Handicap
témoignage
(6 novembre 2008)
Un avenir
pour “tous” les enfants
Situé
en Brabant Wallon, “le Chat Botté” est un centre d’accueil de jour et de
stimulation précoce pour des enfants de 0 à 6 ans présentant principalement
un syndrome autistique ainsi que des troubles du développement. “Ces enfants
doivent être pris en charge et stimulés dès que possible pour que leur
avenir soit aussi proche que possible du quotidien de tous les enfants” nous
expliquent sa directrice et psychologue, Sarah Terelle, ainsi que Céline
Lavallée, Présidente de l’association des parents (1).
Un
centre dédié
aux enfants de 0 à 6 ans présentant des symptômes
d’autisme et des troubles du développement.
Gabrielle
est au “Chat Botté” depuis près de deux ans et demi. Elle va avoir 5 ans. Sa
maman, Céline Lavallée, raconte: “Nous avions remarqué que Gabrielle ne
réagissait pas quand on l’appelait. Elle semblait enfermée dans son monde.
Ses échanges avec les autres étaient limités. Nous pensions même qu’elle
était sourde, ce que n’ont pas confirmé les tests de dépistage de la
surdité. C’est qu’il y avait un autre problème… Nous avons alors été orienté
vers un centre de référence (2) attaché aux Cliniques Saint
Luc à Bruxelles, qui a détecté à la suite de tests psychologiques, de
logopédie… des retards de développement avec la présence de traits
autistiques.”
A la suite de ce
diagnostic la maman de Gabrielle a pris contact avec le “Chat Botté”. Trois
journées d’observation ont permis de tracer le portrait de Gabrielle,
d’évaluer ses compétences, ses besoins et la manière dont elle réagit à ce
qui se passe autour d’elle… Une large discussion entre les parents et les
professionnels du centre a permis d’envisager une prise en charge et de
parler des modalités de celle-ci.
“Heureusement, précise
madame Terelle, psychologue et directrice du “Chat Botté”, le diagnostic
se pose de mieux en mieux et de plus en plus tôt. Il est important pour
l’avenir que l’enfant soit stimulé le plus tôt possible. Le dépistage ne se
fait pas au “Chat Botté”. Il y a 7 centres de référence, spécialisés dans le
dépistage, rattachés à des hôpitaux universitaires, comprenant des équipes
pluridisciplinaires avec un médecin à leur tête, neuropsychiatre,
pédopsychiatre ou neuropédiâtre.”
Partir des atouts de l’enfant
Gabrielle progresse très
vite. Certes, après deux mois elle ne parlait toujours pas, mais elle
répondait à son nom, regardait son interlocuteur, souriait… “Ensuite,
elle s’est mise à exprimer des demandes par rapport à ses besoins comme la
nourriture alors que jusque là, c’était nous, les parents, qui devions lui
faire des propositions. Puis elle a commencé à interagir avec ceux qui
l’entourent en demandant des objets. Cela, c’est le progrès le plus
flagrant. Bien sûr, ces enfants ne jouent pas comme les autres, n’ont pas
les mêmes comportements ou la même façon de tenir un crayon… Mais Gabrielle
commence à jouer. Même si ce n’est pas de façon adéquate, elle montre de
l’intérêt pour ces jeux. Et c’est pour nous un grand progrès!”
Mais à la maison, chez
des amis… peut-on observer les mêmes progrès? “Pas du tout, explique
sa maman. Gabrielle a des comportements très différents. Des compétences
acquises au centre ne fonctionnent qu’au centre. Le problème de Gabrielle,
comme celui des autres enfants du “Chat Botté” c’est qu’en dehors du Centre
ces enfants sont totalement perdus. Dès qu’on les sort de leur cadre de vie
habituel les enfants autistes ont des comportement exacerbés. Ainsi, nous
pensions pouvoir prendre des vacances avec Gabrielle et cela a été l’enfer
alors que tout allait bien au Centre ainsi qu’à la maison. Mais elle avait,
dans cette maison de vacances, perdu ses points de repères. Elle semblait
régresser… mais tout est rentré dans l’ordre quand nous sommes rentrés.”
Tout changement dans le
temps ou dans l’espace peut effectivement affecter l’enfant au point de voir
réapparaître des comportements que l’on croyait disparus. Les enfants qui
souffrent d’autisme ont tendance à être rigides. Ils répètent les mêmes
choses. Ils font les mêmes gestes, Ils répètent les mêmes activités,
“mais nous essayons de ne pas les enfermer dans cette rigidité, explique
madame Terelle. Nous essayons de modifier leur environnement tout en
préservant quelques points de repère essentiels qui les sécurisent, qui les
rassurent afin de leur permettre de progresser. Ainsi, avec les parents,
nous essayons de diversifier la nourriture des enfants qui sont très
sélectifs dans leur alimentation.” Certes, chacun d’entre nous vit aussi
de gestes rituels répétés tout au long de la journée. Mais chez un enfant
autiste, rien n’est spontané.
Des perspectives encourageantes
Au “Chat Botté” l’équipe
travaille avec des méthodes anglo-saxonnes permettant une prise en charge
individualisée dans chacun des gestes dans la vie courante : “Nous
insistons beaucoup sur le caractère pluridisciplinaire de notre approche,
c’est-à-dire la combinaison de pratiques éducatives très structurées,
individualisées aux besoins de chacun et proposées à un rythme soutenu aux
enfants afin d’augmenter leurs chances de progresser.”
Ces méthodes reconnues
par le monde scientifique, partent des atouts de l’enfant.
Ainsi, les enfants
autistes ont une mémoire visuelle très développée: “Nous utilisons cette
capacité en recourant souvent à des pictogrammes, des photos qui donnent à
l’enfant des points de repères et l’aide à comprendre ce qu’on attend de
lui”. Grâce aux points de repères proposés par ces méthodes, l’enfant
autiste, qui a beaucoup de difficultés à organiser lui-même son temps et à
se retrouver dans l’espace, va donner à l’enfant la possibilité de
s’occuper seul.
En fin de compte,
l’objectif est d’apprendre à transposer les comportements de Gabrielle
acquis au “Chat Botté” à la maison, dans des milieux familiaux et puis dans
la vie de tous les jours: “L’erreur que nous avions faite en partant en
vacances avec Gabrielle, explique sa maman, qui est aussi présidente de
l’association des parents, est de ne pas en avoir parlé avec le Centre.
Gabrielle n’avait pas été préparée au changement.
Il
nous faut travailler à généraliser ces comportements acquis. Les
perspectives sont encourageantes car nous la voyons progresser et nous
savons qu’il y aura encore des progrès. Même si nous savons que nous devons
faire le deuil de beaucoup de choses du fait de l’autisme, on ne fait le
deuil de tout! Nous travaillons pour que l’avenir de tous ces enfants soit
aussi proche que possible du quotidien de tous les enfants: qu’ils aillent à
l’école, qu’il aient des loisirs, qu’ils prennent plaisir à vivre, qu’ils
vivent avec d’autres enfants qui ne sont pas handicapés, qu’ils vivent
auprès de leur famille.”
Propos
recueillis
par
Christian Van Rompaey
(1) Le Chat Botté, asbl, rue Sainte-Wivine, 15 A – 1315
Sart-Risbart (Incourt). Tél.:010/24.31.00 –
www.centrechatbotte.be -
centrechatbotte@hotmail.com
Le
Centre est né en 2003 sous l’impulsion de Madame Terelle et Madame le Hardy
de Beaulieu (qui en est l’administratrice déléguée) grâce à la participation
financière du Fonds de soutien Marguerite-Marie Delacroix. Il a reçu en
2005 un agrément et un subventionnement conjoint de l’AWIPH et l’ONE.
(2) Le but de ces centres (au nombre de 7) est de donner aux
patients atteints d’un trouble autistique les meilleures chances de
bénéficier rapidement d’un diagnostic approfondi et d’un accompagnement.
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