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Jeunes (1er juin 2006)


 

“Au secours, on veut m’aider!”

 

Sous le titre “Au secours, on veut m'aider!”, Claude Seron, psychopédagogue liégeois, publie un ouvrage sur le thème de l'aide aux adolescents en rupture, en détresse… Il nous explique l'objet de ce travail au titre paradoxal.

 

Claude Seron : "Au secours, on veut m'aider" évoque un double mouvement présent chez le jeune en grandes difficultés. Même s’il revendique de plus en plus de liberté, si ses parents le laissent faire à peu près tout ce qu’il veut, sans superviser ses allers et venues, ses activités, il peut le vivre comme une forme d’abandon, d’indifférence à ce qui peut lui arriver. Il a besoin que les adultes s’intéressent à ce qu’il vit, à ce qu’il fait. Mais s’il est enlisé dans des problèmes récurrents, il n’est pas évident pour lui d’exprimer une demande d’aide, surtout auprès d’un professionnel.

Ainsi, dans mon livre, je propose des récits de tranches de vies partagées avec ces adolescents "abandonniques", c'est-à-dire ces jeunes qui n'arrivent pas à identifier clairement les sources de leur mal de vivre, qui sont perpétuellement en guerre contre l'entourage, énonçant d’interminables listes d’injustices et de revendications, faisant ainsi payer à autrui toute la souffrance qu’ils traînent avec eux depuis très longtemps.

A l’adolescence, le corps et l'esprit de l'adolescent connaissent une révolution intérieure qui le fragilise. Il craint que celui qui aurait accès à son monde intime, ses pensées torturées et ses doutes ne profite de ce moment de faiblesse pour le fragiliser encore davantage. Plus l’adolescent est en difficulté identitaire, plus le regard que les autres portent sur lui va être déterminant au niveau de ce qu’il se raconte à propos de qui il est. Même s’il est en grande souffrance, à quoi bon aller trouver un psy ; ses problèmes, il a la conviction de les connaître par cœur. Il ne voit pas en quoi la parole et l’écoute pourraient modifier quoi que ce soit. Pire, comme il sait maintenant que les mots ne servent pas uniquement à décrire des objets inertes mais aussi à communiquer des émotions et des sentiments, il se méfie de ce qu’il dit. Il n’a pas envie qu’un psy le perce à jour, le piège à travers ses questions suspectes et l’étiquette en vertu de l’une ou l’autre de ses théories de référence. Aussi, je propose différents repères pour guider les pas des adultes, désamorcer les escalades de comportements violents ou autodestructeurs et aider ces jeunes à sortir de scénarii dont l’issue est prévisible : l’abandon. Parce que, pour l’adolescent abandonnique, il semble plus évident de solliciter la haine que de rechercher l’amour lorsqu’il s’agit de se mettre à l’abri du rejet.

 

En Marche : Quelle est la proportion de jeunes concernées par les pratiques spécifiques que vous décrivez dans votre ouvrage?

Claude Seron : Nous savons que 30 à 40% des jeunes commettent des délits au moment de la puberté. Les trois-quarts de ces infractions sont des vols ou dégradations de lieux publics ou de biens ne leur appartenant pas. 3 à 4% d’entre eux vont persister sur la voie de la délinquance au-delà de 24 ans. On devine l’importance de la réaction des adultes face à ces adolescents qui se cherchent et réclament une attitude contenante (et non emprisonnante) de la part de leur entourage.

 

 

 

 

 

L'adolescence est le début
de la prise de distance avec les parents,
la prise de tous les risques.

 

EM : Vous parlez de l’importance de la réaction des adultes face aux multiples expressions de la crise des adolescents. Quelles sont les attitudes les plus adéquates?

Claude Seron : Le fait que l’adolescent soit souvent en pleine contraction exige beaucoup de souplesse dans les réponses que lui apportent les adultes. En effet, il exprime rarement de manière explicite ses désirs contradictoires ; il réclame simultanément davantage de liberté tout en montrant qu’il a encore besoin de protection. Il sait qu’il doit apprendre à s’opposer aux adultes pour conquérir son indépendance mais cela ne peut se construire que dans un environnement empreint de sécurité. Face à ces “foutez-moi la paix et intéressez-vous à moi, soutenez-moi” concomitants, les adultes doivent faire preuve d’une grande tolérance à l’ambiguïté et ne pas toujours s’arrêter aux comportements manifestes mais bien aux besoins sous-jacents. Trouver des réponses adaptées aux difficultés des ados et non à nos problématiques d’adultes n’est évident pour personne ; ce qui fait dire à certains sociologues dont Michel Fize que la crise d’adolescence est peut-être avant tout la crise des parents, des enseignants et des éducateurs (1).

EM : Quelles sont les réactions qu’il est préférable d’éviter?

Claude Seron : Plusieurs attitudes parentales s’avèrent insécurisantes, voire même insupportables pour l’adolescent. Lorsqu’il adopte des comportements inquiétants et observe que cela fait peur aux adultes qui l’entourent, il finit par avoir peur de la peur qu’il suscite. Il le remarque, par exemple quand les parents sont perpétuellement dans l’évitement du conflit. Le fait d’être considéré par ses parents ou ses enseignants comme un enfant très vulnérable de qui on ne peut rien attendre et encore moins exiger, ne l’aide pas non plus, au contraire !

En Marche : Il n’est pas toujours évident de lire entre les lignes pour arriver à décoder les réels besoins de l’adolescent en difficulté…

Claude Seron : En effet, quelquefois, à travers ses symptômes, dont la signification échappe à son entourage, le jeune exprime un vécu traumatique à propos duquel il ne s’est jamais confié à personne. Il peut aussi mettre en scène la douleur sourde et congestionnée qu’il a reçue en héritage de ses parents, souvent bien malgré eux. Cette souffrance, jamais reconnue par personne, que les parents ont enterrée sous une chape de plomb avec l’espoir de l’oublier et d’y survivre, peut continuer à suinter 20 ou 30 ans plus tard et affecter le tissage du lien d’attachement entre le parent et son enfant. L’enfant ou l’adolescent va mal et effectivement, il n’est pas toujours évident de trouver l’origine de son mal de vivre et d’attribuer un sens à ses symptômes.

L’adolescence est aussi un tournant dans la manière de vivre et d’exprimer ses attachements. Le jeune supporte moins les contacts physiques avec ses parents. L’explication est à la portée de tout parent sensé qui, même s’il en souffre, la comprend aisément : du moment où il devient nubile, l’adolescent a besoin de s’éloigner physiquement pour apprendre à désirer ailleurs. C’est l’âge où l’affection se manifeste, à distance, par l’estime et le respect (2).

 

En Marche : En définitive, à qui s’adresse votre livre?

Claude Seron: J’ai choisi délibérément un style simple pour aborder des problématiques complexes, sans tomber dans le piège de trop les simplifier ou les minimiser. J’ai évité au maximum d’avoir recours à un jargon “psy” afin d’être compris par les destinataires du livre : les professionnels de la relation d’aide, de l’éducation, du social, de la santé mais aussi les enseignants et les parents confrontés à des jeunes qui se murent dans différentes formes d’indifférence à eux-mêmes.

 

 (1) Michel Fize a rédigé un chapitre dans le deuxième tome de “Au secours, on veut m’aider!”.

 (2) Maryse Vaillant, Il m’a tuée, Paris, Éditions de la Martinière, 2002.

 

Deux livres pour comprendre l’adolescence en détresse

"Au secours, on veut m'aider !" Les deux ouvrages qui viennent de paraître portent le titre que l’asbl “Parole d’Enfants” a donné à un congrès organisé au grand amphithéâtre de l’UNESCO à Paris en novembre 2003.

Le premier tome invite le lecteur à suivre Claude Seron, à travers son parcours professionnel, dans l’accompagnement d’adolescents en souffrance qui se murent dans différentes formes d’indifférence à eux-mêmes.

Le second tome reprend les contributions des différents orateurs au congrès.

Le premier tome (près de 300 pages) est divisé en 5 grandes parties.

Le premier chapitre parle du vécu des adolescents abandonniques et la manière dont les éducateurs tentent de construire une relation restauratrice avec eux leur permettant de retrouver une sécurité de base et d’abandonner les comportements destructeurs et effrayants qu’ils mettent en actes.

Le second chapitre est consacré à une problématique encore peu connue car les personnes qui en souffrent hésitent à le faire savoir à l’extérieur de la maison : cela concerne les parents victimes des mauvais traitements que leur infligent leur adolescent(e)

Dans la troisième partie, Claude Seron parle des enfants parentifiés, c'est-à-dire de ces jeunes qui portent les valises de leurs parents en grande difficulté.

Comprendre et agir dans les situations où il y a explosion de la violence et de la délinquance des jeunes ayant subi des injustices est l’objet du quatrième chapitre.

Quant au cinquième chapitre, il aborde le problème des agressions sexuelles sur mineurs. Claude Seron expose des manières concrètes d’accompagner les victimes, les jeunes agresseurs ainsi que leurs parents. C’est d’ailleurs une préoccupation constante de l'auteur : apporter des éclairages utiles aux adultes qui s’occupent 

de jeunes en

souffrance et qui ne se laissent pas facilement approcher.

“Au secours, on veut m’aider!” Venir en aide aux adolescents en révolte, en rupture, en détresse… Éditions Fabert, Paris, 2006.

• Tome 1 : textes de Claude Seron, psychopédagogue au Centre liégeois d’intervention familiale et à l’asbl “Parole d’Enfants”.

• Tome 2 : documents du Congrès organisé par "Parole d'Enfants" (Paris 2003) sous la direction de Claude Seron.

Ces deux ouvrages peuvent être commandés par écrit au service librairie d’en marche (voir bon de commande en page 14). Prix :

25 EUR le tome. Prix En Marche : 22,50 EUR. Frais de port en sus.

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