailleurs, ce qui est contraire à leur éthique”,
concluent d'autres acteurs dont la Fédération de l'aide et des soins à
domicile(2) et la Fédération des centrales de services à
domicile.
La gageure
serait de coller aux demandes des utilisateurs avec les pics et les creux
selon les saisons…, tout en offrant des emplois stables et encadrés. Appel
est lancé à la ministre fédérale de l’emploi.
// CD
(1) Ires, “Les titres-services: quelle qualité d'emploi et
d'organisation du service?”, Regards économiques, n°69. avril 2009. A lire
sur
www.uclouvain.be/regards-economiques.html
(2) www.fasd.be
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