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Seniors (6 février 2014)

Dans le télescope des moins de 50 ans

© Flickr-srpb1001
 Bon à savoir 

On vieillit moins bien quand on a une mauvaise perception du vieillissement. “Des études menées sur des aînés l'ont montré”, explique Jean-Baptiste Dayez, chargé d'études à Énéo: “Ceux qui voient le vieillissement de manière négative sont aussi ceux qui, plusieurs années plus tard, ont tendance à être en moins bonne santé, à adopter moins de comportements préventifs (à quoi bon, puisque, selon eux, le vieillissement s’accompagne naturellement d’un déclin), à développer plus de problèmes cardio-vasculaires, à voir leur mémoire décliner davantage et à vivre moins longtemps (environ sept années de moins que ceux qui ont une vision positive du vieillissement)”.

Ainsi, veiller à sa vision de l'avancée en âge et lutter contre ses propres stéréotypes, c’est aussi s’assurer un vieillissement plus harmonieux, ajoute le chercheur.

Entre 15 et 49 ans, comment perçoit-on l'avancée en âge? Quelles attitudes a-t-on face à la vieillesse, face aux seniors ? Après avoir interrogé les aînés sur l'image qu'ils ont d'eux-mêmes, Énéo a enquêté auprès de leurs cadets. Résultats: les jugements ne sont pas trop sévères. Mais vieillir demeure indésirable.

Vieillir est inéluctable, certes. Il n'empêche: “rester jeune”, dans nos sociétés occidentales, compte parmi les ambitions largement partagées. On qualifie volontiers l'esprit du temps de “jeuniste”, exaltant la jeunesse, lui vouant une forme de culte. Est-ce à dire que la discrimination ou la dévalorisation règnent envers les plus âgés? Le mouvement social des aînés, partenaire de la Mutualité chrétienne, s'interroge. Avec une équipe de l'Université de Liège, Énéo tente de décrypter le regard que posent les moins de 50 ans sur leurs aînés. Comment les perçoivent-ils? À quel âge considèrent-ils qu'on est vieux?... Une enquête en ligne livre quelques observations intéressantes.

Même si, remarquent d'emblée les auteurs de l'étude, le panel de répondants n'est pas tout à fait représentatif de la population belge de moins de 50 ans. Il se révèle un peu trop féminin (trois femmes pour un homme ont répondu), un peu trop jeune (les moins de 30 ans sont majoritaires) et un peu trop diplômé (65% des répondants possèdent un diplôme de l'enseignement supérieur de type long).

Être vieux, le plus tard possible

À grand renfort de statistiques, de médianes, d'écarts-types…, l'étude conclut qu’aux yeux des répondants, la jeunesse se termine vers 45 ans, tandis que la vieillesse commence à 65 ans. Mais au-delà de ces chiffres absolus, fruit de moyennes, il est surtout remarquable d'observer que “les âges charnières reculent au fur et à mesure de l'avancée en âge du répondant”. Comme une mise à distance, l'âge de la vieillesse se place toujours plus loin : à partir de 65 ans, quand on a moins de 30 ans; à partir de 70 ans, quand on se situe entre 30 et 49 ans. Dans l'ensemble, vieillir n'est pas souhaité. Ainsi, dès 30 ans, “l'âge semble déjà être devenu un ennemi”, explique Jean-Baptiste Dayez, chargé d'études à Énéo. “On voudrait être plus jeune qu'on ne l'est, et on aime se sentir plus jeune et se croire perçu comme tel par autrui”.

Entre 50 et 65 ans, il y a comme un “no man's land”, observe également le chercheur. On n'est plus considéré comme jeune, et pas encore considéré comme vieux. Pas de qualificatifs pour cette tranche d'âge qu'Énéo englobait dans sa recherche. C'est à partir de 60 ans qu'une personne peut être qualifiée d’ “aîné”, indiquent les répondants. Viennent ensuite les termes “senior”, “retraité”, “pensionné”. Puis, avec la septantaine, les épithètes “ancien” et “personne âgée”. Toujours d'après les moyennes, l'usage du mot “vieux” ou “vieille” ne semble approprié qu’à partir de 72 ans. Énéo peut se réjouir d’avoir choisi le terme “aînés” pour définir son mouvement : il brasse ainsi la plus large tranche d'âges.

Sage, actif et malade… comme tout le monde ?

Explorer les stéréotypes – positifs ou négatifs – à l'égard des aînés faisait aussi partie des visées de l'enquête. Les répondants devaient, par exemple, se positionner par rapport à une série d'adjectifs qui pourraient qualifier les plus de 50 ans: “compréhensifs”, “sages”, “avares”, “lents”…

Bonne nouvelle pour les aînés: un tiers des répondants choisissent l’option neutre. Sans doute considèrent-ils que ces différentes facettes n’ont rien à voir avec l’âge. Quant aux autres réponses, elles se montrent dans l’ensemble positives. Les aînés sont, entre autres, considérés comme professionnellement expérimentés et intéressants. Reste que la discrimination relative à l'âge, appelée âgisme par les scientifiques (lire ci-dessous), n'est pas totalement absente de l'enquête. “Mais elle apparaît de manière indirecte et nuancée”, souligne Jean-Baptiste Dayez. Lorsque l'on demande aux répondants de citer spontanément des mots qu'ils associent aux personnes âgées, les termes à connotation négative sont loin d'être absents du tableau. Les maladies, l'isolement, la lenteur, la dépendance sont régulièrement cités. À propos de l'apparence – élément ô combien capital à notre époque –, on ira de “dentier” à “laideur”…

Se connaître “en vrai”

Le profil du répondant n'est pas sans influence sur son jugement. “Plus on appartient à un groupe différent des aînés – en clair, plus on est jeune –, plus on est susceptible de les juger négativement”, observe l'étude. A contrario, le fait d'avoir un sentiment de finitude plus important (une plus forte conscience que son temps de vie est limité) diminue l'appréciation négative. Tout comme le fait de côtoyer fréquemment des personnes âgées, surtout si elles sont en bonne santé. Ceci confirme le postulat que les contacts tordent le cou aux stéréotypes et réduisent la discrimination. “L’idée que le contact entre les groupes est bénéfique est très ancienne”, souligne Jean-Baptiste Dayez, qui en rappelle les nuances.

Cela ne peut fonctionner que si les relations sont harmonieuses entre les personnes (pas de hiérarchie ou de rapport de force…) et que si les profils en présence sont variés. Aux yeux d'Énéo, la rencontre entre générations reste la voie royale pour améliorer la perception que les jeunes ont de leurs aînés.

//CATHERINE DALOZE

>> Plus d'infos : Comment les aînés sont-ils perçus ?, dans Balises n°44, janv. 2014 • www.eneo.be • 02/246.46.73.

© Wikimedia

L'âgisme et les maux de l'âge

Refuser un logement à un étudiant parce que les jeunes sont bruyants et fêtards ; indiquer dans une offre d'emploi que l'on recherche des collaborateurs “jeunes et dynamiques”, comme si des personnes plus âgées l’étaient moins par définition; refuser d’inscrire à un cours de danse africaine une dame de 60 ans sous prétexte qu’elle n’en aura pas les capacités physiques…: autant de discriminations sur la base de l'âge que cite à titre d'exemple le Centre pour l'égalité des chances(1).

Le terme d'âgisme qualifie ces formes de ségrégation et d'exclusion. Comme on parle aussi du sexisme et du racisme. L'âgisme désigne l’ensemble des discriminations liées à l'âge, y compris celles qui touchent les jeunes. Il intègre donc des phénomènes tels que l'adultisme (la valorisation de l’âge adulte au détriment des autres âges) ou l'éphébiphobie (la peur de la jeunesse). Mais, le plus souvent, l'âgisme se réfère aux aînés. C'est d'ailleurs en évoquant les préjugés et la mise à distance ou l'évitement vis-à-vis des seniors que la notion a été définie dans le courant des années 1970.

Les âges balisent notre organisation en société. Ils cadencent l'accession à certains droits et la fin de certains dispositifs. Le vote est accessible à partir de 18 ans, la majorité sexuelle, acquise à 16 ans. La retraite professionnelle a ses règles d'âge… En bref, les âges “ronds” – s'ils posent question au regard de leur arbitraire – participent de notre manière de voir la vie, de la structuration de notre société. Ils renforcent aussi l'imaginaire collectif, selon lequel “jeune, j’apprends ; adulte, je travaille ; vieux, je me repose”, ou plus inquiétant “jeune, je suis à charge ; adulte, je finance ; vieux, je suis assisté”…Si l'âge peut agir comme un facteur de protection, il peut aussi être un facteur d'exclusion. Souhaitable parfois, le critère de l'âge peut se montrer injuste d'autres fois. Vigilance, donc.

D'autant que l'âgisme peut se faire insidieux. “L'enfer est pavé de bonnes intentions”, rappelle ainsi Jean-Baptiste Dayez, auteur de l'étude sur l'image des aînés à Énéo (lire ci-dessus). “Une part des conséquences de l'âgisme part d'intentions tout à fait louables”. Un des exemples courants de cet “âgisme bienveillant” qu'il évoque est le “parler personne âgée”. L'interlocuteur modifie sa façon de parler lorsqu'il s'adresse à une personne âgée : plus lentement, plus fort, avec des phrases raccourcies, des propos simplifiés… Ce qui peut être utile pour une frange des aînés se voit généralisé… abusivement.

//CD

(1) Lire le rapport annuel 2012 du Centre. Un focus y est consacré à la discrimination sur la base du critère de l'âge. Téléchargeable sur www.diversite.be (rubrique Publications). Infos : 0800 12 800

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