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Mutualité service (4 octobre 2012)


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Une présence rassurante à la maison

Une profession qui se cherche

Alors que dans l'ensemble du pays, des services de gardes à domicile sont reconnus, contrôlés financés – de manière plus ou moins importante – par les entités régionales, la Région de Bruxelles-Capitale est à la traîne. En Région wallonne, par exemple, 430 équivalents temps pleins sont financés dans une quarantaine de services et le financement de 100 emplois supplémentaires est en cours de négociation.

La non-reconnaissance du métier encourage le travail au noir et les abus en découlant”, observe l'asbl Gammes qui emploie, encadre et forme une septantaine de gardes à domicile à Bruxelles(1). L’association ne manque pas d'interpeller le politique à cet égard. Ce fut encore le cas le 14 septembre dernier, lors d'un colloque sur le sujet. Les arguments s'enchaînent: le besoin est criant; le métier de garde est une belle opportunité d’emploi et de formation pour des personnes peu qualifiées; il faut éviter que la garde à domicile ne soit un luxe que seuls les plus riches peuvent se permettre…

A y regarder de plus près, la seule reconnaissance du métier n'est qu'un premier pas. Il est essentiel mais il s'agit ensuite de faire en sorte que les services disposent des moyens humains et financiers ad hoc pour déployer leurs savoir faire. Le défi est de taille sur l'ensemble du territoire belge.

(1) Gammes asbl – 02/537.27.02 – www.gammesasbl.be

© Véronique Vercheval

Rester dans sa maison, son appartement, là où l'on a vécu jusqu'à présent, là où on a ses repères, c'est le souhait de nombre d'entre nous. Malgré l'âge grandissant, ou malgré la maladie ou le handicap, les jambes qui ne portent plus si bien, les gestes moins assurés, la tête qui divague… La garde à domicile peut aider dans certaines situations.

Il ne sera, pour beaucoup, pas réaliste de rester dans ses meubles, sans aides. Pour le ménage, pour la préparation des repas, pour les courses, les toilettes… Mais également pour garantir une présence sécurisante, veiller au confort au quotidien. Souvent l'entourage s'y attelle. Ainsi, pariant sur le maintien à domicile, de grandes familles qui ne se sont pas éparpillées à des kilomètres à la ronde répartiront en leur sein les passages auprès du proche affaibli. De plus petites maisonnées tenteront de s'organiser avec les bonnes volontés alentour. L'aventure n'est cependant pas aisée ; les disponibilités sont variables et, sur le long cours, l'épuisement ne manque pas de poindre à l'horizon. Un passage quotidien, voire plusieurs fois par jour, auprès de son parent vieillissant ou affaibli peut devenir une contrainte terrible. Sans compter, les plus isolés qui chercheront vaille que vaille de l'aide à proximité.

Pour répondre à ces souhaits de rester à domicile malgré la perte d'autonomie, l'âge, la désorientation, la maladie, et pour apporter quelques moments de répit aux familles, plusieurs métiers se développent. Ainsi peuvent être mobilisables – aux côtés des aides familiales, des aides soignants, des aides ménagères, etc. – des services de gardes à domicile.

Surtout être là

Les gardes à domicile viennent apporter présence et soutien, de jour ou de nuit. Leur mission principale: collaborer à la sécurité et au confort de la personne. On parle de “présence active”.

Une notion pas toujours simple à appréhender, tant elle tient à l'être davantage qu'au faire. Laissant les soins médicaux aux infirmiers, le nettoyage aux aides ménagères…, les gardes à domicile sont principalement dans l'écoute, dans le soutien au bien-être, effectuant au besoin certaines tâches: aide au lever, au coucher, à la prise des repas, à boire, aux changements des protections éventuelles, etc. Il arrive que leur fonction souffre de quelques a priori douteux: “A quoi sont-ils payés ? A papoter ?”. A les connaître, à expérimenter leur service, les méfiances s'éclaircissent. “Une des difficultés de mon nouveau métier, expliquait une jeune garde à domicile de l'ASD de Ath au début de sa carrière, était de rester 'inactive' parfois chez des patients où la principale aide est l'écoute. (…) J'aide les patients et eux m'apprennent souvent des choses : recettes de cuisine, petits “trucs” pour bricoler, histoire d'un village… (…) Je les trouve ‘attachants’, j'essaye encore de faire quelque chose avec eux : un jeu de carte simplifié, une séance de maquillage…”. Et ceci sans tomber dans l'occupationnel ou la stimulation à tout crin.

Rassurer les proches

Audrey Fervil est responsable d'une équipe de gardes à domicile dans le Brabant wallon(1). Elle explique les demandes qui lui sont faites. “On nous appelle pour des personnes qui ne savent plus rester seules à domicile. La plupart du temps, ce sont des couples : l'un a un problème de santé et l'autre ne peut y faire face seul. Parfois, il s'agit de personnes en soins palliatifs. Souvent, ce sont les enfants qui téléphonent ou les demandes arrivent par les centres de coordination pour organiser une sortie d'hôpital. Quand elle est organisée. Parce qu'il arrive que ce ne soit pas le cas. Comme pour cette dame alitée, avec une attelle, vivant seule, de retour chez elle et pourtant, dans l'incapacité de s'en sortir en solo. Il faut alors agir rapidement. Souvent, les enfants voudraient une présence maximale, pour être rassurés et avoir l'esprit plus tranquille pendant leurs occupations. Il s'agit alors de décortiquer les demandes.

Pas simple en effet de faire un choix équilibré entre la crainte des risques (de chute, d'accident…) et le besoin d'intimité. Pourtant, “cela peut être lourd d'avoir quelqu'un à la maison”, remarque Audrey Fervil qui examinera chaque demande avec soin. Ainsi, avant l'entame d'une garde à domicile, et l'établissement d'un horaire de présence, il s'agira d'estimer avec les premiers concernés leurs besoins, de veiller à ce qu'ils ne surestiment – ni ne sous-estiment – leurs capacités. Et de réajuster la garde si nécessaire.

//CATHERINE DALOZE

>> Plus d'infos : Fédération de l'aide et des soins à domicile: 02/735.24.24 - www.fasd.be

(1) Equipe organisée au sein des Aide et soins à domicile (ASD).

Dérives commerciales et autres

Pour 1.870 euros par mois, offrez-vous une garde au pair bulgare 24h/24. Voilà ce que propose Seniorcare24 à Herentals. Personal Services Ost West, quant à lui, fournit en Flandre, des “soins bon marché 24h/24 à domicile plutôt qu'en maison de repos”, pour 1.390 euros par mois, la prise en charge du billet d'avion de la garde polonaise, son logement et sa nourriture, ainsi que 650 euros de frais d'administration. Et cetera.

Employées par une structure à la légalité parfois douteuse et aux finalités plus financières que philanthropes, en contrat d'indépendante voire totalement au noir, les offres de gardes à domicile se multiplient. En Communauté germanophone, on parle aussi des dames roumaines ou polonaises, sans savoir précisément. “Elles viennent par l'intermédiaire d'une agence allemande, ou s'organisent entre elles, issues du même village. Elles logent chez des personnes âgées en perte d'autonomie. C'est tout un circuit”, explique Anneliese Zimmermann de l’Aide et soins à domicile (ASD) de Eupen. “Elles couvrent un certain besoin. Il y a trop peu de lits en maison de repos (et de soins) dans la région. Dans ces endroits très ruraux, l'entraide familiale était importante. Mais les politiques ont réagi trop tard face aux changements de mode de vie et au vieillissement de la population”. Les dangers de “marchandisation” et de “tiersmondisation” dans le domaine sont à craindre.

Certaines associations dénoncent d'ailleurs une forme d'esclavagisme moderne(1). “Les gens ne réalisent pas tellement le problème de ce type de travail”, constate Anneliese Zimmermann. Pas de protection sociale pour le travailleur, illégalité de contrat qui peut être rompu du jour au lendemain, exploitation des personnes, non-respect des droits des travailleurs, participation à des filières, absence de qualification du personnel… sont autant de problèmes qu'entraînent ces réponses débridées à une demande écrasante. Le règne de la débrouille pour trouver d'urgence une solution de garde à domicile amène certaines familles – devenues employeurs pour la circonstance – à laisser de côté certains principes éthiques qui les guident habituellement.

On donne l'illusion aux gens qu'ils pourront rester à la maison aussi longtemps qu'ils le souhaitent. Mais il y a des limites au maintient à domicile dont on discute trop peu. Les politiques ont du retard”, interpelle Anneliese Zimmermann en adoptant un point de vue macro.

(1) La Fondation Roi Baudouin a publié en 2005 un rapport consacré au travail domestique: "Rappeler la norme et protéger les victimes". Voir www.kbsfrb.be ou 070/23.37.38.

Un roulement bien pensé

La patience est une des qualités nécessaires à la garde à domicile. Le sens des responsabilités également, parce qu'il leur revient de gérer des situations qui ne sont pas toujours évidentes: des échanges musclés entre les membres d'une famille, une chute, un accès de démence… sans rompre les liens. Seuls au domicile, les gardes peuvent néanmoins compter sur une équipe, explique Audrey Fervil responsable d'une de celles-ci en Brabant wallon. Elle plaide pour cette organisation du travail qui reconnaît aux professionnels le besoin d'extérioriser, de discuter d'une situation plus difficile avec des collègues, de trouver conseils, d'apprendre à réagir face à certaines problématiques comme la maladie d'Alzheimer, la sclérose en plaques, les soins palliatifs, la confusion… Il en va de la qualité du service rendu, soulignent – comme elle - de nombreux professionnels.

Parmi les garanties d'un service professionnel, il en est une qui – de prime abord – peut paraître surprenante: l'attention portée – dans la majorité des cas – à confier un bénéficiaire à plusieurs gardes. Pour avoir tenté l'expérience de confier à une seule personne la garde à domicile d'un bénéficiaire, Audrey Fervil explique comme cela peut se révéler défavorable. Pour les personnes aidées comme pour les gardes à domicile. D'abord, la situation peut vite devenir trop lourde à porter. Surtout, la barrière professionnelle se rompt plus facilement et la place de chacun – notamment de la famille – en pâtit. Elle pense à cette vieille dame qui considérait une garde à domicile comme sa petite-fille, délaissant sa réelle petite-fille. La confusion des rôles n'apporte rien de bon. Certes, les gardes partagent des moments très intimes, et l'essentiel de leur métier tient de la relation humaine; certes, l'attachement entre les patients et les gardes est inévitable, mais il y a des limites à ne pas dépasser. Le fonctionnement en équipe aide. Il permet un certain dynamisme relationnel.


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