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Drogues (3 juillet 2003)


Pièges et méfaits du tabac!

 

La principale parade existant pour convaincre les gens de ne pas commencer ou d’arrêter de fumer, ce sont les campagnes d’information et de prévention. Pourtant, aucune d’entre elles ne peut être considérée comme le remède miracle. Aussi, non seulement, il faut mettre en place une armada de petits moyens, car tous les fumeurs ne sont pas sensibles aux mêmes arguments, mais il faut aussi dénoncer les stratégies des cigarettiers pour recruter de futurs fumeurs et les enfermer dans une dépendance très forte!

 

Lire également ci-dessous :

Une santé qui part en fumée

"J'arrête demain, si je veux..."

“La Belgique, pays sous-développé en termes de prévention contre le tabac!”

Quelques chiffres

Dire à un fumeur d’arrêter de fumer n’est pas facile: non seulement il faut qu’il en soit capable, mais encore faut-il qu’il en ait envie ! Aussi, de nombreuses pistes ont été testées pour les convaincre.

 

Argument numéro 1 : la santé. Bien sûr, il est l’argument le plus important : si vous arrêtez de fumer, vous réduisez vos risques de développer toute une série de maladies, souvent mortelles. Cet argument remporte un certain succès auprès des fumeurs plus âgés ou qui ont charge de famille. Il suffit de voir les résultats obtenus au Canada, après l’apposition sur les paquets de cigarettes de mentions très claires et de photos informant sur les méfaits physiques du tabac, mesure appliquée chez nous depuis peu. “Cependant, ces arguments ont un effet plutôt à court terme. Il doit donc être envisagé, mais pas seul. Il doit faire partie d’un ensemble de mesures qui attaquent sur tous les fronts”, estime Luk Joossens, spécialiste “tabac” attaché à l’OMS et porte-parole de la Coalition Nationale contre le Tabac.

 

Des résultats, mais pas suffisamment

Autre mesure qui fait grand bruit : l’interdiction de vente aux jeunes de moins de 16 ans. Mis à part l’attrait qu’ont les jeunes de braver l’interdit et les moyens qu’ils trouveront pour se procurer des cigarettes, notamment via des aînés, la mesure n’a de sens que si elle est bien respectée et contrôlée. Or, il s’agit bien là du problème essentiel : les contrôles sont insuffisants. C’est le cas notamment pour l’obligation pour les responsables d’établissements HORECA de réserver un espace fumeur dans des locaux de plus de 50m2, sinon des extracteurs de fumée : les contrôles étant insuffisants, la loi n’est respectée que par une minorité. Le respect du non-fumeur n’est donc pas assuré.

Les campagnes vers les jeunes dans le style “quand tu fumes, tu as une haleine de cendrier”, et visant leur volonté de séduire, normale à cet âge, a fait son temps. Ses résultats ont été réels, mais elle s’est essoufflée.

Toutes ces pistes ont tout de même donné des résultats intéressants : “Dans les années 70, le tabagisme des adultes tournait autour de 40%. Suite à des campagnes, certes peu puissantes comparées aux campagnes menées par les cigarettiers, le tabagisme en Belgique a chuté à environ 30% au début des années 90, ce qui est un résultat très appréciable”, explique le Prof. Pierre Bartsch, pneumologue à l’Ulg et Président de la FARES, Fondation contre les Affections Respiratoires et pour l’Education à la Santé. Un chiffre qui, hélas, stagne.

 

“Dénormaliser”

Aujourd’hui, à côté de ces pistes, une nouvelle tactique a été importée du Canada, pays pionnier en matière de lutte contre le tabac, la “dénormalisation”. Entendez: il faut dénoncer les pratiques de l’industrie du tabac pour recruter de nouveaux consommateurs et les rendre de plus en plus dépendants à un produit qu’elle sait nocif pour la santé du fumeur et de son entourage. “Il faut dénoncer le fait que les cigarettiers nient cette nocivité, rendent les cigarettes toujours plus addictives, cachent la nature des additifs, organisent la contrebande pour conquérir des marchés ou les conserver, jouent avec les plus grands trafiquants comme les régimes mafieux ou financent les réseaux terroristes”, accuse Gérard Dubois, professeur de Santé publique en France, expert auprès de l’OMS, Président du Comité National français contre le tabagisme, dans son livre “Le Rideau de Fumée” (Ed. du Seuil).

Pour étayer ses accusations, il a dépouillé un par un les documents secrets que l’industrie a dû rendre publics. Toutes les preuves de ses mensonges s’y trouvent : l’industrie a pris connaissance des méfaits du tabac sur la santé dès 1962 et c’est dans un rapport datant de 1977 que les cigarettiers ont décidé, en bloc, de nier la causalité des relations entre tabac et maladies ; en 1972, de hauts responsables de RJ Reynolds reconnaissent que la nicotine est “une drogue puissante”, comme ils le disent eux-mêmes, mais continuent encore aujourd’hui à prétendre que la nicotine n’est pas addictive. Mais surtout, l’un des documents secrets de Philip Morris datant de 1988 explique la tactique de désinformation sur le tabagisme passif qu’elle organise, mettant en place “une équipe de scientifiques organisée par un coordinateur scientifique et des avocats américains, pour revoir la littérature scientifique ou faire des études sur le tabagisme passif pour maintenir une controverse”. Cette dernière dénonciation constitue un vrai problème pour l’industrie, qui argumente en disant que fumer est un acte volontaire…

Cette dénormalisation a pour objectif de démontrer aux fumeurs qu’ils sont les jouets d’une industrie qui leur fournit un produit de mort, non seulement pour eux, mais aussi pour leur entourage. Ils sont pris dans un réseau d’industriels prêts à tout pour les maintenir dans leur dépendance et amener leurs enfants vers le tabac.

 

Manipulation dès le plus jeune âge

Et il est vrai que l’industrie du tabac ne recule devant aucun obstacle pour attirer de nouveaux consommateurs. Leur cible privilégiée : les jeunes, dès 14 ans. Raison pour laquelle les grandes marques investissent les lieux où ils se retrouvent et, surtout, s’amusent. “Les boîtes de nuit, rave parties et les concerts, par exemple, sont des endroits privilégiés par les cigarettiers. Le jeune va s’amuser, voir ses vedettes préférées. Il est donc en état de perception et va assimiler le plaisir d’écouter la musique à la consommation de cigarettes. Les cigarettiers sont donc de gros sponsors de festivals d’été”, explique le Dr Jean-Charler Rielle, Responsable du CIPRET-Genève et Membre du Bureau de la Commission Fédérale Suisse pour la Prévention du Tabagisme. Vu les sommes colossales qu’ils proposent aux organisateurs, il est difficile pour eux de refuser…

Les cigarettiers envahissent le milieu du sport également. Ainsi, la Formule 1 est totalement vampirisée par cette industrie, et nous ne soulèverons même pas le “ problème ” Francorchamps : l’industrie du tabac pratique des prix de sponsoring tellement exorbitants que les autres sponsors ont du mal à suivre. En moto, idem. “Un coureur moto suisse a tenté de ne pas se faire sponsoriser par une marque de cigarettes. Il n’a pas eu droit à une moto d’usine, n’était pas invité aux réceptions, n’avait pas sa place dans le village durant les compétitions, bref, il était traité en vrai paria”, raconte encore le Dr Rielle. Penser qu’ils investissent dans le sport par passion relève de la naïveté la plus stupide…

D’autres loisirs sont visés par l’industrie : le cinéma. Ainsi, dans les documents secrets de l’industrie, un contrat : celui signé entre B&W, un producteur américain de cigarettes, et Sylvester Stallone. Ce dernier s’engage à “utiliser les produits du tabac de B&W dans pas moins de 5 films, pour un montant de 500.000$”. Et ce n’est qu’un exemple, frappant avec preuves à l’appui. Avec le sport, la musique, le cinéma, les jeunes sont complètement cernés. Et ils pensent encore que fumer est un acte délibérément choisi ; ils ne se rendent pas compte à quel point ils sont manipulés par les magnats de la cigarette dans leur vie de tous les jours.

Et pour les plus petits, l’industrie a encore des tours dans son sac. Aux Etats-Unis, elle a créé le personnage de Joe Camel, un petit chameau inventé par la marque du même nom. Dès 3-4 ans, les petiots sont familiarisés avec la marque, qui espère leur faire revivre, plus tard, les bonnes années de leur enfance en achetant un paquet avec ce personnage si familier… Des produits à son effigie sont vendus, affichés au niveau des yeux des plus jeunes, à côté des bonbons. Et que penser de ces cigarettes en chocolat de notre enfance, qui induisaient déjà le geste chez les enfants ? Quant à la célèbre famille Simpson, il s’agit d’une famille de fumeurs…

On le voit, il est grand temps pour nos responsables politiques d’être vigilants et de ne rien laisser passer, d’autant que l’industrie soigne son lobbying politique.

Carine Maillard

 

 


 

Une santé qui part en fumée

 

 

 

 

 

 

 

Un fumeur sur deux mourra prématurément d’une maladie liée à la cigarette. En Belgique, on considère que le tabac est à l’origine de 20.000 morts prématurées : près de 55 personnes par jour ! Soit 13 fois plus que les accidents de la route. Ce chiffre devrait faire réfléchir les accros au tabac… Pourtant, la consommation dans la population générale ne diminue plus, après avoir connu une chute entre 1982 et 1994 ; pire : elle a même tendance à augmenter chez les femmes, les jeunes et en Wallonie.

 

Cancer en co.

La première conséquence du tabagisme est évidemment le cancer du poumon. Et dans cette matière, la Belgique détient un bien triste record au niveau de l’Union Européenne, puisque la mortalité due au cancer des poumons y est la plus élevée. Et si on considère, comme le Prof Degraeve, Professeur en Toxicologie à l’ULg, que 85% de ces décès sont directement imputables au tabac, on mesure l’ampleur du désastre ! Mais il n’y a pas que le cancer du poumon qui guette les fumeurs. D’autres cancers résultent pour une bonne partie de cette dépendance, comme les cancers de la vessie, de la bouche, du larynx et du pharynx. Une autre maladie résultant, dans 90% des cas, du tabagisme est la broncho-pneumopathie chronique obstructive (BPCO) qui se caractérise par une réduction de la capacité pulmonaire – on a très vite le souffle court – accompagnée d’une toux persistante et de crachats. Irréversible, elle peut aller jusqu’à nécessiter une dépendance à une bonbonne d’oxigène. Les maladies cardiovasculaires sont aussi augmentées par le tabac qui augmente la viscosité du sang, pouvant provoquer la formation de caillots dans les artères, donc d’obturation, voire d’infarctus ; l’hypertension est aussi favorisée par la nicotine, qui accélère le pouls, provoquant une augmentation de la pression sanguine. Sans compter un risque accru de polyarthrite rhumatoïde, d’ulcères à l’estomac, de maladies intestinales chroniques, de troubles du sommeil, de vieillissement prématuré de la peau, de troubles de l’érection chez l’homme – un risque augmenté de 60% chez ceux qui fument un paquet par jour – et d’avancement de l’âge de la ménopause chez la femme de l’ordre de 2 à 3 ans.

 

Il n’y a pas que les fumeurs qui trinquent !

Mais les risques menacent aussi les fumeurs passifs, dont le risque de cancer du poumon et de maladie cardiovasculaire est augmenté de 30%. Par ailleurs, une équipe de l’UCL a établi que les nouveau-nés de mère fumeuse ont besoin d’une phase de sevrage au moment de la naissance, tout comme les bébés de mères toxicomanes ! Enfin le tabagisme de la mère augmente les risques de fausse couche de 30%, et chez l’enfant, le risque de prématurité, de faible poids à la naissance et de mort subite. Il entraîne un retard neurologique chez le bébé, des résultats qui s’améliorent 5 jours après la naissance, sans néanmoins atteindre les scores des bébés de mères non-fumeuses. Les femmes qui fument après 4 mois de grossesse feraient courir à leur enfant plus de risque de développer un diabète de type 2. De récentes études ont évoqué un lien avec l’obésité, un déficit en vitamine C, l’augmentation des caries dentaires, certains troubles du comportement, comme l’hyperactivité, l’agressivité, ainsi qu’une propension accrue des enfants de fumeurs à devenir eux-mêmes fumeurs plus tard. Ne parlons pas des problèmes respiratoires – risque d’asthme favorisé, pneumonie, bronchites chroniques – qui sont doublés chez les enfants soumis à un tabagisme passif. La liste est-elle exhaustive ? Pas sûr…

Après ce petit récapitulatif, que ceux qui trouvent encore de bonnes raisons de fumer lèvent le doigt.


 

“J’arrête demain, si je veux...”

Combien de fumeurs ont jamais déclaré être capables d’arrêter quand ils le voudront ? Une croyance encore plus récurrente chez les jeunes. Et pourtant… C’est méconnaître les moyens utilisés par les fabricants pour augmenter la dépendance à la cigarette.

 

La principale motivation des fumeurs est le plaisir immédiat. C’est mettre de côté les problèmes de santé qui interviendront après des années de tabagisme. “Oui, mais d’ici-là, j’aurai arrêté”, répondent les fumeurs, surtout lorsqu’ils sont jeunes. En sont-ils aussi sûrs que cela ?

“On estime qu’après un mois d’usage, 10% des garçons et 20% des filles sont dépendants. Et en moyenne, le délai entre la première cigarette et la consommation quotidienne est de 2 ans”, explique Gérard Dubois. Penser qu’on peut se défaire de la cigarette quand on le décide est sous-estimer la capacité des différents additifs à renforcer le pouvoir addictif de la nicotine. Celle-ci rend dépendant, notamment par ses effets apaisants sur l’humeur qui induit le besoin de fumer. Un effet extrêmement renforcé par certains des 600 additifs autorisés, comme l’ammoniaque qui rend l’accoutumance plus forte et plus durable, l’acétaldéhyde qui multiplie l’effet de la nicotine, l’acide lévulinique qui augmente la capacité du cerveau à l’absorber ou le cacao qui, par son effet broncho-dilatateur, va faciliter le passage vers les bronches; ce ne sont que quelques exemples. Par ailleurs, les industriels du tabac mettent au point des plants de tabac génétiquement modifiés pour qu’ils contiennent davantage de nicotine, donc rendent les fumeurs encore plus accros ! Aussi, la volonté et l’envie d’arrêter sont loin, bien loin de suffire.

 

Soutien à la cessation

Parmi les mesures efficaces pour lutter contre le tabagisme, les aides à la cessation jouent un rôle prépondérant. Outre la dépendance purement physiologique, l’aspect psychologique du tabagisme est central : le bien-être immédiat induit par la nicotine mais aussi l’habitude de prendre une cigarette, le fameux “ geste ” sont des éléments à combattre, voire à remplacer. C’est entre autres ce que les Centres d’Aide aux Fumeurs (CAF) vont faire : diététiciens, psychologues, pneumologues, kinés… sont là pour accompagner le fumeur dans sa démarche et lui donner tous les conseils nécessaires, chacun dans sa spécialité. Substituts nicotiniques, en patchs ou en gommes, médicaments, calmants, conseils diététiques, recours à des médecines parallèles comme l’homéopathie ou l’acupuncture, à des méthodes de relaxation comme la sophrologie ou l’hypnose sont autant de pistes qui peuvent être conseillées.

Le fameux plan de 5 jours donne également de bons résultats, à savoir une aide psychologique au sein d’un groupe de soutien où sont prônés la pensée positive, l’exercice physique et la diététique, tout en prenant conscience des raisons qui poussent chaque participant à fumer. Toutes ces méthodes sont basées sur l’entraide entre fumeurs ou ex-fumeurs, ce qui est essentiel pour augmenter le taux de réussite.

Et quand on sait qu’en moyenne, un ex-fumeur a dû s’y prendre à 4 fois pour s’arrêter, on comprend qu’il faut mettre toutes les chances de son côté !

 

Contacts utiles :

FARES pour connaître le CAF près de chez vous: Tél. : 02/512.29.36. Website : www.fares.be

Nicotine Anonyme Belgique.
Tel. : 02/522.06.79 ; 02/644.62.88 ; 0495/12.04.39

Le Pélican, service actif en matière de dépendances. Tel. : 02/502.08.61.

Ligue Santé et Vie (plan 5 jours).
Tel. : 02/511.36.80.


 

 

Quand l’enjeu économique prime sur l’intérêt sanitaire

“La Belgique, pays sous-développé en termes de prévention contre le tabac!”

Dans la cigarette, rien n’est bon, c’est bien connu. Mais pour attirer et garder des consommateurs, l’industrie du tabac tente de contrôler les initiatives de prévention et de lutte contre le tabagisme, histoire d’en limiter les conséquences.

 

A son niveau, notre pays fait bien pâle figure. Les moyens de lutte contre l’industrie du tabac passent bien naturellement par la lutte contre le tabagisme. Or, chez nous, trop peu de moyens publics lui sont accordés, tant en prévention qu’en programmes de cessation. Luk Joossens, spécialiste attaché à l’OMS et porte-parole de la Coalition Nationale contre le Tabac – qui rassemble des institutions comme la Fares et la Ligue contre le Cancer – est un expert renommé qui connaît bien la situation de notre pays et les pratiques de l’industrie. D’emblée, il donne le ton : “La Belgique est un pays sous-développé en matière de prévention. Je n’ai jamais vu aucun autre pays à avoir autant de mal à dégager des fonds, problème encore accentué par la séparation des compétences entre fédéral, communautés et régions. Trop souvent, les mesures prises s’avèrent inapplicables ou ne s’accompagnent pas de moyens pour en contrôler l’efficacité”. Il suffit de voir pour s’en convaincre le niveau d’application de la loi sur l’obligation de réserver, dans les hôtels, restaurants et cafés, un tiers d’espace pour les non-fumeurs : après 15 ans d’existence de cette législation, on constate que 6 établissements sur 10 ne la respectent pas!

 

Rodin laisse penseur…

Ce qui pourrait passer pour une anecdote sème la perplexité sur la volonté belge à lutter contre le tabagisme : la fabuleuse histoire de la Fondation Rodin.

Petit historique : Magda Aelvoet, suivie par d’autres mandataires écologistes notamment, prône la mise à disposition d’un fonds public fédéral de 12,5 millions d’euros par an pour mettre sur pied des initiatives contre le tabagisme avant 2003. Un montant qui serait recueilli par une taxe d’un centime par cigarette vendue. Mais le gouvernement n’a pas suivi la ministre. Et en août dernier, le ministre des Finances, Didier Reynders, annonce la mise sur pieds du 1er fonds de prévention des assuétudes : la Fondation Rodin. Une fondation qui suscite bien des remous.

“Il y a plusieurs problèmes, explique Luk Joossens. Tout d’abord, son financement, soit un peu moins de 2 millions d’euros par an : l’argent provient exclusivement des cigarettiers, qui la financent ‘sur une base volontaire’. Or ceci est contraire à la politique de l’OMS et de sa nouvelle convention-cadre du 10 avril 2003 qui stipule que ‘les parties veillent à ce que les politiques de santé publique en matière de lutte antitabac ne soient pas influencées par les intérêts commerciaux et autres de l’industrie du tabac’ ”. Aussi, si la Belgique signe la convention-cadre de l’OMS, la Fondation Rodin posera problème.

Le deuxième problème soulevé par la fondation est le suivant : comment être indépendant de ceux qui vous permettent d’exister ? “Nous aimerions consulter le contrat établi entre eux et les représentants de l’industrie, mais ils ne veulent pas le montrer…”, regrette Luk Joossens.

Troisième problème : le manque de transparence total quant à la provenance des fonds.

Quatrième problème, les fonds recueillis par la fondation ont servi d’argument aux autorités publiques pour réduire la participation publique à la lutte antitabac : un mois après la création de la fondation Rodin, le montant proposé par la ministre Aelvoet à été réduit à 1.8 millions d’euros, à diviser entre les pouvoirs fédéraux et locaux.

Cinquième problème soulevé par Luk Joossens : l’inefficacité des actions de la fondation. “Celle-ci finance des programmes déjà réalisés, fait la promotion de mesures qui ne marchent pas et orchestre l’agenda des campagnes de prévention. Bref, depuis 4 ans (donc avant la création de la fondation), on assiste à un retour en arrière. Enfin, il y a les méthodes utilisées par la fondation qui consistent à intimider les journalistes, comme récemment le journaliste du Knack, ou certains scientifiques ”.

Lors d’un symposium, Gérard Dubois ne mâche pas ses mots : “Laisser les cigarettiers financer les programmes scolaires ou médiatiques pour dire aux fumeurs d’arrêter de fumer, c’est faire entrer le loup dans la bergerie. L’industrie est prête à payer très cher pour des actions inutiles. La Fondation Rodin est un scandale international!”. Une condamnation sans équivoque, relayée par l’OMS.

Pourtant les actions menées par cette fondation bénéficient de retombées médiatiques largement plus importantes que celles menées pour “dénormaliser” le produit et dénoncer les pratiques douteuses de l’industrie du tabac. Cela laisse tout simplement… penseur !

Dossier réalisé

par Carine Maillard

 

Quelques chiffres

 

Le tabagisme en Belgique en 2002

 

29% des Belges fument tous les jours, 35% des Wallons contre 26% des Flamands.

1 homme sur 3 et 1 femme sur 4 fume.

Chez les jeunes, 39% des garçons et 27% des filles de 15 à 24 ans fument quotidiennement et 11%, chez les deux sexes, occasionnellement.

39% chez les hommes des classes défavorisées fument, contre 22% des hommes des classes sociales supérieures. Chez les femmes, les chiffres sont respectivement de 30 et 17%.

 

(Source : Crioc)

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