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Sport (18 septembre 2014)


Special olympics : les jeux de la solidarité

© Matthieu Cornélis

Il y a les jeux olympiques pour les athlètes valides. Il existe aussi les jeux paralympiques destinés aux athlètes handicapés moteur. Enfin, les moins célèbres Special olympics mobilisent les athlètes handicapés mentaux. Cette année, c'est en Belgique qu'a lieu l'événement. Plus qu'une compétition sportive, c’est une véritable ouverture culturelle et une occasion supplémentaire de valoriser une société de l'inclusion. Reportage à Mortsel, en province d'Anvers, avec la délégation lituanienne.

Ce sont d'abord les couleurs des survêtements de sport qui sautent aux yeux. Partout, du vert et du jaune avec, écrit dans le dos, "Lietuva". Ils sont une cinquantaine. Certains jouent au football dans le jardin, d'autres débarrassent ce qui devait être le repas du soir, partagé sous les tonnelles. La délégation lituanienne des Special olympics a aujourd'hui pris ses quartiers à Hove, non loin d'Anvers, dans le "petit" château de Hovenberg.

Tandis que les dernières tables sont rangées par des volontaires, les chaises, elles, prennent la direction du hall d'entrée de l'imposante bâtisse néoclassique. Il se dit qu'un spectacle de magie va commencer. "Hocus, pocus, marocus". La formule récitée par le magicien annonce le début du spectacle. "Me… Peter Pocus. Me… magic !", dit-il en anglais. Les Lituaniens ne parlent bien évidemment pas un mot de néerlandais. Les plus jeunes se débrouillent avec l'anglais, les plus âgés avec le russe ou l'allemand. Cela témoigne de l'histoire de la Lituanie, petit pays (deux fois la Belgique), autrefois membre de l'Union soviétique et indépendante depuis 1990. Le spectacle n'est pas long, une heure tout au plus. Les tours amusent et subjuguent les jeunes, les moins jeunes, les bruyants, les désinhibés, les plus sages… L'assemblée s'esclaffe d'un seul et même rire lorsque, sur scène, Kristupas se prête au jeu, réquisitionné par le magicien. Il répète le seul mot d'anglais qu'il con naît pour affirmer au prestidigitateur qu'il a bien compris : "Yes".

La suite du programme : balade en ville. Les lacets se nouent, les vestes se ferment, les appareils-photo sont préparés à portée de mains. Assistés par quelques bénévoles, les jeunes handicapés mentaux se préparent à sortir.

Anvers, la nuit

© Matthieu Cornélis

Après une demie heure d'autocar, le groupe arrive à Anvers. Sur la Grand- Place, les jeunes posent pour les photos devant la fontaine Brabo. En y regardant de plus près, on réalise que la délégation n'est pas composée uniquement d'athlètes handicapés. Il y a aussi les entraîneurs, les accompagnateurs et des athlètes valides. Ces derniers sont des lituaniens bénévoles recrutés pour donner un coup de main au sein d'une équipe de basket dite "unifiée". Chaque équipe de basket, toutes délégations confondues, a le droit d'avoir des équipes de basket mixtes. Edagaras, 18 ans, en fait partie et nous en explique le concept. "On joue avec les 'enfants spéciaux', on leur donne la balle, ou pas, ça dépend de l'action de jeu. On joue ensemble mais avec des règles adaptées". "Par exemple, ajoute Martinas, volontaire lui aussi, il doit y avoir au minimum trois sportifs handicapés par équipe sur le terrain. Une autre règle : les sportifs valides peuvent marquer un maximum de 70% du score final". Les Lituaniens comptent ainsi deux équipes de basket composées de six athlètes handicapés et de quatre valides.

Un peu plus loin, face à la cathédrale Notre-Dame, une autre séance de pose s'improvise. Ausra, professeur d'éducation physique dans l'enseignement spécialisé en profite pour passer en revue l'ensemble de la délégation. "En tout, nous sommes 46. Dix joueurs de football, dix joueurs de basket, deux équipes de bocce (une forme de pétanque italienne), des pongistes, des nageurs et des sportifs plutôt portés sur la course à pied". Entre 17 et 30 ans, les athlètes ont été choisis en fonction de leur spécialité et de leur performance. "Bien que nous aurions aimé pouvoir les prendre tous, nous avons dû les sélectionner", regrette Ausra. Vivre cette expérience est en effet une occasion presque unique d'autant que "les villes-hôtes nous ont préparé un super program me : mini-golf, visite de Lier en bateau, son magnifique béguinage… Et puis… les frites !" Les frites sont-elles recommandées pour des sportifs de haut niveau ? Ausra s'esclaffe : "On ne commence la compétition que dans trois jours, ça va…"

Il semble que ces sportifs ne soient pas soumis à un régime alimentaire draconien. Pas loin de la Rue Vleminck, une enseigne : "La crème de la crème". Distribution générale de crème glacée. Les Special olympics, ce n'est pas que du sport, c'est aussi du plaisir.

Une "maison ouverte"

© Matthieu Cornélis

Xavier et Griet de Béthune accueillent des athlètes dans leur maison de Mortsel. "Toc toc toc", osons-nous discrètement, vu l'heure tardive à laquelle nous arrivons. Une lampe éclaire soudainement le hall, Xavier nous ouvre sa porte, surpris de ne pas voir ses invités arriver. Le bus ne devrait pas tarder. Ce délai nous permet de discuter du rôle de "famille d'accueil".

En tout, ils accueillent cinq personnes. "Nos garçons sont partis de la maison, on a de la place, disent-ils, l'air satisfaits d'avoir pu répondre à l'appel de la commune de Mortsel qui, en mars dernier, cherchait des volontaires. Après sept années de vie en Afrique de l'ouest, on sait la valeur d'une maison ouverte". Les souvenirs disposés par-ci, par-là dans l'habitation, témoignent en effet de leur goût pour le Sud. "On a répondu 'présent' car on sait combien c'est important de se sentir accueillis." Qui plus est, le couple est habitué à être en contact avec des personnes porteuses d'un handicap. Elle, pédagogue, enseigne à des futurs professionnels de l'enseignement spécialisé et défend une société "la plus inclusive possible". En sus, les deux hôtes ont, dans leurs familles respectives, un membre qui souffre d'un handicap sévère complexe.

"Connaissez-vous les prénoms de vos invités ?" Une question malicieuse à laquelle ils répondent sans même devoir y réfléchir : "Oui. Il y a Ranvindas, le président de la délégation lituanienne. Puis Inga, c'est la coach des footballeurs. Et les trois jeunes : Raimondas, Svajunas et Algirdas." Bravo, cinq sur cinq. Retenir des prénoms lituaniens est un premier pas vers l'échange culturel. Mais pas facile d'aller beaucoup plus loin, tel que le souligne Griet : "Notre seule crainte était de ne pas savoir communiquer. Finalement, on communique avec des gestes et c'est plus ouvert, plus marrant. Les gestes, ça fait rire, ça casse la glace."

Les hôtes, travailleurs à temps plein tous les deux, n'ont pas beaucoup de temps pour échanger avec leurs invités. Leur programme est plutôt serré. "Le premier jour, on a regardé sur Google maps d'où ils venaient précisément. On a essayé d'en savoir plus sur la Lituanie. Je sais maintenant, dit Xavier, pas peu fier, que merci se dit 'atchou' en lituanien." Griet, pour sa part, a évoqué la diversité et la migration avec ceux qu'elle accueille. "Ils n'ont pas l'habitude de voir des gens de l'Afrique noire. C'est nouveau pour eux. J'espère qu'ils auront vu la belle diversité de la population d'Anvers ce soir !"

"Leffe, very good. Duvel, good. Hoegaarden, okay"

À la porte, du bruit. Les Lituaniens rentrent d'Anvers à une heure tardive, le bus devait déposer chaque membre de la délégation dans sa famille respective à Lier, Hove et Mortsel. Aussitôt installés au salon, Griet se dirige vers le frigo pour en sortir les boissons. Raimondas observe l'assortiment de bières belges avec le sourire. Il se rappelle le bon goût de la Leffe découverte la veille.

Ce soir, les jeunes sont au lait chocolaté. Les adultes, à la blanche de Hoegaarden : "Leffe, very good. Duvel, good. Hoegaarden, okay". C'est le palmarès de la bière belge vue par le président de la dé - légation lituanienne. Les adultes racontent leur journée, le spectacle de magie, Anvers… "How was food ?", demande Griet à Inga ? "Interesting", répond-elle, en évoquant le plat de viande en sauce reçu ce soir. Rires. Les jeunes, épuisés, n'esquissent qu'un petit sourire et ne prennent pas part à la discussion. C'est leur dernière soirée ensemble.

Le lendemain, ils déménagent vers le village olympique. Xavier et Griet comprennent qu'il n'y a plus qu'une question à poser : "Want to sleep ?" Le boss de la délégation, plutôt ventru, sourit. Oui, à minuit trente, il est l'heure. Fatigué, il l'est. Mais il ne fermera les yeux qu'après avoir regardé le résumé du match de basket qu'il a raté aujourd'hui : États-Unis-Lituanie aux championnats du monde de Madrid.

Le lendemain de notre rencontre, on apprend que les États-Unis ont étrillé la Lituanie (96-68). Reste maintenant aux athlètes "spéciaux" de défendre l'honneur de leur pays et de ramener quelques médailles à la maison. Prochain rendez-vous en 2015 pour les Jeux olympiques spéciaux mondiaux de Los Angeles (États-Unis).

//MATTHIEU CORNÉLIS

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