Médias (2 mars 2006)
L'Internet au cœur du
journalisme
Pour
beaucoup, le journalisme en ligne n'est encore qu'une autre façon de
distribuer les journaux : plus besoin de rotative, des délais plus
courts, un produit qui va directement du producteur au consommateur…
C'est ne pas voir qu'une nouvelle presse est en train de naître sur
Internet.
Certes, ce
n'est déjà pas si mal de permettre aux lecteurs de parcourir en ligne
leur journal préféré mais aussi ceux de la concurrence. Les journaux
connaissent ainsi une seconde vie. Ils ne finissent plus dans la
poubelle destinée au recyclage papier. Mais surtout, le journal
d'aujourd'hui, tout en restant pour l'essentiel un fournisseur de
nouvelles, est tout à la fois contenu, canal de diffusion, centre
d'archives, mise à jour en continu et lieu de débats sous forme
d'interactivité grâce aux nombreux blogs qui suivent les principaux
reportages sur les grands journaux d'information. Ainsi, le flux des
nouvelles n'appartient plus seulement aux journalistes. Internet offre
une réactivité que ne connaissait pas la presse écrite qui fonctionne
encore à sens unique : "Je publie, vous lisez" ou, pour la radio
et la télé : "Je diffuse, vous écoutez, vous regardez" avec comme
seul espace d'échange : le classique courrier des lecteurs.
Le
journalisme, précisément, ce n'est plus seulement un flux de nouvelles,
une rédaction qui parle à son public et lui fait parfois la leçon.
L'information, expliquent des journalistes ayant collaboré à la création
du site Internet du quotidien français Le Monde, est un triangle qui a
pour sommets l'événement, son traitement journalistique et la réaction
de l'audience. C'est cela "l'Internet installé au cœur du
journalisme" (1).
Le "journal à voir"
La presse,
si elle veut survivre, ne peut se contenter d'assister au développement
de l'Internet. Elle doit se saisir de ses atouts. Chacun devine qu'il
serait impensable de tenter aujourd'hui une opération telle que celle
qui fut lancée lors de l'apparition de la radio.
Quand la
radio s'est mise à diffuser pour la première fois des nouvelles, la
presse écrite était parvenue (aux Etats-Unis) à obtenir que les stations
de radio ne puissent diffuser plus de deux bulletins d'information par
jour, ne dépassant pas deux minutes, et cela bien après la mise en vente
des quotidiens… Bien évidemment, cela n'a pas duré. Depuis, la vie des
médias a toujours été une lutte sans merci pour la conquête de
l'audience.
La
compétition entre médias n'a jamais cessé. Et, depuis longtemps, la
presse écrite est confrontée à la concurrence du son, de l'image, de la
vidéo et des animations interactives comme le prouve son adaptation
constante de ces dernières années qui a vu se multiplier refonte de
maquettes, envahissement de la photo, recours généralisé à la couleur,
articles courts, titres plus parlants, comme si aujourd'hui, la lecture
ne pouvait plus être un effort. Le texte doit se voir comme une image et
tenir sur un écran ! Les Anglais ont d'ailleurs inventé le terme :
viewpaper (le journal à voir) en remplacement du newspaper (le journal
d'actualité).
Comme
l'expliquait le patron de presse Rupert Murdoch : "Je suis un
immigrant du numérique…[parce que] j'ai grandi dans un monde fortement
centralisé où les nouvelles étaient étroitement contrôlées par quelques
rédacteurs en chef qui jugeaient de ce que nous pouvions et devions
savoir." Or, le journalisme des temps numériques est tout le
contraire ! Il est décentralisé, interactif, ouvert, innovant. Il passe
la main à l'utilisateur. C'est le lieu de tous les messages instantanés
combinant son, textes, photos, vidéos… bref l'ensemble des moyens de
communication jusqu'ici dispersés.
La fin d'un modèle ?
Du côté des
journalistes, Internet s'imposera de plus en plus comme une source
continue d'informations dont ils ne pourront plus se passer. Les
libertés offertes par le réseau ouvert en continu sont aussi des
contraintes qui se sont imposées dans toutes les rédactions.
L'influence
de l'Internet ne cessera de s'étendre. C'est en tout cas ce que montre
une étude internationale menée dans 14 pays par une université de
Californie, qui indique qu'Internet est le premier média à entamer le
temps que les gens passent devant leur téléviseur et inverser une hausse
d'audience qui n'avait jamais faibli depuis 4 décennies !
On peut
hausser les épaules, mépriser Internet, dénoncer ses dangers… et surtout
- dans le monde de l'information - sa légèreté, ses contenus non
construits, disparates, diffusés sous l'urgence, pas assez recoupés…
mais constatons que les grands journaux, sans traîner, ont très vite
tenté d'innover en créant en ligne, parallèlement à la version papier,
des sites actifs qui montrent bien que l'information reste un métier,
une profession rigoureuse qui ne se confond pas avec le bavardage
médiatique spontané, même s'il est sympathique. Mais, ce qui est sûr,
c'est qu'un certain journalisme est en fin de course.
En ligne, le
modèle né dans les quotidiens de qualité d'une presse au statut de
quatrième pouvoir n’aurait-il plus d'audience à qui s'adresser? “Sous
l'effet des moteurs de recherche, d'une navigation inspirée par les
technologies et de la dynamique propre d'un média bâti comme une œuvre
ouverte, les sites sont traversés par une explosion de visites où l'on
serait en peine de retrouver le magistère classique d'une rédaction
s'adressant à ses lecteurs ou à ses auditeurs."
Marshall
McLuhan, prophète du réseau, décédé en 1980, c'est-à-dire avant
Internet, avait pressenti la portée du développement des médias
électriques, comme il disait alors. Il tenait la télévision pour un
média incomplet parce qu'il ne mobilisait pas l'ensemble des sens et de
l'individu. Avec Internet, il serait comblé et aurait assisté au
"retour à la vie tribale grâce au nouveau média électrique. Ayant
longtemps parlé de la condition de l'homme dans une société de masse,
nous pouvons nous préparer à écrire sur la condition de l'homme issu de
la masse dans un monde : individualiste.”
Christian Van Rompaey
(1) “Une
presse sans Gutenberg” - Jean-François Fogel et Bruno Patini. Grasset -
15,70 EUR.
La Fête de
l’Internet
Du 20 au 27 mars, Internet sera en fête pour la 6ème
année consécutive! Une multitude d'événements autour des
nouvelles technologies de l'information et de la
communication permettront à tous de découvrir ou redécouvrir
l'informatique, Internet et ses divers usages.
Les objectifs poursuivis par la Fête de l’Internet sont de
permettre l'accès de tous à l'Internet en encourageant des
opérateurs à inviter les non initiés à découvrir l'outil, de
valoriser les opérateurs qui visent à développer une
approche d'éducation, de recherche et de communication
critique de l'outil Internet et enfin de développer les
usages de l'Internet.
En bref, la Fête de l'Internet, c'est une semaine
"printanière" d'activités autour de l'Internet qui
s'organise un peut partout dans le pays à l’initiative
d’opérateurs aussi divers que des pouvoirs publics, des
associations, des bibliothèques, des entreprises, etc. Il
est d’ailleurs encore temps de développer un projet et de
l'inscrire au programme en souscrivant à la charte et en
allant sur le site d’'ESNET
www.fete-internet.be jusqu'au 15 mars.
La Fête de l'Internet s’articule autour de nombreuses
activités : colloques, rencontres, conférences, portes
ouvertes, initiations, projection de films autour des mondes
virtuels, cyber-soirées, jeux en ligne, création de blogs,
installations de webcams, collecte d'ordinateurs pour
reconditionnement, etc.
La Fête propose également un concours de sites web
francophones belges dont le but est de mettre en évidence
les bonnes pratiques informatiques et de donner un coup de
projecteur sur les réalisations les plus réussies dans 10
catégories (blogs, éducation permanente, institution
culturelle, personnel, …). Ce concours est ouvert jusqu'au
15 mars.
En plus des activités proposées pendant la Fête (voir le
site d’ESNET), plusieurs événements enrichiront le programme
:
• Lundi 20 mars :
colloque d'ouverture : Les communautés virtuelle, leviers
pour la cohésion sociale ? - Parlement fédéral à
Bruxelles.
• Mardi 21 mars :
colloque : Cyber-Haine, racisme et discrimination sur
Internet. Organisé par le Centre pour l’Egalité des
Chances au Cabinet du ministre de l’intégration sociale à
Bruxelles
• Mardi 21 mars :
Rencontres sur le thème de l’Accessibilité - Centre
culturel Jacques Franck à Saint-Gilles.
• Mercredi 22 mars :
colloque : Les services publics communaux, next
generation? – Centre Flagey à Ixelles.
• Jeudi 23 mars :
colloque : Services publics et mutualisation informatique
et remise des prix du concours de sites web -
Parlement de la Communauté française à Bruxelles.
• Lundi 27 mars :
rencontres wallonnes de l'Internet citoyen - Centre de
congrès CEME à Charleroi.
La Fête de l’Internet est organisée par l’asbl ESNET
- rue de Steppes, 24 – 4000 Liège.
Rens. 04/275.02.82. www.esnet.be –
info@esnet.be |
|