Recherche :

Loading

La rédaction

Notre histoire

Newsletter

Nous contacter

Une erreur dans votre adresse postale ?
Signalez-le

Actualité

Culture

International

Mutualité Service

Santé

Société

Nos partenaires

Visitez le site de la Mutualité chrétienne


Donner une chance aux Pays les moins avancés

L’Organisation des Nations Unies a établi une liste des Pays les moins avancés qui compte actuellement 49 pays. Pour ce groupe de pays en développement, la croissance n’a pas été au rendez-vous. Malgré de grandes conférences internationales censées améliorer leur sort, leur situation reste dramatique.


“C
e n’est pas une fierté que d’être inscrit sur cette liste des Pays les moins avancés ! Il y a des avantages mais je souhaite que ceux-ci ne soient pas éternels et qu’ils puissent permettre à mon pays de sortir de sa situation de pauvreté. Je serai alors très heureuse et très fière. Cela ne se passera pas sans un travail décent !” Ainsi s’exprimait Madame Rabiatou Serah Diallo, Secrétaire Générale de la Confédération Nationale des travailleurs de Guinée venue participer aux nombreux débats du Forum des Ong mais surtout faire entendre la voix de la société civile à la 3e Conférence des Nations Unies sur les Pays les moins avancés (PMA) qui se déroulait à Bruxelles en mai dernier.

Classer les pays les plus pauvres
Les Pays les moins avancés… la formule n’est pas très jolie. Elle désigne de manière à peine détournée tout simplement les pays les plus pauvres de la planète. “Dire que les PMA sont les pauvres parmi les plus pauvres est faux, entonne Isabelle Hoferlin, coordinatrice de Social Alert (1). Car ce sont des pays qui ont énormément de richesses mais qui sont exclus parmi les exclus.” Ils sont au nombre de 49 : 34 en Afrique, 9 en Asie, 5 dans le Pacifique et 1 dans les Caraïbes. Dans ces pays, plus de la moitié de la population survit avec moins d’un dollar par jour. Autrement dit, les populations (environ 630 millions de personnes) ne disposent pas de revenus suffisants pour satisfaire leurs besoins alimentaires essentiels (manger, boire une eau potable) et ont encore moins la possibilité de se soigner, de s’instruire, de se loger décemment. Les critères de classement dans la catégories des PMA sont soumis à révision par le Conseil économique et social des Nations Unies tous les trois ans. Un faible revenu, calculé sur base du Produit national brut par tête d’habitant (seuil de 900$ US par habitant), la faiblesse des ressources humaines (déficits en termes de santé, d’éducation, de nutrition et un grand taux d’analphabétisme) et un faible niveau de diversification économique (vulnérabilité économique) sont les bases actuelles de référence.Derrière ces critères très officiels, il y a des réalités bien concrètes. “La pauvreté est criante au Burkina Faso, témoigne Marcel Zante, membre de la Confédération nationale des travailleurs au Burkina. Prenons mon exemple, je travaille et prends en charge près de 15 personnes. Si demain je suis mis à la porte de mon entreprise,15 personnes vont se retrouver sans rien. Les enfants sont plus nombreux dans les rues qu’à l’école. Nous avons eu des aides, des plans, des programmes… mais on n’a pas démarré; on n’arrive pas à passer la vitesse.”

Un triste bilan

Depuis la création de cette notion de “moins avancés” par les Nations Unies en 1971 le nombre de PMA est passé de 25 à 49, il a donc presque doublé. Pourquoi donc a-t-on voulu classer ainsi une série de pays pauvres dans une catégorie de pays “pauvres parmi les plus pauvres” ? Pour tenter de leur venir en aide. Les organisations internationales comme la Banque mondiale, le FMI, l’OMC et les Nations Unies ont développé vis-à-vis des Pays les moins avancés des stratégies de lutte contre la pauvreté… qui jusqu’ici ne se sont pas avérées très efficaces. Les deux premières conférences des Nations Unies sur les PMA qui se sont déroulées à Paris en 1981 et 1990 n’ont pas tenu leurs promesses. A la veille de l’ouverture de la 3e Conférence, Rubens Ricupeiro secrétaire général de la Cnuced
(2) reconnaissait le bilan calamiteux de trois décennies d’aide au tiers-monde. “Malgré les efforts de ces pays, les difficultés socio-économiques auxquelles sont confrontés la plupart d’entre eux et leur marginalisation persistante est accablante.” (3) Les experts estiment que la stagnation économique des PMA est due en grande partie à l’instabilité politique, aux troubles civils, à la mauvaise gestion publique et économique, à la corruption que l’on retrouve dans ces pays. Quatorze des 34 pays africains ont récemment connu des conflits violents. Des conditions qui n’engagent pas fort les investisseurs des pays étrangers à se lancer dans l’aventure. Ces constatations expliquent la lourde insistance des Nations Unies pour que les PMA adoptent les fameuses règles de “bonne gouvernance”. C’est oublier que la transparence et la “bonne gouvernance” doivent aussi s’appliquer aux pays du Nord.Il serait trop facile de mettre l’échec du seul côté des PMA. Les pays riches n’ont jamais atteint les objectifs d’aide au développement qu’ils s’étaient fixés. Lors de la conclusion de la 3e Conférence, le rapport final a réaffirmé la nécessité pour les pays riches de consacrer 0,2% de leur PNB à l’aide au développement des PMA.

Mondialiser
Mieux insérer les PMA dans une économie mondialisée est le grand leitmotiv de cette troisième Conférence mais l’idée n’est pas neuve. Depuis de nombreuses années, on a poussé le Sud à éliminer tous les obstacles aux libres forces du marché. Et si le Sud désire accéder aux exportations vers le Nord, on lui fait payer très cher la facture.
“La pauvreté se réduira seulement si on revoit les concepts de l’ajustement structurel", insiste Isabelle Hoferlin. Le démantèlement des lois sociales, la flexibilisation des travailleurs, la réduction du rôle de l’Etat par la privatisation du secteur public, l’ouverture des frontières sont les trois grands piliers de l’ajustement structurel que les PMA se devaient d’appliquer. Et le respect des conventions des droits de l’homme ? Et la garantie d’un travail décent ? Et le libre accès à tous les produits en provenance des PMA vers le Nord ?


Un autre monde est possible

Dans une déclaration politique, les ONG avaient insisté fortement sur l’urgence d’une annulation totale de la dette des Pays les moins avancés. Cette dette qu’ils traînent comme un poids lourd (de quelque 150 milliards de $) et qui entrave leur développement. Mais aucun engagement précis n’a été pris dans ce sens dans la déclaration finale. Cette 3e Conférence n’était-elle qu’une grand-messe de plus, parsemée de vœux pieux et de bons sentiments, mais vide de tous engagements fermes?“
Un autre monde est possible” scandaient les ONG au Cinquantenaire lors d’une manifestation à la veille de la Conférence. “D’une Conférence à l’autre, on constate des progrès, encourage Isabelle Hoferlin. Notre message doit être un message d’espoir. La société civile montre de plus en plus qu’elle ne se limite pas à l’opposition mais qu’elle fait des propositions concrètes. Le thème de l’annulation de la dette, le Sida et l’accès aux médicaments, la liaison de l’aide publique au développement sont tous des thèmes portés par la société civile et on commence petit à petit à en parler dans les grands rendez-vous internationaux.” “Maintenant il est vrai que dans cette gouvernance mondiale, on parle de problèmes locaux mais de réponses mondiales, explique la coordinatrice de Social Alert. Aux problèmes locaux il faudrait des réponses locales. C’est-à-dire qu’il faudrait que les gouvernements acceptent aussi la participation des ONG de leur pays. Dans beaucoup de pays du Sud, les gouvernements ne veulent rien entendre de la société civile. C’est un défi.” Encore un !

Françoise Robert


(1) Social Alert est une organisation internationale sans but lucratif née d’une coalition de différentes organisations sociales et syndicales internationales. Son but est d’apporter une réponse commune aux violations des droits sociaux, économiques et culturels, de provoquer une prise de conscience sur ces situations et de faire pression pour que de tels actes disparaissent. Renseignements: Tél.: 02/246.36.07. Fax: 02/246.30.10.

(2) Conférence des Nations Unies sur le commerce et le développement.
(3) Cité dans Le Monde du 10 mai 2001 “L’ONU veut coordonner l’action en faveur des pays les plus pauvres”.

Retour à l'Index "Enjeux internationaux"