Alimentation
(21 mai 2009)
Trop de
sel? Danger!
Nocif
lorsqu’il est consommé avec excès, le sel fait l’objet d’une campagne du
Service Public Fédéral Santé publique pour en réduire les apports dans notre
alimentation. Mais où se cache le sel et comment diminuer sa consommation?
Voici quelques pistes pratiques.
Le
sel que nous consommons est du chlorure de sodium, auquel peuvent s’ajouter
divers éléments, selon la provenance et le traitement subi. Ce qui pose
problème dans le sel lorsqu’il est absorbé en trop grandes quantités, c’est
le sodium, qui représente environ 40% de ses composants.
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@ Emely/CORBIS |
Faim ou goût de sel?
Le sel est une substance
vitale pour notre organisme. Il joue un rôle majeur, notamment dans la
transmission de l’influx nerveux, la contraction des muscles, le maintien de
l’hydratation du corps.
Comme d’autres espèces
animales, l’homme est instinctivement poussé, en cas de carence, à consommer
des aliments salés. Mais à cet instinct s’est progressivement substitué
le goût du sel: un comportement acquis, une habitude tout à fait
réversible, qui pousse l’homme à saler ses aliments même quand son organisme
n’en réclame pas. Auteur d’un ouvrage sur ce sujet (1),
Philippe Meyer cite une enquête effectuée pour la Fondation américaine pour
la nutrition, mettant en évidence la préférence des enfants de 0 à 15 ans
pour une nourriture dix fois moins salée que celle de leurs parents. Il
relate également une expérience effectuée sur des tribus d’Inuits éloignées
de sites d’extraction du sel et restées à l’écart de la civilisation
industrielle. En quelques semaines, le sel, qui leur avait été offert et
qu’elles avaient tout d’abord rejeté, leur était devenu indispensable. La
dépendance était installée.
Les besoins de l’organisme
Les besoins varient en
fonction de l’âge et de l’activité physique. Etant donné que la source
principale du sodium dans l’alimentation est le sel, les recommandations
visant à limiter la consommation sont exprimées avec ce même élément. Pour
un adulte, le SPF Santé publique, Environnement et Sécurité de la chaîne
alimentaire préconise l’ingestion maximale de 6 grammes de sel par jour
(soit 2,4gr de sodium). L’Organisation Mondiale de la Santé recommande,
elle, de ne pas dépasser 5 gr quotidiens. Pour les jeunes entre 11 et 18
ans, le SPF recommande de ne pas dépasser 4 gr par jour. Pour les enfants de
7 à 10 ans: 3 gr. Pour les 4 à 6 ans: 1,75 gr. Quant aux bébés et aux jeunes
enfants, la consommation doit tendre vers zéro. Ils doivent donc consommer
uniquement le sel présent naturellement dans les aliments.
Une tueuse silencieuse
En Belgique,
l’absorption journalière de sel est estimée à 10gr : deux fois trop! Or,
l’excès de sel favorise l’hypertension artérielle, responsable de maladies
cardiovasculaires comme l’infarctus du myocarde ou l’accident vasculaire
cérébral qui, ensemble, constituent les premières causes de décès en
Belgique. Il représente aussi un facteur de risque pour le cancer de
l’estomac, l’insuffisance rénale et l’ostéoporose.
La Belgique compte
environ 2 millions de personnes souffrant d’hypertension. Il s’agit d’une
estimation car seule la moitié de ces gens est connue. L’hypertension ne se
sent pas, elle ne produit pas ou peu de symptômes, jusqu’au moment où la
complication ou l’accident survient. C’est pourquoi on la surnomme “la
tueuse silencieuse”. Pour connaître sa tension, il faut la faire mesurer par
un médecin.
Le sel est souvent caché
De nombreux aliments
contiennent naturellement du sel, mais en faible quantité. Par contre, les
aliments préparés artisanalement ou industriellement sont parfois riches en
sel. Leur liste est longue: pain, charcuteries, saucisses, poissons fumés,
fromages, soupes et plats préparés, légumes en conserve, pizzas, fast-food,
chips, biscuits apéritifs, olives, cacahuètes, vinaigrettes, mayonnaises,
ketchup, cubes de bouillon et jusqu’à certaines eaux pétillantes! Le sel se
cache aussi là où, masqué par le sucre, on ne le soupçonne pas: corn-flakes,
biscuits, couques, etc. L’habitude du sel empêche aussi de détecter combien
certains produits sont salés. Le sel de ces denrées représente 75% de notre
consommation. Le SPF Santé publique travaille donc avec l’industrie
alimentaire, la grande distribution et le secteur Horeca à réduire l’offre
en sel de ces préparations. Les 25% restants viennent de notre cuisine ou de
notre table.
Comment réduire,
en pratique?
Tout d’abord, se faire
confiance : le palais s’habitue en très peu de temps à une nourriture moins
salée. En trois semaines, en y allant progressivement, on apprend à
apprécier les aliments dont la saveur n’est plus masquée par le sel. Ceux
qui ont goûté les panades maison sans sel pour les bébés en auront sans
doute fait l’expérience: elles sont loin d’être fades. Et souvenons-nous que
le vin et la bière, jusqu’aux Temps modernes, étaient salés!
Quelques idées et conseils:
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Certains modes de
cuisson (vapeur, étuvée, papillote, sautés...) préservent mieux la saveur
des aliments que la cuisson à l’eau.
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Le recours à des épices
et des herbes aromatiques permet de découvrir de nouveaux goûts et parfums:
ail, échalote, ciboulette, aneth, basilic, menthe, coriandre, gingembre,
cumin, citron, et bien d’autres (attention, certains condiments ou mélanges
d’épices contiennent du sel).
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Eviter de placer la
salière à table. On évite ainsi de resaler par réflexe, ce qui se fait
parfois avant même d’avoir goûté les aliments. Ne pas saler systématiquement
les préparations.
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Certains produits
peuvent être remplacés avantageusement par d’autres: le fromage par un
yaourt, les biscuits apéritifs par des bâtonnets de légumes ou par une sauce
au fromage blanc et aux fines herbes, ou par des billes de melon et des
fruits secs...
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Choisir, dès l’achat,
des aliments exempts ou pauvres en sel. La teneur en sodium de certains
produits est mentionnée sur leur emballage. Des aliments qui peuvent sembler
identiques se distinguent parfois nettement par leur teneur en sodium.
Pour aider le
consommateur lors de ses achats, le SPF Santé publique a élaboré une petite
grille permettant de calculer facilement la quantité de sel présente dans
les aliments et de distinguer ceux dont la teneur en sodium est faible,
acceptable ou trop forte (lire l’encadré ci-dessous). L’Asbl NUBEL a
également établi une table de composition des aliments(2).
A noter: une carence en sel est quasiment impossible, tant celui-ci est
présent naturellement ou par adjonction dans les aliments.
Un sel est-il préférable
à un autre?
Tous les sels, quel que
soit leur prix, contiennent du sodium. Mais mieux vaut privilégier le sel
étiqueté “iodé”. L’iode est très important pour la croissance et, en
particulier, pour le développement du cerveau. On le trouve principalement
dans les algues, les crustacés et le poisson. Mais notre alimentation est
généralement déficitaire en iode. Choisir un sel iodé (sans en abuser!)
devrait permettre de pallier ce manque. Cela dit, pour prévenir de
nombreuses maladies, dont les pathologies cardiovasculaires, le mieux est de
compléter la réduction de sel par des exercices physiques.
Isabelle Thirion
(1) P. MEYER, L’Homme et le sel. Réflexions sur
l’histoire humaine et l’évolution de la médecine, Paris, Institut d’édition
Sanofi-Synthelabo, 2000, 216 p.
(2) L’Asbl NUBEL publie la Table belge de composition
des aliments. Elle donne un aperçu des nutriments présents dans les aliments
(protéines, lipides, hydrates de carbone, minéraux, vitamines, fibres... et
sodium)
Infos : 02-524.72.20 - http://www.nubel.com
Une campagne “Stop le sel!” |
Lancée
le 7 mai dernier par Laurette Onkelinx, la ministre fédérale de la
Santé, la campagne “réduction de la consommation de sel” repose sur
trois outils, dont le plus original est le “salinomètre”, une petite
latte plastique qui permet d’apprécier jusqu’à quel point un produit
alimentaire est salé ou non. En effet, le plus souvent, l’étiquette
d’un aliment mentionne la teneur en sodium, et pas en sel.
Pour connaître
cette dernière, il faut multiplier le sodium par 2,5. Le
salinomètre, imprimé à 400000 exemplaires, permet cette conversion
automatique. Le second outil est une mini-brochure reprenant les
conseils pour diminuer la consommation de sel alimentaire. Elle est
disponible
dans la majorité des points de contact de la Mutualité chrétienne,
les pharmacies et les grandes surfaces. A consulter également, le
site
www.stoplesel.be,
enrichi d’un quiz et d’informations spécifiques pour les bébés.
Brochures et salinomètres peuvent y être commandés.
A noter, enfin,
que cette mobilisation anti-sel inclut l’industrie alimentaire. Elle
s’est engagée à réduire progressivement (10% d’ici à 2012) la teneur
en sel d’une série de produits alimentaires de base: pains, sauces,
soupes, fromages, plats préparées, etc. |
Un
sel
n’est pas l’autre
L’origine
de tout sel, qu’il provienne de mines ou de marais salants, est
marine. Les mines de sel sont, en effet, la trace de mers primitives
qui se sont retirées lors du remodelage des continents ou qui se
sont asséchées lors d’une période de réchauffement climatique. Connu
sous le nom de sel gemme, ce sel est désigné par sel de
terre ou sel minier lorsqu’il est extrait à sec. Il est
parfois dissout, naturellement, par des eaux d’infiltration qui
réapparaissent sous forme de sources ou de mares salées. Le sel peut
aussi être récolté en injectant de l’eau dans les gisements. La
saumure ainsi produite est pompée puis chauffée à des fins de
récupération après évaporation de l’eau. Le sel ainsi obtenu est du
sel fin. Certains exploitants appellent aussi “sel fin” le
gros sel broyé.
Le
sel dit de mer provient des marais salants ou salins.
Il s’agit de bassins alimentés par de l’eau de mer. Sous l’action du
vent et du soleil, l’eau s’évapore et arrive à saturation. Le sel
cristallise alors et se dépose au fond du salin, où il est récolté.
C’est le gros sel. Plus l’évaporation est lente, plus les
cristaux sont gros. La couleur de ce sel, pas toujours blanc, vient
d’éléments présents dans l’eau ou de la couche d’argile sur laquelle
précipite le sel. La fleur de sel est une fine couche de sel
qui se forme à la surface des salins lorsque certaines conditions
météorologiques sont réunies. Le sel de Guérande est issu des
marais salants de Guérande, situés sur la côte sud de la Bretagne
entre la Loire et la Vilaine. On trouve encore des sels raffinés
(dont on ôte certains éléments), des sels traités (pour ne
pas absorber l’humidité de l’air par exemple) ou des sels
naturels. Le sel iodé est du sel auquel de l’iode a été
rajouté. En effet, même le sel de mer, naturellement, ne contient
pas d’iode car ce nutriment disparaît lors de l’évaporation de l’eau
de mer. |
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