Seniors
(19 novembre 2009)
Choisir
un lieu de vie
pour ses vieux jours
Le
sujet reste tabou au sein des familles. Choisir un lieu de vie pour ses
vieux jours s’apparente encore trop souvent dans nos esprits à “un
placement” par dépit, à un drame nécessaire. Les perspectives peuvent
pourtant être plus engageantes. D’aucuns y travaillent par un préalable: la
bonne information.
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© Pierre Rousseau/BELPRESS |
Rechercher
une maison de repos pour un proche parent âgé, Suzanne Cauderlier y a
été confrontée. A l’époque, elle n’avait pas obtenu les informations
valables et susceptibles de répondre aux attentes de ses beaux-parents.
Cette mauvaise expérience n’est sans doute pas étrangère à son
engagement d’aujourd’hui. Enseignante retraitée, elle compte parmi les
nonante volontaires d’Infor Homes Wallonie. Tous renseignent et
orientent les personnes en recherche d’une solution pour rester à
domicile, d’une maison de repos ou d’un autre lieu d’hébergement, que ce
soit pour eux-mêmes ou leurs proches.
Dans l’urgence
Souvent les demandes
sont marquées par l’urgence. Quand une hospitalisation se termine et que le
retour à la maison semble délicat. Quand il y a eu un accro, une chute par
exemple, et que les enfants sont très inquiets pour leur parent qui vit
seul. Quand un événement dans la vie des enfants – un déménagement, un
nouvel emploi… – vient bousculer l’organisation qui prévalait jusque là.
Pourtant la
précipitation n’est pas bonne conseillère, dirait la sagesse populaire.
Avec bonheur, on
remarque donc du côté d’Infor Homes que de plus en plus de personnes
préparent leur «devenir vieux». Atteignant la septantaine, certains ont
entamé la réflexion, balisé le terrain. Comme l’explique Christian Boulet,
également volontaire à Infor Homes Wallonie, il est plus satisfaisant pour
tout le monde de réfléchir à la question à l’avance. Les volontaires à
l’écoute peuvent alors prendre le temps de cerner ce que le consultant
attend (ndlr: c’est ainsi que sont nommées, dans le jargon, les personnes
qui s’adressent à Infor Homes), prendre le temps de mieux l’orienter, de
l’inciter à s’informer, à visiter plusieurs lieux, à y passer un moment...
«On ne choisit pas un lieu de vie comme un produit de consommation»,
lance-t-il franchement.
Surtout choisir
Le mot “choix” a tout
son sens aux yeux de Suzanne Cauderlier. Réserver une place par téléphone ou
ne visiter qu’un seul lieu, est-ce vraiment choisir? Et plus
fondamentalement pour la famille, ne pas interroger son aîné sur ce qu’il
souhaite et attend, ne pas l’associer à la démarche, est-ce vraiment
permettre un choix?
Elargir l’horizon
Infor Homes n’offre pas
“la” solution au consultant, mais propose des pistes à explorer. Et
aujourd’hui, l’association ne manque pas d’attirer l’attention sur des
alternatives méconnues, sur des combinaisons possibles avec le domicile par
exemple. A la personne de voir ce qui lui conviendra le mieux. Car un
individu n’est pas l’autre; un lieu d’hébergement n’est pas l’autre. Là où
l’un sera heureux, l’autre ne le sera peut-être pas. Outre les distinctions
entre les types d’hébergement (domicile, maison de repos, maison de repos et
de soins, résidences services, centre d’accueil de jour…), d’autres éléments
peuvent compter: être situé en centre urbain ou à la campagne, animaux de
compagnie admis ou pas, avec une vie communautaire intense ou moins… Ce
n’est pas en consultant un bottin de téléphone ou une autre liste du genre
telle qu’il en existe sur internet que l’on peut disposer d’une information
suffisante et de qualité, non biaisée par des objectifs publicitaires.
Le
maillage régional d’Infor
Homes Wallonie
C’est
avec quelque 90 volontaires, jeunes retraités pour la plupart, et une équipe
de cinq professionnels, qu’Infor Homes Wallonie fonctionne. 13 équipes
locales réparties sur l’ensemble du territoire wallon assure la mission
d’information et d’orientation des seniors. Certaines régions sont plus
achalandées que d’autres: si Charleroi peut s’appuyer sur une liste
d’attente de volontaires, dans la province du Luxembourg, le recrutement est
moins évident. Les distances à parcourir y participent sans doute.
Les volontaires
nourrissent leur connaissance du terrain par des visites régulières dans
les maisons de repos. Ni inspecteurs des infrastructures, ni placeurs de
seniors, ils s’apparentent davantage à des collecteurs d’infos. Combien de
personnes la maison héberge-t-elle? Comment la maison organise-t-elle
l’accueil des futurs résidents? Peut-on partager un repas en famille? Quel
type d’activités la maison propose-t-elle ? Est-il possible d’emmener des
meubles personnels? Y a-t-il un jardin? Comment se passent les toilettes ou
les soins? … Ils récoltent ainsi une série de renseignements précieux qui
leur serviront de base dans l’orientation des aînés.
Au départ d’un numéro
d’appel central, le relais est en effet assuré vers les volontaires de la
région concernée. Là, le maitre-mot est l’écoute. La discussion peut
durer plus d’une heure et laisser la place à l’expression d’une souffrance.
Des personnes qui se trouvent seules face à des décisions délicates. Des
familles épuisées qui se déchargent. «Souvent les proches se sentent
coupables, explique un volontaire. Nous essayons de dédramatiser autant que
possible les situations». Les attentes sont grandes et peuvent déborder:
certains souhaiteraient être renforcés dans leur choix, s’entendre dire
qu’ils ont pris la bonne décision, d’autres attendent que le volontaire
fasse les démarches pour eux… Les conseils ne manqueront pas mais le choix
restera celui du premier concerné.
Infor Homes Wallonie a
aussi d’autres missions. Elle dispose par exemple d’une commission des
plaintes. Celle-ci analyse les doléances de résidents ou de familles,
parfois de professionnels, à l’égard de la prise en charge des personnes en
établissement. Un manque de communication en est souvent la raison. Si la
plainte s’avère fondée, une médiation est d’abord envisagée. Dans certains
cas, elle est transmise aux autorités compétentes, comme le service
d’inspection des maisons de repos de la Région wallonne. Infor Homes
Wallonie agit également comme relais pour toutes questions concernant
des seniors. Maltraitance, pensions… elle renvoie vers d’autres
professionnels.
Infor
Homes Wallonie –
rue de la Tour, 7 à 5000 Namur - 070/24.61.31 du lundi au vendredi de 8h30 à
17h www.inforhomeswallonie.be
Et à
Bruxelles?
Pour
le territoire bruxellois, il existe une association Infor Homes distincte.
Cette dernière, plus ancienne que sa collègue wallonne, est constituée de
professionnels spécialisés qui offrent aussi ce service d’information et
d’orientation sur le terrain des maisons de repos. L’équipe fonctionne par
le biais d’entretiens personnalisés au siège de l’association ou à
l’antenne située aux Cliniques Saint-Luc à Woluwé. Une décentralisation bien
utile, car 25% des consultants qui entrent en maisons de repos, le font au
départ de l’hôpital.
Infor Homes Bruxelles
apporte aussi d’autres services: juridique, de médiation, de lutte
contre la maltraitance (en Wallonie, le pendant d’Infor Homes Bruxelles en
la matière est “Respect seniors”). Interface entre les usagers des services
aux aînés, les professionnels de ces services et les politiques, il joue
également le rôle d’observatoire.
Dans les cartons de
l’association bruxelloise, on trouve le projet d’un site internet
reprenant les différents établissements de la région, au travers de petits
flashs d’infos. Prévu pour janvier, il donnera accès à une description
sommaire des lieux avec quelques indications comme le prix, tout en invitant
à contacter Infor Homes pour s’informer plus avant.
Infor Homes Bruxelles
bd
Anspach, 59 à 1000 Bruxelles 02/219.56.88 -
www.inforhomes-asbl.be
Catherine Daloze
Idées reçues à propos des maisons de repos? |
Coûteuses?
Le prix est une
interrogation majeure qui conditionnera souvent le choix de
l’hébergement. Comme le remarque Marie-Pierre Delcour, directrice d’Infor
Homes Bruxelles, il n’est pas aisé de trouver une maison de repos en
dessous de 1.300 euros par mois. Même son de cloche du côté wallon,
où l’on avance une moyenne de 1.200 à 1.300 euros. Ceci sans compter
les frais médicaux et autres suppléments très variables selon les
services proposés.
Marie-Pierre
Delcour le constate l’implication financière des familles est
courante. Elles apporteront les compléments nécessaires,
témoigneront de leur solidarité à l’égard de leurs aînés. Tous n’ont
cependant pas de famille, tous ne vivent pas facilement cette forme
de “dépendance”.
Sinistres?
Les maisons de
repos pâtissent d’une image qui date, a pu constater Christian
Boulet, volontaire à Infor Homes Wallonie Charleroi. Fort d’une
quarantaine de visites en deux ans, il se dit heureusement surpris
par un «secteur dynamique, qui bouge et tente vraiment de
répondre au bien-être des résidents». Des normes contraignantes
rendent, cependant, la viabilité des établissements fort laborieuse,
au désavantage des petites structures notamment. Dans le domaine, la
marchandisation va bon train. La vigilance semble de mise.
Au complet?
Offre et demande
ne sont pas en équilibre, c’est un fait. Les listes d’attente sont
légion, tandis qu’un moratoire cadenasse le secteur jusqu’en 2011.
Marie-Pierre Delcour évoque la nécessaire révision de ce moratoire
et ajoute que l’élargissement de la palette des possibilités serait
bien utile, au niveau des lits en maison de repos et de soins
notamment.
La part belle
est aujourd’hui faite aux combinaisons créatives entre centre de
jour et domicile, aux transitions entre une résidence service et une
maison de repos, aux alternatives comme les habitats groupés. Comme
le remarque Marie Villance, coordinatrice d’Infor Homes Wallonie,
«le schéma classique de l’opposition entre maison de repos et
maintien à domicile se voit malmené et se doit de s’adapter». |
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