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Ethique (2 avril 2009)

 

Des réflexions éthiques

d’un homme de médecine

Médecin psychiatre investi sur les questions d’éthique, Léon Cassiers est décédé inopinément le mercredi 11 mars dernier. Récemment encore, il était invité par la Mutualité chrétienne à s’exprimer à propos de la fin de vie. Il proposait avec ouverture quelques réflexions philosophique et éthique autour du thème des soins palliatifs.

 

@ UCL

 

Né le 23 mai 1930 à Bruxelles, Léon Cassiers était une autorité incontestée dans le domaine de la santé mentale. Docteur en médecine en 1954, il obtient en 1957 le diplôme de spécialiste en psychiatrie. Il complète sa formation par un diplôme en psychologie et par un doctorat en criminologie. Il se formera aussi en psychanalyse et en thérapie familiale.  Il aura également une longue expérience de terrain comme praticien, à la direction du service psychiatrique des Cliniques universitaires Saint-Luc pendant près de 20 ans. Ensuite, comme expert des tribunaux.

Professeur émérite de l’Université de Louvain, Doyen de la faculté de médecine de 1989 à 1994 Léon Cassiers a été nommé Président du Comité consultatif de Bioéthique en 1998, dont il assumait encore la vice-présidence.

 

 

Pour Léon Cassiers, le malade avait plus d’importance que la maladie. Celles et ceux qui l’ont côtoyé appréciaient autant ses compétences professionnelles que ses qualités personnelles: une sagesse certaine, une audace tranquille dont il fit preuve notamment dans son travail au sein du Comité consultatif de bioéthique. Ses analyses, non dénuées d’ironie, étaient toutes en finesse.

 

Un nouveau sens pour la médecine

«Le sens des soins palliatifs propose un nouveau sens à la médecine L’apparition des soins palliatifs a constitué une révolution dans les mentalités médicales, estimait-il. Pour de multiples motifs, comme l’a par exemple bien montré David Le Breton, les médecins ne se sont que très lentement intéressés à soulager la douleur physique. Il a fallu vaincre de nombreuses résistances pour faire admettre l’anesthésie dans la chirurgie. Il en a fallu tout autant pour faire admettre qu’une des tâches du médecin était de soulager les douleurs physiques, et plus encore pour admettre qu’il s’intéresse aux souffrances psychologiques. (…) actuellement encore, de nombreux médecins et infirmiers ou infirmières doivent être formés pour prendre en compte les douleurs et les souffrances de leurs patients. (…).

Médecins et soignants définissent généralement le but de leur métier comme la lutte contre la maladie et la restauration de la santé. L’important, c’est de guérir, et les progrès de la médecine sont d’abord des progrès dans les techniques de diagnostic et de traitement. Dans cet esprit, la douleur et même les souffrances que provoquent les maladies disparaîtront d’elles-mêmes si on guérit le malade. A fortiori, la mort sera évitée. C’est une des raisons pour lesquelles de nombreux médecins ressentent la mort comme un échec qu’ils répugnent à rencontrer et s’intéressent assez peu à la souffrance sous ses diverses formes.

Les soins palliatifs, en se donnant pour but de soulager les souffrances et d’accompagner la mort, changent le but de la médecine. Ils donnent un modèle de ce que la médecine, toute la médecine et pas seulement celle des mourants, pourrait être.»

 

Dignité humaine

Conscient des défis éthiques qui se posent aujourd’hui à la science et à la médecine en particulier, Léon Cassiers aura toujours plaidé pour une conception de la dignité humaine qui repose  moins sur la capacité d’autonomie individuelle que sur la solidarité.

C’est encore cela qu’il laissait comme message lors d’un séminaire organisé par la Mutualité chrétienne à Spa le 13 novembre 2008, consacré aux soins palliatifs. Que faut-il entendre, s’interrogeait-il, par cette notion si souvent invoquée: le respect de la “dignité humaine”? Quel sens donner à ce principe, surtout quand il s’agit des plus faibles?

«Pour le point de vue des soins palliatifs, ce qui fait la dignité humaine, affirmait Léon Cassiers, c’est d’être reconnu par l’autre, estimé, respecté ou mieux encore aimé par d’autres. La dignité, dans cette optique, est comme une qualité que chacun accorde à l’autre dans ses relations, et attend de lui (…).

C’est bien l’idée des soins palliatifs: c’est l’accompagnement respectueux et même affectueux des malades qui leur rend le statut d’interlocuteurs valables, le sentiment qu’ils sont acceptés par les autres malgré leurs faiblesses et qu’ils sont encore capables de susciter de l’intérêt, voire même de l’affection. Ils ne sont pas devenus des inutiles. Ils ont gardé leur dignité malgré leur maladie. Au-delà d’une bonne médecine, les soins palliatifs témoignent dans la société que la dignité humaine peut être comprise autrement que comme liée à l’autonomie ainsi que le pensent si souvent les comités d’éthique et les politiciens. En ce sens ils sont un espoir pour notre avenir.»

 

Fraternité

Récemment, lors d’une journée d’études intitulée “Suicide et euthanasie”, Léon Cassiers reprenait ce “pari” qu’il avait exprimé, quelques années plus tôt, lors de l’émission Noms de Dieux (1): «Le XXe siècle a été le siècle de la liberté. Le XXe siècle, le siècle de l’égalité. Espérons que le XXIe sera celui de la fraternité. Car la dignité de l’être humain ne repose pas seulement sur son autonomie. Elle dépend de la solidarité des autres envers lui.»

CVR et CD

 

(1) Emission d’avril 2001 sur La Deux.

 


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