Environnement
(4 novembre 2010)
►Réaction d'un lecteur à
l'article
Le tri,
un bon début
Via leur
sac bleu, les Belges seraient les champions européens du tri et du recyclage
des emballages ménagers. Bravo! Mais on peut aller beaucoup plus loin, au
bénéfice de l'environnement et du portefeuille, en s'interrogeant sur nos
habitudes de consommation.
Nous
sommes tous des champions.
“Nous”, ce sont les
Belges. Chaque année, Fost
|
©
Cardon Coralie/Reporters |
Plus, l'organisme maître d'œuvre de la collecte
et du recyclage des déchets d'emballages ménagers, flatte notre égo, nous
rappelant que nous sommes parmi les meilleurs élèves européens – sinon les
meilleurs – de la récupération, du tri et du recyclage de canettes,
bouteilles et autres
papiers-cartons aboutissant dans nos poubelles. C'est bien simple, précise
l'organisme au petit Point vert: chaque Belge recycle en moyenne plus que
son propre poids, c'est-à-dire 72 kilos de papier, 30 kilos de verre et 15
kilos de PMC (plastiques, métaux, cartons à boissons). Soit, chaque année,
une montagne de 650.000 tonnes.
Une performance,
vraiment? Soyons de bon compte. Depuis une trentaine d'années, des efforts
importants ont été fournis. Le tout-à-la-décharge ou à l'incinérateur n'est
plus de mise. La lutte contre la dioxine sortant des cheminées de ces
installations a donné de bons résultats, à coups de milliards de francs
belges. Les bulles à verre et parcs à conteneurs ont poussé comme des
champignons. Même en matière de prévention, des progrès ont été accomplis.
Ainsi, en trente ans, le poids moyen d'une bouteille plastique d'un litre et
demi est passé de 57 à 29 grammes. En vingt ans, celui des cannettes en
aluminium a fondu de 25%. Et ces progrès techniques n'ont pas empêché les
emballages de continuer à remplir leurs fonctions multiples de protection
contre les chocs, la chaleur, l'humidité, les ultra-violets, les bactéries…
Le hic, c'est que ces
bulletins de victoire donnent une image biaisée de la réalité, à l'instar du
Point vert apposé sur les emballages. Beaucoup de gens s'imaginent que ce
dernier est une sorte de caution environnementale, attestant que l'emballage
qui le porte sera recyclé ou provient de matériaux collectés et recyclés.
Faux! Le petit logo aux deux flèches entrelacées démontre simplement que
l'entreprise qui le met sur le marché paie une cotisation à Fost Plus, ce
qui n'est pas nécessairement la même chose. Libre à elle de continuer à
mettre sur le marché des gadgets suremballés dans du plastique
non-recyclable, des bières vendues dans des bouteilles plastiques jetables
(apparues, il y a peu, dans les rayons, alors que le système de bouteilles
consignées donne de bons résultats) ou, tout simplement, des montagnes de
boissons vendues dans du verre non cautionné: une solution loin d'être
idéale du point de vue environnemental (transport, manutention, fonte,
consommation d'énergie, etc.)
Les
emballages tape-à-l'oeil
Analysée à la loupe,
l'évolution de ce qui aboutit dans les poubelles a de quoi interpeller. Les
emballages sont toujours plus variés, multiformes, sophistiqués. Le Centre
de recherche et d'information des organisations de consommateurs (Crioc)
s'est récemment penché sur le conditionnement des produits les plus courants
achetés par les ménages. Les résultats sont édifiants. Passons sur ces
dentifrices vendus sous un triple emballage (métal, carton, plastique) ou
ces gadgets souvent très petits, noyés dans des emballages plastiques
disproportionnés (qui seront jetés ou brûlés). Le Crioc pointe surtout,
entre autres aberrations, ces bouteilles en verre contenant à peine 200
millilitres de soda mais pesant 367 grammes. Ou ces bouteilles de mousseux
et de champagne pesant jusqu'à 880 grammes (c'est normal: elles doivent
résister à la pression), mais contenant seulement 750 millilitres de boisson
et – c'est moins normal – très rarement cautionnées ni réutilisées. Plus
fondamentalement, il regrette que le choix des emballages obéisse davantage
à des considérations publicitaires ou de marketing qu'à une logique de
réduction des impacts environnementaux. Et de préciser que la fabrication
d'emballages uniques à destination des denrées alimentaires émet à elle
seule, dans notre pays, un million de tonnes de CO2 dans
l'atmosphère…
Tout indique qu'en
Belgique, comme en France(1), le nombre d'unités d'emballage mis sur le
marché ne cesse d'augmenter. L'une des explications à cette inflation réside
dans la taille des ménages: le nombre de personnes vivant seules ou de
familles monoparentales évolue à la hausse, ce qui encourage l'achat de
portions plus réduites. Les sociologues pointent aussi un phénomène de
nomadisme et d'individualisation des consommations: de plus en plus, nous
mangeons et grignotons à gauche et à droite (en rue, au ciné, au shopping,
en voiture, etc.) plutôt qu'au domicile. Une partie de ces emballages
échappe aux flux de collecte et de récupération. Surtout, la consommation
d'énergie et de matières premières est plus importante, globalement, avec
les emballages de petite taille qu'avec des grands contenants. Voilà
pourquoi il faut nuancer le cri de victoire de Fost Plus, selon lequel le
Point vert coûterait, au maximum, 10 euros par an et par personne. Beaucoup
de redevances communales payées pour l'enlèvement des immondices ont, elles,
explosé! Sans oublier que nous avons évidemment payé une première fois ces
emballages à la caisse.
Le grand
déballage
En France, des
associations et quelques grandes surfaces, pionnières, ont mis sur pied des
“plateformes de déballage” à la sortie des grands magasins. Après leurs
courses, les clients sont invités à se débarrasser des emballages superflus
et à les laisser à la charge du distributeur, au lieu de les gérer à
domicile et via les (coûteuses) collectes à domicile. Bien sûr, ces déchets
restent un poids pour l'environnement. Mais de telles plateformes (rien
d'identique en Belgique à ce stade, semble-t-il) véhiculent au moins un
message clair aux autorités et aux fabricants: les emballages, si, ma non troppo.
// Philippe Lamotte
(1) Curieusement, ce
genre de statistiques n'est pas disponible en Belgique.
Achat et
tri: les bons réflexes |
Pour
réduire son empreinte écologique, il faut idéalement réfléchir dès le stade
de l'achat. Comment faire? Voici une synthèse des conseils du Réseau
Eco-consommation
(1). |
►
Privilégier les aliments
produits en vrac et de saison, généralement économes en emballages. Le
recours aux “paniers” de fruits et légumes, dans les quartiers, est un
phénomène en vogue, apprécié également pour sa convivialité.
►
Préférer l'eau de
distribution à l'eau en bouteille, par ailleurs beaucoup plus onéreuse. La
qualité de la première est généralement irréprochable. En cas d'odeur de
chlore, laisser l’eau “respirer” dans une carafe.
►
Opter pour le plastique
réutilisable (PET) pour toutes les boissons. Certes, il est encore rare en
Belgique. Les bouteilles cautionnées sont aussi une très bonne solution. Le
verre jetable est, lui, à proscrire chaque fois que possible. Difficile, par
contre, de trancher entre les bouteilles en plastique jetables et les
cartons à boissons. Les résultats des écobilans ne sont pas clairs.
►
Préférer, à quantités
égales de nourriture, les emballages de grande taille. En n'oubliant pas que
le risque de gaspillage alimentaire est alors plus grand.
►
Traquer les (rares)
produits d'entretien, voire les cosmétiques, qui se vendent dans des
emballages ré-emplissables.
►
Bon à savoir: les sacs
de caisse réutilisables ne sont intéressants, écologiquement parlant, que
s'ils remplacent au moins cinq utilisations successives de sacs plastiques
jetables.
►
Pour les plastiques
affichant “produit recyclé”, contrôler le pourcentage de matière réellement
intégrée au nouveau produit. Laissé à la libre appréciation du producteur,
il est hélas rarement mentionné…
►
Les plastiques végétaux
ne sont pas encore au point, sauf s'ils portent la mention “OK compost” ou
“compost home”.
(1) Le Réseau
Eco-consommation assure des permanences téléphoniques au 081/73.07.30 ou
www.ecoconso.be
|
Composter
chez soi : pratique et utile
L'automne est une
excellente saison pour se frotter au compostage. Y compris lorsqu'on ne
dispose pas d'un jardin. Outre le fait qu'on fait fondre de moitié le poids
de sa poubelle (réduisant du même coup le coût de l'enlèvement des
immondices à domicile), on dispose, après quelques mois, d'un précieux
engrais organique, proche du terreau, qui rend superflu l'achat de sacs de
compost du commerce, souvent mélangé à de la tourbe naturelle. Et l'on
réduit le nombre de camions-bennes sur les routes…
On parle, ici, du “vrai”
compost, pas du simple tas d'herbes abandonnées, qui n'en est qu'une pâle
copie. Le compost le plus rapide et équilibré sera issu d'un mélange de
matières brunes (le carbone), par exemple les feuilles mortes, et de
matières vertes (les résidus de cuisine). Ces dernières années, le secteur
commercial s'est emparé du marché, proposant une multitude de fûts et silos
à compost. Mais quelques planches, piquets et vis peuvent constituer une
alternative à très bon marché.
On
composte les épluchures et les résidus de gazon, bien sûr (ces derniers, pas
en trop grandes quantités), mais aussi les filtres et dosettes à café, les
essuies-tout usagés, les cartons, les coquilles d'œufs voire, à certaines
conditions, les déjections d'animaux, les lambeaux de laine et de coton, les
huiles (de cuisine! - en petites quantités, absorbées sur des morceaux de
carton), les restes de viande et de poisson, etc. Gare aux
mauvaises herbes montées en graines! Elles doivent rester trempées longtemps
dans l'eau avant toute insertion. Eviter tout ce qui a été traité, comme les
copeaux de bois vernis ou collé.
La
décomposition optimale dépend de l'aération, des apports d'eau et de la
fréquence des retournements: tous sont gages de l'absence d'odeurs. La
matière obtenue – le compost – servira à mille usages au jardin et dans les
jardinières: fertilisation, protection des arbres, aération et
enrichissement de la terre, assainissement des pelouses, etc. Le compostage
n'est possible que grâce à l'action de millions de bactéries et
d'animalcules. Ajoutons que le “vermicompostage” est une technique de
compostage adaptée à l'intérieur de l'habitat (1).
(1) Le Comité Jean Pain
est une association spécialisée dans la sensibilisation au compostage sous
toutes ses formes. Infos: 085/23.57.62 –
www.comitejeanpain.be -
www.compostage.info
►Réaction d'un lecteur à
l'article
Monsieur Roland Deridder,
administrateur délégué de la Fédération du verre (asbl), nous a adressé une
lettre s'inscrivant en faux contre l'une des affirmations de l'article du 4
novembre conseillant de "se passer du verre jetable chaque fois que
possible". Mr Deridder trouve cette affirmation "unilatérale, lourde de
conséquences et difficile à prouver". Références bibliographiques à l'appui,
il évoque diverses études faisant état des inconvénients liés aux
plastiques, également cités dans l'article, notamment en ce qui concerne des
rejets de phtalates et d'arsenic dans les aliments et les boissons. Ces
références sont: http://oceans.greenpeace.org/raw/content/fr/documents-et-rapports/debris-plastiques-et-pollution.pdf
et
http://ehp03.niehs.nih.gov/article/fetchArticle.action?articleURI=info%3Adoi%2F10.1289%2Fehp.0901253
.
Enfin, Mr
Deridder estime que le terme "verre jetable" n'est pas approprié et devrait
être remplacé par celui de "verre recyclable", principalement du fait que le
verre peut être recyclé indéfiniment sans perte de ses propriétés mécaniques
ou chimiques.
La rédaction d'En Marche prend bonne
note des remarques de la Fédération du verre et tient à les partager avec
ses lecteurs. Elle tient toutefois à rappeler que cette phrase, si
unilatérale a-t-elle pu paraître à ses lecteurs, faisait partie d'un article
qui, bien loin de vouloir simplifier à outrance la thématique des déchets
d'emballage, visait à sensibiliser ceux-ci à la complexité des écobilans et,
notamment, à la difficulté de trouver des alternatives pratiques au verre
non consigné sur le marché belge. Nos sources se montraient très critiques
quant au bilan environnemental du verre "jetable" ou "recyclable". Au Réseau
Eco-consommation, on estime que "les récipients en verre jetable sont de
loin les plus mauvais écologiquement" (fiche conseil 050). Au Centre de
recherche et d'information des organisations de consommateurs (Crioc), on
recommande explicitement d' "éviter les bouteilles en verre non
réutilisables", celles-ci étant mentionnées comme "le plus mauvais choix" ou
"le plus mauvais élève de la classe" au regard de nombreux paramètres
environnementaux ("Impact environnemental des emballages, Etat des lieux").
Jeter ses bouteilles en verre à usage unique dans les bulles à verre reste
évidemment un geste écologique, nettement préférable à celui de les jeter à
la "poubelle tout venant". Mais ce geste et le recours à ce matériau ne sont
pas dénués d'inconvénients et n'ôtent en rien l'intérêt d'une réflexion
comparative ou générale sur les filières de production et de traitement des
divers emballages mis sur le marché belge.
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