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Santé publique (17 mai 2012)

> Cet article a été sélectionné comme finaliste au prix européen du journalisme santé, dans la catégorie "arrêt du tabac".

> lire également : “Ma vie libérée du tabac”

Eteindre l’envie de fumer

© Philippe Turpin/Belpress

Arrêter de fumer. Combien de fumeurs n’ont-ils pas déjà pris cette bonne résolution ou y sont-ils parvenus quelques temps avant de rechuter? Si la volonté et la motivation sont déterminantes, elles ne suffisent pas. Se faire aider permet de lutter plus efficacement contre les différentes dépendances en jeu. Reportage lors d’une séance de soutien en groupe.

Ils sont une douzaine autour de la table. Hommes et femmes de tous âges. Ils ont décidé d’arrêté de fumer, de se défaire une fois pour toutes de la cigarette, cette compagne à la fois si attirante et si encombrante. Afin de mettre toutes les chances de leur côté, ils se sont inscrits auprès du Centre d’aide aux fumeurs de l’Institut Bordet pour bénéficier d’une aide au sevrage tabagique en groupe(1). Un programme spécifique qui s’étale sur treize mois. Pour l’heure, les fumeurs le sont toujours. Ils sont en phase préparatoire de leur arrêt tabagique. Le compte à rebours a commencé. D’ici la date buttoir – le 16 mai 2012 en l’occurrence – , les fumeurs participent à trois séances fixées à une semaine d’intervalle. Suivra la phase de “désintoxication”, composée de neuf séances réparties sur trois mois, puis une phase de consolidation pendant laquelle les rencontres collectives seront plus espacées.

Après un entretien individuel et une première séance collective consacrée à la motivation, celle du jour porte sur la cigarette dite antistress, celle fumée quand cela ne va pas bien, qui sert à calmer, à remettre les idées en place. “Lorsqu’on questionne ceux qui ont rechuté, on constate qu’ils ont enclenché la reprise le plus souvent lors de moments émotionnellement difficiles, explique au groupe le psychologue et tabacologue Martial Bodo. Or, la vie est parsemée d’états de stress, de bouleversements, d’énervements. Il faut donc vous préparer à trouver des alternatives à la cigarette pour y faire face. Est-ce que cela évoque quelque chose pour vous la cigarette antistress?”, demande le coach. Plusieurs participants opinent du chef. Michèle se lance : “Oui, la cigarette m’apaise, me relaxe et si je ne trouve pas mon paquet, je suis encore plus énervée. Je crois cependant que c’est une illusion. J’ai arrêté de fumer pendant huit mois et je me sentais beaucoup plus calme. Depuis que je refume, je suis nettement plus nerveuse. Cette fois, je suis déterminée à vraiment dire adieu à la cigarette”. Thierry évoque l’impression que la cigarette le met surtout dans un brouillard, le déconnectant de la réalité. Natacha pense aussi que le tabac est plus excitant que calmant. Martial Bodo confirme qu’il augmente le rythme cardiaque : “Si vous vous mettez en position allongée et que vous prenez votre pouls, vous verrez qu’il sera plus élevé après avoir fumé” précise-t-il.

Une triple dépendance

Fumer régulièrement entraîne une triple dépendance : physique, psychologique et comportementale.

  • La dépendance physique naît de l'apport régulier en nicotine mais aussi des additifs introduits volontairement dans le tabac pour renforcer cette dépendance. Le corps s'habitue progressivement à cette drogue et réclame régulièrement sa dose pour répondre au signal lancé par le cerveau. Le manque se traduit par des troubles de la mémoire et de la concentration, des troubles de l’humeur, des insomnies, des maux de tête et vertiges...

  • La dépendance psychologique, très pernicieuse, est réellement à prendre en considération. Fumer est, pour beaucoup, un moment de plaisir, de détente. Mais le tabac remplit 36 autres fonctions selon les circonstances: il brise l’ennui, calme, booste, comble la solitude, offre une certaine assurance, joue un rôle d’antidépresseur...

  • La dépendance comportementale est également déterminante. Pour un fumeur régulier, le geste d’allumer une cigarette est celui qu’il effectue consciemment, de manière spécifique et exclusive, à des moments charnières de la journée.

Le degré de dépendance ne se mesure pas uniquement au nombre de cigarettes fumées par jour. L’intensité d’inhalation, la manière de fumer, le moment de la première “clope” de la journée sont aussi importants à évaluer.

//JD

S’ouvrir à de nouveaux horizons

La séance se poursuit. Chacun a la possibilité de s’exprimer, de réagir. Le tabacologue relance les questions, fournit des explications, renvoie chacun à son vécu propre. Avec beaucoup d’humour, d’empathie. Sans jugement ni culpabilisation. Sans diabolisation du tabac. Rien à voir donc avec les séances collectives mises en scène de manière caricaturale dans le film “Le Pari”. “Mon métier n’est pas de vous convaincre, de vous manipuler. La cigarette l’a fait avant moi, dit malicieusement Martial Bodo. Je suis là pour vous aider à surmonter vos envies et besoins de tabac, à éteindre la nostalgie liée à la cigarette et surtout à investir d’autres plaisirs, d’autres objets pour remplacer cette baguette magique, ce grigri. Evitez de vous figer sur le fait que c’est la fin de quelque chose. C’est surtout une formidable ouverture vers de nouveaux horizons, l’occasion de remplir votre vie d’autres choses, que ce soit par des achats, des loisirs, des voyages ou par une ouverture à autrui, le tabac confinant souvent à la solitude, voire même à la relégation puisque le tabac est hors-la-loi dans les lieux publics.” Et le tabacologue d’inviter les participants à calculer le gain financier qu’ils économiseront en ne fumant plus, et à réfléchir à la manière de l’utiliser pour (se) faire plaisir. Il s’agira, pour l’un, de s’offrir régulièrement un cadeau, pour l’autre, une belle récompense au terme d’une échéance. Pour un troisième, ce sera l’inverse, une “folie” à concrétiser tout de suite pour brûler tout risque de racheter des paquets.

Quant à la manière de remplacer la fameuse cigarette antistress, toutes les idées sont bonnes à prendre. Michèle, Thierry, Valérie, Olivier, Marcel, Yvette et les autres expliquent chacun ce qu’ils se voient bien faire : aller faire un tour dehors, manger un bout de chocolat, mastiquer un chewing-gum, boire une tasse de thé, téléphoner à une copine, se réfugier dans une pièce non fumeur de la maison, brûler de l’encens, se défouler à vélo, faire du rangement, pratiquer des exercices de respiration, prendre un bain, s’allonger quelques instants, écouter de la musique, sortir le chien…

A cette évocation, Martial Bodo raconte une anecdote, l’histoire d’un ancien fumeur qu’il a accompagné. “Ce monsieur s’est rendu compte qu’il fumait surtout pour combler son ennui, sa solitude quand il rentrait chez lui. Il a décidé d’adopter un chiot labrador qu’il a appelé Nicotine. Dans un premier temps, ce chien lui a servi de substitut à la cigarette. Mais Nico est vite devenu un véritable compagnon qu’il a plaisir à promener durant des heures”.

La séance touche à sa fin. Une heure, c’est vite passé. “La séance prochaine, on fera des exercices de respiration et de relaxation pour apprendre à se détendre, précise Martial Bodo. La veille du jour J, on se donnera des petites idées pour trouver les gadgets, doublures et substituts oraux au rituel de la cigarette. Pendant la semaine qui vient, continuez à observer votre manière de fumer et identifiez en quoi il vous est insupportable d’être fumeur. D’ici la date buttoir, il n’est pas nécessaire de diminuer votre consommation. Cela risque même d’être contre-productif. C’est arrêter qui est le plus difficile, quel que soit le nombre de cigarettes fumées par jour”, précise le tabacologue.

// JOËLLE DELVAUX

(1) Sessions d’aide entièrement gratuites (substituts à la nicotine compris) destinées aux personnes qui ne sont pas sous contrat de travail. Infos : 02/534.54.68. - 0497/108.100.

Se faire aider

Arrêter de fumer, ca ne s’improvise pas. Il est avéré que sans aide, le risque de rechute est de 90 à 95%. Pour augmenter les chances de réussite, un suivi médical et psychologique personnalisé est vivement conseillé. Il sera couplé à un changement de mode de vie (une activité physique, même modérée, diminue le désir de fumer) et éventuellement à la prise de substituts à base de nicotine (patchs, gommes...) ou de produits médicamenteux (prescrits sous strict contrôle médical). En moyenne, trois tentatives bien conduites sont nécessaires pour aboutir à une abstinence définitive. Afin de promouvoir ce soutien professionnel, les pouvoirs publics ont décidé, il y a quelques années déjà, de rembourser les consultations d’aide à l’arrêt tabagique(1) auprès d’un médecin ou d’un tabacologue reconnu (voir ci-après). Une mesure unique en Europe, il faut le souligner. La consultation de tabacologie s’adresse aussi aux personnes qui souhaitent simplement entamer une réflexion sur leur consommation avec l’aide d’un professionnel.

A qui s’adresser ?

  • Le médecin traitant est le premier interlocuteur du patient qui souhaite arrêter de fumer. Il pourra le conseiller, l’orienter, l’accompagner dans son sevrage, le remotiver en cas de rechute.

  • Les tabacologues sont des professionnel de la santé (médecins, infirmiers, psychologues...) qui ont suivi une formation universitaire en tabacologie. Reconnus par le Fonds des affections respiratoires (Fares), ils proposent des consultations en privé ou dans les Centres d’aide aux fumeurs (CAF)(2).

  • Les Centres d’aide aux fumeurs, coordonnés par le Fares, proposent une aide spécialisée à la gestion du tabagisme. Répartis sur l’ensemble de la Communauté française et le plus souvent ancrés en milieu hospitalier, ils offrent, en lien étroit avec le médecin traitant, une prise en charge individuelle et/ou collective par une équipe composée d'un médecin, d'un psychologue, d'un diététicien, d'un kinésithérapeute, d'un tabacologue, voire d’autres professionnels tels que sophrologue, hypno-thérapeute... Certains centres développent un accompagnement spécifique durant la grossesse(2).

  • Complémentairement, Tabac Stop (0800 111 00) fournit gratuitement des conseils et un accompagnement intensif et personnalisé par téléphone, en semaine de 15h à 19h. Un programme de coaching virtuel est aussi accessible sur www.tabacstop.be

// JD

(1) Huit consultations sont remboursées. L’intervention de l’Inami s’élève à 30 euros pour la première séance (45 minutes minimum), 20 euros pour chacune des sept séances suivantes (30 minutes minimum) qui doivent avoir lieu sur maximum deux années civiles. L’intervention est de 30 euros pour toutes les séances en cas de grossesse.

(2) La liste des tabacologues et centres d’aide aux fumeurs est disponible au 0800/11100 (numéro gratuit), sur www.tabacstop.be ou sur www.aidesauxfumeurs.be

>> Pour plus d’infos et de nombreux conseils sur l’arrêt tabagique, consulter la brochure gratuite “Tabac. Et si j’arrêtais”, remise à jour par Infor Santé. Elle est disponible sur simple demande au 0800 10 9 8 7 ou auprès des conseillers mutualistes de la MC. Elle est aussi téléchargeable sur www.mc.be


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