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Tourisme (5 juillet 2007)

 

 

Evasion

Les îles, entre rêve et réalité...

Îles mythiques, îles rêvées, îles réelles isolées et dépeuplées, île refuge qui peut se transformer en enfer, île cauchemar qui enferme et n’offre aucune issue de secours, île en danger… Les îles interpellent et forment un univers à part à découvrir avec respect.

"Belle-Île-en-Mer, Marie Galante, Saint-Vincent loin Singapour, Seymour Ceylan. Vous c'est l'eau, c'est l'eau qui vous sépare et vous laisse à part...» la chanson de Laurent Voulzy me trotte dans la tête, puis celle de Jacques Brel bien sûr «Une île au large de l'espoir, où les hommes n'auraient pas peur. Et douce et calme comme ton miroir. Une île…». Ce doit être l’approche des vacances qui me fait penser à ces territoires si particuliers que sont les îles.

«Île: étendue de terre entourée d’eau de tous côtés» nous informe le Petit Larousse. Voilà bien un dénominateur commun à toutes les îles: un isolement géographique d’avec le continent, une coupure par rapport au reste du monde. Pour le reste… toutes sont différentes. Du Groenland à Madagascar en passant par la Grande-Bretagne, la Martinique, Bali et ses îles Guili, les îles Phi Phi en Thaïlande, l’île Madame ou l’île aux Moines en France… toutes ces îles recouvrent des réalités multiples.

 

Île paradisiaque

Les îles sont synonymes de voyage, d’évasion, de vacances en pays chaud, de rêve... L’île se fait alors paradisiaque dans de nombreux imaginaires. Sable blanc et cocotiers, mer d’huile transparente d’un bleu turquoise... une version carte postale. Le mythe de la petite île déserte ou peu peuplée, protégée par la mer, difficilement accessible fait partie de l’inconscient collectif et a alimenté de nombreux récits d’aventures dont le plus célèbre est bien sûr Robinson Crusoé. Dans cette histoire devenue mythique contée par Daniel Defoe, Robinson, perdu sur son île déserte, lutte contre le désespoir et les effets destructeurs de la solitude. Il y survit grâce à un travail quotidien calqué sur le modèle de vie occidental. Doux paradoxe alors que l’île est synonyme de liberté, d’évasion et de repos dans les imaginaires.

Toujours est-il que les îles perdues dans les mers chaudes restent un rêve de voyage de nombreux touristes à la recherche d’un Eden. Ces îles sont d’ailleurs souvent une destination typique des voyages de noces. Petit bémol cependant. Cet engouement touristique pour ces îles paradisiaques devenues de plus en plus accessibles grâce aux prix plancher des vols d’avion se fait parfois, souvent même, au détriment des écosystèmes très fragiles de ces territoires isolés.

 

Île prison

L’île n’est pas pour tous un lieu de rêve. Longtemps, elle fut le lieu d’isolements forcés… N’est-ce pas sur les îles que l’on installait la plupart des bagnes? Comme Alcatraz dans la baie de San Francisco, le bagne de Guyane dans les îles du Salut, le bagne de l’île de Ré, etc. Aujourd’hui encore c’est sur une île qu’est installée la plus célèbre prison du monde: Guantanamo.

 

Une île, lieu de fuite

L’île peut aussi être synonyme de fuite, d’échappatoire. «Je vais prendre le premier avion vers une île déserte, comme cela on ne m’importunera plus. Plus de coups de fil, de mails, de questions, d’ennuis!». Un isolement souvent fantasmé qui voit l’île comme une entité archaïque qui ne serait pas connectée aux réseaux modernes de communication et serait forcément toujours calme.

L’île est le lieu d’un isolement volontaire qui s’impose pour certains comme un besoin… Paul Gauguin mais aussi Jacques Brel sont partis aux îles Marquises trouver couleur, inspiration et calme intérieur.

L’isolement peut être «imposé»... les fans du jeu de télé-réalité Kho Lanta savent combien l’isolement sur une terre inconnue et hostile, aussi paradisiaque soit elle, peut avoir de revers.

Dans «L’île» de Robert Merle, roman dont l’intrigue est largement inspirée de l’histoire réelle des révoltés du Bounty, des marins mutins se réfugient sur une île déserte afin d’échapper à la justice avec un groupe de Tahitiens. Passée la joie de leur nouvelle liberté acquise, ils doivent organiser leur vie en société, gérer les tensions entre le groupe de marins britanniques et les Tahitiens. Et lorsque sur un si petit territoire une société s’entre-déchire, cela peu devenir l’enfer…

 

L’île, berceau d’une microsociété

Les microsociétés qui peuplent les îles ne fonctionnent pas tout à fait de la même manière que sur le continent. Leur isolement induit certaines particularités, certains comportements. Très attachés à leur terre, limitée et délimitée, les insulaires, comme on les appelle, ont en général un important sentiment d’appartenance à leur communauté. Ils se méfient des continentaux, ont du mal à les accepter lorsque l’un de ceux-ci vient s’installer sur «leur» île et ils ne les intègrent jamais vraiment à leur communauté. Est-ce cette perception de l’espace limité dont ils disposent qui induit cette volonté des insulaires de se démarquer et d’affirmer haut et fort leur identité propre?

«En réalité, la communauté insulaire est un groupe social où les individus se situent les uns par rapport aux autres: la communauté prime sur le groupe familial et le groupe familial prime sur l’individu. Le groupe offre un référent socioculturel à l’individu, qui en contrepartie, le respecte dans le maintien de son équilibre, explique Marie-Noëlle Burgarella-Mattei de l’Université de Corse (1). Il va de soi que l’initiative personnelle a peu de place dans une telle société. Un changement peut rompre l’équilibre social et menacer le groupe tout entier (par exemple, par des conflits ou encore par une remise en cause du système de valeurs). La situation extrême étant la disparition de la culture, la perte d’identité. La terre joue également un grand rôle dans ce type de société : elle représente l’origine de l’individu, qui lui voue en retour un attachement profond et passionné.»

Cette manière d’être et de penser n’offre pas beaucoup de place aux initiatives originales et personnelles.

«Ces comportements traduisent deux phénomènes sur le plan socio-économique, analyse encore Marie-Noëlle Burgarella-Mattei. Une inertie locale: l’esprit d’entreprise est entravé par la crainte du changement. Paradoxalement, l’initiative est mieux tolérée lorsqu’elle vient de l’extérieur, elle ne menace pas l’équilibre du groupe, elle ne soulève pas de rivalités internes. L’émigration : le salut des îles semble provenir des relations qu’elles ont entretenues avec l’extérieur. L’isolement crée une société oppressive, qui engendre le symptôme de l’émigration, dans certains cas pour fuir la misère et le chômage ou dans d’autres cas, pour réussir une carrière professionnelle.»

 

Île en danger

Isolée par la mer, dépendante de transports coûteux et parfois hasardeux en fonction du temps, l’île reste fragile économiquement. Plus que tout autre terre, elle dépend aussi fortement des conditions climatiques.

Le tsunami du 26 décembre 2004 en est une preuve flagrante. Ce séisme a ravagé de nombreuses îles comme les îles Andaman et Nicobar dans l'est de l'océan Indien proches de l’épicentre. Les plages touristiques des îles du Sud de la Thaïlande comme Phuket, Khao Lak ou Phi Phi ont aussi été atteintes par les murs d'eau. Les Maldives et les 1.192 îlots que comptent l'archipel ont été dévastés. L'île Rodrigues, puis l'île Maurice, la Réunion et les Seychelles ont également été touchées. Un véritable désastre!...

Le 4ème Rapport d’évaluation du Groupe d’Experts Intergouvernemental sur l’Evolution du Climat (GIEC) consacré au «Bilan 2007 des changements climatiques: Conséquences, adaptation et vulnérabilité» rendu public à Bruxelles en avril dernier consacre un point particulier pour préciser l’impact du réchauffement climatique sur les petites îles. «Des infrastructures vitales pour les communautés insulaires seront menacées par l’augmentation du niveau de la mer, les tempêtes, l’érosion... Les ressources disponibles en eau douce vont diminuer sur de nombreuses îles, notamment des Caraïbes et du Pacifique, au point de ne plus pouvoir subvenir aux besoins. Enfin, la dégradation des systèmes côtiers (érosion, blanchiment des récifs de corail, etc.) diminuera l’attractivité touristique de ces îles.»

Les îles paradisiaques et de rêve tant adulées des touristes pourraient donc se transformer en véritable cauchemar si nous n’y prenons garde?

Îles mythiques, îles rêvées, îles réelles isolées et dépeuplées, île refuge qui peut se transformer en enfer, île cauchemar qui enferme et n’offre aucune issue de secours, île en danger… Les îles sont ambivalentes, entre ouverture vers les autres, vers le continent, et repli identitaire. Elles sont le lieu de tous les contraires, mi-marine mi-terrienne. Elles sont multiples et multiformes… Qu’elles soient baignées par les eaux turquoise et chaudes ou battues par les flots et les vents, les îles interpellent et forment un univers à part.

Françoise Robert

 

(1) Dans “Conséquences socio-économiques de l’insularité : de l’isolement à la coopération”, texte du Colloque “L’île laboratoire” de l'Université de Corse 19 au 21 juin 1997 sous la direction d’Anne Meistersheim, http://www.eurisles.org/textes/labo/

 

 

 A LIRE 

 D’ILE EN ILE 

La très belle émission Thalassa sur France 3 est une merveilleuse ambassadrice du monde de la mer. Régulièrement, l'équipe de Thalassa nous emmène découvrir la réalité tout en contraste des îles de par le monde. Dans ce beau livre intitulé “D'île en île, escales dans les plus belles îles françaises”, Georges Pernoud nous entraîne à la découverte des plus belles îles parmi la centaine d'îles que compte la France. Terres insolites posées au milieu de la Manche comme Bréhat, terres australes et antarctiques comme les Kerguelen, îles méditerranéennes touristiques comme la Corse, archipels paradisiaques de la Polynésie. Un beau voyage abondamment et superbement illustré.

D'île en île Georges Pernoud Michel Lafon 43,65 EUR.


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