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Politique International (17 décembre 2009)

 

Vers une couverture pour tous

en soins de santé

Le projet de réforme de santé aux Etats-Unis, initiée par le Président Barack Obama, a pour objectif principal d’offrir une couverture médicale universelle à tous les résidents américains. En effet, près de 45 millions d’Américains n’ont actuellement aucune assurance soins de santé. Malgré les avancées sociales que permettrait une telle réforme, celle-ci ne fait pas l’unanimité. Le chemin est encore long…

 

 

 Le nouveau système de santé

devrait encourager les assureurs privés à

baisser leurs primes, et les prestataires de soins à

améliorer le rapport qualité/prix des prestations.

 

Le système de santé américain est le plus coûteux parmi les 30 pays membres de l’OCDE (Organisation de coopération et de développement économiques). Les dépenses totales de santé s’élèvent à 16% du PIB (1), alors que la moyenne de l’OCDE tourne autour de 9%. Malgré ce niveau de dépenses élevé, les indicateurs de santé comme l’espérance de vie et le décès des prématurés sont relativement médiocres, comparés aux autres pays de l’OCDE. Si on prend par exemple l’espérance de vie, les Etats-Unis se classent 24ème , avec une moyenne de 78 ans (2). L’absence d’un système public d’assurance soins de santé accessible à tous les résidents y est pour beaucoup. 66% des Américains de moins de 65 ans sont assurés via leur employeur. Certaines catégories sociales sont prises en charge via les programmes nationaux spécifiques: Medicare et Medicaid. Medicare est destiné aux plus de 65 ans et aux personnes gravement handicapées, ce qui représente 15% de la population. Medicaid couvre les personnes en situation de pauvreté, soit 11 % de la population (3). Le reste, soit près de 45 millions d’Américains, n’a pas d’assurance soins de santé. Outre l’absence de couverture universelle, les faibles résultats observés en matière de santé s’expliquent par le manque de régulation du marché. Les assureurs et les prestataires de soins ont en effet peu de contraintes en matière de couverture des assurés pour les premiers, et de rapport qualité/prix des soins prodigués pour les seconds.Le cas de Lisa Friedman illustre bien cela: «Lorsque cette femme sentit un nodule dans son sein, en 2001, elle sollicita auprès de son assureur le droit de passer une mammographie. Ce droit lui fut dénié. Par chance, Lisa était médecin et elle put attaquer cette décision pour contraindre son assureur à autoriser l’examen. Ce dernier révéla un cancer avec plusieurs métastases. Lisa fut traitée chirurgicalement. Inutile de se demander ce qui serait arrivé si cette patiente n’avait pas été médecin et si elle n’avait pas eu la compétence nécessaire pour attaquer, avec succès, le rejet originel de son assureur»(4).

 

Un projet ambitieux

Les principaux changements proposés portent à la fois sur l’instauration d’une assurance publique accessible à tous les résidents, et sur des mesures visant à mieux encadrer l’activité des assureurs et des prestataires de soins. Voici quelques exemples de mesures concrètes (5): L’assureur public (l’Etat) serait chargé de négocier les honoraires avec les prestataires de soins, et autorisé à utiliser des méthodes de rémunération basées sur la qualité. L’objectif est de résoudre le conflit entre le désir de faire des économies et les besoins de bonne prise en charge du patient. En effet, on observe actuellement que «l’argent est sauvé, non pas en maximisant la qualité mais en rognant sur les services, en transférant les coûts des soins sur la famille du patient» (4). Des négociations sur les prix des médicaments seraient introduites ainsi qu’un meilleur remboursement des médicaments pour les bénéficiaires de Medicare et Medicaid. Les assureurs privés seraient obligés de standardiser les différents paquets de prestations offerts afin de faciliter la comparaison des primes. Les assurés pourraient ainsi plus facilement identifier la police d’assurance au meilleur prix.Le nouveau système de santé devrait encourager les assureurs privés à baisser leurs primes, et les prestataires de soins à améliorer le rapport qualité/prix des prestations et ce, grâce à la concurrence avec le système d’assurance public et les mesures d’encadrement proposées. Selon le Bureau du budget du Congrès (CBO), la mise en place du projet de réforme devrait coûter près de 1000 milliards de dollars sur 10 ans (2010-2019) (6). Pour financer cette réforme, un budget de 634 milliards de dollars est prévu (7): 316 milliards devraient provenir des économies liées aux nouvelles mesures prises dans le secteur des soins de santé (e.a. via la réduction des prix des médicaments, la diminution des réadmissions dans les hôpitaux, etc.). 318 milliards devraient provenir d’une diminution des déductions fiscales offertes aux plus aisés. D’autres mesures doivent encore être envisagées afin de combler le déficit. On parle de mesures d’économies supplémentaires dans les programmes de santé publique Medicaid et Medicare.

 

Sacro-saint marché

Malgré les avancées sociales et les économies que permettrait la mise en place de la réforme, le projet ne fait pas l’unanimité. Le credo des défenseurs des principes de marché dans le système de soins tient en quelques lignes: «Les systèmes publics sont corrompus, dispendieux et inefficients. Pour faire baisser le coût des soins et optimiser leur qualité, il suffit de libérer les forces du marché» (4). Cette position est défendue par bon nombre d’Américains. Ceux-ci entretiennent une grande méfiance vis-à-vis de toute mesure qui pourrait être qualifiée de “socialiste”. «Les habitants du nouveau monde associent instinctivement le socialisme au modèle soviétique, à la contrainte liberticide, aux longues files d’attente, à la pénurie, à l’incompétence crasse, à la misère» (4).Ce raisonnement ne tient pas compte du fait que le “marché de la santé” est imparfait, en ce sens où nous ne sommes pas tous égaux face à la (mauvaise) santé, et donc face aux possibilités de se faire assurer. Il ne tient également pas compte du fait que le patient, ne disposant pas du savoir médical, peut difficilement juger de la qualité des soins prodigués. Ceci explique la relative facilité pour les assureurs de refuser de prendre en charge telle ou telle prestation (cfr. le cas de Lisa Friedman). Du côté des prestataires, ceux-ci peuvent aisément prodiguer des soins qui ne sont pas toujours les plus adéquats mais qui rapportent le plus.

 

Rien n’est encore gagné

Le 7 novembre 2009, la Chambre des représentants a adopté un plan de réforme du système d’assurance maladie américain (par 220 voix contre 215), offrant ainsi à Obama une première victoire au Congrès(4). Le projet de loi doit encore passer l’obstacle du Sénat. Celui-ci a voté, le 21 novembre dernier, en faveur du lancement formel du débat sur la réforme de santé. Une fois que le Sénat aura approuvé un texte de loi, qui bien souvent diverge de la version adoptée à la Chambre, les deux organes devront se mettre d’accord sur un texte unique qui devra ensuite être voté, avant de soumettre la loi au Président Obama pour sa promulgation (8).Le processus est encore long, et il n’est pas dit que les élections parlementaires à mi-mandat en novembre 2010 faciliteront les choses. En effet, «les Républicains s’efforcent de prolonger la bataille pour la réforme de santé jusqu’à l’année prochaine en espérant que la perspective des élections parlementaires de mi-mandat amènera les démocrates élus dans des Etats conservateurs à voter contre la réforme» (6).

Olivier Gillis, Recherche et Développement - MC
 

(1) Le produit intérieur brut (PIB) est un indicateur économique permettant de mesurer le niveau de production (et donc la richesse) d’un pays.
(2) Données OCDE, 2009.
(3) “Le système de santé américain” - S. Chambaretaud et D. Lequet-Slama. - ADSP. N. 36. Septembre 2001.
(4) “Santé, paye ou crève” in “Made in USA – Les ravages du “modèle américain” - M. Desmurget. Max Milo l’Inconnu International. Mars 2008.
(5) “Starting on the path to a high performance health system” - K. Davis et al. The Commonwealth Fund. Novembre 2009.
(6) “Obama appelle le Sénat à voter sa réforme de santé” - Libération, 8 novembre 2009.
(7) www.whitehouse.gov/omb/fy2010_key_healthcare/ 
(8) “USA: feu vert du Sénat au débat sur la santé” - Le Soir, 22 novembre 2009.

 


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