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L’accès aux soins de santé à l’étranger (17 janvier 2002)

 

Libre circulation (ou non) des patients

dans l’Union européenne ?

 

L’union monétaire, maintenant réalisée, est le fait marquant le plus perceptible
de l’émergence de l’État européen. Depuis les conclusions de Laeken, un nouveau défi est lancé avec le projet de Convention : celui de construire un État européen.

Jusqu’à présent, l’intégration européenne s’est centrée sur la sphère économique et marginalement sur le politique, le social et la santé. En effet, traditionnellement, la protection sociale couvre les prestations de santé fournies sur le territoire national.

Ce principe de territorialité émane de la conception de l’État nation qui a pour mission en matière de santé de sauvegarder la santé publique, d’organiser un système de soins accessibles à la population et de veiller à l’amélioration de l’état de santé.

Cependant, avec les arrêts rendus par la Cour de Justice des Communautés européennes (CJCE), en avril 1998, dans les affaires Kohll et Decker, les secteurs des soins de santé et de la protection sociale n’échappent plus à l’emprise du processus de l’intégration européenne. L’accès aux soins à l’étranger, régulé par le formulaire E112,
st au cœur du débat sur la libre circulation des patients dans l’Union européenne.

 

Les affaires Kohll et Decker

Avec les affaires Kohll et Decker, une brèche a été introduite au sein du système traditionnel de régulation de l’accès aux soins à l’étranger. Pourtant, en soi, celles-ci ne présentaient, au départ, rien de spectaculaire. L’assurance maladie luxembourgeoise a refusé à MM. Kohll et Decker de rembourser les prestations de santé délivrées à l’étranger, respectivement l’achat, en Belgique, de lunettes prescrites par un ophtalmologue luxembourgeois et un traitement orthodontique en Allemagne.

Les refus de remboursement étaient motivés par l’absence d’autorisation préalable requise par la législation luxembourgeoise (1).

M. Decker et M. Kohll ont formé des recours contre ces décisions auprès des juridictions luxembourgeoises compétentes. Ils invoquèrent que la condition de l’autorisation préalable était contraire aux principes de la libre circulation des biens et services (2). En effet, cette condition, qui n’était imposée qu’aux prestations médicales délivrées en dehors des frontières nationales, s’avérait dissuasive pour les patients qui souhaitent faire appel à des prestataires étrangers.

Puisqu’il s’agissait d’une interprétation du Traité instituant la Communauté européenne, la Cour de cassation du Luxembourg a renvoyé l’affaire à la Cour de Justice des Communautés européennes. Devant cette juridiction, les autorités luxembourgeoises, soutenues par plusieurs États Membres (la Grèce, le Royaume Uni, l’Allemagne, la France et l’Autriche, la Belgique, les Pays Bas et l’Espagne), ont motivé le refus de remboursement et la réglementation luxembourgeoise sur laquelle ce refus reposait.

Le premier débat argumentaire a porté sur la question de savoir si le droit communautaire s’appliquait à la sécurité sociale, sachant que cette matière relève de la compétence de chaque État membre.

La Cour de Justice des Communautés européennes (CJCE) a considéré que si les États membres jouissent d’une grande liberté pour organiser leurs systèmes de sécurité sociale, ce pouvoir ne peut être utilisé pour contrevenir à la législation communautaire. Aucun secteur ne peut se soustraire à l’application des principes communautaires de non-discrimination et de libre circulation. Comme l’explique l’avocat général dans ses conclusions : “le secteur de la sécurité sociale ne constitue pas un îlot à l’abri de la législation communautaire.”

En deuxième lieu, les autorités luxembourgeoises prétendaient que, si les principes de libre circulation s’appliquaient aux prestations médicales délivrées dans le cadre de la sécurité sociale, des motifs légitimes fondaient la reconnaissance d’une exception. Elles arguaient que le droit communautaire autorise les États membres à restreindre la libre circulation lorsque l’intérêt général ou la sécurité risque d’être mis en péril. Selon l’État luxembourgeois, la condition de l’autorisation préalable était nécessaire :

  •  pour préserver l’équilibre financier du régime de sécurité sociale: l’absence de limitation du flux de patients à l’étranger aux seuls cas urgents ou médicalement justifiés entraînerait de graves conséquences financières pour la sécurité sociale luxembourgeoise;

  •  pour protéger la santé publique des assurés sociaux: sans l’instrument de l’autorisation préalable, l’État luxembourgeois serait contraint de rembourser des prestations à l’étranger dont il ne pourrait garantir la qualité;

  •  pour maintenir sur le territoire luxembourgeois un service médical et hospitalier équilibré et accessible à tous : le financement, la viabilité et la qualité de l’offre médicale au Luxembourg seraient mis en danger si les Luxembourgeois choisissaient massivement de se soigner à l’étranger.

Cependant, la Cour de Justice des Communautés européennes a rejeté ces justifications.

  •  Elle a considéré que la demande de remboursement de MM. Kohll et Decker était une transaction financière neutre pour l’assurance maladie luxembourgeoise, puisqu’ils proposaient d’être remboursés sur base des tarifs luxembourgeois. Dès lors, l’équilibre financier du système n’aurait pas été mis en péril.

  •  En ce qui concerne l’argument relatif à la qualité des soins, la Cour de Justice a rejeté cette justification en invoquant l’application du principe de la reconnaissance mutuelle des diplômes aux prestataires de soins dans l’UE, ainsi que les efforts réalisés, pendant les années 70, pour harmoniser les exigences en matière de formation des professionnels de santé. Elle a jugé cette base suffisante pour supposer un niveau de qualité des soins équivalent dans les différents États membres.

  •  Enfin, la protection et la valorisation par un État de son infrastructure médicale ne se justifient que lorsque la santé publique est effectivement menacée. Or, ces deux affaires ne pouvaient fonder une telle menace.

En conséquence, la Cour a considéré, dans les deux affaires, que l’autorisation préalable exigée par la législation luxembourgeoise constituait une restriction injustifiable à la libre circulation des marchandises et des services. Cette condition au remboursement des soins à l’étranger décourageait les ressortissants luxembourgeois de faire appel aux prestataires de services et de produits médicaux d’un autre État membre, sans qu’il y ait pour autant une base de justification légitime. Cependant, la Cour, dans les arrêts, n’a pas exclut que dans d’autres affaires, des raisons pourraient justifier une restriction à la libre circulation.

 

L’affaire Vanbraekel

En juillet 2001, la CJCE a rendu son arrêt dans l’affaire Vanbraekel (3). Souffrant de gonarthrose bilatérale, Mme Descamps, assurée sociale belge, a sollicité, en février 1990, l’autorisation de subir en France une intervention chirurgicale orthopédique. Cette autorisation a été refusée. Malgré cette absence d’autorisation, l’intéressée a été soignée à Paris en avril 1990 et a introduit un recours devant le Tribunal du travail de Tournai (Belgique) en vue d’obtenir le remboursement de ses soins puis devant la Cour du travail de Mons. Sur base d’un rapport d’expertise déposé le 29 décembre 1994, la Cour a condamné la mutualité de l’intéressée a prendre en charge les dépenses d’hospitalisation à l’étranger. En même temps, elle a saisi la CJCE sur le tarif à appliquer. Le remboursement doit-il être calculé selon le tarif de l’État où les droits sont ouverts ou selon celui de l’État où l’intervention a été pratiquée?

A cette question la CJCE a répondu, sur base du traité(4) que, si le remboursement de frais exposés pour des services hospitaliers fournis dans un État membre de séjour est inférieur à celui qui aurait résulté de l’application de la législation en vigueur dans l’État membre d’affiliation en cas d’hospitalisation dans ce dernier, un remboursement complémentaire correspondant à cette différence doit être accordé à l’assuré social par l’institution compétente.

 

Les affaires Smits et Peerbooms

Toujours en juillet 2001, la CJCE a rendu un autre arrêt en matière de soins à l’étranger. Dans les affaires Smits et Peerbooms (5), deux assurés sociaux hollandais, elle devait se prononcer sur la demande de remboursement de prestations dispensées à l’étranger sans autorisation préalable. Mme Smits, atteinte de la maladie de Parkinson, a reçu dans un hôpital de Cassel (Allemagne) un traitement catégoriel et multidisciplinaire qui n’est pas dispensé aux Pays-Bas. Mr Peerbooms, tombé dans le coma après un accident a été transféré à l’hôpital universitaire d’Innsbruck (Autriche) où il a subi une thérapie spéciale de neurostimulation intensive, avec succès puisqu’il est sorti du coma. Aux Pays-Bas ce traitement n’est couvert par l’assurance maladie qu’à titre expérimental dans deux centres médicaux, auxquels Mr Peerbooms ne pouvait avoir accès compte tenu de son âge (accès réservé à des personnes de moins de 25 ans).

Dans ces deux affaires, l’assurance maladie hollandaise a refusé de rembourser les frais des traitements arguant l’absence de raison médicale justifiant un traitement à l’étranger et, en outre, que les traitements qui ont été administrés ne sont pas considérés comme “usuel par le corps médical hollandais”.

Dans son arrêt, la CJCE reste conforme à la jurisprudence qu’elle a créée par les arrêts Kohll et Decker. L’autorisation médicale préalable constitue une entrave à la libre prestation des services médicaux. Seulement, elle accepte que l’assurance malaýie hollandaise puisse déroger à l’application de ce principe pour des soins hospitaliers délivrés à l’étranger. Elle reconnaît que les justifications avancées par les Pays-Bas sont fondées : d’une part l’intérêt général (coût économique d’une offre hospitalière nationale) et d’autre part la santé publique (nécessité de planifier une infrastructure pour répondre aux besoins de la population).

Pour la CJCE, l’exigence du caractère usuel du traitement ne peut justifier un refus d’autorisation pour un “traitement éprouvé et validé par la science médicale internationale” et l’autorisation ne peut être refusée pour absence de nécessité médicale lorsqu’un traitement identique ou présentant le même degré d’efficacité pour le patient peut être obtenu en temps opportun auprès d’un établissement ayant conclu une convention avec la caisse de maladie dont relève l’assuré.

Enfin, la Cour de Justice des Communautés européennes recommande aux États membres de recourir à des conventions entre les systèmes de santé limitrophes dans les régions frontalières et d’utiliser davantage le formulaire E112, autorisant la délivrance de soins à l’étranger, pour résorber les files d’attente.

 

D’autres affaires pendantes

D’autres affaires sont en cours devant la CJCE et devraient sans aucun doute apporter des réponses à des questions non résolues à ce jour.

L’affaire Müller-Fauré (6) concerne une assurée hollandaise qui a délibérément décidé de suivre un traitement dentaire pendant ses vacances en Allemagne, prétextant qu’elle n’était pas satisfaite des prestations dispensées par les dentistes hollandais. Sa caisse de maladie a refusé de lui rembourser ses soins estimant que le traitement reçu n’était ni urgent, ni médicalement nécessaire.

L’affaire Van Riet (7) concerne encore une assurée hollandaise qui s’est rendue dans un hôpital belge pour une arthroscopie plutôt que de patienter trois mois avant de subir cette intervention dans un hôpital d’Amsterdam. Sa caisse de maladie refuse également de lui rembourser ses frais médicaux pour des motifs similaires.

 


Quel est l’impact de la jurisprudence de la Cour de Justice des Communautés européennes ?

Plusieurs enseignements découlent des arrêts de la CJCE décrits ci-dessus..

Tout d’abord, comme l’a affirmé l’avocat général dans l’affaire Kohll et Decker, la sécurité sociale n’est pas un secteur à l’abri de l’application des règles du Traité de Rome. Dès lors, la libre circulation des biens et services ne peut être entravée, sauf dans les situations définies par le législateur européen et la jurisprudence.

En deuxième lieu, les règlements européens concernant la coordination des systèmes de sécurité sociale ne renferment plus les seules procédures de régulation financière de l’accès aux soins à l’étranger. La CJCE a défini une procédure spécifique pour le remboursement des soins ambulatoires délivrés à l’étranger sans autorisation médicale préalable. Dans ce cas, les frais ne sont plus remboursés sur base du tarif du pays où les soins ont été dispensés mais du pays où les droits sont ouverts (pays compétent). Depuis ces arrêts, le Luxembourg a intégré cette procédure dans sa législation. La Belgique a fait de même mais a plafonné le remboursement a 500 Eur. Quant aux autres États membres, à l’exception de la France qui applique la jurisprudence européenne pour les lunettes et les lentilles, ils avancent toujours qu’ils ne sont pas concernés par ces arrêts. En conséquence, la belle unicité de procédure de régulation financière instaurée par les règlements a volé en éclat. Ceci est d’autant plus vrai que dans l’affaire Vanbraekel, la CJCE a estimé qu’il fallait verser un complément financier équivalent à la différence entre le tarif de remboursement des frais à l’étranger et celui en vigueur dans le pays de résidence, lorsque celui-ci était plus avantageux pour l’assuré social qui se rend dans un établissement hospitalier étranger avec l’accord de son système de sécurité sociale.

En troisième lieu, les arrêts Kohll et Decker et les arrêts suivants (Vanbraekel, Smits et Peerbooms) instituent une jurisprudence qui considère que la procédure d’autorisation de soins à l’étranger est une entrave à l’application du principe de la libre prestation des services.

En quatrième lieu, cette entrave peut-être justifiée pour des raisons économiques d’intérêt général et de santé publique lorsque la procédure d’autorisation préalable concerne les soins hospitaliers à l’étranger. Enfin, les États membres sont invités à recourir au développement du conventionnement avec les systèmes de santé des pays limitrophes dans les zones frontalières et à délivrer davantage d’autorisation de soins à l’étranger pour tenter de résorber les files d’attentes.

 

Des questions demeurent aujourd’hui sans réponse

Comment les systèmes de convention en vigueur dans les États membres vont-ils intégrer l’obligation qui leur est faite de ne pas discriminer les prestataires étrangers par rapport aux prestataires nationaux?

Qui bénéficient réellement de cette apparente libéralisation de l’accès aux soins? Est-ce le prestataire de soins? Est-ce le patient? En tout cas, les malades doivent souvent être bien formés, bien informés et disposés des moyens nécessaires pour se faire soigner à l’étranger (déplacements, logement d’accueil pour le ou les proches, aisance linguistique, avance des frais…).

Dans quelle mesure les dispositifs mis en place dans les États membres pour maîtriser les coûts et assurer une meilleure qualité des soins ne risquent-ils pas d’être contournés ou mis à mal? A titre d’exemple, le Grand Duché rencontre des difficultés pour négocier une nouvelle convention avec les prestataires de soins depuis les arrêts Kohll et Decker.

Plus fondamentalement, la Cour de Justice des Communautés européennes, dont la fonction est de dire le droit, n’est-elle pas en train de définir de nouvelles orientations à caractère politique ? L’absence de réaction du politique (les États membres et la Commission ou le Conseil) inquiète. S’oriente t-on dans une prochaine étape vers une libéralisation plus importante? Si tel est le scénario qui est en train de voir le jour, ne vaudrait-il pas mieux prendre des initiatives en vue de réguler à la faveur des patients, des prestataires, des systèmes de sécurité sociale et des ressources économiques des États, l’évolution des soins à l’étranger au sein de l’Union car il existe d’importantes inégalités entre États mais aussi entre les citoyens d’un même pays en matière de santé et d’accès aux soins.

Henri Lewalle

(17 janvier 2002)

 

(1) En référence à l’article 22.1c du règlement européen 1408/71 - (2) Traité de Rome : ancien article 30 et 36 pour M. Decker et 59 et 60 pour M. Kohll - (3) Affaire C-368/98 - (4) Article 59 du traité CE devenu, après modification, article 49 du traité CE. - (5) Affaires C-157/99, Smits épse Geraerts et Peerbooms. - (6) Affaire C-385/99 - (7)Affaire C-385/99

 

 


Coordination européenne

des systèmes de sécurité sociale

Craignant que la libre circulation de la main d’œuvre ne soit sévèrement entravée si les droits à la sécurité sociale restaient confinés aux frontières, le législateur européen, en absence d’une harmonisation en la matière, a adopté, aux premières heures du Marché commun, l’instrument de la coordination des systèmes de sécurité sociale, afin de garantir des droits aux travailleurs migrants et aux personnes dont ils ont la charge.

La coordination des systèmes de sécurité sociale est fondée sur le principe de la libre circulation des travailleurs(1). La coordination des systèmes de sécurité de sociale régie par les règlements européens(2) repose sur deux mécanismes :

  • la totalisation des périodes d’assurance pour l’ouverture et le maintien du droit aux prestations ainsi que pour le calcul de celle-ci;

  •  le paiement des prestations aux personnes résidant sur le territoire des États membres.

Dans le domaine de la santé, la coordination traite principalement trois situations:

  • le travailleur frontalier (formulaire E106): il peut bénéficier de la prise en charge des soins délivrés à la fois sur le territoire du pays où il travaille et où il réside. Ce double accès aux soins concernent également les membres de sa famille lorsque des conventions entre États le permettent. C’est notamment le cas entre la France et la Belgique.

  •  Les soins urgents délivrés en cas de séjour temporaire à l’étranger (formulaire E111) sont remboursés sur base du tarif en vigueur dans le pays où les soins ont été dispensés.

  • Le travailleur ou le membre de sa famille qui souhaite recevoir des soins dans un autre État membre doit obtenir une autorisation préalable de son institution d’assurance maladie compétente et la présenter, à l’institution du lieu de séjour. Le formulaire E112 atteste le droit d’accès aux soins dans l’État d’affiliation et l’acceptation de l’institution compétente de couvrir les frais afférents au traitement médical spécifié.

Les États membres ont la possibilité de moduler leur politique d’autorisation de soins à l’étranger. Cependant, la réglementation européenne(3) précise que l’autorisation ne peut être refusée lorsque deux conditions cumulatives sont remplies : d’une part le traitement doit être couvert par le système de protection sociale et d’autre part le traitement ne peut être dispensé dans le pays de résidence dans un délai normalement nécessaire compte tenu de l’état de santé du patient et de l’évolution probable de sa maladie.

Une étude sur la mobilité transfrontalière des patients dans le cadre du système de coordination communautaire(4) réalisée voici plus de 10 ans par l’Association Internationale de la Mutualité (AIM) montrait que les États membres menaient, en général, une politique d’autorisation très restrictive. En 2000, une seconde étude de l’AIM pour la Commission européenne, constatait que le Royaume Uni ne délivre guère plus de 600 formulaires E112 par an, la France 400, la Suède 20. Proportionnellement, la Belgique et le Grand-Duché se montrent moins restrictifs avec respectivement en moyenne 2000 et 7000 cas l’an(5).

C’est sans doute une des raisons qui limite l’impact financier des soins transfrontaliers. Celui-ci reste marginal : à peine 2 Eur par habitant par an ou mois de 0,5% des dépenses publiques de santé(6). Le Grand-duché de Luxembourg fait, pourtant, exception, en totalisant un coût moyen de 116 Eur par habitant, soit 9% de ses dépenses publiques de santé. Ceci s’explique principalement par la capacité réduite de l’infrastructure de soins du Grand-duché, compte tenu de la petite taille de la population, et par voie de conséquence de la nécessité de recourir pour les malades aux soins dispensés à l’étranger.

 

(1) L’article 42 du traité C.E. attribue au Conseil le pouvoir d’adopter “dans le domaine de la sécurité sociale, les mesures nécessaires pour l’établissement de la libre circulation des travailleurs”.

(2) 1408/71 et 574/72.

(3) l’article 22, 2, 2 du règlement européen.

(4) Palm, Nickless, Lewalle en Coheur, Implication de la jurisprudence récente concernant la coordination des systèmes de protection contre le risque de la maladie, Rapport général, mai 2000, partie 1, chapitre II.

(5) Association Internationale de la Mutualité, Soins de santé transfrontaliers au sein de la Communauté européenne, avril 1991, 190 p ; Voir aussi Hermesse J., Lewalle H., L ‘accès aux soins en Europe, Quelle mobilité du patient?, Academia, Eurospectives, Bruylant,

1993, 135 p.

(6) Voir aussi De backer C. et Hermesse J. (1999), “Les soins de santé transfrontaliers “, in MC-Informations, 188, juin-juillet, pp. 3-12.

 

 


Des compétences sociales restreintes pour l’Europe

• La protection sociale

Depuis la signature du Traité de Rome (1957), les États membres ont conservé leur compétence en matière d’organisation et de gestion de leur système de santé et d’accès aux soins. Pourtant, le Traité contient les jalons d’une politique communautaire en matière de protection sociale. Cependant, sa mise en œuvre est paralysée par le vote à l’unanimité au Conseil des Ministres. De plus, les États membres invoquent le principe de subsidiarité, défini à l’article 5 du Traité (1), pour conserver une compétence souveraine dans les domaines de la protection sociale et de la santé.

La politique communautaire se limite, jusqu’à présent, à soutenir et à coordonner l’action des États membres. Elle est l’émanation de ce que l’on nomme du “ soft law ”. Celui-ci se définit par un ensemble de mesures non-contraignantes comme des communications ou des recommandations, des missions de coordination ou de promotion de coopération entre États membres.

 

• La santé

Le Traité de Maastricht (1993) a créé la base légale qui permet à l’UE de déployer des actions communautaires dans le domaine de la santé. Le Traité d’Amsterdam (1997) a réformé le contenu de l’ancien article 129 par l’article 152. Celui-ci attribue un rôle complémentaire à la Communauté en vue de “l’amélioration de la santé publique et de la prévention des maladies et des affections humaines et des causes de danger pour la santé humaine” (art. 152, 1, 2).

L’article 152, 1 accentue la fonction essentielle que doit remplir la politique de santé à l’intérieur de l’UE: “ Un niveau élevé de protection de la santé humaine est assuré dans la définition et la mise en œuvre de toutes les politiques et actions de la Communauté. ” Cette transversalité, reconnue à la protection de la santé, contraint l’U.E., lors de l’élaboration d’autres politiques, à tenir compte des conséquences en matière de santé publique.

(1) “Dans les domaines qui ne relèvent pas de sa compétence exclusive, la Communauté n’intervient, conformément au principe de subsidiarité, que dans la mesure où les objectifs de l’action envisagée ne peuvent pas être réalisés de manière suffisante par les États membres et peuvent donc, en raison des dimensions ou des effets de l’action envisagée, être mieux réalisés au niveau communautaire…”

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