Bouger (1er avril 2010)
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© Laurent Caro/Belpress |
Entre l’homme
et l’eau :
ça baigne !
Pourquoi
fréquenter assidûment la piscine lorsqu’on ne sait pas nager? Pour apprendre
à nager? Pas seulement… C’est ce que démontre Pady Duijn en plongeant avec
petits et grands dans cet élément liquide qui, dit-il, révèle nos faces
cachées.
Tensions et
angoisses s’y dévoilent pour, peu à peu, s’y diluer.
Au début
était la naissance, première sortie, la tête hors de l’eau…
Moment intense qui déterminera notre mouvance future dans la vie. Pady Duijn
le sait, pour l’avoir lui-même expérimenté ! “J’ai toujours été
interpellé, attiré par l’eau. Dans le cadre de mes études d’éducation
physique, j’ai réalisé un travail sur les bébés nageurs. J'y ai pris
conscience des limites de cette approche qui est axée sur la survie et pas
sur le “bien-vivre”. Et j’ai réalisé que beaucoup de nos comportements se
déclinaient sur ce mode, comme si nous vivions ‘sur nos gardes’”. Il
poursuit: “C’était mon cas. En en cherchant les raisons, j’ai découvert
qu’à ma naissance, je ne respirais pas et qu’on m’avait plongé
successivement dans des eaux froides puis chaudes… Etait-ce gravé en moi ?
Grâce à ces questionnements et aux réponses que j’y ai apportées, ma façon
d’aborder mon métier et ma méthode d’apprentissage de la natation, ont
évolué”.
Pas d’âge
pour la nage
Beaucoup
d’adultes craignent les profondeurs, les éclaboussures de l’eau sur leur
visage, ou bien l’intrusion de l’eau dans les narines. Certains évitent le
ruissellement de l’eau sur leur visage durant la douche. Ces peurs sont
souvent le reflet de nos manières d’être dans la vie. Nos premières
expériences ont été vécues dans un élément liquide, in utéro. Si la
grossesse a été difficile, cela s’est inscrit dans la mémoire cellulaire.
Difficile alors de profiter au maximum des moments passés au contact de
l’eau.
Comment dépasser
ces peurs liées à l'eau, profiter de ses bienfaits, voire même apprendre à
nager à l'âge adulte alors qu'on a toujours fui ou enfui cette idée ?
La démarche
poursuivie par Pady Duijn vise à faire découvrir à chacun le plaisir du
toucher de l’eau et à mettre un bagage adapté à la disposition de chaque
participant. Pour l’un le plaisir sera de marcher dans l’eau, pour l’autre
d’y barboter ou de s’y coucher, pour un autre encore de nager, à sa façon.
Cette méthode,
riche d’une longue pratique et nourrie de nombreux échanges avec des
praticiens homéopathes, ostéopathes, psychologues…, s’adresse à tous et se
pratique dans des piscines où l’eau est à 32°. Les séances sont
individuelles ou en petits groupes.
La spécificité
de cette méthode? Intégrer une dimension de développement de la personne en
allant bien au-delà de l’apprentissage d’une nage stéréotypée. “La
méthode permet non seulement d’apprendre à se sentir en confiance dans l’eau
mais surtout à renforcer des capacités : confiance en soi, développement de
l’autonomie, équilibrage de l’énergie corporelle et motrice, reconnaissance
des limites dans la vie, amélioration de la relation à autrui”, assure
Pady Duijn.
Une vieille histoire |
On
trouve des traces d’activités aquatiques humaines dès 4000 avant
J.C. en Egypte. Des vestiges de bains publics datant de 2600 avant
J.C. ont été mis à jour dans la vallée de l’Indus. Au Sri Lanka,
chez les Mayas, en Grèce Antique et dans la Rome Antique, au Moyen
Orient, chez les Indiens d’Amérique, au Japon, bref, un peu partout
dans le monde, des témoignages écrits ou peints prouvent que cette
fréquentation de l’eau par l’homme ne date pas de la dernière
pluie !
Chez
nous, c’est en 1890 que s’est créé le premier club de natation.
Accueillant essentiellement des jeunes gens, le souci de rendre
cette activité plus accessible à un large public a donné naissance,
en 1891, au Cercle de Natation de Bruxelles.
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Aujourd’hui, via
week-ends thalasso, centres de loisirs aquatiques, thermes, cours
d'aquagym, piscines publiques et privées… l’eau jaillit partout dans
notre quotidien. Si nos grands-parents se contentaient souvent de
tremper l’orteil dans la mer du nord… l’eau, aujourd’hui, se partage
à tout âge ! |
En prenant le
temps de s’installer dans l’eau, d’être à l’écoute de ce que l’on ressent à
ce moment-là, on est ramené à son intériorité, l’eau agissant comme un
révélateur. “Etre enveloppé par le liquide tiède permet de se connecter à
soi-même.”
Qu’est-ce que je
ressens dans l’eau? C’est par cette entrée en matière que débute une séance
chez Pady Duijn qui invite l’apprenti baigneur à s’observer au contact de
l’eau. Pas question de poursuivre l’objectif de plonger au coup de sifflet
pour parcourir des longueurs en brasse. Se mouvoir dans l’eau est, avant
tout, une création très personnelle, qui tient compte des composantes
corporelles, psychiques de la personne. “Dans l’eau, tu ne sais pas
tricher, tu viens sans artifice”.
Parmi les
exercices pratiqués lors des séances, il y a ‘la planche’. Détendue ? Pas
tout de suite évidemment. Au début, apparaissent des tensions qui, selon
l’endroit où elles se situent, vont dire des choses sur soi. A partir de ces
constats, une sorte de rééquilibrage, en douceur, va pouvoir être opéré. Peu
à peu, l’assurance gagnera. “C’est lorsque l’on parvient à bouger dans
l’eau, comme une algue, que l’on fait vraiment corps avec elle, ‘subtile
alliée’ !”
Respecter
l'eau
De tous temps,
l’eau a questionné, interpellé, agi sur l’imaginaire des hommes. Le baptême,
les ablutions et leur symbolique de purification, le déluge hante
l’inconscient collectif. On a tous eu vent d’histoires de noyade. Monstres
marins, sirènes, baleines dévoreuses… toutes ces histoires sont inscrites
dans nos inconscients collectifs. L’eau, source de vie perd pourtant de son
caractère sacré en s’écoulant goutte à goutte de nos robinets. C’est au
respect de l’eau, aussi, qu’éveille le maître nageur.
// Laurence Delperdange
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Pour plus d'infos:
La goutte d'eau asbl • 02/384.99.07. •
www.lagouttedeau.be
“J'ai vaincu ma peur de l'eau” |
Il y a
quelques mois, Léna, 55 ans, a décidé de vaincre sa peur de l’eau
d’autant plus qu’elle se sent bien… dans son bain. Mais la piscine,
bruyante et profonde, l’effraie. Les leçons de natation suivies à
l’adolescence l’ont plutôt… refroidie ! Son souhait aujourd’hui est
d’aller vers une meilleure harmonie personnelle qui relierait corps
et esprit. Elle a donc songé à la natation.
Dès ses
premières séances avec le maître-nageur, elle réalise qu’elle
n’utilise pas son corps dans son intégralité, se sentant déconnectée
de certaines parties d’elle-même. “La méthode part du potentiel
de chacun. Etant donné que j’avais pas mal de tensions dans le bas
du dos, il a fallu adapter mes mouvements pour que ces tensions
disparaissent, mes peurs aussi. Aujourd’hui, je parviens à rester
couchée sur le dos, sans craintes, en lâchant prise, sans le masque
dont j’avais besoin au départ.”
Comme la
méthode se veut à l’écoute de chacun, elle peut paraître peu
orthodoxe. En fait, elle respecte le rythme et les particularités
physiques mais aussi psychiques de chacun, dans la douceur,
l’harmonie. “Je me sens aujourd’hui, beaucoup plus dynamique,
plus centrée dans mes activités, mieux ancrée dans le sol… J’ai
découvert combien je travaillais dans l’urgence; j’étais tout le
temps sur le qui-vive. Ma fille, bonne nageuse (elle a fait de la
compétition), m’a accompagnée à quelques séances. J’avoue que quand
j’ai découvert que je me sentais à l’aise sous l’eau alors qu’elle
éprouvait des difficultés à y demeurer, j’étais assez fière de moi!”
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