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Jeunes (2 août 2007)


 

 

Le poker n’est pas un jeu d’enfant!

Depuis quelques années, le poker connaît un véritable engouement y compris chez les jeunes. Les joueurs s’y adonnent volontiers sur Internet et participent à des tournois organisés illégalement. Le collège des Procureurs généraux, la Commission des jeux de hasard et le CRIOC font la lumière sur ce phénomène et plaident pour une politique cohérente de protection du joueur.

 

Le jeu de poker connaît un succès de plus en plus grand au niveau mondial et la Belgique n’est pas en reste. Il suffit de constater la croissance exponentielle sur internet des sites de jeux aux offres attrayantes mais aussi la couverture médiatique des grands tournois sur certaines chaînes de télévision, commentés par des vedettes du show bizz. «Il est temps de réagir car le poker se développe dans toutes les strates de la population et dans toutes les tranches d’âge», explique Cédric Visart de Bocarmé, Procureur général de Liège, en précisant que le “Texas Hold’em Poker”, la forme la plus en vogue de poker (1), a même fait son entrée dans les bureaux et les cours d’école.

 

Compétitions risquées

Dans les débits de boissons également, ce jeu de hasard – n’en déplaise à ceux qui n’y voient qu’un jeu d’adresse et de tactique, la distribution aléatoire des cartes relève bien du hasard – se substitue peu à peu aux jeux conventionnels. L’engouement est tel que d’aucuns ont compris l’intérêt financier à organiser des tournois en dehors des casinos qui sont pourtant les seuls autorisés à proposer ce jeu à leur clientèle de plus de 21 ans (un seul tournoi annuel est autorisé par casino).

Ces compétitions clandestines attirent souvent les milieux mafieux et criminogènes et les joueurs qui y participent n’ont aucune garantie sur l’honnêteté du jeu ni sa sécurité (pour preuve les récents hold-up sanglants à Gembloux et Schaerbeek). L’organisation de ces tournois illégaux (pourtant annoncés à grand renfort de pub dans les journaux!) comporte également bien d’autres risques et dérives: absence de contrôle des joueurs (les personnes interdites de jeu et mineurs d’âge sont acceptés), risque d’endettement (les sommes échangées peuvent être conséquentes compte tenu du rachat toujours possible de jetons pendant toute la partie), risque évident d’accoutumance au jeu, en particulier chez les jeunes et les personnes fragiles. Sans parler de l’énorme fraude fiscale et sociale inhérente à ces activités clandestines…

Comme le rappelle Cédric Visart de Bocarmé, l’organisation illégale de telles parties est punissable de peines de prison ou d’amendes dès lors qu’elles impliquent des mises de plus de 22 centimes et des gains de plus de 6,20 euros. Une circulaire invite d’ailleurs les parquets à lutter prioritairement contre l’organisation de l’exploitation du jeu, une tolérance existant par rapport au jeu de poker entre amis, à la maison où les gains sont généralement peu élevés.

 

Sur Internet aussi

L’engouement pour le poker vient aussi d’Internet où prolifèrent les sites étrangers de jeux de hasard (en Belgique, l’exploitation de tels sites est interdite). Ces sites sont particulièrement attractifs pour les jeunes, familiarisés avec Internet. Car pour y accéder, il n’y a rien de plus simple. Quel que soit son âge, il suffit de s’inscrire même sous un faux nom, de fournir les chiffres affichés sur n’importe quelle carte de crédit (c’est dire le risque encouru par les propriétaires de carte de crédit, qui ont pu être abusés lors d’une transaction dans un établissement… ou par leur enfant), d’introduire un montant à débiter et de fournir le mot de passe de son choix. Le jeu peut alors commencer. Comme par hasard, lorsqu’on mise peu (ou que l’on joue gratuitement, ce qui est proposé comme jeu d’essai), on gagne toujours. Mais quand les mises augmentent, c’est une autre histoire... Par ailleurs, tout est fait pour que le joueur accrédite toujours plus son compte. S’il veut à un certain moment récupérer ses gains, il doit alors sortir de l’anonymat et fournir une adresse à laquelle un chèque lui sera envoyé. Encore faut-il gagner, sans rejouer…

«La plupart des sites proposent des jeux virtuels mais certains présentent des parties “en live” avec tables, croupiers et webcams… installés à l’autre bout du monde», raconte Emmanuel Mewidden, administrateur-délégué des casinos de Spa et de Namur, pour l’avoir vu de ses propres yeux dans un établissement aux Philippines!

«La plupart des sites de jeux de hasard étrangers échappent à tout contrôle, toute taxation, toute obligation légale, et brassent des sommes colossales sans aucune garantie de sérieux pour les joueurs. Comme les tripots clandestins, ils représentent une concurrence déloyale par rapport aux casinos», ajoute Emmanuel Mewidden qui plaide pour diminuer le taux d’imposition des jeux de poker afin de les faire revenir dans les lieux encadrés et réglementés que sont les casinos, et tuer les organisations illégales (2). «S'il existait une offre belge sur Internet proposant des garanties de solvabilité et de transparence, les joueurs se dirigeraient sûrement vers elle», assure Antoinette Brouyaux, responsable de la communication au CRIOC.

La Commission des jeux de hasard et le CRIOC plaident pour un cadre légal uniforme pour tous les jeux de hasard afin d’assurer à ce secteur une réelle cohérence et mieux protéger les consommateurs-joueurs, vu les risques de dépendance et ses conséquences dramatiques sur les plans social et financier. «Compte tenu du fait que les jeux de hasard dépassent les frontières, il est urgent que ce dossier soit mis à l’agenda de l’Union européenne pour une politique cohérence et harmonisée. Nous appelons le futur gouvernement fédéral à agir dans ce sens», martèle Etienne Marique, Président de la Commission des jeux de hasard.

Joëlle Delvaux

 

(1) Dans ce type de poker, chaque joueur (de 2 à 10) reçoit deux cartes face cachée puis 5 cartes sont distribuées sur la table. L’objectif est de faire la meilleure main possible en utilisant 5 des 7 cartes à disposition.

(2) Le jeu de poker est taxé comme les jeux de pari à 11% des mises alors que les autres jeux de hasard sont taxés sur le produit brut des jeux.

 

 

Les jeunes, le jeu et l’argent

D’après une enquête réalisée en 2006 par CRIOC auprès de 2305 jeunes entre 10 et 17 ans, deux jeunes sur cinq disent avoir déjà joué pour de l'argent, ce qui représente une nette augmentation par rapport à 2005 (1 jeune sur 4). Ils dépensent en moyenne 6,50 euros par mois mais certains peuvent consacrer jusqu’à 40 euros à cette activité. L’âge moyen pour commencer à jouer est de 11 ans et 8 mois.

Les jeux d’argent préférés semblent être les billets à gratter (33 %), les salles de jeux et le Lotto (30%), puis les jeux de carte (7%) et sur internet (6%) (dont le poker pour ces deux dernières catégories). Les effets du jeu ne sont pas insignifiants quand on sait que 6% se déclarent être attirés de manière permanente par le jeu, que 4% disent utiliser le jeu comme un exutoire à leurs problèmes et que 3% dissimulent le fait qu’ils jouent à leurs proches.

En conclusion, trop de jeunes jouent aujourd’hui à des jeux d’argent interdits par la loi mais accessibles sans problème ou d’acquisition facile. A cet égard, on peut s’inquiéter du fait que 85% des points de vente visités en Belgique par des mineurs d’âge lors d’un "mystery shopping" mené en 2006 à l’initiative du CRIOC ont accepté sans réserve de leur vendre un billet à gratter ou de Lotto alors que cela leur est interdit! La Loterie Nationale a d’ailleurs mené une campagne d’information auprès des points de vente pour leur rappeler la législation à cet égard.

 

Sans attendre que des mesures de protection plus efficaces soient prises à l’égard des jeunes, le CRIOC est en train de développer, dans le cadre du projet Safer Internet (www.saferinternet.be), des pages informatives et pédagogiques sur la problématique du jeu en ligne, en étant attentif à ne pas verser dans le catastrophisme qui peut décrédibiliser la prévention, surtout parmi le public cible des jeunes.

JD

(1) 95% en Flandre, 60 % en Wallonie et 56 % à Bruxelles.

 

 

 

Au hasard d’une vie meilleure…

Le jeu existe depuis la nuit des temps et répond à un besoin normal de divertissement, de vertige, de déguisement, de compétition aussi. Mais dans notre société, les jeux qui touchent à l’argent ont pris une place considérable, démesurée même, envahissant les médias et la publicité, s’engouffrant dans les foyers, racolant des joueurs de plus en plus jeunes.

 

Dans le jeu, il est question d’argent, de beaucoup d’argent. En Belgique, selon les estimations les plus prudentes citées par la Commission des Jeux de hasard, tous les secteurs légaux des jeux de hasard génèrent un revenu brut annuel (chiffre d’affaires moins gains payés) de 1,2 milliards d’euros. Rien que les données financières de la Loterie Nationale, leader sur le marché (75% des parts de marché), donnent le vertige: 1,2 milliards d’euros de chiffre d’affaires en 2006, soit une progression de plus de 21,4 % en trois ans à peine, notamment grâce au succès de l’Euro Million (1). Rien que pour une cagnotte spéciale de lotto un vendredi 13, par exemple, les Belges jouent pour quelque 25 millions d’euros (un milliard de francs belges)! On croit rêver!

D’après une étude menée par la Loterie Nationale sur les dépenses des Belges en jeux de hasard (jeux de la Loterie Nationale mais aussi casinos, jeux TV payants, paris sportifs, jeux dans les cafés, jeux sur Internet…), 75 % des Belges de plus de 18 ans jouent au moins une fois par an à un jeu de hasard payant. Ils dépensent en moyenne 575 euros par an. Les plus gros joueurs sont des hommes, francophones, âgés de 35-44 ans et de classe sociale basse.

Si l’on ajoute à ces chiffres officiels le circuit illégal des jeux, les activités de jeu développées à l’étranger et les jeux de hasard sur Internet, on mesure l’ampleur du phénomène. Une ampleur qui n’est pas prête de s’arrêter, les jeux proposés via les canaux interactifs et nouvelles techniques de communication n’étant encore qu’à leurs balbutiements.

 

Rêves de richesse

Depuis bien longtemps déjà, les gens ne rêvent plus de changer le monde mais de se remplir les poches et plus encore de devenir riches, «scandaleusement riches»… Quand le chômage devient structurel, quand les salaires et les pensions restent bloqués, que les livrets d’épargne ne rapportent plus grand-chose, que l’on perd ses repères ou qu’on a du temps à tuer, on s’en remet à Dame Fortune, le hasard devenant le seul espoir d’une vie meilleure, l’illusion du gain facile étant entretenue de manière irrationnelle dans l’opinion publique.

Si la toute grande majorité de ceux qui parient plus ou moins régulièrement sur un jeu de hasard le font par plaisir et avec modération, le Service public fédéral de la Justice estime à 135.000 le nombre de joueurs pathologiques dans notre pays, plus de 31.000 étant interdits judiciaires ou volontaires des salles de jeux et casinos. Lorsque l’on sait que la plupart de ces accros ont commencé à jouer très jeunes, on mesure l’importance de mener un travail de prévention auprès des mineurs d’âge pour que le jeu reste ludique et ne se transforme pas un jour en cauchemar pour lui et son entourage…

JD

 

(1) Source : rapport annuel et rapport financier 2006 de la Loterie Nationale. Ces rapports sont consultables en ligne sur le site www.loterie-nationale.be

 


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