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Handicaps (4 juillet 2013)

Ensemble, au-delà des préjugés

© Sebastian Franco

Une petite vingtaine de jeunes de 15 à 23 ans, encadrés par des volontaires d’Altéo et de DéClik, viennent de vivre une fabuleuse semaine à Houffalize. Issus de l’immigration et/ou en situation de handicap moteur, ils ont confronté leurs différences, expérimenté l’entraide et changé leur regard sur les difficultés du quotidien.

Le soleil et la chaleur ne sont pas vraiment au rendez-vous en cette fin de mois de juin. Qu’à cela ne tienne: c’ est avec enthousiasme que la joyeuse troupe s’apprête à vivre une journée hors du commun au milieu des bois. Au programme? Parcours aériens avec tyrolienne et promenades en joëlette. Hugues Saudemont, animateur Altéo à Dinant, a déjà repéré les lieux. “La joëlette est une version sur roue de la chaise à porteurs”, explique-t-il aux jeunes qui l’entourent et jettent un œil intrigué sur les trois engins rangés à la queue leu leu au bord de la route. “En plus confortable bien sûr, autant pour le passager que pour les deux accompagnateurs”, ajoute-t-il. L’animateur explique les rudiments de la conduite. Chaïma, Sarah et Abdelali sont les trois premiers jeunes porteurs d’un handicap moteur... à se faire transporter. C’est une première expérience pour eux. Tout comme pour les jeunes valides d’ailleurs. “Je ne savais même pas que cela existait”, s’enthousiasme Thomas, tout en plaçant Chaïma sur le siège d’une joëlette. A la fois excitée et quelque peu inquiète, la jeune fille pousse des petits cris au moment où le convoi, enfin prêt, s’ébranle. Quelques rayons de soleil percent à travers les arbres, comme pour guider les pas des jeunes randonneurs...

Un projet-pilote

Pour la plupart des participants, ces quelques jours passés ensemble ne sont pas les premiers: en octobre 2011, ils avaient fait connaissance lors d’un week-end passé en auberge de jeunesse. Ce court séjour concrétisait le projet “handicap et migration” élaboré par trois ASBL: l’association belgo-marocaine DéClik, l’Institut royal d’accueil pour le handicap moteur (Irahm) et Altéo, mouvement social de personnes malades, valides et handicapées(1).

Les jeunes étaient désireux de se revoir et de passer plus de temps ensemble”, lance Nathalie Piette, éducatrice à l’Irahm. “Altéo a dégagé un budget pour des projets novateurs et nous avons profité de cette opportunité pour renouveler l’expérience, confie Julie Barozzini, permanente à Altéo Bruxelles. C’est d’autant plus important qu’on se rend compte que la population bruxelloise multiculturelle ne se rencontre pas ou peu”.

© Sebastian Franco
Le petit groupe formé autour des joëlettes a maintenant quitté la route pour emprunter un sentier. Paloma Urbina, volontaire à Altéo, ferme la marche. Avec enthousiasme, elle raconte: “On séjourne dans un gîte d’étape et on est donc complètement autonome pour l’intendance. Cela crée des moments de convivialité et d’échanges, notamment lors de la préparation des repas ou de la vaisselle. Chacun a trouvé sa manière d’aider, même ceux qui ont un handicap. Cela leur permet de s’affirmer, de montrer ce qu’ils savent faire”. Elle poursuit : “Les deux groupes de jeunes sont progressivement allés les uns vers les autres. L’après-midi qu’on a passée hier à la piscine de Bastogne a été décisive à cet égard. Les jeunes valides se sont occupés des moins valides dans les vestiaires, puis dans l’eau, et ils se sont formidablement amusés ensemble”.

Nathalie Piette enchaîne : “Pour des jeunes handicapés, le fait que d’autres jeunes s’occupent de leur ‘nursing’ est loin d’être évident. Et vice-versa. C’est pourtant venu spontanément. Cela se joue au niveau de l’entraide, de la confiance...

Lors de ce séjour, l’atelier de massage et de maquillage qui a précédé la soirée dansante restera certainement gravé dans les mémoires. Il a permis aux jeunes filles de se rapprocher par-delà leurs différences et de se dévoiler, au sens propre comme au figuré... “On avait occulté la pièce, allumé des bougies et mis de la musique douce pour créer une atmosphère propice à l’intimité et la détente, explique Nathalie Piette. Libérées du regard des garçons qui, dans une autre partie du gîte, suivaient l’atelier de mixage de musiques, certaines jeunes filles ont fini par retirer leur voile. Ce fut l’occasion de parler des croyances religieuses, de la signification du voile, de l’image de la femme. Cela nous a permis de sortir des idées toutes faites sur ces questions”.

Des délires communs

Je n’ai pas eu peur. C’était gai”, lance Chaïma, les yeux pétillants de vie, à la fin de la balade en joëlette. Thomas la réinstalle dans sa chaise. Tels des chevaux de fer, les joëlettes attendent patiemment les passagers suivants. Mais c’est l’heure de la pause-déjeuner. Tout le monde dévore le pique-nique tout en commentant les activités du matin. Certains ont fait des jeux dans le car, d’autres, en attendant leur tour en joëlette, ont inauguré le parcours de cordes installé dans les arbres par l’équipe d’animateurs sportifs d’Altéo venus d’Anderlues. Laetitia et Chaïma sont particulièrement impatientes de tenter l’aventure. Placée dans une nacelle adaptée, la personne est hissée à quelques mètres de hauteur avant d’être “lâchée” le long d’un corde reliée à un autre arbre. Hamza aide consciencieusement les animateurs. Il est aux petits soins pour les jeunes handicapés qui, chacun à leur tour, vont s’élancer dans les airs.

Se mélanger entre non valides et valides pendant une semaine, c’est riche, confie Hanan, une jeune participante de l’asbl DéClik. Eux, avec leur handicap, et nous, avec notre origine immigrée, on est souvent stigmatisés. On est victimes des mêmes préjugés et discriminations. On a l’impression d’être l’objet des mêmes regards de peur, de rejet. Ici, on peut être soi-même comme dans la vie, faire connaissance, s’amuser, partager. Ensemble, on se retrouve dans nos délires, dans notre jeunesse commune, comme par exemple lors de la soirée dansante. Eux, ils ne veulent pas qu’on les prenne en pitié. Et nous, on peut montrer qu’on n’est pas des voyous, qu’on peut aider les autres”. Hanan compte d’ailleurs en faire son métier. “Je me rends compte qu’ici en Belgique, on fait pas mal de choses pour les personnes handicapées. Il y a des aides, des associations... Ce n’est pas comme cela au Maroc”, regrette-t-elle.

Les activités sportives touchent à leur fin. Ce soir, après un souper agrémenté d'un thé à la menthe, tous partageront leurs impressions et souvenirs en regardant les photos du séjour qui s’achève. C’est en chantant dans toutes les langues autour d’une guitare qu’ils se quitteront enfin pour aller se coucher. En espérant que ce séjour se renouvelle...

//JOËLLE DELVAUX

(1) Les associations avaient répondu à un appel à projets dans le cadre de la Quinzaine de l’égalité des chances initiée par la Région bruxelloise.


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