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Consommation (2 février 2012)

Quand Bruxelles flambe…

© Pierre Rosseau/BELPRESS

En Région bruxelloise, les meilleures aides sociales n’arrivent pas à compenser la hausse des prix du gaz et de l'électricité, ni la hausse des loyers, en pleine explosion. Les solutions, à l’étude, sont à la portée de la main.

Nous lançons un appel urgent. Si cela continue, nous ne pourrons plus assumer nos missions”. Cette assistante sociale du CPAS d’Etterbeek sait de quoi elle parle. Avec ses collègues de la cellule énergie, elle a récemment procédé à un test comparatif des prix de l’énergie réclamés à un ménage à consommation plutôt faible. Entre le tarif du fournisseur le plus cher et le tarif social, la différence est de 68 euros par mois. Appréciable, certes, mais encore insuffisant pour changer la donne en profondeur de la population précarisée. Cette différence, trop faible, signifie que le passage à un tarif social, lorsqu’on vit dans la précarité, ne suffit plus pour payer le loyer et les charges en fin de mois. Insuffisants, également, les petits trucs habituels : quitter son fournisseur par défaut, traquer les consommations cachées de certains appareils (notamment les décodeurs et les tv plasma), multiplier les lampes économiques et modifier mille petits comportements à domicile.

Un constat accablant

Etterbeek n’est évidemment pas la seule commune concernée. Presque partout en Région bruxelloise – mais pas uniquement –, les indicateurs virent au rouge. La hausse des prix énergétiques de ces dernières années complique une crise du logement déjà lancinante. Un chiffre général, d’abord : entre février 2010 et février 2011, le montant de la facture moyenne de chauffage a grimpé de 18,9%, soit près de 200 euros par ménage. Cette hausse frappe évidemment plus durement les personnes à petits revenus, qui habitent principalement des logements mal isolés, souvent qualifiés de “passoires énergétiques”. En tant que locataires, ces personnes ont souvent peu d’intérêt à procéder à de gros travaux d’isolation. A Bruxelles, la situation est d’autant plus préoccupante que 250.000 à 300.000 personnes vivent sous le seuil de pauvreté et que le logement est particulièrement vétuste : moins d’un bâti sur deux dispose d’un thermostat, 58% de fenêtres à double vitrage. Pour les plus faibles revenus de la capitale, la détérioration de ces quinze dernières années est particulièrement frappante : alors qu’en 1995, les 30% de Bruxellois les plus pauvres avaient accès à 12% du parc locatif, il leur reste à peine 3% du parc pour se loger aujourd’hui. “Les allocations sociales n’ont pas suivi, constate Marie-Laurence De Keersmaecker, professeur à l’UCL. Les loyers ont augmenté plus vite que l’indice santé”. Et la santé trinque. “Les gens reportent de plus en plus leurs soins de santé, s’alarme Eric Colle, du service social de la MC Saint-Michel, à Bruxelles. Les soins préventifs – dentaires, vaccination…. – deviennent complètement caducs. Il n’est plus rare de croiser des ménages qui consacrent plus de 50% de leur budget au poste locatif global : loyer et énergie”.

Comment expliquer une telle dégradation? La hausse des prix de l’énergie n’est pas le seul facteur en cause. Tous les observateurs conviennent que la batterie d’aides sociales existantes, dépassée ou mal pensée, ne parvient plus à endiguer la montée de la précarité énergétique. Ainsi, les primes à l’isolation ont jusqu’ici largement profité aux propriétaires bailleurs et non aux locataires, qui forment 60% de la population bruxelloise. Même constat pour les réductions d’impôts consenties en cas d’isolation, d'achat d’une chaudière performante… Selon la Coordination Gaz/Electricité/Eau, l’Etat fédéral a reversé 4,1 millions d’euros aux locataires en 2007, pour… 375 millions aux propriétaires ! Bien sûr, CPAS et services sociaux bruxellois interviennent tous azimuts (Fonds énergie, tarifs sociaux, compteurs à budget, allocations de chauffage, guidances énergétiques, etc.). Mais, ainsi que le constatait récemment Sandrine Meyer, chargée de recherche à l’ULB, “aider les gens en difficulté, c’est bien, mais on manque cruellement de mesures agissant sur le fond du problème : la qualité des logements”.

Des pistes de solution

Discutées lors d'une récente journée d’études des Equipes populaires, ces mesures pourraient être les suivantes :

  • Objectiver les prix, via une grille de référence des loyers. On définirait ainsi, pour chaque catégorie de logement, des écarts de prix raisonnables selon divers critères, dont la performance énergétique.

  • Pour les logements qui ne respectent pas les normes mais facilement rénovables, alléger le système d’amendes imposées au propriétaire bailleur, afin de l’inciter à entreprendre les travaux d’isolation, etc. S’il réclame alors un loyer plus élevé, l’y autoriser strictement dans la mesure permise par la grille de référence.

  • Inciter les communes à mieux contrôler le retrait des logements vraiment insalubres du parc locatif, afin d’en rayer les vraies “passoires énergétiques”. En parallèle, multiplier les logements communaux de transit.

  • Permettre à l’Inspection régionale du logement, reconnue pour la qualité de son travail, de se rendre davantage sur le terrain et de mieux cibler les logements insalubres, de même que les “marchands de sommeil”.

  • Introduire un “permis locatif”, préalable à toute mise en location, et y intégrer un critère énergétique (éventuellement évolutif) reconnu par le code du logement.

  • Favoriser le système du tiers investisseur, trop peu pratiqué jusqu’à présent chez les particuliers, de même que les Agences immobilières sociales (AIS), qui bénéficient tant aux locataires qu’aux propriétaires.

  • Rendre beaucoup plus lisible la filière du prêt vert 0%(car la précarité touche aussi un nombre croissant de propriétaires occupants).

  • Augmenter le précompte immobilier, tout en le comprimant pour les bailleurs respectant la grille de référence.

  • Instaurer une allocation-loyer qui intègrerait les coûts énergétiques. La plupart de ces pistes, qui ne suscitent pas forcément l’unanimité, sont à l’étude à la Région bruxelloise. Et cela, dans un contexte institutionnel où les Régions deviendront bientôt compétentes en matière de baux résidentiels…

// PHL

>> “Alléger la somme loyer + facture d'énergie: quelles politiques publiques en Région Bruxelloise?”, journée du 12 janvier 2012. Infos : 081/73.40.86 – www.equipespopulaires.be

 


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