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Psychologie (20 novembre 2014)


Émotions et santé : un duo gagnant

© LEEMAGE BELGAIMAGE

Nos émotions - comme la colère, la joie, la tristesse, la peur… - ont du pouvoir. Elles orientent nos comportements, nous informent sur nos besoins, guident nos choix. Être capable de les comprendre, de les réguler a une influence sur notre santé mentale, mais physique aussi. Une étude universitaire et de la Mutualité chrétienne l'atteste pour la première fois.

Des recherches scientifiques avaient déjà montré que le niveau de compétences émotionnelles d'un individu agit dans des domaines importants de la vie, explique le professeur Moïra Mikolajczak de l'UCL. Précision d'entrée: quand ils parlent de compétences émotionnelles, les chercheurs se réfèrent à cinq aptitudes: identifier ses émotions, les comprendre, les exprimer de façon socialement acceptable, les réguler, les utiliser. Sans trop de surprise, il est attesté que des compétences émotionnelles élevées ont un effet positif sur un premier domaine: la santé mentale. Moins de stress, moins d'anxiété, des phobies moins sévères. "Ceci ne veut pas dire que la personne davantage à l'écoute de ses émotions ne va jamais développer une dépression ou ne va jamais souffrir de troubles anxieux, précise le professeur. Mais il en faudra beaucoup plus dans le plateau de cette personne avant qu'elle ne craque".

Globalement les compétences émotionnelles permettraient d'être plus heureux, plus satisfait… Autre sphère bichonnée: les relations sociales (familiales, conjugales, professionnelles). Certaines études ont indiqué que les individus aux compétences émotionnelles élevées sont moins souvent en conflit avec leur proches, plus appréciés, nourrissent des relations plus durables et plus profondes. Là aussi, il s'agit de statistiques, et donc de tendances globales. Troisième domaine déjà exploré: les performances au travail et les compétences managériales. Elles aussi auraient un lien avec les compétences émotionnelles. Plus celles-ci sont élevées moins la personne est envahie par le stress, plus elle est enthousiaste…

Premières objectivations

Malgré l'étendue de ce champ d'études, "nous ne disposions encore d'aucune donnée scientifique permettant d'établir à grande échelle un lien objectif entre compétences émotionnelles et santé, déclare cette spécialiste de l'UCL. Des études avaient bien montré par exemple que des personnes avec de moindres compétences émotionnelles avaient tendance à se plaindre plus de maux de tête, de dos, de ventre… Mais cela n'avait jamais été testé de manière objective." C'est cette relation d'influence entre compétences émotionnelles et santé que des chercheurs de l'UCL, de la KUL et de la MC viennent de sonder.

En particulier le lien entre ces compétences et le recours aux soins de santé: nombre de consultations de médecin, consommation de médicaments, durée d'hospitalisation… Leurs sources? Près de 11.000 formulaires de réponses remplis par des membres de la Mutualité chrétienne, et extraits d'un plus vaste échantillon, avec un souci particulier d’être représentatif de l'ensemble de la population belge. Le tout anonymisé et récolté – comme il se doit – avec l'autorisation des personnes concernées.

Influence sur la santé ?

Des analyses statistiques de ces données, il ressort qu'une relation existe bel et bien entre soins de santé et compétences émotionnelles. Ces dernières lorsqu'elles sont élevées – d'après des mesures auto-rapportées – vont de pair avec une consommation réduite de médicaments, un nombre de consultations chez les médecins inférieur à la moyenne, un nombre inférieur aussi de jours d'hospitalisation. Ainsi d'après l'étude, les deux variables les plus probantes pour prédire notre état de santé se trouvent être l'âge et les compétences émotionnelles intrapersonnelles c'est-à-dire relatives aux émotions de l'individu lui-même (distincte de la compétence à lire les émotions d'autrui).

Agent de prévention

Deuxième leçon majeure de cette étude: les compétences émotionnelles atténuent les effets de certains facteurs de risque sur la santé, comme l'indice de masse corporelle élevé, le peu d'activité physique ou le faible niveau de formation… L'alimentation, l'exercice physique, le niveau socio-économique, le soutien social, la consommation d'alcool et de tabac comptent en effet parmi les éléments considérés comme "prédicteurs" de bonne ou mauvaise santé. Les chercheurs ont tenté de savoir si les compétences émotionnelles pouvaient moduler les effets de ces prédicteurs connus, les réduire en fait. Et cela semble être le cas pour certains d'entre eux.

Concrètement, une personne qui pratique peu d'activité physique et qui a de faibles compétences émotionnelles passera en moyenne presque deux jours de plus à l'hôpital par an, qu'une personne tout aussi peu sportive mais davantage apte à réguler ses émotions.

Autre exemple: une personne âgée avec des compétences émotionnelles faibles consommera près de 180 doses de médicaments de plus par an qu'une personne âgée avec des compétences émotionnelles élevées. "Les compétences émotionnelles sont un prédicteur significatif et pourtant négligé de la consommation de soins de santé, conclut Moïra Mikolajczak. Son avantage, c'est que contrairement à l’âge par exemple, il peut être modifié", avance-elle confiante. Le focus est mis jusqu'à présent sur l'hygiène alimentaire et l'activité physique – pensons à l'adage "5 fruits et légumes par jour et 30 minutes d'exercices physiques." Sans doute, et c'est l’avis des auteurs de l'étude, les campagnes de prévention devrait-elles intégrer la gestion des émotions.

//CATHERINE DALOZE

>> Plus d'infos sur : www.mc.be/competence-emotionnelle

 Qu’entend-on par "compétences émotionnelles" ? 

Il est parfois très difficile de saisir notre pouls émotionnel, d'aller au-delà d'un constat général tel "je me sens bien ou mal". Est-ce que l'on éprouve de la colère? De la frustration? Ou de la honte? De la culpabilité? Est-ce plutôt de la tristesse? Ou s'agit-il d'un savant mélange de plusieurs émotions ?

Joie, fierté, émerveillement, enthousiasme, mais aussi colère, tristesse, anxiété, dégoût… la palette est étendue. Qu'elles soient agréables ou pas, "les émotions sont des compagnons de vie indispensables !", observent Martin Desseilles et Moïra Mikolajczak, respectivement psychiatre et docteur en psychologie. "Si nos émotions, même les plus difficiles, ont une utilité, cela ne veut pas dire qu'il faille les laisser nous envahir à tout moment. Les émotions sont indispensables à la vie, mais, pour une vie épanouie, nous devons être capables de gérer et réguler une partie d'entre elles."

Les compétences émotionnelles renvoient à notre manière de traiter ces sentiments, ces émotions agréables et désagréables. Les chercheurs utilisent aussi le terme d'"intelligence émotionnelle" ou de "quotient émotionnel". Mais la notion de compétences a l'avantage d'induire que la situation n'est pas figée. Car des compétences, on peut les améliorer.

Les spécialistes distinguent deux versants aux compétences émotionnelles: elles sont intra ou interpersonnelles. Les unes se déploieront dans le traitement de nos propres émotions: les identifier, comprendre ce qui les déclenche, savoir les exprimer d’une manière adéquate, pouvoir les réguler et les utiliser à bon escient. Moïra Mikolajczak exemplifie: "une personne qui exprime bien ses émotions est capable d'expliquer calmement, au moment opportun, pourquoi cette situation la met en colère et ce que l'autre peut faire pour l'apaiser. Une personne qui n'est pas compétente dans l'expression des émotions choisira mal son moment, s'exprimera en criant, ou râlera ou boudera sans rien dire".

Quant aux compétences interpersonnelles, elles sont relatives aux aptitudes à lire, à comprendre… l'état émotionnel d'autrui. Là aussi, il n'est pas toujours évident d'interpréter l'émotion de l'autre, de trouver les mots pour l'apaiser… Chacun y réussit plus ou moins bien.

Comment mieux vivre avec ses émotions ?

Lectures d'ouvrages pratiques ou de réflexion sur les émotions, formations à la gestion des émotions, programme de pleine conscience, psychothérapies… Plusieurs canaux existent pour développer ses compétences émotionnelles. Et l'offre s'enrichit. Même si le rêve exprimé par certains de voir intégré ce type de matière dans l'enseignement de manière systématique n'est sans doute pas pour demain.

Quelle forme peuvent prendre les premiers conseils? Dans l'ouvrage "Vivre mieux avec ses émotions", les auteurs détaillent "des petits gestes qui sauvent".

> Résoudre immédiatement les petits désagréments. Ceux-ci déclenchent des émotions négatives fréquentes et chroniques, qui peuvent perdurer tant que le problème ne sera pas réglé. L'accumulation de petits désagréments affecterait autant qu'un grand événement difficile à vivre. En bref, évitons de procrastiner (reporter au lendemain).

> Identifier les défauts qui nous pourrissent la vie. Désorganisation, procrastination, impulsivité… "Nous passons énormément de temps à souffrir de nos défauts et très peu de temps à les changer". Pas facile mais "cela en vaut la chandelle".

> Prendre le temps de se relaxer. Plusieurs manières de se relaxer: les activités apaisantes et les techniques de relaxation dirigée.

> Éviter la malbouffe… mais avoir toujours un sucre sur soi. "Si vous devez régler un conflit avec votre conjoint ou un membre de votre famille, ne partez pas le ventre vide! Et si vous êtes énervé(e) en rentrant chez vous en raison du désordre ou des cris des enfants, mangez quelque chose avant de dire quoi que ce soit. Les choses vous paraîtront moins graves le ventre plein!" Et les auteurs d'ajouter: "du sucre, oui… mais pas trop". Car si le sucre aide à gérer ses émotions, s'il constitue un "aliment réconfortant", il ne faut pas en abuser.

> Garder des souvenirs tangibles des événements agréables.

> Penser autrement : se rappeler que nos pensées ne reflètent pas forcément la réalité (ce n’est pas parce que je pense que je suis nulle et/ou qu’il me veut du mal que c’est vrai). Essayer de voir le côté positif des choses.

> Passer plus de temps au présent : moins “ruminer“ sur les douleurs du passé et anticiper moins anxieusement les tracas futurs.

> Un dernier conseil, plus surprenant, avancé par les auteurs de l'ouvrage : ôter de sa vue ce qui fait penser à l'argent. En effet, "on pourrait comparer l'effet des magazines de luxe à celui qu'une énorme part de gâteau aurait sur un diabétique qui doit perdre du poids: agréable au moment même, mais insidieusement délétère sur le long terme", indiquent Martin Desseilles et Moïra Mikolajczak.

>> Plus d'infos :
M. Desseilles & M. Mikolajczak, "Vivre mieux avec ses émotions", éd. Odile Jacob, 2013.
Et d'autres supports tels : Ilios Kotsou, "Petit cahier d'exercices d'intelligence émotionnelle", éd. Jouvence, 2011.

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