Jeunes
(2 octobre 2008)
Enfants
“délinquants”,
parents en “stage”…
En
2006, la protection de la jeunesse - entendez la justice des mineurs - est
réformée. Au pas de charge diront certains, comme pour répondre à l’émoi
provoqué par la mort de Joe Van Holsbeeck. Parmi les mesures adoptées,
l’instauration d’un stage parental. Ce dernier est mis en œuvre depuis
presque un an. Bref retour sur son émergence et ses premiers résultats.
Outre
la responsabilisation des jeunes ayant commis un fait qualifié d’infraction,
la réforme de la Loi dite de 1965 a mis l’accent sur la responsabilisation
des parents. Elle entend éviter les chaises vides répétitives et tenter de
“remobiliser” les parents s’ils manifestent un “désintérêt caractérisé”. Ils
seront dorénavant prévenus de l’arrestation de leur enfant, conviés aux
audiences et pourront faire l’objet d’une mesure appelée stage parental.
Pas d’unanimité
Le principe d’un stage
parental avait soulevé nombre de questions quant à sa mise en pratique en
Communauté française. Les réticences du secteur de l’Aide à la jeunesse
censé endosser la mesure et la traduire sur le terrain disaient la crainte
voire l’opposition de certains face à cette nouvelle mission. Le stage en
tant que sanction des parents n’aura-t-il pas un impact négatif sur
l’autorité morale de ces derniers? Ne sera-t-il pas décrédibilisant? Et
puis, qui peut se targuer de “prescrire des comportements parentaux idéaux”?
Qui peut prétendre que l’autorité parentale est une compétence que l’on
acquiert?
Des parents à soutenir pour qu’ils retrouvent l’estime d’eux-mêmes. |
Au final, il y aura peu
de candidats à la mise en œuvre de la mesure, mais une proposition retiendra
l’attention. Elle émane du directeur du Pensionnat Henri Jaspar (service
d’accueil et d’aide éducative et centre d’accueil d’urgence). Un nouveau
service voit ainsi le jour, il prend le nom “Affiliations”. Une équipe est
alors constituée avec 14 travailleurs. Une méthodologie de travail est
conçue et s’expérimente.
Des parents dans l’impasse
Depuis un an
approximativement, la mesure est donc effective. Le Parquet jeunesse peut
proposer un stage parental, le Tribunal de la jeunesse l’imposer. Vol
simple, vol avec violence, fait de mœurs, coups et blessures, dégradation,
délit de stupéfiants… sont autant d’actes commis par les enfants de ces
parents pour qui le stage parental est estimé utile, en parallèle avec une
mesure destinée au jeune. De l’avis des intervenants du service
Affiliations, aucun parmi la septantaine de parents rencontrés jusqu’à
présent ne se désintéresse fondamentalement de ses enfants. Certes,
certaines attitudes peuvent être interprétées en ce sens. Des parents qui
nient les faits, en sont complices, fuient la justice faute de confiance en
ces instances, ou encore qui surprotègent leurs “petits”… Mais au fond, ce
sont surtout des parents en survie, des parents face à des impasses
éducatives qu’il y a lieu non pas d’éduquer, mais de soutenir pour qu’ils
retrouvent l’estime d’eux-mêmes.
Experts de leurs familles
Alors dès le début, lors
de la proposition du Parquet ou du prononcé du juge, les intervenants du
service Affiliations tiennent à être présents. Cette présence, ils
l’envisagent comme un signe qu’ils ne sont en aucun cas le bras armé de la
justice qui sanctionne, que leur rôle est autre: celui de l’aide. Une aide
qui se gardera de toute stigmatisation, en évitant les jugements, en axant
l’intervention sur la collaboration. “Seuls les encouragements sont
constructifs, la confrontation vient des parents eux-mêmes”,
remarque-t-on du côté d’Affiliations.
La position des
intervenants se veut humble. Ils ne savent pas plus ou mieux, mais tentent
de détecter avec les parents les expériences positives, les exceptions dans
les années de galère qu’il s’agira d’amplifier, sur lesquelles ils pourront
s’appuyer. C’est par les parents que seront peu à peu dégagés des objectifs
prioritaires: des objectifs réduits, atteignables. “Moi, je voudrais
arrêter de boire”, dira ce papa. “Que faire à la place?”,
réfléchira-t-il avec l’aide de l’équipe. Se succèderont sur 50 heures, des
entretiens à domicile et des rencontres en groupes multifamiliaux, où les
jeunes sont admis, où se croisent les expériences similaires, où s’échangent
les compétences.
“Il me respecte
plus”, “elle m’insulte moins”, “il rentre à l’heure fixée”, “j’ai moins
honte de sortir, je peux marcher la tête haute”… sont autant d’avancées
pour ces parents qui regagnent peu à peu l’estime d’eux-mêmes. La mesure est
en tout cas à disposition des juges et des procureurs du Roi, qui y
recourent de manière variable aujourd’hui. Quant au secteur de l’aide à la
jeunesse, la méthodologie expérimentée par Affiliations semble le rassurer,
tout en marquant sa vigilance pour l’évaluation du dispositif.
Catherine Daloze
Infos:
Affiliations - 02/520.58.94
http://users.telenet.be/affiliations/
De l’aide? |
Allô Info
Familles - 02/513.11.11
-
est une
ligne téléphonique mise en place en Communauté française à
l’intention des parents, afin de les informer, de les orienter ou
simplement de les écouter dans leurs difficultés – petites ou
grandes – avec leurs enfants. |
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