Conseils pratiques
(6 décembre 2007)
La
prévention
contre le cancer du col de l’utérus
Depuis
le 1er novembre 2007, le vaccin destiné à prévenir 70% des
cancers du col de l'utérus est largement remboursé par l’assurance soins de
santé obligatoire pour les filles âgées de 12 à 15 ans révolus. Pourquoi le
remboursement cible-t-il cette tranche d’âge? Ce vaccin est-il efficace
contre tous les cancers du col de l’utérus? Le dépistage par frottis doit-il
être encore pratiqué? D’où provient ce cancer? Réponses à vos questions.
1.
D’où vient le cancer du col de l’utérus?
Le cancer du col de
l'utérus est causé à l’origine par la présence d'un virus, le papillomavirus
humain (HPV), qui se transmet par voie sexuelle. Il existe plus de 100 types
de papillomavirus humain, mais seuls certains peuvent être à l'origine de
l'apparition d'un cancer du col de l'utérus. Les deux types à haut risque de
cancer les plus fréquents sont le HPV 16 et 18 qui sont retrouvés dans plus
de 70% des cancers du col utérin. Les autres types à haut risque sont les
31, 33, 35, 45, 52 et 58.
Les autres type de
papillomavirus humain sont responsables des "condylomes acuminés", sortes de
verrues se développant sur les organes génitaux et régressant spontanément
grâce à une réaction immunitaire.
2. L’infection est-elle contagieuse?
Absolument. L'infection
au HPV est transmissible par voie sexuelle. On considère que 70 à 80% des
femmes seront infectées un jour par le HPV. Mais la majorité des infections
ne donne pas de symptômes et guérit spontanément en quelques mois, grâce à
l'apparition d'une immunité. La cancer du col survient uniquement lorsque
les types de papillomavirus à haut risque s’installent de façon permanente
au niveau du col de l’utérus. Ils peuvent ainsi transformer petit à petit
les cellules normales en cellules cancéreuses. Une transformation qui
s’étale sur des années, voire des dizaines d’années. Le cancer du col de
l’utérus est donc une complication assez rare d’une infection très répandue.
Bien souvent d’ailleurs, lorsque le cancer apparaît, d’autres facteurs sont
présents, par exemple, un système immunitaire stressé ou affaibli, une
mauvaise alimentation, le tabagisme… A noter que ces virus HPV ne provoquent
pratiquement jamais de cancers génitaux chez l'homme.
3. Comment peut-on savoir si on est infecté par le HPV?
L'infection ne donne pas
de signes dans la majorité des cas. Il n'est donc généralement pas possible
de savoir si une personne est infectée, sauf en présence de verrues
génitales.
Seul le dépistage par
frottis du col permet de détecter la transformation des cellules avant
qu'elles ne deviennent cancéreuses (voir question 9).
4. Le vaccin contre le cancer du col de l’utérus est-il efficace contre
toutes les formes de cancer du col de l’utérus?
Non. Le premier vaccin
contre le cancer du col de l’utérus mis sur le marché et remboursé en
Belgique, le Gardasil, cible quatre types de papillomavirus à haut risque
(6, 11, 16 et 18), responsables de 70% des cancers du col de l'utérus et de
90% des verrues génitales.
Plusieurs études
cliniques ont montré la grande efficacité de ce vaccin dans la prévention du
cancer du col de l’utérus et des lésions cervicales précancéreuses. Il est
également efficace pour les lésions bénignes cervicales, vulvaires et
vaginales et sur les verrues génitales. Cette protection a été observée
jusqu’à cinq ans après une vaccination complète mais des études de suivi à
long terme sont en cours.
Un deuxième vaccin vient
d’être mis sur le marché en octobre dernier par une autre firme et sera
prochainement remboursé. Il s’agit du Cervarix qui cible quant à lui les
deux types de papillomavirus humain cancérigènes les plus fréquents, à
savoir les HPV 16 et 18. Les études cliniques de suivi montrent également
une excellente efficacité du vaccin, avec apparemment une durée qui pourrait
être plus longue.
5. Qui rembourse le vaccin contre le cancer du col de l’utérus et pourquoi
est-il limité aux jeunes filles entre 12 et 15 ans accomplis?
Le ministre fédéral des
Affaires sociales a suivi la proposition de la Commission de remboursement
des médicaments, d’introduire le remboursement du vaccin contre le cancer du
col de l’utérus dans l'assurance maladie obligatoire, seul à même de
permettre à toutes les jeunes filles d’accéder à ce vaccin très coûteux (la
vaccination avec le Gardasil - en trois injections - coûte près de 400 euros
au total) (1).
Grâce à ce remboursement
en catégorie B, au lieu de payer 130,22 euros par dose de Gardasil, la
patiente n’en paiera que 10,60 euros (soit 31,80 euros au total). Les
bénéficiaires de l'intervention majorée (BIM) et les personnes bénéficiant
du statut OMNIO paieront 7,10 euros par dose (soit 21,30 euros au total)
(2).
Le remboursement est
accordé aux jeunes filles qui, lors de l'injection de la première dose, ont
entre 12 et 15 ans révolus. Cette catégorie d'âge a été ciblée en raison du
fait que le vaccin possède son efficacité maximale lorsqu'il est administré
avant le premier contact avec le virus et donc avant les premiers rapports
sexuels(3). Cela étant, la vaccination dans cette tranche
d'âge est recommandée, que les jeunes filles aient déjà eu ou non des
relations sexuelles.
100.000 jeunes filles
sont concernées et 45 millions d'euros ont été consacrés au remboursement de
ce coûteux vaccin par la sécurité sociale. Le choix fait par le gouvernement
fédéral correspond au meilleur rapport coût-efficacité en termes de santé
publique.
6. La vaccination est-elle recommandée aux jeunes filles plus âgées?
C’est au médecin de
famille ou au gynécologue de juger sur base individuelle si la vaccination
des jeunes filles de 16 à 25 ans (ayant déjà eu des contacts sexuels ou non)
est indiquée. Il est important que cette offre de vaccination anti-HPV
s’inscrive dans le cadre d’une consultation au cours de laquelle la
contraception et les rapports sexuels protégés sont abordés. De même, il est
important que soit rappelée la nécessité de pratiquer un dépistage régulier
par frottis dès l’âge de 25 ans.
7. Comment s’effectue concrètement la vaccination?
Chaque dose du vaccin
est délivrée en pharmacie sur base d’une prescription médicale. Le vaccin
doit être conservé au frigo en attendant d’être administré par le médecin
généraliste.
Le schéma de vaccination
comprend trois doses administrées par voie intramusculaire (de préférence
dans la partie supérieure du bras). La deuxième dose doit être administrée
deux mois après la première et la troisième, quatre mois après la deuxième.
8. La vaccination est-elle synonyme de protection totale?
Non, bien entendu. La
vaccination contre le HPV pourrait offrir à tord un sentiment de sécurité
alors qu’elle ne protège en rien les jeunes filles et les femmes contre tous
les cancers du col de l’utérus ni contre les maladies sexuellement
transmissibles comme le sida ou l’hépatite B. Il est évident qu’elle ne
protège pas non plus d’une grossesse non désirée.
Cette vaccination ne
supprime donc nullement la nécessité d'être prudente et de se protéger lors
des relations sexuelles par l'utilisation de préservatifs.
9. Le dépistage du cancer du col de l’utérus reste-t-il nécessaire après
vaccination?
Tout à fait. Etant donné
qu'aucun vaccin n'est efficace à 100%, que Gardasil ne protège pas contre
30% des cancers du col de l'utérus ni contre des infections déjà existantes
dues aux HPV, le dépistage par frottis du col de l'utérus reste
indispensable dès l’âge de 25 ans. Par ailleurs, on ne peut pas dire
aujourd'hui pendant combien d'années le vaccin assure une véritable
protection.
Le dépistage par frottis
permet de détecter des anomalies des cellules avant l'apparition d'un
cancer, ce qui permet d’entamer ainsi un traitement local. Toutes les femmes
entre 25 et 65 ans devraient pratiquer un dépistage tous les trois ans.
Joëlle
Delvaux
(1) Arrêté ministériel du 18-10-2007modifiant la liste
jointe à l’AR du 21 décembre 2001 fixant les procédures, délais et
conditions en matière d’intervention de l’assurance obligatoire soins de
santé et indemnités dans le coût des spécialités pharmaceutiques – MB du
22-10-2007.
(2) Via son service vaccination, l’assurance complémentaire
de la Mutualité chrétienne rembourse jusqu'à 25 euros des frais de
vaccination restant à charge des patients. Cela signifie que pour les jeunes
filles de 12 à 15 ans, le coût de cette vaccination sera quasi couvert. Les
patientes qui décideraient de se faire vacciner alors qu'elles ne sont pas
dans les conditions pour bénéficier de l'intervention de l'A0 bénéficieront
seulement du remboursement de l'assurance complémentaire. De plus amples
informations peuvent être obtenues auprès de votre mutualité, en appelant
gratuitement le 0800 10987 ou sur le site www.mc.be.
(3) Chez les femmes infectées, le vaccin n'a aucune
efficacité. Mais s’il y a infection, elle est rarement le fait simultané des
quatre virus présents dans le vaccin.
Un dépistage à systématiser |
La première
condition pour que la vaccination contre le cancer du col de
l’utérus soit efficace est de maintenir le dépistage: une réduction
de la couverture de celui-ci pourrait en effet anéantir les effets
positifs de la vaccination.
Le dépistage par
frottis classique permet d’éviter en Belgique environ 1.400 cancers
du col par an. Malgré tout, chaque année, 700 femmes sont encore
atteintes d’un cancer invasif du col - cancer qui n’avait pas été
détecté à temps par dépistage - et plus d’un tiers de ces femmes en
décèderont.
Le nombre de
diagnostics d’un cancer du col de l’utérus pourrait encore diminuer
si le dépistage était organisé de manière systématique.
Actuellement, d’après une étude du Centre fédéral d’Expertise des
soins de santé (KCE), seulement 59% des femmes de 25 à 64 ans se
présentent régulièrement chez leur gynécologue ou médecin de famille
pour un frottis de dépistage du cancer du col (1).
Mais souvent à une cadence exagérée : en principe, un seul frottis
tous les trois ans suffit alors que, chez la plupart, il est réalisé
chaque année. Les autres 41% ne se présentent jamais ou rarement
pour un frottis du col.
Dans son avis
relatif à la vaccination contre les infections causées par le
papillomavirus humain, le Conseil supérieur de la Santé
(2) plaide avec le KCE pour un dépistage systématique du cancer
du col de l’utérus ainsi qu’un bon enregistrement des résultats du
dépistage, des vaccinations HPV et des cancers.
JD
(1) Le KCE a publié une première étude intitulée
Cancer du col de l’utérus: d’abord une question de dépistage
méthodique, en octobre 2006 (n° 38B) et, un an après, une seconde,
intitulée Vaccination HPV pour la prévention du cancer du col de
l’utérus en Belgique (n°64B). Ces études sont téléchargeables sur le
site du KCE : www.kce.fgov.be
. Rens.: 02/287.33.88.
(2) Avis n°8204 du Conseil supérieur de la Santé, téléchargeable
sur le site
www.health.fgov.be/CSS_HGR |
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