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Social (21 juin 2012)

L’index, une digue contre le détricotage social

Comment fonctionne l'indexation ?

L’index est un mécanisme qui permet d’adapter automatiquement au coût de la vie les salaires, les pensions et les allocations sociales(1). Une corbeille, composée d’environ 500 produits et services, permet de vérifier dans quelle mesure le coût de la vie augmente. Cette corbeille est adaptée régulièrement en fonction des habitudes d’achat de la population. Depuis 1994, les carburants, les boissons alcoolisées et le tabac ne font plus partie du panier qui sert de référence pour le calcul de l’indexation automatique des salaires. On parle dès lors d’indice-santé.

Chaque mois, on observe si l’indice-santé lissé (c’est-à-dire la valeur moyenne de l’indice santé des quatre derniers mois) dépasse ou non une valeur déterminée (l’indice-pivot). Lorsque c’est le cas, les salaires du secteur public et les allocations sociales sont indexés un mois après le dépassement (deux mois pour les pensions du secteur public). Cette indexation se traduit concrètement par une augmentation de 2% des montants.

Dans le secteur privé, l’indexation automatique des salaires n’est pas réglée par la loi mais bien par des conventions collectives de travail (CCT). Ce système s’est développé à la suite d’actions syndicales et de négociations entre les deux guerres, et a été généralisé après la Seconde guerre mondiale. Ainsi, chaque secteur est libre de conclure une CCT au sein de sa commission paritaire afin de fixer les modalités de son propre mécanisme d’indexation automatique. Chaque employeur est ensuite tenu d’appliquer celui-ci.

Dans les faits, le principe de l'indexation automatique est acquis dans quasi tous les secteurs mais avec des modalités différentes. La plupart procèdent à l’indexation des salaires sur la base d’un pourcentage fixe (1%, 2%...) à intervalles indéfinis, selon le moment où l’indice-pivot, précisé dans la CCT, est dépassé. D’autres secteurs font l’inverse: l’indexation s’effectue à intervalles fixes (une fois par an, par trimestre...) mais selon un coefficient variable proportionnel aux indices.

A l’échelon interprofessionnel, le revenu minimum mensuel garanti est fixé par CCT au sein du Conseil national du travail et est indexé chaque fois que l’indice-santé lissé dépasse l’indice-pivot.

Comme le fait remarquer la CSC, l’indexation automatique n’est pas un système rigide puisqu’elle fait l’objet de négociations entre les représentants des employeurs et les syndicats. En Belgique, on trouve d’ailleurs toujours des travailleurs pour lesquels, hélas, l’indexation automatique n’est pas garantie.

// JD

(1) Indemnités d’incapacité de travail, allocations de chômage, allocations d’interruption de carrière, prestations familiales, allocations pour handicapés, revenu d’intégration, Grapa...

© Philippe Turpin/Belpress

Préservation du pouvoir d’achat, soutien à la consommation, facteur de paix sociale, maintien des rentrées pour l’Etat et la sécurité sociale... : les avantages de l’indexation automatique des salaires ne manquent pas. Pourtant, ce système fait l’objet de virulentes critiques. Décryptage.

Avec le Luxembourg, la Belgique est le seul pays d’Europe à protéger le revenu réel des travailleurs et des allocataires sociaux, en procédant à une indexation automatique des salaires, des pensions et des prestations sociales. Le dernier village gaulois à résister aux assauts du néo-libéralisme? Il semble bien, effectivement, que la guerre soit idéologique. Dans les autres pays, les salaires suivent le coût de la vie mais d’une façon nettement plus saccadée, souvent insuffisante et au fil de conflits sociaux plus nombreux. Quant aux plus virulents pourfendeurs de notre système (FMI, OCDE, institutions européennes...), ils possèdent eux-mêmes un système d’indexation au bénéfice de leurs travailleurs. Un comble !

Des risques d’inflation ?

Les opposants à l’indexation automatique des salaires accusent ce système d’entraîner une perte de compétitivité des entreprises par le fait même qu’il augmente le coût salarial et renforce les tendances inflationnistes en boucle (les prix des biens et services augmentent, déclenchent une indexation des salaires qui se répercute à la hausse sur les prix). “Cela fait des décennies que l’OCDE, appuyée par les organisations patronales, demande à la Belgique d’en finir avec l’indexation des salaires en dénonçant ce ‘cercle vicieux’, observe Matéo Alaluf, sociologue du travail à l’ULB(1). Or, l’inflation est faible, la politique monétaire est contrôlée par la Banque centrale européenne et les négociations salariales sont cadenassées par la loi de sauvegarde de la compétitivité (loi de 1996)”, constate-t- il. Et de dénoncer les vrais coupables de l’inflation, à savoir les prix des produits alimentaires et, surtout, ceux de l’énergie que les ménages et les entreprises belges paient nettement plus cher que leurs voisins. “Le contrôle des prix de l’énergie serait en conséquence bien plus efficace que la manipulation de l’index”, affirme le sociologue.

Des risques pour la compétitivité ?

Ceux qui estiment qu’avec l’index notre économie est trop chère font référence à l’écart salarial par rapport aux pays voisins”, explique la CSC. “Or, si l’on tient compte des milliards d’euros de subsides salariaux versés par l’Etat aux entreprises (titres-services, mesures d’activation des allocations… – ndlr), notre ‘handicap salarial’ est très faible!”, ajoute le syndicat chrétien qui se mobilise pour la défense de l’indexation automatique(2). Les coûts salariaux belges suivent donc une tendance similaire à ceux de la France et augmentent plus lentement qu’aux Pays-Bas. “C’est l’Allemagne qui joue un jeu asocial, avec sa politique de dumping salarial, dénonce le syndicat chrétien. Dans ce pays, un quart des travailleurs gagnent moins de 10 euros bruts par heure. De nouveaux emplois sont effectivement créés, mais ce sont des mini-jobs qui n’offrent que de très bas salaires, des emplois à temps partiel, intérimaires(…)”.

Par ailleurs, même si les travailleurs belges coûtent un peu plus cher à leur employeur, ils leur rapportent davantage. En effet, leur productivité est 6,3% plus élevée qu’aux Pays- Bas, en France et en Allemagne ! Quant à l’emploi, nous n’avons pas à rougir : entre 1996 à 2011, il s’est amélioré (en heures travaillées) de 15,5%, contre 5,8% seulement pour la moyenne des trois pays voisins. Les mesures de relance prises après la crise financière et de sauvegarde de la sécurité sociale expliquent ces bons résultats.

On le voit, les indicateurs en termes de salaire, de productivité et d’emploi sont loin de nous être défavorables. Par contre, c’est sur le plan de l’innovation que le bât blesse. Un facteur pourtant essentiel lorsqu’on mesure la compétitivité. L’investissement en formation et en recherche et développement (R&D) doit garantir une économie innovante et dynamique, capable de proposer des produits “à haute valeur ajoutée” pour lesquels les acheteurs sont prêts à payer le prix fort. Or, en Belgique, les investissements en R&D globaux s’élèvent en 2009 à 1,96% du PIB, contre 2,47% en moyenne pour nos voisins. Notre pays est donc en train de creuser son "handicap d’innovation"!

Des attaques idéologiques

Pour Matéo Alaluf, l’offensive actuelle contre l’indexation automatique des salaires est d’une toute autre envergure que celle connue jusqu’ici. En effet, l’Europe veut imposer à la Belgique des réformes néolibérales – notamment sur le marché du travail – même si elles n’ont aucun rapport avec les déficits budgétaires. “Le Pacte de stabilité et de croissance (qui coordonne les politiques budgétaires nationales afin d’éviter tout dérapage – ndlr) fait de la modération salariale le centre de son dispositif (...) Il a moins pour objectif de mettre un terme à la crise que d’en recueillir les fruits (...) : la rémunération du capital se nourrit de la baisse du pouvoir d’achat des salaires”. Henri Goldman, éditorialiste de Politique(1), s’indigne à son tour : “Dans cette jungle – la même qui justifie les sursalaires des patrons et leurs bonus indécents –, il y aura toujours de bonnes raisons pour s’aligner sur les salaires les plus bas et sur la protection sociale la plus faible. C’est pourquoi la défense intransigeante de l’indexation automatique des salaires n’est pas celle d’un privilège, mais d’une digue contre le détricotage organisé de tous les acquis sociaux au détriment des travailleurs et des allocataires sociaux d’ici et d’ailleurs”.

// JOËLLE DELVAUX

(1)Faut-il revoir l’indexation des salaires” - Dans Politique, revue de débats, n° 71 - sept-oc 2011 - 7 EUR 02/538.69.96. - http://politique.eu.org

(2) Voir www.indexo.be.

Si l’indexation automatique n’existait pas...

Quelques chiffres valent mieux que de longs discours. Illustrons donc par un exemple ce que deviendrait le salaire sans indexation automatique ou même privé d’une seule indexation (saut d’index).

Un travailleur salarié touchait 3.000 euros bruts par mois au 1er juillet 2001. Imaginons qu’il bénéficie, chez son employeur, d’une augmentation barémique de 1% tous les deux ans en date du 1er juillet (augmentation liée à son ancienneté). Dix ans après, au 1er juin 2011, à combien s’élève son salaire?

Sans inflation, son augmentation barémique aurait porté son salaire à 3.250 euros en 2011. Du fait de l’inflation et grâce à l’indexation automatique (+ 2% en cas de dépassement de l’indice-pivot), ce travailleur perçoit en réalité un salaire brut mensuel de 3.962 euros. Ainsi, grâce à l’indexation, la perte de son pouvoir d’achat (calculée sur son salaire de 3.250 euros) se limite à 1,49% sur dix ans alors qu’elle aurait été de 19,19% sans indexation (soit une perte de près de 624 euros par mois)! La perte de 1,49% est liée au fait que l’indexation reflète l’inflation avec un léger retard et utilise l’indice-santé plutôt que l’indice des prix à la consommation.

Exprimé autrement, s’il n’avait bénéficié que de son augmentation barémique (sans indexation), ce travailleur aurait perçu 3.250 euros en 2011, mais en termes de pouvoir d’achat, ce salaire ne vaudrait plus que 2.626 euros... Il aurait donc quand même perdu 12,12% de son pouvoir d’achat en dix ans (soit une perte de 374 euros par mois), malgré ses 250 euros d’augmentation barémique.

Imaginons maintenant qu’un saut d’index soit appliqué dès le mois prochain à ce travailleur qui doit encore prester 25 ans avant ses 65 ans. Avec un salaire mensuel brut avoisinant actuellement 4.000 euros, il perdra pas moins de 29.232 euros cumulés d’ici sa pension ! Comme le souligne la CSC, à l’initiative d’un simulateur accessible à tous(1), ce calcul ne tient même pas compte des autres répercussions d’un saut d’index (notamment sur le montant de la pension).

On voit donc bien que l'indexation limite très fort la perte de pouvoir d'achat du travailleur (et de sa famille). Elle le fait toutefois moins bien pour les petits revenus que pour les revenus moyens et supérieurs. En effet, les produits alimentaires et de l’énergie connaissent, ces dernières années, une hausse de prix plus élevée que les autres biens et services. Et ils pèsent plus lourd dans le budget des familles à petits revenus.

// JD avec Patrick Feltesse, conseiller socio-économique au MOC.

(1) Dans le cadre de sa campagne de sensibilisation sur l’indexation des salaires - www.indexo.be/fr


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